Le hurlement élégant du loup retenti, et Cléonos, onze ans, est véritablement surpris du choix de la fontaine. Il sait que sa famille et ses proches le voit comme un enfant doux et sympathique, peut-être un peu timide, et on lui a pourtant murmuré dans la file vers sa répartition que les Lupy avaient une fâcheuse tendance à être parfois turbulent, ou du moins, légèrement « rentre dans le tas ». Il y pense toute la soirée, et rien qui puisse justifier ce placement ne lui vient à l’esprit.

Il est né dans le froid de l’hiver Canadien dans un hôpital sorcier, une naissance tout ce qui a de plus banale. Il est nommé Cléonos, un prénom jamais entendu chez les non-mage, et pourtant parfois donné chez les sorciers : une variation de Cléon, dont les significations sont « glorieux », « célèbre », « persévérant » et « organisé ». Cléonos en vient à se demander si la fontaine ne l’a pas placé chez les rouges seulement à cause de ceci.

Peut-être est-ce à cause de sa magie ? Mais il n’a pas souvenir d’une magie très offensive non plus. Il se rappelle de son tout premier sort à six ans, quelque chose de classique, oubliable même : un simple incendio, une petite flamme froide et inoffensive, seulement source de lumière et non de douleur. Le sortilège est vite oublié comme cela arrive si souvent avec les premiers sorts d’enfance incontrôlé, puis réapprit lors de ses années à Ilukaan. Cléonos aime à croire qu’il se spécialise en sortilège de protection, et les protego qu’il lance obtiennent très rapidement des notes optimales. Ses parents sont extrêmement satisfaits.

Les parents de Cléonos sont tous les deux à la tête d’une chaîne de bijouterie sorcière. Elle n’a de sorcière, à vrai dire, que sa localisation dans les différentes villes magiques. Aucune des pierres vendues ne sont des artefacts, bien qu’elles soient souvent achetées par les sorciers souhaitant les utiliser comme support pour en créer. La chaîne de bijouterie Pitéras est en partenariat avec de nombreux antiquaires et magasins sorciers particulièrement chics et prisés : Cléonos a toujours vécu dans la richesse, les bonnes manières, les courbettes et les vêtements de marque. Tout ceci venait malheureusement avec l’exigence de parents ayant réussi leur vie, et bien que les premières années scolaires de Cléonos suffisent à les satisfaire, la quatrième année est le début d’une petite crise d’adolescence qui fait chuter les espoirs qu’ils avaient pour leur fils.

Bien que ses notes ne chutent pas, Cléonos exprime clairement son souhait de ne plus reprendre la bijouterie une fois adulte. Ses sortilèges de protego deviennent petit à petit des Lacarnum Inflamare, des Incendios et des Flambios, avec son sortilège préféré, mélange de Protego et de feu, le Protego Diabolica. Cette préférence inquiète sérieusement parents comme professeur, mais en plusieurs années, aucun ne remarque de dérive liée à ces sorts. Peut-être le courage qu’il a pris à deux mains afin de dire « non » à ses parents est la raison pour laquelle il est un Lupy ? Mais sa petite révolte ne le mène pas à sa perte. Les notes de Cléonos sont en hausse, son comportement est exemplaire : il souhaite seulement trouver ce qui lui plaît, et ce n’est malheureusement pas ce qui plaît à sa mère ni à son père.

Cette passion pour les sortilèges de feu mène malheureusement Cléonos chez le médecin sorcier. Visiblement, une légèrement pyromanie –contrôlée– de sa part est ce qui a entraîné une condition physique magique nommée Ignus Quaeris. Il s’agit d’une simple surchauffe du corps après un contact trop grand avec des sortilèges de feu : cet épuisement, irréversible, provoque une haute température chez le sujet, ainsi qu’un épuisement plus rapide due à une utilisation de la magie trop poussée. Cléonos réalise que les métiers demandant un rythme soutenu de lancer de sortilège, tel que Auror, Pompier sorcier ou bien même duelliste, lui sont désormais fermés. L’été devient difficilement supportable pour lui, et ses entraînements en sortilèges se raccourcissent. Il réussit malgré tout à maintenir des notes tout à fait convenables.

Cléonos se tourne alors vers l’artisanat magique. La création d’outil et d’artefact capturent son intérêt, une fois la voie de l’action complètement détruite pour lui. Le maniement du métal et du bois, de la chauffe et des propriétés magiques trouvées dans la nature deviennent sa vie : vidéo witchtube, encyclopédies, documentaires et visites dans des ateliers deviennent son quotidien, ainsi qu’un sujet de conversation duquel il a du mal à s’éloigner. Une hésitation se forme en lui entre deux futurs emplois : créateur et vendeur de baguette, ou bien producteur et commerçant d’artefact. Dans les deux cas, le Lupy sait vers où se diriger : le Cursus de Commerce et Artisanat magique, dont il espère faire partie l’année prochaine.

(c) Ilukaan