Voilà bien longtemps que le club d’escrime d’Ilukaan était en activité. Et bien qu’ayant toujours pratiqué le kendo et le iaido, Zenitsu ne s’y était inscrit que très récemment. Jusqu’alors, outre avec son sensei, il avait toujours pratiqué en solitaire. Après tout, ce n’était pas vraiment non plus une activité de groupe. Mais surtout, il préférait qu’on ne le voit pas, ça lui permettait d’éviter de se ridiculiser. Ce n’est pas comme si, malgré les nombreuses années d’entraînement, il avait un quelconque talent. Parfois, il se demandait même pourquoi il persistait. Il ne maniait pas spécialement bien son sabre, et en plus, il aurait pu se blesser. PIRE ! Il aurait pu se tuer. Son constant manque de confiance en lui n’aidait clairement pas. Pourtant, il était tout à fait apte à maîtriser n’importe quel instrument de musique. Pourquoi n’y arrivait-il pas pour le reste. La seule raison qui le poussait à continuer à pratiquer, c’était son sensei, Jigoro, qui l’avait recueilli, qui lui avait tout appris, et qui, malgré les nombreuses disputes, croyait en lui.  

Alors, sous les conseils de ses amis, il avait rejoint le club. Shinobu, la présidente, n’avait pas eu à insister bien longtemps pour le convaincre. Un simple “je crois en toi, Zenitsu”, et sans même qu’il ne le réalise, il avait signé pour. Il faut dire que la potionniste avait un certain pouvoir pour le motiver.

Pourtant, il continuait d’éviter le plus possible de croiser ses collègues escrimeurs lors des entraînements. Il pratiquait seul, discrètement. C’était bien là l’une des rares choses qu’il faisait discrètement ! Après tout, il n’avait besoin de personne pour travailler sur sa posture et ses enchaînements.

Et c’est ainsi qu’en ce mercredi après-midi, Zenitsu s’était dirigé vers le gymnase, avec sa tenue et ses affaires de sport, pour travailler un petit peu. Il savait qu’il serait plutôt tranquille, entre les cours de certains, les nombreuses activités proposées par les divers clubs et les magasins de Bloomburry, il avait peu de chances de rencontrer quiconque. Et puis, pour la sécurité de tous, mieux valait être seul. Seul au milieu de la grande pièce, le blondinet enchaînait les séries de mouvements. Les bases, ils les connaissaient. Il les maîtrisait même plutôt bien. Mais pour le reste, ses mouvements étaient hésitants, un peu lents et loin d’être parfait. Des gouttes de sueur perlaient sur son front, alors qu’il recommençait encore et encore les mêmes mouvements, essayant de comprendre où il échouait. Pourquoi n’était-il pas capable de s’améliorer, malgré ses nombreuses années, les mains crispées sur le tsuka de son arme, les courbatures dans les jambes et dans les bras.

Tout comme pour la magie, il était à peine dans la moyenne. Il s’en sortait toujours suffisamment, mais il ne s’améliorait jamais vraiment, et il n’excellait dans aucune matière. Son seul talent était pour la musique. Il attendait impatiemment la 8e année, et la possibilité de choisir un cursus d’arts magiques. Au moins, il aurait enfin l’impression de réussir. En attendant, il était obligé de travailler. Le club d'escrime n'était qu'un passé temps, et il aurait très bien pu laisser tomber des années auparavant. Cependant, il était hors de question de donner raison aux rumeurs sur son incapacité et sa couardise. Il n'abandonnerait pas. Pas tant qu'il n'aurait pas perfectionner au moins une technique !

Cela ne faisait pas bien longtemps qu'il avait commencer ses exercices que déjà, le jeune sorcier était démotivé. Zenitsu déposa son boken, et s'assit quelques minutes sur le tatami, songeur. Tout son entourage maîtrisait le kendo. Tanjiro était particulièrement doué, et était complètement acharné. Inosuke, aussi fou était il, savait manier ses lames comme personne. Kanao était si gracieuse un sabre à la main. Sans compter Rengoku-sama et Kocho-sama, vice-president et présidente du club. Il se sentait légèrement exclu, avec ses difficultés constantes.

