Quand tu avais éteint ton téléphone dans la semaine, Neil, pour faire plaisir à Cassiopea, tu t’étais douté qu’il y aurait à un moment ou un autre des représailles. On ne désobéissait pas à Andrew Minyard impunément. Mais même en sachant que tes actes auraient des conséquences, ça ne t’empêchait pas de défier son autorité de temps en temps. On t’avait toujours appris à t’écraser, Neil, à courber l’échine devant plus fort que toi. Mais tu savais qu’avec le blond, tu ne risquais rien. Vu le nombre de fois où il avait menacé de te tuer, si tu étais toujours vivant aujourd'hui, c’était qu’il ne comptait pas vraiment passer à l’acte. Tu savais très bien qu’il en serait capable, mais Andrew Minyard ne trahissait jamais ses promesses. Et sans que tu n’en saches vraiment la raison, il avait promis de te protéger tant qu’il te trouvait intéressant. Mais rien n’était intéressant chez toi de prime abord. Une apparence basique, une seule et unique passion poussée à l’extrême… À ton avis, tu étais quelqu’un devant qui on passe et qu’on oublie. C’était même le but que tu recherchais, tu ne devais être qu’un figurant dans la vie des autres.

Mais Andrew avait l’air de voir à travers tes mensonges comme à travers tes lentilles. Tu ne te souvenais plus du nombre de fois où vous aviez eu des discussions houleuses sur pourquoi tu en portais. Tes mensonges pré-faits ne fonctionnaient pas sur lui. L’excuse de la mauvaise vue ne lui convenait pas, car il avait réussi à déceler qu’elles étaient colorées. Comment il l’avait su, tu n’en avais aucune idée. T’étais-tu trompé de teinte un jour en les commandant ? Avais-tu relâché ta vigilance et ton attention un jour où tu avais substitué un sort de coloration d’iris à tes lentilles pour reposer tes yeux ? Tu n’en avais aucune idée, mais il n’avait pas l’air de connaître la vraie couleur de ton regard et cette idée te soulageait un peu. Il savait que tu cachais des secrets, mais pas lesquels. Tu ne savais pas si cela devait t'inquiéter ou non et si continuer à traîner avec lui était une bonne idée, mais Andrew ne te laisserait jamais t’enfuir sans avoir le fin mot de cette histoire, tu en étais sûr. Alors autant continuer de jouer avec lui, en gardant la situation sous contrôle au maximum. Enfin, autant que tu le pouvais avec Andrew Minyard dans l’équation.

Toujours est-il que c’était avec tes vêtements délavés et ternes que tu retrouvas le lupy après votre entraînement de la soirée. Il t’avait demandé de venir avec lui, pas de porter les fringues qu’il t’avait achetées. Il avait tenté de te lancer sept souafles dans la tronche, même s’il n’avait réussi que cinq fois, alors tu n’allais pas être coopératif ce soir. Il n’avait qu’à faire des efforts s’il voulait que tu en fasses aussi. Et tu savais que ces souafles n’étaient pas la punition pour avoir éteint ton téléphone, vu que vous en aviez parlé l’après-midi même. C’était ce soir qu’il allait te faire payer. Peut-être qu’il allait finalement vraiment te noyer dans la mer pendant votre balade sur la plage, cette fois-ci.

- Tu ne m’as pas demandé de les mettre aujourd'hui, Andrew. Si tu ne me dis pas clairement les choses, je ne peux pas savoir ce que tu veux.

