La salle informatique était peu occupée à cette heure-ci. Et la métisse le savait, c’est pourquoi elle avait choisi cette heure propice à tous ceux qui souhaitent travailler au calme sur les ordinateurs, invention moldue rapidement adoptée par la communauté magique. Comme pour tout ce qui est attrait à la technologie, les sorciers se les sont par la suite réappropriés, notamment en créant le Witchnet. Mikasa n’a jamais compris ce besoin d’incorporer tous ces outils au quotidien de sorciers et de sorcières, alors qu’ils se sont toujours bien débrouillés auparavant sans, la magie les assistant déjà dans leurs corvées.

Tout cela peut être lié aux origines de la sorcière. Bien que de sang-mêlé, la magie a toujours fait partie de la vie de la cervirald, d’aussi loin qu’elle s’en souvienne. Elle leur servait pour énormément de choses, aussi futiles soient-elles. Ils n’avaient jamais eu grand besoin de communiquer qui plus est, du moins sur de grandes distances, ou bien alors ils s’arrangeaient pour échanger de vive voix. Plongés dans la campagne allemande, même les prémices des machines connectées actuelles avaient eu du mal à se faire une place au sein des foyers voisins dépourvus de capacités extraordinaires.

Aussi, la jeune fille ne découvrit réellement ce domaine que lors de son arrivée à l’école canadienne. Elle avait réussi à s’y accommoder assez rapidement, même si elle ne s’avancerait pas pour dire que cela constitue sa spécialité. Elle a tout de même ouvert un compte Pentagram, qu’elle alimente toujours à l’occasion d’évènements particuliers. Elle s’est également chargée de mettre ses parents à la page à ce sujet, ce qui facilite désormais leurs communications lorsqu’elle étudie à plusieurs milliers kilomètres de sa maison.

Enfin, bien qu’elle ait comblé son retard concernant les technologies, elle ne maitrise toujours pas à 100%. C’est pourquoi elle est dans cette salle, ayant décidé de joindre l’utile à l’agréable. Leur professeur d’Histoire de la Magie leur avait récemment confié un devoir sur l’ère industrielle et ses impacts sur la société sorcière. C’est le dernier gros devoir de l’année dans cette matière, elle ne compte pas le louper, et, ne pouvant compter sur Lovino ces derniers jours en vue de son état, la meilleure solution lui est évidente. Elle s’installe à l’un des postes disponibles, dans l’optique d’effectuer quelques recherches sur une période précise. Il n’y a aucun bruit, à l’exception de celui de la rencontre perpétuelle entre les doigts de l’adolescente et le clavier, accompagné par celui du petit moteur de la machine servant de source d’information.

De la salle informatique émane une apaisante atmosphère pour quiconque s’y aventurerait. Les seuls bruits venant faire écho au silence apparent sont légers tout en étant rythmés. Ce qui, si l’on tient compte de la configuration de la pièce, permet la comparaison avec une sphère où ni le temps ni l’espace ne semble jouer de rôle. Mikasa ne voit d’ailleurs pas les minutes s’égrainer au fur et à mesure que ses recherches progressent. Le travail qui leur avait été donné est conséquent, c’est pourquoi son exploration sur le sujet est assez exhaustive tout en étant efficace.

Voilà un adjectif que l’on emploie volontiers pour décrire l’allemande d’une manière globale : efficace. Directe, synthétique, franche, perspicace, autant dire qu’elle ne passe pas par quatre chemins pour communiquer, aussi bien pour ses devoirs scolaires que ses devoirs personnels. Concernant son exposé sur le dix-huitième siècle et sa place dans la société sorcière, la méthode suivie n’est pas différente de celle utilisée pour les autres travaux. Taper un terme bien précis, lire un article sur le sujet en diagonale, juger de sa pertinence, selon passer à l’article suivant ou bien écrire de quoi le retrouver. Cela constitue la première étape. Une fois le tri effectué, lire l’écrit dans son intégralité, faire une synthèse sur son parchemin et éventuellement noter quelques remarques ici et là, puis recommencer le processus. Oui, la cervirald compose encore sur papier, bien qu’elle pourrait s’en passer et le faire directement sur la machine. Toutefois, pour les examens, elle sait pertinemment que seuls les copies à la main sont acceptées, à moins d’avoir une dérogation spécifique, c’est pourquoi elle continue à s’exercer à la main.

