L'eau chaude coule le long du dos de Daniel, les gouttes épousant la moindre de ses formes de jeune adolescent. Ses muscles, encore peu formés, l'en remercient. La séance d'aujourd'hui fut intense, à moins que ce ne soit la rentrée qui ait rendu les efforts fournis plus importants. Après tout, le retour des cours de l'école et des dortoirs apporte son lot de tension.

D'autant plus lorsque son camarade de chambre prend plaisir à vous faire tourner en bourrique. Il n'y a pas à dire, Belphegor a le don de le faire suer, bien plus que le sport et les cours de potions. Le seul mérite qu'il possède est celui de bien porter son prénom, aussi particulier qu'il soit. Il est vraiment infernal.

Toujours est-il que Daniel n'apportait aucune attention à ses soucis de chambrée cet après-midi. Non, il profitait du temps libre que lui accordait son emploi du temps pour reprendre la pratique du patin à glace, son exutoire, sa bulle, ses ailes. Enfin, reprendre n'est pas le mot exact, puisqu'il n'a pas totalement arrêté durant les grandes vacances d'été. Seulement, ce n'était que du divertissement ces derniers mois. Désormais, les entraînements sont plus sérieux et complexes. Cela lui a fait le plus grand bien, peu importe les courbatures qui l'attendent à la sortie des vestiaires.

Alors qu'il sort de la cabine, il entend une sonnerie caractéristique émaner des vestiaires. Il s'empresse alors de se sécher et d'enfiler des vêtements avant de se diriger vers son casier. Pourvu que ce ne soit pas une notification qui indique qu'il n'a pas rendu un devoir à temps, ou n'importe quelle autre mauvaise nouvelle. Il n'y croit pas trop. Toutefois, il est très curieux de connaître la personne qui possède un très bon timing et pourquoi elle l'a contacté.

Un sourire nait alors ses lèvres : il ne s'agit de nulle autre que Lilwenn, son amie ! Cette dernière lui propose de prendre leur goûter dans le parc, un petit rituel que possède les deux jeunes sorciers. Cela emplit le coeur du canadien de bonheur, qui exécute une petite danse de la joie. Tant pis pour les rageux qui s'amuseraient à dire que cette réaction est celle d'une personne ayant un date avec la personne qu'elle aime. Il n'est pas le seul à apprécier de passer un bon moment avec quelqu'un qu'il apprécie énormément, si ?

Oh, mais il n'a pas de temps à perdre ! Après une lecture plus attentive du message, il réalise seulement après quelques minutes qu'il ne lui reste qu'un peu moins d'une heure ! Aussi, il se dépêche de rejoindre la Maison Bleue en courant. Une fois sur place, il souffle un bon coup.

Avant de commencer quoique ce soit, il replace sa pompe correctement. Il peut enfin s'en défaire lorsqu'il fait du sport ou qu'il est sur la glace, mais rarement dans d'autres cas. Là est le quotidien, diabétique depuis son enfance.

Alors qu'il s'apprête à songer quel présent ramener à l'anglaise pour la remercier de lui offrir leur pause de l'après-midi, cette dernière l'avertit de la forte teneur en sucre de ses gâteaux. Daniel lui répond immédiatement que ce n'est pas grave, il sait comment gérer, puis que cela ne gâchera en rien ce moment entre eux. Si, à son arrivée à Ilukaan, il avait eu droit à de nombreuses séances chez l'infirmière et un régime diététique adapté, il a également appris à gérer l'ingestion de nourriture trop sucrée, notamment pour se fondre dans la masse, mais aussi pouvoir profiter comme les autres d'une pause gourmande.

Une fois ce détail réglé, le sorcier prend la salle de bains du dortoir, remerciant le ciel que Belphegor ne se soit pas endormi dedans. Il se fait beau, très beau. Pour une fois, il apporte un peu plus de soin à ses cheveux ainsi qu'à son visage. Après tout, il s'agit de Lilwenn, Daniel se doit donc d'être impeccable devant une petite princesse de sa trempe. Elle apporte toujours beaucoup de soins, notamment à sa chevelure, que le Bleu ne veut absolument pas la décevoir de ce côté-là. Il faut être plus que présentable devant les demoiselles, surtout lorsqu'elles sont aussi grâcieuses que la Verte ! Un dernier coup d'oeil dans le miroir, tout est bon. Même ses vêtements ne paraissent pas trop froissés.