Est-ce que tu jouais avec le feu, Neil ? Bien sûr. C’était dangereux de contrarier Andrew, surtout quand il t’attrapait par le menton pour essayer de sonder ton âme avec son regard ambré, mais tu ne voulais pas le laisser gagner. Il finit par froncer les sourcils et abandonner, avant de se mettre en route vers Bloombury. Tu le suivis donc sans un mot, attendant de voir à quelle sauce tu allais être mangé. Tu laissais d’ailleurs Andrew faire toute la conversation, alors que vous marchiez jusqu’au Poutine King. Il te parlait d’une exposition qui ne t’intéressait absolument pas, mais au moins il n’y eut pas de blanc gênant pendant le trajet. Enfin, ce n’est pas comme si tu trouvais le silence gênant, quand tu étais avec Andrew. Mais lui, il avait besoin de parler, alors tu le laissais faire sans trop chercher à comprendre pourquoi. Rapidement tu te retrouvas assis face à lui dans le fast-food, à votre table habituelle, votre commande tout aussi habituelle sur un plateau entre vous. Tu croquas dans ton burger sans te préoccuper de tes frites qui disparaissaient pour aller rejoindre la glace d’Andrew. En cinq ans, tu avais eu le temps de t’habituer à le voir avaler cet étrange mélange, même si tu n’étais pas prêt à sauter le pas et à tester toi aussi les frites trempées dans la glace.

- Ils en ont de la chance, moi j’ai reçu plus qu'un souafle sur deux aujourd'hui.

Tu n’essayais même pas de convaincre Andrew de ne pas viser ses coéquipiers en pleine tête avec le souafle. Ce n’était pas tes affaires, tu n’étais pas dans l’équipe des Lupy toi. Tu arrivais déjà à le faire régulièrement s’entrainer avec toi et c’était déjà pas mal. Alors que tu espérais pouvoir finir ton repas dans le calme, les médicaments d’Andrew se mirent à faire effet. Tu le voyais à son sourire. Il ne disparaissait de son visage que quand son traitement commençait à ne plus faire effet. Tu trouvais même que c’était les moments les plus agréables à passer avec lui. Juste avant les repas, quand il n’avait pas encore avalé ses pilules. Il ressemblait presque à un adolescent normal… Enfin, aussi normal que pouvait être Andrew Minyard. Tu l’écoutais donc t’exposer sa fameuse idée alors que tu savourais tes dernières frites, sentant déjà que c’était une mauvaise idée.

- On va avoir des problèmes Andrew, si on fait ça. Tu le sais, non ?

Tu plongeas ton regard dans celui du blond mais… Il avait l’air bien trop déterminé. Tu n’avais aucune chance de le raisonner, Neil, alors autant essayer de limiter au maximum la casse.

- Quoi que je te réponde, tu y iras de toute façon, hein ? Comment comptes-tu procéder pour entrer sans te faire attraper ? Et pour ne pas qu’on te reconnaisse ? Est-ce que tu sais au moins s’il y a des caméras de surveillance ou des vigiles ?

Puis tu ne pouvais pas utiliser ta magie hors de l’école, Neil. Tu étais mineur et encore porteur de la trace. Ça risquait vraiment de vous compliquer la tâche en cas de pépin. Dans quoi allais-tu encore t’embarquer… Tu n’y étais pas encore et tu regrettais presque déjà.

Tu finissais ton repas en écoutant son plan, Neil. Une fois qu’Andrew avait une idée en tête, il était impossible de la déloger, tu le savais. Tu notais quand même que ses idées les plus délirantes arrivaient souvent après la prise de ses médicaments, comme s’ils avaient le pouvoir de lui faire croire qu’il était capable de tout réaliser. Ou au moins, le pouvoir de ne pas le faire penser aux conséquences. Tu te demandais si ses plans foireux allaient disparaître avec son changement de traitement cet été, tout comme son sourire effrayant. Tu n’étais pas assez bien calé en psychiatrie pour savoir quelles étaient les différences entre des médicaments pour la dépression et pour la bipolarité. Tu ne connaissais pas non plus en détail les différences entre ces deux pathologies. Tout ce que tu savais, c’était qu’Andrew allait peut-être changer pendant les vacances. Cette idée te dérangeait. Et s’il ne te trouvait plus intéressant ? Et s’il ne pouvait plus jouer au Quidditch avec ses nouveaux cachets ? Mais le principal, c’était sa santé. Alors tu espérais juste qu’il irait mieux, peu importe les impacts que ce mieux aurait sur toi. Tu ne savais pas si tu pouvais qualifier Andrew d’ami, vu qu’il te détestait et que tu avais de toute façon du mal à ranger les gens dans cette catégorie, mais tu pouvais au moins dire que tu étais proche de lui. Assez proche pour que son bonheur te préoccupe plus que votre relation.