L'Agatsuma poussa un long soupir, reflet de son désespoir. Pourtant, il se releva, reprit son arme en main, les doigts douloureux de ses nombreuses heures passées à répéter les mêmes positions. Au moins, seul, il pouvait se concentrer entièrement, et ne pas prêter attention aux moqueries des autres. Mais au fond, il aurait bien aimé, que quelqu'un l'aide, lui montre comment mieux s'y prendre.

Malgré de nombreux autres pratiquants de cet art, le blondinet avait tendance à rester seul pour s’entraîner. Ce n'était pas le cas lorsqu’il était chez lui, au Japon, et que Jigoro-senpai l’entraînait. Mais ici, malgré la présence de ses aînés, il avait cette peur constante d’être jugé sur ses défauts, qu’il savait nombreux. Rengoku-san et Kocho-san aurait très certainement été ravie de l’aider, mais, pour une quelconque raison, il ne leur demandait jamais. Peut-être avait-il simplement peur du regard qu’ils poseraient sur lui après l’avoir vu. Et il ne voulait pas impliquer ses amis. Tanjiro aurait été compatissant, mais Zenitsu aurait très certainement pris cela comme de la pitié. Ne parlons pas d’Inosuke qui aurait simplement attaqué à répétition, cherchant plus la bagarre qu’autre chose.

Plus le temps passé, et plus ses entraînements duraient. Mine de rien, et tout naturellement, son endurance devenait meilleure chaque semaine. Ses postures et ses techniques étaient loin de faire de même. Cela faisait une petite demi-heure qu’il enchaînait les frappes dans le vide. Il avait principalement fait quelques suburi aujourd’hui. Bien qu’il ne s’agissait pas d’un exercice particulièrement compliqué, l’Ursirre était tout de même légèrement essoufflé. Après tout, le poids de son arme commençait à peser sur ses bras, et ce n’était pas non plus de tout repos.

Aussi, lorsque le lupy aux cheveux verts débarqua dans son champ de vision, vêtue de sa tenue traditionnelle et de son bokken en bois, Zenitsu s’arrêta aussitôt. Il l’observa s’approcher de lui, tout en le saluant, et ses joues, déjà rougies par l’effort, se colorèrent un peu plus. Depuis combien était-il là ? Avait-il eu le temps de voir tous ses défauts montrer le bout de leur nez ? Le jeune sorcier connaissait peu Genji, mais largement assez pour savoir qu’il était très doué dans cet art, et qu’il n’aurait pas souhaité se retrouver dans un duel au katana avec les Shimada. Aux paroles de son aîné, il secoua la tête de droite à gauche.

- Je suis là depuis une demi-heure, mais le temps de me changer et l'échauffement, je n’ai pas commencé il y a si longtemps.

Il lui lança un petit sourire amical, ravalant sa fatigue. Il ne manquait pas spécialement d’endurance, mais la répétition des mouvements, et le fait de ne voir aucune amélioration ne l’aidait pas vraiment à rester motivée. Il ne voulait pas le montrer. Ses doigts, crispés sur son sabre d'entraînement en bois, étaient douloureux. Ses pieds, qu’ils avaient bougé dans un même mouvement continuel, se faisaient lourds. Dans sa bouche, un goût salé de sueur le dérangeait un peu. Cette préparation, pourtant banale, aurait sûrement raison de lui dans peu de temps. Mais il n’en laissa rien paraître. Tout le monde le voyait déjà comme un froussard, facilement effrayé, hors de question par-dessus d’avoir une réputation de tire-au-flanc ! Cette petite pause était donc la bienvenue. Il abandonna donc son bokken un instant, et désigna celui de son aîné.

- Tu viens pour t’entraîner, toi aussi ?