Il franchit donc le perron des Ursirre avant de prendre la route du parc, non sans contempler le décor que procure l'été indien. Bien qu'il préfère le printemps, le né-moldu ne se lasse jamais des couleurs chatoyantes qui colorent les arbres, la terre et le ciel, de mille et un feux. Ce n'est pas aussi coloré que peut l'être le Carnaval, mais cela est plus apaisant. Daniel aime d'autant plus cette période puisqu'elle est annonciatrice de l'hiver et toutes les habitudes qui l'accompagnent.

Cependant, pour le moment, c'est une habitude des beaux jours que le canadien cherche à accomplir. Alors que son regard bleu océan vagabonde dans la valse chatoyante des arbres, ce dernier s'arrête sur la Cerviralde. Verte au milieu de ce paysage, il lui aurait été impossible de pouvoir ne pas la voir. Le jeune adolescent se dirige alors vers elle, son grand sourire tranchant de nouveau son visage rond d'enfant. Il la salue d'une révérence. Elle est décidément toujours aussi élégante.

"Bien le bonsoir, dame Cerwyn ! Il parait que vous désirez ma présence. Puis-je ainsi me joindre à vous en m'asseyant à vos côtés sur cette nappe ?"

Il rit un peu après avoir prononcé ces quelques mots. S'ils ont l'habitude de se parler de la sorte, cela l'amuse toujours beaucoup.

Son sourire se réchauffe à mesure que le gloussement de la Rose vient déposer de tendres couleurs pastel sur les joues de Daniel. Certes, il a l’habitude de lui adresser un tel langage. Toutefois, les réactions de sa camarade ne le lassent jamais. On peut même aisément avancer qu’elles ne le laissent pas indifférent. Quoi de plus normal ? Entre amis, il est tout à fait normal d’être sensible à l’état de l’autre.

Non, il ne veut pas entendre parler d’amour avec un grand A, comme dans leurs romans de chevalerie. Cela lui semble totalement absurde comme pensée, il ne sait même pas pourquoi son cher et tendre colocataire en ait venu à penser de telles pensées. Sûrement pour l’embêter, comme à son habitude. De toute façon, le narcoleptique n’a pas l’air d’y connaitre grand-chose à ce sujet, vu la limace humaine qu’il représente. Enfin, ce n’est pas la personne à laquelle il doit penser présentement, aussi se contente-t-il de chasser ces pensées comme à son habitude quand cela concerne Belphegor.

Il reporte alors son attention sur Lilwenn et veille à ne rien froisser alors qu’il s’assoit courtoisement à ses côtés, non sans une petite révérence. Dans le doute que la chaleur qui avait empli ses joues quelques secondes plus tôt se soit évaporée, le regard bleu du canadien se pose sur le plateau de la collation qui se trouve devant eux. Cela ne ressemble en rien à ce qu’il a pris pour habitude de manger en termes de pâtisseries. Toutefois, cela lui parait pour autant tout aussi appétissant que celles que sa tante a l’habitude de lui préparer ou de lui apprendre à cuisiner. Néanmoins, si les gâteaux ont l’air succulents, le sorcier préfère accorder son attention à la voix de Dame Cerwyn, afin de comprendre au mieux le nom qu’ils portent. Si la prononciation semble fluide au travers des lèvres de la galloise, les oreilles de Daniel rencontrent quelques difficultés à déchiffrer exactement le nom de ces pâtisseries. Enfin, il n’en dira rien à sa camarade. Il se contente de hocher la tête à ses propos.

"Ils sentent très bons ! Merci de m’avoir choisi pour les déguster ! "

Cela n’a rien de problématique ! Une fois qu’ils auront gouté, il n’aura qu’à mener des recherches personnelles sur le réseau internet sorcier afin de trouver quels cadeaux la Verte a bien voulu partager avec lui ! En plus, en procédant de la sorte, il pourra par la suite s’atteler dans les cuisines pour essayer de tout son cœur de reproduire les biscuits à son tour.