En tout cas, même si ces idées farfelues suivaient toujours sa prise de médicaments, elles n’en étaient pas moins dénuées de logique. Il réfléchissait vraiment à la faisabilité du projet, il cherchait de vraies solutions pour pallier aux difficultés que vous pourriez rencontrer dans la réalisation de son plan. Tu aurais préféré qu’il crochète la serrure, vu qu’il était plus doué que toi dans ce domaine, mais au moins il ne comptait pas utiliser sa magie pour ouvrir la porte. Ça ne servait à rien d’essayer d’être discret si c’était pour laisser votre signature magique derrière vous. Les sorciers étaient moins habitués aux méthodes moldues, alors ça serait sûrement plus déroutant pour eux qu’un sortilège pour ouvrir la porte s’ils cherchaient à remonter jusqu'à vous. Puis avec des gants, vous ne laisseriez aucune trace.

- Il faudra penser à mettre des gants, j’en ai si besoin. Et j’ai un masque aussi.

Tu n’expliquas pas pourquoi tu avais un masque sur toi, Neil. Ton sac de sport était toujours rempli d’objets insolites, quand on ne connaissait pas ton passé. Les vieilles habitudes et principes de ta mère te collaient à la peau, même des années après. Tu n’étais plus en cavale depuis 7 ans, mais tu étais toujours prêt à fuir à tout moment. Des gants pour ne pas laisser de traces de ton passage, un masque pour dissimuler ton visage, des vêtements usés et ternes pour passer inaperçu, des sweats à capuche pour camoufler tes cheveux le temps de faire une nouvelle teinture… Et ton kit de crochetage, au cas où. Tu ne pensais pas avoir vraiment à t’en servir un jour.

- Et tu pourras me transformer en blond, si ça t’amuse. Mais le brun reste une couleur plus passe partout.

C’était pour cela que tu étais brun aux yeux marrons, Neil. Andrew voulait vous métamorphoser pour entrer incognito dans le musée, comme si c’était un jeu, alors que c’était ce que toi tu faisais tous les jours pour rester invisible. C’était pour cela que tu portais des lentilles et que tu utilisais de la teinture, mais même si Andrew savait pour tes yeux, il n’avait aucune idée de pourquoi tu faisais cela. Il ne se rendait pas compte qu’il s’amusait de ce qui avait été pendant trois années ton quotidien, et qui te suivait toujours aujourd'hui. Mais tu ne t’en formalisas pas, finissant ton burger pendant qu’il allait chercher vos glaces. La nuit allait être longue, alors autant profiter au maximum des derniers instants de répit que tu pouvais grappiller.


- Il faut être prêt à toutes les éventualités, Minyard. Surtout quand on traîne avec toi.

Votre balade sur la plage n’avait malheureusement pas fait changer Andrew d’avis. Même après une glace et une cigarette, il était toujours aussi déterminé à pénétrer de nuit dans le musée. C’était d’ailleurs pour cela que vous étiez tous les deux devant une porte de service du bâtiment, faisant semblant de discuter alors que tu maniais discrètement tes crochets pour la déverrouiller. Tu aurais aimé pouvoir laisser une autre cigarette se consumer entre tes doigts actuellement, pour apaiser le stress que tu ressentais à l’idée que tu étais en train de faire une grosse connerie. Mais ça aurait été prendre le risque de laisser une preuve de ton passage. Alors tu te contentais de l’odeur à la fois désagréable et réconfortante du tabac froid qui s’était accrochée à vos vêtements. Soudainement, le cliquetis de la serrure te fit comprendre que tu avais réussi ton coup. Tu relevas les yeux vers lui, peu habitué à le voir en brun, même si sa chevelure était dissimulée sous sa capuche. Il comprit sans que tu ne dises un mot que tu avais réussi et lança un sort pour vous faire disparaître le temps de passer la porte.