De la part du Lupy, Zenitsu s’était attendu à des pratiques en un contre un, à des duels, à quelque chose d’époustouflant. Il était surpris de voir Genji débarquer seul dans le gymnase. Dès qu’il commencerait ses exercices, le blondinet s’arrêterait probablement, trop embarrassé pour continuer devant quelqu'un qui l’impressionné autant. D’autant plus dans sa tenue quasiment traditionnelle. Lui-même, plutôt à cheval sur les traditions, ne revêtait la sienne que pour faire plaisir à Jigoro-senpai. Et malgré tout, une question lui taraudait l’esprit. C’était maintenant ou jamais. Et les paroles s’échappèrent de ses lèvres si vite, qu’il ne put les retenir.

- Tu aurais quelques conseils ?

Ses joues avaient pris une teinte rosée.

- Je n’ai pas l’impression que ce que je fais m’aide beaucoup, à vrai dire…

L’enthousiasme de Genji n’était pas spécialement partagé par Zenitsu. A vrai dire, s’entraîner ne le détendait pas spécialement. Il n’avait jamais fait ça pour se changer les idées, pour se faire du bien, pour être dans sa bulle. Au contraire, c’était toujours une source d’angoisse et sujet à la négativité chez le blondinet. S'entraîner était une corvée qu’il continuait de faire pour faire plaisir à son maître, qui vivait à l’autre bout du monde et qui n’avait absolument pas conscience qu’il continuait le kendo. L’art du sabre n’était ni une passion, ni un passe-temps, et n’avait absolument aucun but thérapeutique. Il s’agissait simplement de prouver que ce n’était pas un bon à rien, de prouver qu’il avait une quelconque valeur, de prouver qu’il savait faire quelque chose dans sa vie. Peut-être aussi était-ce un moyen de se rassurer au quotidien. Au moins, il savait se défendre un minimum en dehors de la magie. Il n’avait pas à compter uniquement dessus, et vu sa maîtrise de la baguette, il valait mieux pouvoir compter sur autre chose. Si ce n’était qu’il n’était pas spécialement bon non plus pour l’escrime, le self défense ou n’importe quoi d’autre.

Mais il n’en dit rien. Il resta impassiblement silencieux, observant Genji s’échauffer, un sourire neutre sur le visage. Plutôt que de montrer son désaccord, de devoir argumenter, de se retrouver à se demander une nouvelle fois pourquoi il avait fait ses choix sans lui-même le savoir, il préférait écouter ce que le Lupy avait à lui répondre. Rengoku-san aurait probablement été ravi de l’aider, de le guider, et de le conseiller. Mais Zenitsu ne voulait surtout pas le décevoir en échouant, puisqu’il était persuadé que c’est ainsi que cela finirait. Kocho-san également n’aurait pas dit non s’il était allé la trouver. Mais il était hors de question de lui montrer sa médiocrité. Il était déjà bien chanceux de les avoir en amis, hors de question de leur montrer qu’il ne valait pas un clou.

Son visage se crispa légèrement lorsque Genji approuva ses propos. Il savait bien qu’il n’était pas bon, et que ses exercices étaient vains. Il savait qu’il n’avançait pas et que s’il continuait ainsi, il ne verrait jamais aucune amélioration. Mais entendre quelqu’un, qui n’avait qu’entre-aperçu son travail confirmer ses dires, ça faisait un peu mal. Zenitsu ravala sa fierté, serra la mâchoire et fit abstraction du reste. Il était là pour apprendre, et le Lupy allait peut-être le lui permettre. Ce n’était pas le moment de faire la fine bouche. D’autant plus qu’il était lui-même à l’origine de ces propos. Il ne se passa que quelques secondes avant que Genji reprenne la parole, essayant tout de même de mettre en avant quelques qualités. Mais elles parurent interminables. L’Agatsuma tripotait maladroitement son sabre, attendant que son nouveau “maître” termine sa phrase.