Une bonne heure passe sans que la métisse ne s’en rende compte, et son travail est déjà bien avancé. Au sein de cette bulle, rien ne pouvait atteindre sa concentration. A moins que ce Dôme de paix ne se brise de l’intérieur. Ce n’est pas un grand bruit qui avait mis fin à tout ce calme. Néanmoins, aussi discret soit-il, il est tout de même audible à quiconque s’était accommodé à l’atmosphère propice à l’efficacité. Du moins, il semblerait que cela dépende des personnes. Alors qu’elle termine son paragraphe, la jeune femme décide de trouver la source de ce son parasitaire. Vu la population présente dans la salle, elle n’a pas à chercher très loin. Un autre élève a l’air de s’être endormi au bout de la pièce. Enfin, un étudiant, difficile de véritablement en juger, puisqu’on ne peut apercevoir qu’une masse de cheveux se rapprochant d’un sombre ananas faire corps avec le clavier situé en face. Il est un parfait inconnu pour la cinquième année, mais cela ne l’empêche pas de vouloir aller le réveiller, aussi bien pour lui que pour les autres.

Estimant judicieux de prévenir l’individu au plus vite, Mikasa prend soin de sauvegarder ses recherches, puis de s’approcher de la belle au bois dormant. Elle lui tape légèrement l’épaule, au cas où sa voix ne suffirait pas :

« Hé, tu es en train de dormir. Ici, c’est une pièce pour travailler. »

 
Eh bien voyons, voilà qu’il s’adresse à elle comme à sa mère, preuve indéniable que le japonais n’est donc pas à son premier coup d’essai en termes de sieste. Encore se serait-t-il écroulé de fatigue après une nuit blanche en tête à tête avec ses révisions, Mikasa lui en aurait sûrement un peu moins tenu rigueur. Néanmoins, compte tenu des propos qui lui sont adressés suite à sa remarque, il lui semble qu’elle ait affaire à un habitué de l’assoupissement en tout lieu, potentiellement fainéant qui plus est.
 
Voilà une philosophie bien étrangère à l’allemande, si ce n’est opposée à la sienne. Depuis toujours, la métisse ne s’accordait de repos que lorsqu’elle estimait sa tâche accomplie correctement. Elle n’a jamais compris ceux qui réussissent à passer outre cette espèce d’obligation mentale pour céder à l’appel de la procrastination. Ne jamais remettre à demain ce que tu peux faire dès aujourd’hui est l’un des proverbes qui résume le mieux le rapport de l’adolescente au travail. Non qu’elle n’apprécie le fait de pouvoir se détendre . Au contraire. Toutefois, pourquoi s’encombrer d’une labeur et la laisser traîner, alors que l’on peut très bien s’en débarrasser rapidement en l’effectuant le plus tôt possible et disposer de plus de temps pour se reposer ?
 
Bien sûr, peut-être que la cinquième année se trompe sur le compte de son camarade et que ses suppositions sont fausses, mais une petite voix lui chuchote à l’oreille que son intuition est la bonne. A moins que ce ne soit l’attitude mollassonne de Shikamaru et sa posture témoignant avec clarté de son intention de retourner rejoindre les bras de Morphée. Ne comptant pas céder d’un pouce, la brune continue de lui faire comprendre son ressenti.
 
« Je suis venue ici pour travailler, dans cette salle conçue pour. Non pour entendre quelqu’un ronfler. Si c’était le cas, j’aurai attendu cette nuit pour m’y mettre dans mon dortoir. »
 
Après tout, si elle était venue le réveiller en premier lieu, c’est parce qu’il l’avait dérangé dans ses recherches. Autrement, l’allemande n’avait aucune rancune envers le Lupy, ne le connaissant pour ainsi dire pas du tout. S’il n’avait pas fait de bruit trop audible dans son sommeil, elle l’aurait sûrement laissé roupiller en paix. Mais ce n’était pas ce qui s’était produit, au grand désarroi des deux élèves vraisemblablement.