Ainsi, il pourra les offrir à la Cerwyn et lui faire une surprise ! Après tout, peut-être qu’elle possède toujours le mal avec les années ! Ce sont que ses propos ont l’air de sous-entendre. Si Daniel peut amener un peu du Pays de Galles pour lui remonter le moral, alors il est prêt à travailler jour et nuit pour le faire ! Il possède des bases en pâtisseries qui sont aussi là pour ce genre de cas ! Le Griffith n’a jamais été réellement confronté au mal du pays, ce qui ne l’empêche pas d’être conscient que ce n’est pas le cas de la majorité de ses amis. Alors il se démène du mieux qu’il peut pour qu’ils se sentent mieux comme chez eux lorsque cela rentre dans ses cordes. Cela va même au-delà des cordes qu’il possède à son arc lorsqu’il s’agit de Lilwenn, mais les deux sorciers sont proches, donc cela semble tout à fait normal de pousser le vice. D’autant plus alors qu’il l’entend soupirer ! Cela dit, il n’a pas le temps de s’enquérir de son état qu’il se retrouve avec le présent de la Cerviralde dans ses petites mains.

S’il prend bien quelques instants avant de réaliser ce qui vient de se passer, son visage l’a précédé et traduit son état, se colorant d’un rouge semblable à celui des roses que les chevaliers offrent en cadeaux aux princesses. Sauf qu’ici, il semble que ce soit la princesse qui ait déposé la rose sur la joue du chevalier.  

La confusion passée, il ne peut s’empêcher d’arborer un sourire encore plus grand que celui avec lequel il s’est assis, tout en se frottant l’arrière du crâne d’une main. Non, il n’avait pas oublié leur balade sur la plage de cet été. Au contraire, le souvenir s’est particulièrement ancré dans sa mémoire sans que Daniel puisse l’expliquer. Cependant, il doit bien avouer que Lilwenn vient de le prendre au dépourvu. C’est presque à peine qu’il ose offrir le cadeau. Son courage à deux mains pris, il défait alors délicatement le ruban avant de soulever le coffret. C’est alors le souffle coupé que son doux regard se pose sur le bijou siégeant désormais dans sa main, s’attardant sur les moindres détails de finition. Il sait que son amie est douée, mais est ce qu’elle n’est pas bien plus que cela ??

"M-mais c-c’est absolu-ment m-magnifique  ! V-vous êtes s-sûres de ne pas être un m-miracle en p-personne ? "

Cela a dû lui demander de travail énorme ! Pas étonnant que Daniel veuille se donner autant à fond pour être digne de la sorcière. Ce bijou aurait sa place dans sa vitrine dans un musée tant sa beauté submerge le Canadien… Afin que ce dernier ne réalise que contrairement à la Verte, ce dernier est arrivé à leur goûter sans le moindre présent à donner. Quelle honte ! Quel scandale ! Ce n’est pas digne d’un chevalier ! Pas question de le porter avant de trouver rapidement un objet tout aussi précieux à offrir à son amie !

Il essaye de réfléchir rapidement tout en se redonnant un peu de prestance. Seulement, il n’a rien sur lui qui pourrait avoir tout autant de valeur… A moins qu’il s’agisse de valeur sentimentale ! Il tapote alors sa broche en forme de flocon, avant que celle-ci se transforme en danseuse classique de glace, tournant sur elle-même. Ce cadeau lui avait été par sa famille de cœur, dans l’école, alors qu’il venait de gagner sa première compétition dans le monde sorcier ! Elle occupe une place chère dans son cœur. Toutefois, il a une confiance aveugle et absolue envers la Rose, aussi cela lui fait même plaisir de lui la donner.

" Hmm… Vous m’avez eu D-Dame Cerwyn ! Toutefois, je ne peux porter ce collier tant que je ne vous aurais pas offert un présent d’une valeur au moins égale à celui que vous venez de m’offrir. Aussi, en attendant de trouver l’objet qui vous conviendra le mieux, je vous confie ma ballerine de glace. Elle a une grande valeur sentimentale pour moi, et je sais que vous en prendrez bien soin. "

Il pose alors les deux présents à leurs côtés, essayant de calmer son cœur dont le rythme est en pleine montagne russe. Il essaye ainsi de se reconcentrer sur l’objet de sa venue, à savoir une collation. Il observe alors les tasses, tenues gracieusement par la sorcière.  Se remettant droit et veillant à adopter une respiration normale, il se reprend :

" Je ne me fais pas de souci à ce sujet. Si le thé a été choisi en fonction de tes goûts, alors il ne pourra qu’être bon ! Veux-tu que j’ouvre les boîtes de pâtisseries ? "

Il allait définitivement apprendre le gallois.