Ton premier réflexe une fois à l’intérieur fut de chercher les caméras, les issues de secours et tous les signaux qui pourraient t’indiquer la présence d’un vigile ou d’un système de sécurité. Tu avais presque l’impression que vous étiez en train de commettre un crime alors que vous ne comptiez rien faire de mal à part regarder. Enfin, si Andrew ne changeait pas de plan pendant votre petite visite nocturne du musée. C’était d’ailleurs beaucoup moins accueillant de nuit, comme lieu.

- Quelles sont les salles et les œuvres que tu veux aller voir ?

Autant ne pas perdre de temps. Plus vous restiez et plus vous risquiez de vous faire prendre. Tu n’avais vraiment pas envie que cette petite escapade remonte aux oreilles de ta famille. Puis plus longtemps tu restais ici, plus tes préfets auraient le temps de se rendre compte que tu étais hors de ton dortoir après le couvre feu.

- La plupart des lampes éclairant les œuvres sont éteintes en plus. On ne va rien voir. Tu aurais vraiment mieux fait de revenir en journée.

Ce sortilège plairait à ta mère, Neil, il vous aurait été bien utile pendant vos années de cavale. Ce fut la première pensée qui te traversa l’esprit quand Andrew t’expliqua le fonctionnement du sort de sa composition. Mais rapidement, une deuxième pensée s’insinua dans ton cerveau. Ta mère te tuerait si elle savait pour quoi vous étiez en train d’utiliser ce sortilège de génie. Elle t’avait dit de rester discret, de ne pas faire de vagues et de te fondre dans la masse, et toi, à la première occasion venue, tu pénétrais en pleine nuit dans un musée. Elle serait furieuse si elle le savait, il ne fallait pas que vous vous fassiez prendre. Tu n’eus pas le temps d’y réfléchir plus de toute façon, vous étiez déjà dans le bâtiment et tu suivais Andrew entre les œuvres.

- Non, jamais. Ce n’est pas trop mon truc les musées.

Tu avais beau avoir traversé des dizaines de villes et de nombreux pays, tu n’avais jamais visité les musées et autres lieux de culture. Tu n’étais pas là-bas pour faire du tourisme mais pour survivre. Tu aurais pu voyager un peu pour le plaisir avec Stuart, c’est vrai. Mais entre son travail, tes rendez-vous chez le psychomage et les visites au parloir, c’était compliqué. Puis ton parrain était plutôt casanier, ce qui t’arrangeait. Tu avais déjà fait beaucoup trop de longs trajets inutiles dans ta vie, alors que tu n’avais que seize ans. C’était donc uniquement depuis ton entrée à Ilukaan que tu avais de nombreux lieux de culture à ta disposition, entre ceux présents à Bloombury et les voyages scolaires. Mais selon ta nouvelle identité, tu étais le fils d’une trafiquante d’art. C’était la fausse raison pour expliquer que ta mère était inculpée. Alors ça la foutait un peu mal si les gens se rendaient compte que tu ne connaissais vraiment rien aux tableaux et autres productions artistiques. Ta couverture était déjà mise à rude épreuve avec les élèves fouineurs de l’école, tu n’allais pas en plus leur donner du grain à moudre.

- Moi qui pensais que monsieur était un génie.

En tout cas, tu baissas directement le ton. Savoir que quelqu'un d’autre était avec vous dans le musée te rendit beaucoup plus méfiant et sur tes gardes. Vous n’aviez pas le droit à l’erreur. Les statues et les tableaux bougeant ne te surprirent pas car tu avais toujours vécu dans un environnement sorcier, par contre. Même si ce n’était pas exactement la même chose, il n’y avait que des photos mouvantes chez Stuart. Tu ne trouvais pas ça plus perturbant. Tu longeas donc la rangée de tableaux de sorciers célèbres, te fichant clairement de la plupart d’entre eux. Tu t’en foutais de savoir qui avait inventé la pimentine ou le premier vaccin contre la dragoncelle. Mais par contre, quand vous fûtes face à Bowman Wright, une lueur d’intérêt illumina ton regard. Tu te demandas pendant une seconde si Andrew avait fait exprès de t’emmener devant ce tableau vu ta passion pour la Quidditch mais… Pourquoi ferait-il cela, franchement ?