Au moins s’était-t-il excusé, bien que le ton employé témoignait du fait qu’il n’était pas du tout gêné d’avoir dérangé un élève en plein travail. Enfin, étant donné qu’il était désormais certain qu’il n’en était pas à son premier coup d’essai, rien d’étonnant dans son attitude.

Si l’allemande ne comprenait pas ceux qui cèdent à l’appel de la procrastination, elle ne comprenait également pas ceux qui ne ressentaient pas de la gêne alors qu’ils importunaient leur entourage, même involontairement. Peut-être était ce parce qu’elle n’était pas de ceux-là, tout simplement. En plus d’être efficace dans son travail, elle avait toujours su l’effectuer en toute discrétion. Pas que dans son travail d’ailleurs. Elle avait cette faculté à être silencieuse aussi dans ses paroles que dans sa démarche, ce qui induisait que les autres oubliaient parfois sa compagnie jusqu’à ce qu’elle se manifeste, tel un fantôme. Il faut dire qu’elle annonce rarement sa présence et qu’elle est bien capable de le faire uniquement en croisant le regard de son interlocuteur. A quoi bon gaspiller sa salive lorsqu’un hochement de tête suffit ? Au final, tout cela n’était qu’une combinaison de l’éducation de la brune mêlée à son caractère.

Loin d’être convaincue par la réplique du Lupy, elle n’en rajouta cependant pas un mot. Cela ne servait guère à grand-chose, ses yeux plissés et ses lèvres pincées illustrant plutôt bien sa suspicion. Mikasa n’avait que faire de savoir si le japonais avait effectivement un devoir à rendre ou non, cela lui était égal. Ca ne la regardait pas. Tant que la métisse pouvait travailler sans un ronflement non loin, c’était tout ce qui comptait.

Toujours est-il qu’elle n’avait jamais réellement aimé travailler avec les fainéants. Pendant qu’ils restaient là à ne rien faire, elle restait dans son coin à effectuer sa tâche. Ils ne la dérangeaient pas, certes, et la Cervirald n’avait pas besoin d’eux pour ses travaux, mais ils retardaient malgré l’avancée de leur projet en commun. Fort heureusement, l’allemande se trouvait chanceuse de ne pas avoir à coopérer avec son camarade ici présent qui rentrait à ses yeux dans cette catégorie, l’estimant son aîné d’au moins une ou deux années si ce n’est plus.

Ainsi, elle retourna à sa place sans un bruit, espérant cette fois-ci pouvoir se concentrer sans bruit parasitaire.

La suite de l’après midi se déroula plutôt bien pour Mikasa. Sans ronflement parasitaire pour la déranger, elle avançait aisément ses recherches. Le sujet représentait certes leur dernier gros devoir en la matière de l’année, mais il n’était pas si compliqué que cela, à condition d’être bien organisé comme l’allemande. Elle espérait que ses camarades aient effectué leur travail de leur côté, chose qu’ils avaient plutôt eu intérêt à faire s’ils ne désiraient pas se faire remonter les bretelles par la brune. Enfin, son équipe connaissait assez bien son tempérament, donc cela devrait aller. L’attitude de son camarade lui avait mis quelques peu le doute, doute qui s’était finalement dissipé à mesure qu’elle voyait le bout du tunnel.

Ainsi son travail finalement achevé, elle alla l’imprimer et le récupérer au niveau de l’imprimante, à l’autre bout de la pièce. Encore une invention dont la métisse n’avait découvert l’existence qu’une fois admise à la prestigieuse école canadienne. Plus simple à comprendre que les ordinateurs tout de même. Tout aussi pratique également. Et Mikasa préférait de loin ces nouvelles techniques de recherches, bien qu’elle apprécie le charme de celles plus traditionnelles, reflétant plus la dure labeur qu’ont passé les élèves sur leurs projets.

