Les intérêts de Cassiopeia Alvarez étaient plutôt variés. Les oiseaux, la divination, le yaoi (et elle ne s'en cachait même plus depuis quelques années, que les haters disent ce qu'ils veulent, ça ne la ferait même pas ciller), et ah, elle aimait bien la magie noire, aussi. Quelle chance a-t-elle eu de faire la rencontre d'Ahava, qui était tout aussi curieuse qu'elle à ce sujet ! N'était-ce pas généreux de la part de l'Espagnole d'utiliser les ressources à sa disposition en tant qu'élève du cursus de Sciences Occultes pour propager la connaissance ? Les humanistes, s'ils étaient encore vivants, seraient fiers d'elle. Ou peut-être pas ; ils étaient chrétiens, après tout. Comme sa mère, ils lui criraient qu'elle irait en Enfer pour avoir embrassé les pieds de Satan.

À la base, Cass avait donné des recommandations de lecture à l'Ursirre. Les manuels de base, puis des livres qu'elle avait eu l'occasion de feuilleter lors de la réalisation de travaux scolaires, et encore d'autres... Problème étant, il n'était pas spécialement aisé de commander ce genre d'ouvrages louches pour monsieur madame tout le monde, du moins, pas sans attirer des regards circonspects, voire méfiants. Pour cette raison, elle avait aidé sa camarade non seulement à trouver des copies, mais aussi à se les procurer sur des sites de confiance. Enfin, de « confiance », vous voyez. La seule chose qu'elle demanda à Ahava en retour fut de ne pas lui poser de questions.

Les colis tous arrivés à destination, il était enfin temps pour les deux jeunes femmes d'ouvrir les pages de ces magnifiques bébés et d'en extirper tous leurs secrets. Bien sûr, elle n'avait pas donné le titre que de livres qu'elle avait personnellement lus. Dans sa liste se trouvaient aussi certaines oeuvres qui ne se trouvaient pas dans la bibliothèque de l'école, mais que les professeurs avaient utilisés pour monter leurs cours. Les bibliographies à la fin des PowerPoints avaient, pour la première fois depuis leur invention, servi. Elle était donc tout aussi impatiente que sa camarade à l'idée de poser les yeux sur ces fruits interdits.

Impatiente ? Oui, mais pas assez pour ne pas prendre le temps de se faire belle avant de se présenter au rendez-vous. Ses cheveux avaient BESOIN d'être attachés en adorables couettes et elle DEVAIT enlever son uniforme pour mettre une jolie robe, sinon elle aurait explosé ! Sans surprise, elle allait arriver en retard, mais honnêtement, ses amis devraient savoir qu'il faut lui dire d'arriver quinze minutes avant l'heure où on veut vraiment qu'elle vienne. Quand Cassiopeia poussa la porte de l'amphithéâtre, ce fut avec confiance et une main aux ongles incroyablement bien vernis. Puis, d'un pas presque rapide (incroyable de la part de madame je-m'en-fous !), elle rejoint Ahava, tira la chaise à côté d'elle et s'assit. Ses lèvres s'étirèrent en son habituel sourire illisible. Avait-elle une attitude neutre, amicale, passive-agressive ? C'était à son interlocuteur de le déterminer. Dans ce cas, pourtant, il était assez facile de deviner que son expression ne cachait pas quelconque malice. Pas avec leur merveilleuse et ludique activité du jour.

— Mais que vois-je ? Tu as amené des beignets ? Quelle belle journée. Son regard quitta rapidement les sucreries pour se diriger vers le visage de son amie. Ah, mais où sont mes manières... Dit la femme la moins polie d'Ilukaan. Bonjour Ahava. Tu es très belle aujourd'hui.

Il lui arrivait souvent de penser cela des autres filles... Mais elle ne le disait qu'à celles qui étaient belle ET dont la compagnie était agréable. Peu gênée, elle attrapa immédiatement un donut et croqua dedans, avant de prendre les livres empilés sur la table de sa main libre pour les étaler.

— Donc, aujourd'hui nous travaillons avec « Magie noire : comment la pratiquer en toute sécurité. » et « Vérités et mensonges sur la magie. » ... N'as-tu pas reçu la copie de « Sortilèges et malédictions tabous que l'histoire cherche à rayer » ? Peut-être avait-elle oublié de le sortir de son sac... Ça serait ballot d'oublier un de leurs objets de recherche, surtout après tout l'argent qu'elles avaient dépensé pour se le procurer.