- Tu sais qui c’est ? C’est le mec qui a inventé le vif d’or. Avant, les attrapeurs devaient pourchasser un vrai oiseau, le Vivet doré. C’était souvent si brutal que l’oiseau mourait presque écrasé à chaque match. Il a sauvé l’espèce de l’extinction en inventant ce truc. Le vif vaut d’ailleurs 150 points, car lors du premier match de Quidditch où un Vivet doré a été lâché, on avait promis 150 gallions à celui qui serait capable de l’attraper. Même les gardiens seraient sortis de leurs buts pour tenter leur chance.

Tu aurais pu parler pendant encore des heures du Quidditch et de son histoire, mais tu savais que ça n'intéressait pas le lupy. Enfin c’était ce que tu pensais, jusqu'à ce qu’il te demande de venir voir l’exposition temporaire avec lui, qui était sur le Quidditch.

- C’est pour cela que tu voulais m’emmener avec toi ?

Tu ne répondis pas quand il te demanda si ça te gênait de finir la visite, te dirigeant directement vers la dernière salle. Maintenant que vous étiez ici, autant en profiter pour tout voir. Ça serait bête de faire demi-tour maintenant.

- Elle est sur quoi exactement, l’exposition temporaire ? Sur les balais et autres accessoires utilisés au Quidditch ? Sur les joueurs ? Sur les équipes ? Sur l’évolution du Quidditch à travers les âges ? À moins que ce ne soit sur le créateur du Quidditch ? Ou peut-être sur le Quidditch à travers le monde ? Ou ses diverses représentations ?

Est-ce que tu t’emballais un peu ? Peut-être. Si on voulait te faire parler pendant des heures, il suffisait de te lancer sur ce sport de balai. C’était ton obsession. Tu lisais et tu regardais tout ce qui concernait de près ou de loin le Quidditch.

- D’ailleurs, même en géopolitique le Quidditch a son importance. Il peut permettre de résoudre certains conflits par le sport… Les moldus font pareil avec les jeux olympiques et le football. C’est vraiment quelque chose d’universel. Et il y a même une guerre qui a commencé à cause du Quidditch en Amérique latine. Bon, il y avait déjà des tensions entre les deux pays, mais le match a mis de l’huile sur le feu et le comportement des supporters a totalement fait dégénérer le truc.

Tu ne savais vraiment pas quoi répondre à cela, Neil. Andrew avait voulu t’emmener au musée avec lui parce qu’il savait qu’une exposition te plairait. Pourquoi le blond voudrait-il te faire plaisir alors qu’il te détestait ? C’était illogique. Surtout qu’il te soutenait aussi qu’il détestait le Quidditch, quand tu essayais de lui faire avouer qu’il s’amusait en jouant. Alors pourquoi avait-il amené une personne qu’il détestait à une exposition sur un sport qu’il était censé détester ? Ça n’avait aucun sens. Enfin, tu étais persuadé au fond de toi qu’Andrew aimait le Quidditch, au moins un tout petit peu. Il ne te laisserait pas le traîner sur le terrain plusieurs fois par semaine sinon. Puis cette lueur dans son regard quand vous vous défiiez seul à seul aux tirs au but… Le Quidditch devait lui faire ressentir quelque chose, il ne voulait juste pas se l’avouer. Mais pourquoi toi et pas Kevin ? Il était fou du Quidditch lui aussi. Après, il est vrai que votre ami n’aurait jamais accepté de pénétrer dans un musée de nuit… Kevin était trop un monsieur parfait pour faire des bêtises.

Cela devait donc être un concours de circonstances, Neil, si Andrew t’avait choisi pour venir voir cette exposition avec lui. Il voulait un passionné avec qui passer sa visite, capable de pénétrer dans un musée en pleine nuit, et c’était tombé sur toi. Peu de monde remplissait ces conditions à Ilukaan de toute façon. C’était la seule explication qui avait du sens, à tes yeux. De toute façon, tu décidas d’arrêter de t’encombrer l’esprit avec ces réflexions et de profiter de l’exposition. Enfin, il fallait déjà sortir de la salle principale pour ça. Alors que vous passiez devant des tableaux qui ne t’intéressaient point, tu posas à Andrew des questions sur ce que vous alliez voir ensuite, trop impatient pour attendre silencieusement. Mais le blond te ramena au calme en te rappelant la présence du vigile. L’ambiance était tellement tranquille que tu avais presque oublié pendant quelques secondes que vous étiez en train de faire une énorme connerie.