Sur le court trajet qui la conduit jusqu’à la machine d’imprimerie, elle jeta un coup d’œil à celui qui occupait aussi cette salle, et ne put s’empêcher de soupirer. Bien entendu, ce dernier s’était ainsi rendormi, comme elle pouvait s’y attendre. Enfin peut-être avait-t-il été plus productif cette fois-ci, avant de sombrer de nouveau dans les limbes du sommeil. Autant dire qu’à ce rythme, ses travaux pourraient prendre des heures, comme ne jamais se terminer dans les temps.

Aussi, après avoir rangé ses recherches dans son sac, et donc de désormais quitter la salle, puisqu’elle n’avait plus rien à y faire, elle s’approcha encore une fois du japonais pour le secouer.

« Bonne chance pour tes travaux. »

Elle le pensait réellement. Après vite fait regardé les écrits de l’aîné, nul doute qu’il allait en avoir besoin.

Mikasa l’écoutait ainsi déblatérer en silence, formidable paradoxe qu’il en était. Shikamaru avait oublié de mettre fin au sort créant une bulle l’isolant du reste du monde. D’un point de vue sonore uniquement. Sans quoi, l’allemande aurait passer son chemin. La scène était quelque peu risible, le japonais semblait s’énerver sans que personne autour ne puisse l’écouter, ce qui avait été son souhait en premier lieu. Néanmoins, l’allemande ne pouvait pas prêter attention à ses propos, se contentant de regarder d’un air impassible les mouvements faciaux de l’ainé, n’étant pas capable de lire sur les lèvres.

Visiblement, il n’avait pas l’air ravi d’être une fois de plus dérangé dans son processus de siestes. Toutefois, impossible d’en dire plus. Aussi, elle décida de mettre fin à cette ridicule mascarade. Elle sortit donc sa baguette et la dirigea vers le Lupy.

 « Finite. »

Décidément, en plus d’être un fainéant, il serait tête-en-l’air qui plus est. Quel fantastique camarade de classe devait-t-il faire. Au moins possédait-t-il un peu de jugeote, de ce que la métisse avait pu lire de ses travaux affichés sur l’écran, bien que ceux-ci furent maigres. Quel potentiel gâché. Elle rangea sa baguette.

« Tu peux reprendre maintenant. Je n’ai pas entendu une seule de tes paroles à cause de l’assurdiato. »

Est-ce qu’elle voulait réellement entendre ce qu’il avait à lui dire ? Pas vraiment. Mais en vue de la teinture rouge qu’avait pris le japonais, il n’aurait pas été respectueux de s’en aller. Et de laisser gaspiller de la salive pour rien, encore une fois. Bien qu’elle avait déjà une petite idée de ce qu’elle s’apprêtait à entendre et qu’elle s’en saurait bien passer.

Trop ennuyant, hein ? Si c’était une blague, elle ne faisait guère rire Mikasa. Certes, ce n’était pas le mot qu’avait employé son camarade, mais ce dernier n’était-il pas synonyme d’ennui originellement ? Ennui ou contrariété, dans le langage des moins fleuris, si on puit le dire. Comment un travail pouvait-t-il ennuyeux ? Pour l’allemande, il en était tout l’inverse. Le travail était ce qui occupait, peu importe à quoi il pouvait se rapporter. Il faisait passer le temps, et permettait d’acquérir des connaissances, intellectuelles ou manuelles, utiles ou moins utiles par la suite. Aussi, la brune ne saisissait pas la pensée du Lupy, mais soit.

«  Tu peux repousser cette tâche autant que tu veux, mais tu n’en auras pas toujours le temps. Mais tu es libre d’agir comme bon te semble. »

Il est vrai qu’il pouvait bien faire ce qu’il veut, si l’on faisait abstraction de la question temporelle dans l’équation. Et le facteur patience du professeur, mais ce dernier dépendait en grande partie du temps écoulé. Notion qui régit toute forme de vie, et indissociable de l’espace, son opposé, la métisse n’avait jamais pensé grand-chose à son sujet.