- Alors, en fait, je pratique le kendo et le iaido depuis que je suis tout petit. Mais je n’ai jamais montré un quelconque talent pour.

Il réfléchit un instant. Comment mettre les mots sur ce qu’il ressentait ? Il ne l’avait jamais vraiment fait. Il repensait à toutes les fois où il avait pratiqué, avec Jigoro, avec Kaigaku, et où il n’avait strictement ressenti aucun plaisir. Il le faisait simplement parce que c’était ce que son père adoptif, qu’il considérait d’ailleurs plus comme son maître que comme son paternel, lui avait appris.

- Je ne sais pas vraiment pourquoi je continue. Par habitude peut-être ? Ou peut-être simplement que je veux enfin pouvoir dire que je suis bon quelque part. Pour me rassurer ? Pour rendre Jigoro-senpai fier ? Qu’il puisse, un jour, dire que je ne suis pas qu’un bon à rien.

Le jeune Ursirre avait toujours été franc. C’était là une de ses très grande qualité. Et quitte à passer une fois de plus pour un pleutre son objectif, il était fier de dire qu’il le faisait par tradition.

- A vrai dire, je ne sais vraiment ce que j’attends comme conseil. Peut-être juste me donner quelques trucs et astuces pour que je puisse m’améliorer ? Que je puisse avoir une direction où aller quand je m’entraîne ?

S’entraîner avec quelqu’un, déjà, ça pourrait être plus qu’utile. Il garda cependant cette pensée pour lui. Une chose à la fois, un pas devant l’autre. Il serra sa poigne, et se remit en position, prêt à reprendre les enchaînements.

- Ne serait-ce que savoir quel exercice pratiquer ?

Il écoutait les paroles de son sensei du jour avec attention. Il n’avait pas grand espoir. Bien d’autres avaient échoué dans la tentative de le faire s’améliorer. Notamment Jigoro, son senpai, son grand-père, comme il aimait à l’appeler. Il avait eu beau se prendre maints coups de la part des autres enfants que le vieux avait recueillis, il ne s’était jamais réveillé. Rien ne l’avait miraculeusement aidé à devenir meilleur dans la pratique. Et pourtant, il se refusait ABSOLUMENT à tout arrêter.  

- Je peux quand même pas juste laisser tomber.

Ces mots étaient sorti comme un soupir. Genji ne les avait probablement même pas entendu. Et pourtant, il avait l’impression qu’il fallait qu’il défende son choix avec plus de vigueur. Il n’avait peut-être pas un objectif clair. Il n’avait peut-être aucun talent. Il n’avait peut-être aucune raison de persister. Et pourtant, sa détermination était bien présente. Plus qu’il ne l’avait soupçonné.

- Je veux le rendre fier. Il a toujours tout donné pour moi. Il m’a appris son art parce que c’est ce qu'il savait le mieux faire. J’abandonnerai pas, même si ce n'est pas mon expertise. Je lui montrerais qu’il a eu raison de me faire confiance tout ce temps !

Il s’arrêta aussi vite qu’il avait commencé. Ses propos avaient été déversés à vitesse grand V, comme souvent avec le japonais. Il avait tendance à parler plus vite qu’il ne pensait, et à s’arrêter dès que son esprit rejoignait ses paroles, réalisant qu’il devrait peut-être réfléchir à ce qu’il disait.

Il se tut donc, regardant son aîné prendre position pour lui expliquer ce qui n’allait pas. Bokken à la ceinture, Hakama parfaitement cintré. Jambe écarté dans une position détendue mais pleine de force. Quelle classe. Il ne devait pas manquer de succès avec les filles, lui. Peut-être que ce point pourrait être un vecteur plus motivant : les bons sabreurs étaient souvent des tombeurs ! Si ça pouvait attirer la gente féminine… Mais il préférait ne pas l’évoquer à voix haute… Il passait déjà pour un coureur de jupons auprès de toute l’école, inutile d’en faire plus…