Toujours est-il que quand la salle de l’exposition temporaire s’ouvrit à vous, Neil, tu remis au second plan dans ton esprit l’illégalité de votre visite. C’était incroyable. Tu n’aurais jamais pensé voir autant d’objets et de choses liés au Quidditch dans la même pièce. On pouvait voir l’émerveillement dans tes yeux. Tu regardais le terrain de Quidditch avec autant d’extase lors de ton arrivée à Ilukaan. Peut-être qu’Andrew avait raison quand il te traitait de junkie. Ce sport était comme une drogue pour toi, une raison de vivre. Tu ne pensais qu’à ça, quand tu n’étais pas sur un balai, tu attendais avec impatience le moment où tu pourrais de nouveau voler… Si Dalida aurait voulu mourir sur scène, c'était sur un terrain de Quidditch que tu aimerais passer tes derniers instants, Neil.

Tu ne savais pas par où commencer, Neil, alors tu t’approchas au hasard d’une des nombreuses vitrines de cette salle, observant son contenu presque religieusement. C’était la vitrine consacrée aux souafles. Tu connaissais presque déjà tout sur cette balle, alors tu n’avais pas besoin de lire les écriteaux. Tu montras à Andrew la première balle, dont la couleur n’était pas celle écarlate d’aujourd'hui. De plus, ce souafle était plein de trous et de lanières de cuir. Il ne ressemblait à vrai dire en rien aux balles utilisées de nos jours, si ce n’est sa taille qui restait identique.

- Les premiers souafles ressemblaient à cela. Ça change, hein ? Ils sont devenus rouges pendant un hiver, parce que les joueurs avaient du mal à repérer la balle.

L’écriteau explicatif donnait la date. 1711. Mais tu ne t’encombras pas de cette donnée inutile.

- Ce portrait, là, c’est Daisy Pennifold. C’est à elle qu’on doit le fait que le souafle ne finisse pas tout le temps par terre. Elle a créé un sortilège pour ralentir sa chute car elle en avait marre de toujours devoir aller le chercher au sol. C’est pour cela que les souafles portent son nom maintenant. Mais ce n’est pas le seul sort lancé sur les souafles. Ils ont attendu le dix-neuvième siècle pour les enchanter avec des sortilèges d’empogne. Ça permet de faciliter la prise à une main. C’est pour cela que les lanières et les trous bizarres ont disparu.

C’était fascinant de voir comment la création de nouveaux sortilèges avait impacté le Quidditch. Tu te demandas pendant quelques secondes si ton sport préféré allait connaître une nouvelle évolution de ton vivant. Est-ce qu’on pouvait rendre mieux le Quidditch que ce qu’il était déjà ? Tu en doutais, Neil.

- Tu veux qu’on regarde s’il y a une vitrine sur les gardiens ?

Tu levas les yeux au ciel, Neil, quand Andrew fit remarquer que tu retenais bien les choses qui concernaient le Quidditch. Les paroles du blond oscillaient entre compliments et insultes. Il était impressionné par ta capacité à réciter toutes ces connaissances, mais il ne pouvait pas seulement parler de cela bien sûr. Ça serait trop gentil pour l’air de méchant qu’Andrew se donnait. Il fallait une petite pique pour que le compliment passe plus inaperçu.

- Oui, j’enlève tout ce qui est futile de ma caboche. C'est pour ça que j’oublie tout le temps que tu ne veux pas que je t’accompagne à Bloombury avec mes “vêtements de clochard”.

Tu avais essayé d’imiter la voix d’Andrew sur la fin de la phrase, parce que tu les trouvais très bien tes vêtements, toi. En tout cas, tu te reconcentras sur la vitrine et les merveilles qu’elle contenait.

