Un soir de Pleine Lune, le petit Remus Lupin, six ans, s’apprêtait à s’endormir quand il entendit un son étrange venu de sa fenêtre, entrouverte pour laisser passer un filet d’air doux et estival. Le petit garçon se redresse… et son regard croise celui d’yeux jaunes qui hanteront ses cauchemars jusqu’à la fin de sa vie.

C’est ce soir là que tout à basculé. Un loup-garou, en colère contre son père, l’a visé pour se venger, l’a changé à jamais. L'homme ne s'est jamais pardonné d'avoir donné une simple amende pour mise en danger d'autrui à ce sorcier dangereux.

Remus, qui avait jusqu'alors connu une vie plutôt tranquille avec ses deux parents et dont le caractère doux et sociable lui avait attiré bien des amitiés, vit sa sérénité détruite. Il ne pourrait plus parler à ses copains après l'école, plus projeter de voler la baguette de ses parents pour faire devenir l'âne du voisin jaune moutarde, ou attendre le retour de son père, du Ministère avec une pile de crêpes qu'ils auraient préparés avec les papis du voisinage et sa mère, quand elle était là et non en déplacement pour ses reportages.

Ses parents et lui durent quitter la maison où il avait grandi, par peur des voisins et des racontars. Ils trouvèrent une ferme isolée où personne n’irait s’inquiéter des hurlements de loup qui y retentissaient à chaque pleine lune. Il crut qu’il ne pourrait jamais aller à l’école de magie, ses parents lui firent l’enseignement à la maison jusqu’à ses onze ans, et durent rencontrer le directeur de Poudlard pour s’assurer de la possibilité de scolarité de leur fils. Lui, si isolé, qui avait perdu tout ses amis de son âge à cause du déménagement, ne savait pas s’il avait envie de se mêler aux autres enfants. Il avait peur d’être reconnu, ostracisé, comme sa famille et lui l’avaient été suite à l’attaque.

Mais il entra à Poudlard et rejoignit les rangs des Gryffondor. Mieux : des garçons lui offrirent une amitié pure, joyeuse, sincère, qui répara un peu son cœur et combla ses peurs. Qu’est-ce qu’il n’aurait pas fait pour eux ? Qu’est-ce qu’il se laissait entraîner dans des histoires auxquelles il n’aurait jamais participé sans eux… Il s’est amusé, il les a adoré… et leur amitié s’est même renforcée par la découverte de sa malédiction, ce qu’il n’aurait pas cru possible. C’est avec eux qu’il a découvert une forme de liberté d’esprit, qu’il a développé son amour de la magie, des sortilèges, qu’il a traversé les affres de l’adolescence, avec ses crushs, ses hontes et ses petits tracas. C’est aussi avec l’un d’eux qu’il a découvert l’amour pour la première fois. Franchement, grâce à eux il avait l’impression de vivre, de respirer pour de vrai, tout le temps, c’était merveilleux.

Rien ne semblait pouvoir les arrêter, lui et Sirius prirent même un appartement ensemble après Poudlard, l’un filant son chemin pendant que Remus continuait ses études dans les sortilèges. Parfois, il en oubliait ses transformations, qui étaient nettement plus supportables avec ses amis animagus. C’était leur rendez-vous, qu’importe où ils étaient, ils se voyaient les soirs de Pleine Lune. C’était parfait.

Mais comme dans tout les moments de bonheurs, un malheur arrive si vite. Il était en train de faire des recherches approfondies sur un sortilèges lorsqu’il reçut la lettre lui annonçant la mort de ses amis. Le choc fut rude pour lui, et d’autant plus pour Sirius. Cela causa un déséquilibre entre eux alors que l’un s’acharnait à trouver une solution pour Harry, et l’autre se laissait juste sombrer dans le malheur. Cela les brisa l’un l’autre. Remus retomba dans sa peur de l’autre, du rejet, et… finalement, partit simplement un jour, sans même laisser un mot, dévasté, et dans l’incompréhension.

Il n’osa plus contacter aucun de ses amis restant par la suite, perdit le fil de ce qui arrivait au fils de Lily et James, il se laissa vivre dans une sorte de brouillard de tristesse, bougeant beaucoup. Malgré l’arrêt de ses études, l’une des seules choses qui le maintenaient était ses recherches sur les sortilèges, qu’il faisait indépendamment de toute structure, et son goût pour la cigarette, qui le forçait à une sorte de routine… aussi étrange que ça puisse paraître.

Il dériva pendant des années, de pays en pays, fuyant souvent quand on se rendait compte de sa conditions, sautant de petits boulots en petits boulots, dans le but d’avoir de quoi subvenir à ses besoins. Il ne possédait plus grand-chose, il se demandait même souvent à quoi bon vivre ? Quelque chose le tenait quand même. Il était seul, n’avait plus aucun lien. Il repensait avec nostalgie à ses amis, se demandant ce que Sirius et Peter étaient devenus, parfois. Ils lui manquaient, mais il était trop lâche pour oser les recontacter. Et plus le temps passait, plus il se trouvait lâche, et moins encore il osait. Dans une boucle sans fin, arriva un jour où il répondit sans trop y croire à une annonce pour un professeur de sortilèges. Il avait déjà enseigné, parfois, dans sa vie, et il aimait ça, mais il savait aussi qu’un loup-garou au contact d’enfants… Il avait déjà eu des problèmes.

Pourtant, il fut engagé… et le voilà donc à Ilukaan.

(c) Ilukaan