Il écoutait donc les conseils du Lupy, acquiesçant, comme s’il en prenait note. Mais au fond, il se disait simplement que.. *EVIDEMMENT QUE JE SUIS RIGIDE ?! ET SI JE ME BLESSE ?!*  La peur suintait par tous les pores de son corps… Malgré une pratique régulière et depuis sa plus tendre enfance, Zenitsu n’avait jamais surmonté cette crainte de s’infliger des blessures, d’en infliger aux autres. On pourrait croire que le maniement du sabre dès le plus jeune âge aurait permis à ce genre d’appréhension de s’envoler, mais pas chez le blondinet. Il serrait les dents, une moue sur le visage, cachant son désarroi pour ne pas passer une fois encore pour un pleutre.

Certains avaient des talents innés. Ce n’était pas le cas de Zenitsu pour le kendo ou le iaido. Il regardait, ébahi, Genji enchaîner deux-trois mouvements qu’il ne connaissait pas vraiment, comme s'il les avait pratiqué toute sa vie. Il n’y avait pas à dire, celui aux cheveux verts forçait l’admiration. Il manquait peut-être parfois de discipline, dans la vie quotidienne, mais concernant l’art du sabre, c’était complètement différent ! On pouvait sentir la passion qui débordait du Lupy, et le bien être qui émanait de lui, arme à la main. Il avait l’air à l’aise, avec son bokken. Il l’était probablement aussi avec son katana. Le blondin en était légèrement jaloux. Il aurait aimé posséder la même confiance en lui, et la même maîtrise.

Genji reprit place. Zenitsu était sur le point de répondre à sa question - il s’était déjà entraîner sur des cibles, oui, mais toujours seul - mais il stoppa net le cours de sa pensée en entendant la proposition de son aîné. Il écarquilla les yeux face à ses paroles. Comment ça, s’entraîner sur une cible vivante ? Comment ça, attaquer Genji avec son bokken ? Il risquait de blesser quelqu’un d’autre, et qui plus est quelqu’un qui lui venait en aide ! Heureusement, on ne parlait là que de fausses armes, qui ne possédaient aucun tranchant. Mais il s’agissait quand même d’une sorte de masse en bois, parfaitement contondantes !

Il avala difficilement sa salive. L’ursirre était hésitant à accepter, mais Genji était déjà en place, lui lançant un sourire. Un sourire espiègle et plein de malices qui était là pour le mettre au défi. Zenitsu poussa un soupir. Il n’était toujours pas vraiment convaincu.

- Tu es sur ? Je risque de te blesser. Je n’ai pas envie de te faire du mal, moi…

Mais son sensei de substitution semblait sûr de lui.

- Je te préviens d’avance… Ça risque de faire beaucoup de coups…

Il marque une légère pause. Il était persuadé que les mots de Genji n'étaient pas des paroles en l’air, et il en était fatigué à l’avance. Il ajouta juste trois mots, dans un murmure.

- Et de pompes…

Le blondinet se remit donc en position. Il se saisit de son bokken, les doigts crispés sur son manche, les talons plantés dans le sol, le machoir serré, et le cœur battant la chamade. Quel stupide idée… Il se lança dans une première tentative qui fut… Un échec critique ! Heureusement, puisqu’il n’avait absolument aucune confiance en lui et avait prédit que les choses se passeraient ainsi, il n’y avait pas mis beaucoup de force, et le bois de l’arme retomba sur le sommet du crâne à la toison verte en un bruit sourd.. BONK..

Zenitsu rapprocha son arme de lui, paniqué, s’assurant qu’il n’avait en aucun cas fait mal à son compagnon.

- TOUT VA BIEN ? CA A TAPÉ FORT NON ?!

Peut-être que Genji ne se rappellerait pas qu’il lui avait promis des pompes en cas d’échec avec le coup qu’il venait de se prendre ? Le culpabilité était bien présente pour notre ami Zenitsu.