La Cervirald détestait dépenser lorsque ce n'était pas nécessaire, et encore plus en vain. (Grandir avec une mère monoparentale irresponsable monétairement et dépendante aux jeux l'avait peut-être un peu marquée. Un petit peu.)

Les compliments étaient bien jolis, mais il était faux de dire que chacun était né égal. Se faire complimenter par un vieux bonhomme portant un sac poubelle n'aurait fait ni chaud, ni froid à Cassiopeia - mais se faire dire qu'elle était splendide par la gagnante d'un, non, de plusieurs concours de beauté ? Là, c'était différent. Son opinion avait de la valeur aux yeux de la Cervirald, qui sentit ses joues rosir à l'entente de ces mots flatteurs. Elle avala la première bouchée de son donut au citron avant de lui répondre, ne tenant pas à passer pour plus malpolie qu'elle l'était. Bien que de dire aux autres d'aller se faire arracher les testicules par un griffon ne lui faisait rien, paraître mal élevée l'horrifiait.

— Bien vu ! J'ai acheté cette robe la semaine dernière.

Ceci dit, elle fit une légère moue lorsque l'Ursirre lui confirma avoir oublié un des livres qu'elles avaient commandé dans le cadre de cette importante réunion. Était-il possible de lancer un Accio pour le récupérer ? Probablement, mais probablement aussi que le livre, lors de son trajet entre la chambre d'Ahava et leur location actuelle, casserait plus d'une fenêtre. Pas que cela dérangeait Cassiopeia, folle de destruction qu'elle était, mais elle avait promis à son psychomage de faire attention à ne pas abîmer la propriété publique après avoir cassé le pare-brise d'une voiture pour la énième fois. « Non, Cassiopeia, lancer un Reparo n'annule pas tes actions », blablabla. Elle avait arrêté d'écouter quand il avait déblatéré cette idiotie. Si la magie ne sert pas à ça, elle sert à quoi ?

— Pas la peine. Si tu ne le trouves pas en ligne, nous n'aurons qu'à l'étudier la prochaine fois. Le livre ne va pas souffrir de combustion spontanée, à ce que je sache. Car, il était évident à ses yeux que leurs petites rencontres innocentes ne seraient pas qu'un événement unique, mais deviendraient une véritable tradition.

Elle bougea sa chaise pour avoir une bonne vue sur l'écran d'ordinateur de son amie. Yep, son instinct avait été bon. Peu importe à quel point l'Australienne fouillait, aucune copie électronique de ce petit ouvrage ne se présentait à elles. Déçue, elle ne put que ressentir de l'empathie au soupir de sa camarade.

— Dommage ! Si seulement les moldus étaient un poil plus irresponsables et avaient mis la main sur ce livre particulier avant de le numériser comme ils aimaient tant le faire avec chaque tas de papiers qui leur tombait entre les mains, daube ou chef d'oeuvre... Bien, nous n'aurons pas à répéter les bases, alors ! Si tu ne l'as pas fait, cependant, je te conseille de lire à propos de Médée et Grimhildr. Surtout Médée, son histoire est drôle. Elle tue ses enfants parce que son mec l'a trompée. Elle posa ensuite un doigt sur son menton, réfléchissant à la meilleure marche à suivre pour entamer leurs recherches. Ça ne lui prit qu'un instant avant qu'elle reprenne la parole. Si tu veux mon avis, on prend un livre, on ouvre la table des matières, et on décide quel sujet nous intéresse le plus. Ça sera notre premier sujet. Qu'en penses-tu ?

Même si elle avait demandé à Ahava son avis, l'Espagnole n'attendit pas sa réponse pour étirer son bras et saisir « Vérités et mensonges sur la magie. » dans sa belle main manucurée. Elle ouvrit le livre à la page qu'elle avait mentionné et parcourut la liste des sujets vite fait, jusqu'à ce que...

— Génial. Elle posa l'index à gauche d'un des sous-titres du livre. Je vote pour qu'on lise sur l'histoire de l'interdiction des sorts. Certains d'entre eux doivent bien avoir une utilité, s'ils ont autrefois été permis !

Les gens avaient tendance à oublier que la magie noire n'était pas que Avada Kedavra, Crucio et Imperio. Bien sûr, ayant étudié les maléfices toute l'année, Cass avait bien sa petite idée d'à quoi ils pouvaient servir autre que le meurtre, mais elle ne connaissait pas tout, loin de là. Elle en était encore à sa première année en cursus universitaire, après tout - elle avait encore de nombreuses années devant elle avant de devenir spécialiste en son domaine.