Leurs temps leur était compté. Ils vivent et ils meurent. Comme des milliards avant eux et des milliers après eux. Ils étaient totalement insignifiants et n’avaient aucun de le contrôler. Du moins, en grande partie. Après tout, les sorciers avaient bien réussi à s’affranchir partiellement de cette contrainte grâce à l’invention du retourneur du temps, bien que limitée dans son utilisation, ce qui témoignait pour Mikasa de leur impuissance face à cette notion abstraite. C’est aussi ce qui apportait un certain charme à la vie, selon elle.

Il est vrai qu’elle ne dirait pas peut-être pas non une petite sieste, s’étant faite quelque peu assommer par la somme d’informations qu’elle a amassé durant ses recherches. Il était encore assez tôt pour qu’elle puisse se le permettre sans risquer de frôler l’insomnie, en décalant son rythme nycthéméral. Elle avait toujours veillé à dormir aux heures propices au repos, comme lui suggère le plus souvent son cycle circadien. Une hygiène de vie parfaite, un sommeil qualitatif, le tout résultait d’une routine précise et concise qu’appliquait l’allemande depuis des lustres. Elle ne faisait jamais rien au hasard, et s’efforçait de ne jamais se laisser aller, à moins qu’elle le mérite. Tout cela était dans l’ordre naturel des choses, peu importe ce que cela impliquait.

Enfin, la germano-japonaise pouvait se permettre, contrairement à son camarade, de s’accorder un temps de répit. Toutefois, elle n’avait pas prévu de le passer à roupiller. A la place, Mikasa se prévoyait une activité qui lui reposait tout autant l’esprit, et qui lui ferait gagner un temps précieux une fois celui des examens arrivé. Temps qu’elle a déjà bien assez perdu à faire la morale au japonais.

« J’ai prévu de faire bien plus intéressant maintenant que je me suis débarrassé de mon travail. Mais pas la sieste, vois-tu, la composition de thé. »

D’un tempérament calme, les rares fois où la Cerviralde avait laissé ses émotions prendre le dessus, elle avait eu la sensation de savoir comment agir sans avoir pour autant à réfléchir. L’instinct. Voilà ce qui la guidait lorsque cela se produisait. C'étaient les rares instants où la métisse se laissait aller et n’avait plus de contrôle sur elle-même. Seule l’adrénaline qui coulait dans ses veines était maîtresse de son corps, la manipulant telle une marionnette, obligeant son cerveau à déposer les armes. C’est pourquoi elle tourna le dos à son aîné, se dirigeant vers la porte, son petit doigt lui disant qu’il lui était inutile de rester plus longtemps ici, même s’il y avait peu de chances que Shikamaru arrive à la faire sortir de ses gonds de la sorte.

Qui plus est, la composition de thé l’attendait. Art tout aussi méticuleux que la cadette. Il lui demandait du temps et de la concentration certes, mais loin d’être une obligation. Oui, c’était l’un de ses hobbies, la senteur de certaines plantes et le toucher de certaines feuilles apaisaient son esprit. Régulière consommatrice de thé qu’elle était, cela lui était d’autant plus utile. La cinquième année manipulait les végétaux avec brio dans ces compositions, douée en botanique et en potions, l’un des avantages d’être fille de magicoagriculteurs. Elle savait ainsi ce qu’elle mettait dans ses boissons et laquelle prendre pour quels effets. Bien plus intéressant que d’essayer de raisonner un ananas somnolent.

En effet, l’allemande n’aurait pu contredire son aîné sur ce point. L’art de préparation de thé était complexe, et la moindre erreur, fatale. Enfin, pouvant s’avérer fatale, pour être plus exact. Tout dépendait de l’ingrédient utilisé, de son dosage, du moment où il était incorporé, …  Certaines de ses décoctions étaient même inspirées ou bien utilisées dans le domaine, c’est pour dire à quel point les effets de ces boissons pouvaient être puissants.

«  Aucun risque. Je le fais depuis des années. Je sais ce que je fais. »

« Je sais toujours ce que je fais » Phrase qui s’applique plutôt bien à sa manière d’agir. Sans oublier que c’était une pratique que Mikasa exerçait depuis bien des années maintenant.

