La porte du dortoir claque derrière moi sans que je ne ralentisse le pas. J'ai beau adorer la pluie et le vent, là c'est sérieusement too much je trouve. Enfin, un peu c'est chouette mais avec les rideaux de flotte qui s'abattent sur nous, pas moyen de ne pas finir trempée comme une soupe. Et les parapluies c'est même pas envisageable avec le vent. Pfff !

Enfin, maintenant que j'ai réussi à rejoindre les dortoirs de Cervirald, je n'ai plus qu'un hâte. Atteindre ma chambre pour retrouver Mary et pouvoir me changer. Parce que mes chaussures font 'schplock schplock' en coeur avec les gouttes qui perlent de mes cheveux et de mon manteau. Je vais être bonne à m'essorer de toutes mes forces avant de me coller au radiateur le temps de bien me réchauffer. Hors de question de tomber malade.

Mon sac dans les bras, je viens fouiller un peu dedans pour m'assurer que mes livres et autres cahiers n'ont pas souffert du trop plein d'humidité tout en gravissant l'escalier menant à l'étage. Et si je suis soulagée de voir que mes affaires n'auront pas souffert du mauvais temps, j'ai sous-estimer le potentiel glissant des marches. Un appui un peu moins sûr fait déraper mon pied et je sens le déséquilibre me gagner. Aussi, en réflexe, je lance mon bras pour chercher de quoi m'accrocher mais je rate la poignée de la fenêtre. Résultat, je finis 5 marches plus bas, mes affaires plus ou moins éparpillées autour, sur les genoux et légèrement désorientée du coup.

C'est bon, tout va bien. Je peux me lever et je n'ai mal nul part, je me suis juste fait surprendre. Je me redresse en grognant un peu pour venir tout récupérer avant que mon regard ne tombe sur mon bras à travers ma manche déchirée. Sur lequel je ne peux pas rater la grande marque de couleur trop vive qui s'y trouve. Et qui vire trop rapidement au rouge, venant me faire blanchir en me stoppant net dans mes gestes. C'est... du sang ? Mon sang ? 

— Hey, gamine ! Les escaliers, faut y aller avec les pieds, pas le cul. Tes fesses sont faîtes pour chier, par marcher, ton corps fonctionne pas comme-

Nan, sans rire ? Non mais tu te prend pour qui avec tes remarques débiles ? T'as de la chance que là, je sois encore trop en panique pour te répondre. Après, mine de rien, le simple fait de ne pas être toute seule me rassure un peu. Cela me donne un autre point ou fixer mon attention et mon regard. Sauf qu'en découvrant la tête que tu tires en me regardant, je ne me sens plus aussi rassurée que je l'espérais.

— Holy fuck. Tu pisses le sang !!

"- Merci Cap'tain Obvious."

Pour le coup, ça m'a complètement échappé. Et si j'ai voulu le dire de façon très neutre et limite moqueuse, il est évident que le rendu est tout sauf ça. Entre ma voix qui chevrote un peu, mes yeux qui brillent sans pleurer encore et le fait qu'étant trempée je frissonne de froid, je dois franchement pas avoir l'air fringante. Allez, on respire et... On récupère le mouchoir qu'il me tend sans même tourner la tête vers moi. C'est si affreux que ça ? Vite, poser le mouchoir dessus et appuyer pour faire cesser le sang.  

"- Ca va s'arrêter, hein ?"

Parce que là, j'en mène pas large et de voir que le blanc du mouchoir posé sur la plaie commence déjà à se parer d'une couleur plus foncé me rend irrémédiablement nerveuse. Bon, essayer de réfléchir calmement, ça pourrait être un bon début. Sauf que là, je vois que le rouge qui s'étale.

"- Je dois faire quoi, maintenant ?"

Toi, t'es plus âgé et t'as rien alors, tu vas pouvoir m'aider, n'est-ce pas ?

— Tu dois...  Tu dois... Tu dois faire... Ce truc, là.

Ce truc, là ? Quel truc ? Pour le moment, j'ai déjà du mal à retenir mes larmes en me forçant à respirer profondément alors si je dois aussi réfléchir en même temps, ça va pas le faire. J'arrive pas à aligner deux pensées correctes. Si Papa était là, il saurait me rassurer et me dire quoi faire. Maman elle aurait déjà tout arrangée aussi mais là, ils sont pas là alors... Je dois faire quoi du coup ?

— Je pense que je pourrais faire un Episkey.
Mais je dois prévenir: je suis une merde en magie.

Punaise, mais t'es sérieux ? Genre tu trouves ça drôle de me balancer de faux espoirs comme ça ? Non parce que le genre je vais t'aider mais en fait je peux pas, ça sert à rien en fait. Et non, je ne me suis pas mise à trembloter, c'est pas vrai. Et j'ai pas gémis en resserrant mes doigts sur le mouchoir qui rougi toujours, doucement mais surement.

— Alors... C'est ta décision. On peut aussi t'amener à l'infirmerie, mais c'est loin, et il faudrait ressortir sous la pluie. Ça m'a l'air d'être une idée sacrément conne.

"- Je veux juste que... ça s'arrête, c'est tout."

Les sanglots sont perceptibles dans ma voix alors que la panique se manifeste de plus en plus. Si le sang traverse le papier, je vais en avoir sur les doigts en prime. Il va y avoir cette odeur de fer qui me rend malade et je veux pas ça. Alors, je souffle profondément pour juguler de mon mieux la panique qui gonfle dans ma poitrine.

"- C'est quoi, Episkey ?
Tu crois que tu peux... le faire ?"

Ca ne me dit rien ce nom, je ne sais pas à quoi ça correspond alors oui, vu qu'il semble pas en meilleur état que moi, ça me fait peur. Mais je peux pas rester comme ça et l'infirmerie est loin alors, j'ai pas trop le choix. J'ai besoin de son aide. 

"- S'il te plait..."