Le sport, c'était magique pour l'esprit de la jeune femme. Encore mieux que la magie elle-même. Après avoir fait le tour de l'île en courant, elle s'était décidée sur un coup de tête à marcher dans le parc de l'école, ses pas se faisant entendre sur les chemins de terre. Les fleurs semblaient bien plus accueillantes que les gens pour cette demoiselle habituellement si solaire. La rentrée était toujours une cause de stress intense pour la sportive. Serait-elle à la hauteur ? Avec qui allait-elle partager sa chambre ? Arriverait-elle à concilier les cours et les entrainements ?

Alors, pour faire taire tout ça, la demoiselle courrait jusqu'à en perdre le souffle, les cheveux aux vents. Elle adorait la sensation de la route défilant sous ses vieilles baskets et cette impression de liberté qui augmentait à chaque foulée. Mais, cet endroit était aussi cher à son coeur. Elle y venait souvent lors de sa première année à Ilukaan. Elle s'installait sur un banc, face à la plante la moins fleurie et elle chantait pour cet être tardif mais qui serait la plus belle. Cela faisait des mois que Mulan n'avait pas pris le temps de cette simple interaction.

Alors, après avoir fait le tour de la zone, elle s'était approchée d'un arbre un peu moins beau, tout était relatif, évidemment, et la lupy s'installa en tailleur sur la pierre fraiche du banc. Elle détacha ses cheveux noirs, inspirant longuement avant de vider son esprit, presque comme avant un combat important. Rapidement, une chanson s'imposa dans son esprit. Lentement, doucement au début, sa voix rejoignit celle qui déjà chantait dans sa tête. Légèrement cassée et presque grave, elle suivait la mélodie imaginaire, les yeux clos. Que cela faisait du bien de chanter pour autre chose qu'elle-même. C'était si rare. Mulan n'était pas femme à laisser ce talent que beaucoup jugeaient inutiles, s'exprimer. Peu de personnes connaissaient cet aspect de la guerrière qu'elle était.

Vêtue de son jogging et de son débardeur à la couleur de sa maison, elle dénotait clairement dans le paysage mais personne ne semblait dans les parages. Sinon, jamais la sportive ne se serait permis de se laisser porter par la musique. Mais, elle sentait chaque note vibrer dans son corps, au plus profond de son âme, reléguant ses inquiétudes comme la poussière sous le tapis. Elle semblait si lumineuse, si charismatique, comme si rien ne semblait l'ébranler, comme si l'ouragan intérieur était mort dans l'oeuf. La puissance d'une passion qui courait dans les veines, au même titre que l'escrime ou le quidditch.

Lorsque la chanson se termina, elle prit une longue inspiration pour se canaliser. Devait-elle se laisser aller dans une autre musique plus ou moins girly ? Elle rouvrit les yeux et regarda la plante qui ne semblait pas avoir bougé pour autant. Cela ne semblait pas fonctionner, cette histoire de parler aux plantes. Tant pis. De toute façon, qui avait bien pu voir une Mulan qui se laissait aller à la musique ? Personne. Non, j'insiste. Vraiment. Ah. Elle eut un doux sourire, glissant une mèche de ses cheveux noirs derrière son oreille. Le dos droit, la demoiselle se remit à fredonner naturellement. Elle en avait besoin, clairement, de cette partie que personne ne connaissait vraiment. De ces mélodies douces, enivrantes, puissantes aussi, de ces fragments de son âme qu'elle parsemait au détour des refrains qu'elle écrivait parfois.

Pourquoi avait-elle ce besoin si pressant de chasser toutes ces pensées de son esprit ? Mulan était perdue dans un flot de reproches dits et implicites depuis son retour de vacances. Elle ne le dirait sans doute jamais mais elle avait été réellement marquée par les quelques mots prononcés par cette idiote de marieuse. Quelle tradition nulle, franchement. Dans ce genre de cas, elle détestait réellement son pays et sa culture. La sportive se retrouvait donc, assise par terre à chanter pour des oiseaux qui n'en avaient strictement rien à foutre de sa tronche. Elle en aurait presque eu les larmes aux yeux, de se rendre face à cette évidence. Mais, elle ne devait pas, il le fallait pas se laisser abattre. Elle ne ferait pas une bonne épouse ? Très bien, elle serait autre chose, quelqu'un de mieux, de différent et qui honorerait autrement les Fa.

Alors, une nouvelle fois, sa chanson s'arrêta et elle poussa un franc soupire. Elle sursauta en entendant une voix qu'elle reconnaîtrait entre miles. Rebelle. Ce brin de femme si particulier qu'elle aimait beaucoup. Aussitôt, son visage s'illumina pour ne laisser place qu'à un sourire de bienvenue et des éclats rieurs dans les yeux. La demoiselle n'avait pas tord. Mulan haussa les épaules et désigna vaguement d'un geste de la main les animaux présents. « Ah tu crois ? Dommage. » Elle se remit aussitôt sur pieds et elle nettoya ses fesses d'un mouvement rapide.

La poursuiveuse sourit à Buttercup une nouvelle fois et en quelques enjambées, elle se retrouva devant son amie qu'elle serra dans ses bras. C'était un passage obligatoire pour la pauvre jeune femme. Mulan savait au fond, tout au fond que la pauvre aimait les câlins. Alors, elle s'imposait sans doute un peu trop. Mais, les moues boudeuses de la belle étaient beaucoup trop mignonnes. Elle ne s'en lasserait jamais. « Comment tu vas, Rebelle ? Tu as l'air en forme ! » Plus de trace de cette tristesse d'il y avait quelques minutes à peine. Juste un sourire doux et charmant. La façade habituelle mais en même temps, plus sincère puisque Buttercup était quelqu'un auquel tenait vraiment la jeune femme. Elle avait envie de l'aider à avancer comme personne ne l'avait fait pour elle.