Zenitsu était sincèrement inquiet pour son aîné, il avait senti la puissance de son coup. Alors la réaction de Genji le laissa pantois pendant un instant. Il… riait ? N’y avait-il eu donc aucune force lorsqu’il avait asséné son bokken ? Il le regardait, ébahi, lui décocher un sourire, un geste de main rassurant, et une phrase passe-partout pour lui assurer que tout allait bien.

- Je suis vraiment désolé ! C’est parti tout seul !

Dans son regard, une lueur sincèrement désolée brillait. Il s’en voulait de pouvoir potentiellement blessé quiconque. Il était inquiet à l’idée qu’on lui rende la pareille dans l’heure qui suivrait aussi. Il avait demandé conseil à Genji sans vraiment le connaître. Et il l’avait déjà un peu esquinté Même s’il ne s’agissait que d’une bosse, c’était, à ses yeux, une bosse de trop. Il n’avait pas vraiment envie de recommencer l’expérience, qui était douloureuse pour les deux sabreurs, de manière bien différente. Ce n’était pas dans les habitudes du blondins de faire mal à quelqu’un - à l’exception peut-être d’Inosuke, mais ce n’était jamais lui qui lançait les hostilités. Son regard s’attrista encore plus en entendant les paroles du Lupy. Il secoua la tête en signe de déni.

- Tu n’y es pas du tout ! Je n'ai vraiment pas fait exprès. J’ai juste mal retenu la retombée de mon bokken !

Comment pouvait-il croire un seul instant que Zenitsu l’avait volontairement blessé ? Jamais il n’aurait pu envisager quelque chose comme ça ! Non seulement, le petit discours de Genji le peinait, en plus, il le vexait. Même s’ils ne se connaissaient pas vraiment, tout le monde savait que le jeune Ursirre était bienveillant. Cependant, tout n’était pas faux, dans le discours du sorcier aux cheveux verts. Il ne s’était pas cru un seul instant réussir à ne pas toucher son aîné. Il était parti complètement défaitiste. Il aimerait faire croire que non, mais dans tous les scénarios qu’il s’était imaginé, en abaissant son katana de bois, il touchait le crâne de Genji. Il fit du mieux qu’il pu pour le cacher, mais ces propos, qu’il prenait très à coeur, l’avait ragaillardi.

Sans piper un mot de plus, il s’allongea sur le sol, face au sol. Il s’appuya sur ses bras et poussa dessus pour effectuer sa première pompe de l’après-midi. Il la fit sans trop d'efforts. Malgré son manque de confiance et de compétences, Zenitsu était plutôt musclé à force de s’exercer. Il se releva, espérant malgré tout ne pas avoir à recommencer trop souvent. Une source de motivation supplémentaire pour ne plus échouer. S’il voulait en faire le minimum, il devrait s’améliorer très rapidement. Et même s’il était persuadé que ce n’était pas prêt d’arriver, il rêvait de pouvoir atteindre ce nouvel objectif.

Sans attendre le top départ, il se remit en position, épée de bois à la main, respiration calme, et regard concentré.

- Tu es prêt ?

Bien évidemment, plusieurs échecs s’ensuivirent. Il y eut plusieurs pompes, plusieurs essais. Et la culpabilité grandissait en même temps que la motivation à faire mieux. Genji semblait le croire capable de s’améliorer, alors peut-être que cela était vrai. Il était peut-être mauvais. Il était peut-être défaitiste. Il se sous-estimait peut-être. Mais une chose qu’il était impossible de dire, c’est qu’il manquait de volonté. Elle était plus forte que jamais. Pourquoi spécialement aujourd’hui, il l’ignorait. Peut-être que la présence du Lupy pour l’aider le motiver d’autant plus. Cela n’avait que peu d’importance. Il était prêt à prendre les choses un peu plus en main.