Elle avait tout d’abord observé sa charmante mère à l’œuvre, japonaise d’origine. Dans son pays natal, elle y avait appris tout ce qu’il y avait à savoir sur ce breuvage, ainsi que les cérémonies qui l’accompagnaient. Ainsi, elle était devenue une préparatrice hors pair, et avait ramené tout son savoir dans ses valises en Europe. Qui plus est, sa génitrice avait également en sa possession quelques diplômes sur l’art de la botanique, lui permettant aisément de se préparer du thé en toutes connaissances de cause. Ce n’était pas pour rien qu’elle arrivait à faire tourner son activité de magociagricultrice avec son mari.

Par la suite, sa mère lui avait transmis tout son savoir-faire, comme le voulait la tradition nippone. La métisse connaissait ainsi parfaitement les rouages de la cérémonie du thé ainsi que la manière de le préparer. Elle avait bien sûr son propre kimono de cérémonie et tout ce qui pouvait aller avec, mais cela lui était bien inutile à Ilukaan, les consommateurs de théine étant rares, et elle doutait qu’ils veuillent se prêter à un tel protocole. Pourtant, la brune avait tout ce qu’il fallait dans ses bagages pour organiser un tel évènement, probablement par nostalgie maternelle.

Néanmoins, la cinquième année préparait tout de même régulièrement différentes sortes de thé, que ce soit pour sa propre consommation ou celles de ses camarades polis et appréciés de sa personne. Elle arrivait assez aisément à se procurer les différents ingrédients nécessaires, et pouvait donc facilement préparer ses boissons. Revitalisantes, contre le coup de blues, contre les insomnies ou la nervosité, il y en avait pour tous les genres et tous les maux. Bien sûr, ça ne remplace pas des soins médicaux et il faut un peu y croire et être régulier pour espérer un quelque conque résultat. Plus simple d’obtenir un effet néfaste que bienfaisant donc. Cela restait cependant un art que la jeune fille prenait beaucoup de plaisir à s’en divertir, malgré la complexité du processus.

Un regard impressionné, encore un de plus à son tableau de chasse. Non que Mikasa les cherchait, elle les collectionnait plus, de part ses capacités. L’allemande n’a jamais essayé d’avoir l’attention portée sur elle de quelque manière que ce soit. Du moins, elle n’en avait jamais ressenti le besoin, excepté les rares fois où on ne la remarquait pas alors qu’elle avait un service à demander. Avoir les regards braqués sur la métisse, très peu pour elle ; elle ne prenait cette place que lorsqu’il fallait que qu’une personne la prenne. La célébrité n’apportait jamais rien de bon selon la Cerviralde, aussi discrète se faisait-t-elle.

C’était tout simplement comme ça. La cinquième année épatait souvent son entourage, de manière involontaire. Certains par sa réactivité, voire impulsivité, plutôt insoupçonnée chez la jeune fille, en raison de son tempérament calme en règle générale. D’autres, comme Shikamaru, étaient surpris par son efficacité. Pourtant, de son point de vue à elle, Mikasa ne faisait rien d’extraordinaire. Elle se contentait juste de faire ce qu’elle avait à faire, rien de plus. La métisse n’avait jamais vraiment eu conscience de son endurance et de ses capacités de travail, bien qu’elle ne se sous-estimait pas. Elle connaissait ses limites, c’est tout. Enfin, l’allemande pensait que tout le monde devrait faire de même, mais tout cela était une autre paire de manches.

Certes, peut-être ne naissaient-t-ils pas tous égaux, et ne possédaient pas les mêmes capacités, mais cela ne devait pas les empêcher d’essayer de fournir autant d’efforts. Néanmoins, chacun voulait ce qu’il voulait, et c’était tout ce qui importait, tant qu’il ne faisait pas de mal à la famille de la cadette.

« Effectivement, on peut dire ça. C’est celui que je gagne à ne pas roupiller lorsque je dois travailler. »

Sur ce, elle tourna les talons pour de bon, franchissant le seuil de la porte de la salle d’informatique, laissant son aîné à ses propres réflexions désormais.