- Le nom complet des souafles avec lesquels nous jouons actuellement c’est les souafles de Pennifold.

Mais peu de gens savaient cela, il fallait vouloir se plonger dans l’histoire du sport pour s’intéresser à ce genre d'informations. Andrew aurait dû venir avec Kevin dans cette exposition, plutôt que toi, Neil. Il était passionné d’histoire et de Quidditch. Il aurait sûrement eu plus d’anecdotes que toi à raconter. Toujours est-il que tu haussas les épaules en te dirigeant vers la vitrine des gardiens. Andrew râlait qu’il n’y aurait sûrement rien à voir mais tu n’étais pas d’accord. Tous les postes étaient important au Quidditch, le rôle de gardien ne faisait pas exception. Eux aussi avaient dû évoluer avec le temps, avec les avancées magiques et technologiques, au fil des nouvelles fautes et des nouvelles règles. Tu observas donc les objets exposés, autant les articles que les photos et les écriteaux.

- Ne dis pas de bêtises, c’est intéressant. Tu aurais adoré pouvoir jouer comme les anciens gardiens, c’est un style de jeu qui te ressemble. Puis je pense qu’il doit y avoir une vitrine plus loin sur les figures au Quidditch. Les gardiens sont plutôt forts pour arrêter les souafles de manière étrange.

Vous vous dirigiez vers les balais, pendant que vous parliez, ne faisant pas du tout l’exposition dans l’ordre. Heureusement que vous étiez venus en pleine nuit, ça aurait été infernal pour les autres visiteurs de profiter de l’exposition avec vous papillonnant aléatoirement de vitrines en vitrines. Tu souris, amusé, en voyant l’écriteau sur les 700 fautes commises lors du même match de Quidditch et les 7 règles qui en ont découlé. L’évocation d’une hache te fit légèrement grimacer, mais les autres fautes étaient tellement loufoques que tu trouvais ça plutôt amusant.

- Tu n’aurais jamais eu l’idée pour ces 7 fautes là, mais je suis sûr que tu as déjà eu des idées similaires pour les 693 autres fautes.

Tu aurais aimé assister à ce match quand même, Neil. Il fallait y aller pour faire 700 fautes… Peut-être qu’une personne ayant vécu ce match avait mis ses souvenirs en bouteille pour que le monde entier puisse les regarder en utilisant une pensine ? Ça te semblait trop beau pour être vrai, mais tu espérais que ça le soit. En tout cas, si les souvenirs de ce match avaient été conservés, l’exposition n’en faisait mention nulle part. Donc les chances étaient vraiment très minces. Tu suivis Andrew vers la vitrine des balais, un peu moins émerveillé que lui devant le Oakshaft 79. Certes, il avait appartenu à Jocunda Sykes et ses exploits étaient impressionnants, mais les Oakshaft n’étaient vraiment pas de bon balais pour jouer au Quidditch.

- C’est un balai résistant et parfait pour les vols d’endurance, mais sa maniabilité est dégueulasse. Jamais on en verra sur les terrains de Quidditch. C’est pour les gens qui préfèrent la sécurité et la stabilité, pas pour les sportifs. On ne peut pas tourner à grande vitesse avec ça.

Ton regard était d’ailleurs plutôt attiré par le Brossdur 1. Tu le désignas d’un mouvement de tête pour le montrer à Andrew.

- Ça, c’est un balai fait pour les athlètes. La compagnie des balais Brossdur a été la première à produire des balais spécialement conçus pour les joueurs de Quidditch. Ils ont d’ailleurs eu le monopole pendant trois ans, avant que les Comètes 140 arrivent sur le marché. Tous les joueurs avant ça avaient des Brossdur 1.

Tu continuas pendant un long moment de lui parler des balais, mais surtout de ce que chaque modèle avait apporté au milieu du Quidditch. Le sortilège de freinage, la possibilité d’atteindre des altitudes de plus en plus importante, l’amélioration de la maniabilité… Tu aurais pu passer des heures à en parler, si Andrew n’avait pas soudainement tendu sa main vers un objet exposé, le touchant du bout des doigts et déclenchant une alarme. Merde.