Son manque de confiance se ressentait. Mais, au fur et à mesure que l’entraînement se déroulait, il avait l’impression de maîtriser son mouvement de mieux en mieux. Les coups que se prenaient son aîné était plus léger, moins puissant. Le blondinet réussissait à ralentir son bokken de plus en plus en avance, la courbe que parcourait la lame de bois était mieux définie. Et le jeune sorcier le ressentait. Avec un peu plus de persévérance, peut-être que son mouvement finirait par réellement s’améliorer. Et peut-être qu’avec encore plus d’entraînement, tous ses enchaînements également. Et avec le temps, peut-être aurait-il l’impression de ne plus être si désespérément mauvais.

Lui qui avait l’habitude de stagner en permanence, de ne jamais progresser, il était surpris de cette séance d’entraînement qui semblait l’avoir… aider à s’améliorer ? Il avait remarqué que son mouvement était plus juste, plus maîtrisé. Qu’est-ce qui avait bien pu se débloquer chez lui pour que d’un coup, les choses changent, ne serait-ce qu’un tout petit peu ? Zenitsu se sentait totalement revigoré par sa petite réussite. Et plus l’entraînement avançait, plus il prenait confiance en lui. Ses coups s’affinaient, son mouvement se faisait plus léger, plus rapide, son esprit s’était vidé alors qu’il visualisait ce qu’il devait faire avant même de le faire.

Avec un peu d'entraînement, peut-être finirait-il par savoir quoi faire de son bokken en combat. Il ne rêvait pas, il ne deviendrait pas un escrimeur très doué en deux-trois jours. A vrai dire, il n’espérait même pas le devenir. Il voulait simplement se prouver qu’il était capable de quelque chose, il voulait apprendre à y prendre du plaisir. Il voulait pouvoir, lorsque l’envie lui en prenait, faire un combat dans lequel il ne se prendrait pas tous les coups sans savoir y répliquer.

Si il y avait bien une chose qu’on ne pouvait pas reprocher au blondin, c’était sa persévérance et sa résilience. Il manquait de confiance, il était peureux, il se faisait facilement marcher dessus, il baissait la tête si souvent. Mais il ne baissait jamais les bras. Il avait décidé de prouver quelque chose via l’escrime, alors il le prouverait. Il avait décidé que la musique serait sa vie, alors il vivait sa musique. Il passait des heures à travailler seul dans son coin sans l’aide de personne, sans vraiment qu’on le sache, juste pour progresser avec une lenteur épuisante. Mais jamais il n’avait pour autant laissé tomber.

Et alors que Genji lui annonçait la fin de la séance, il regrettait presque de ne pas continuer jusqu’à s’effondrer. Il comptait bien retenir chacun des conseils que lui avait donnés Lupy au cours de cet entraînement, et les mettre en pratique, encore et encore et encore, jusqu’à épuisement. Mais il se contenta d’écouter son senpai du jour, de poser son bokken, les bras flageolant et vidés de toutes leurs forces, et de chercher sa bouteille d’eau dans son sac.

- Ça ne te dérangerait pas ?

Il avait tendance à préférer se débrouiller seul, mais au vu de l’après-midi, quelques leçons supplémentaires de la part de Genji étaient en réalité bienvenues. Il ne comptait pas lui demander beaucoup de temps, de toute façon, entre la musique, les cours, et la gang, il n’avait pas tant de trous dans son agenda pour pouvoir ajouter une séance d’entraînement tous les jours.

- Dans ce cas, on pourrait peut-être se voir de temps en temps, pour que tu me donnes des techniques pour m’entraîner dans mon coin, et des petits conseils ?

Il ressentait une petite lueur d’espoir. Lui, qui était totalement démoralisé en début de séance, persuadé qu’il n’arriverait jamais à rien, et qui était simplement trop borné pour s’arrêter, avait enfin l’impression que toutes ses heures à tenir son sabre en bois à la main, à se concentrer sur sa posture, ses mouvements, la trajectoire de sa lame, n’étaient finalement pas inutile.

- Je pratiquerai un peu, d’ici là, comme ça, tu pourras me dire ce que tu en penses !