La mer, le sable, les roches : la plage. Lieu de nature où bon nombre de personnes aiment se rendre pour des raisons qui leur sont propres. Pas même la facette romantique du coréen n’apprécie s’y enfoncer, notamment par sa thalassophobie. L’immensité de cette bouche bleue de la Terre, Colton n’avait jamais réussir les subtilités sentimentales qui poussaient les êtres à s’y jeter. Certains sont même désireux de placer leurs restes dans la gueule de l’animal afin d’y reposer éternellement, prisonniers de ces eaux. Rien qu’à cette pensée, le Strixyst se sent comme aspirer vers le sol.

Ce n’est donc pas pour se rafraîchir les idées au cours d’une baignade ni admirer contempler la surface bleutée que le sang-pur a bravé l’hiver canadien, parfois aussi rude que ses montagnes natales. Oh que non, ce qu’il recherche se trouve même bien en arrière de la plage, lorsque la végétation hibernante prend le pas sur le sol sableux. Cela est quelque peu difficile à discerner par de telles conditions météorologiques, couvrant d’un épais manteau blanc l’horizon brumeux. Toutefois, l’étudiant sait où il pose les pieds ; il est venu faire du repérage avant que la neige ne dissimule toute trace de vie. Se doutant de ce qui allait arriver, le Violet avait été prévoyant lors de son repérage, ayant installé une longue branche solide de plusieurs dizaines de centimètres qu’il avait planté à l’emplacement de son trésor. De la sorte, à moins qu’une grosse tempête ne se dirige précipitamment sur l’île de la Nouvelle-Ecosse, le Strixyst pourrait se repérer sans problème. A moins que des pirates décident de déterrer ce qui se trouve au pied du bois sans le remettre en place, frustrés de repartir bredouilles de leurs recherches.

Fort heureusement, cela ne se produit pas et Colton entrevoit son repère de loin. Il faut dire qu’il n’y a qu’un épais manteau blanc pour seul paysage, le piquet brun se démarque donc aisément. Soulagé de n’apercevoir personne d’autre à l’horizon, tous et toutes probablement emmitouflés devant un bon feu ou profitant des sports d’hiver, il se dirige vers l’objet. Non que son activité soit tenue secrète, seulement le meilleur compagnon du coréen reste l’absence de paroles sur fond sonore d’une nature endormie. Une fois parvenu devant l’emplacement, ses doigts gantés se saisissent de sa fine baguette de chêne blanc. Dans un souffle de brume, Colton transforme la fine branche en une robuste pelle de bois, avant d’entamer la première tâche qu’il s’est confié : déterrer son trésor de pirate terrestre.

Un coup à gauche, un coup à droite. La couverture blanche n'est guère épaisse, aussi le Coréen n'a que peu d'efforts à fournir pour ôter le manteau qui recouvre son trésor. Bien entendu, il aurait pu recourir à la magie pour faire fondre le froid ambiant. Toutefois, le jeune sorcier considère qu'un peu d'exercice physique est la bienvenue durant cette période au cours de laquelle on préfère s'emmitouffler sous des couches de vêtements tout en préparant au mieux ses réserves vitales pour survivre au changement climatique. Non qu'il n'en ait vraiment besoin, le Strixyst surveille son alimentation toute l'année, grand adepte de la philosophie d'un esprit sain dans un corps sain. Seulement, un peu de stimulation de ses muscles lui permet de se réveiller un peu avant l'arrivée du réveil du monde. Colton n'a probablement pas une grande carrure, mais il possède plus de force que son apparence maigrichonne le laisse suggérer.


L' air glacé vient rougir de plus ses lèvres desquelles s'échappent la respiration haletante de l'étudiant. Ses oreilles ont la chance de ne pas subir ces attaques glaciales, couvertes par un cache-oreilles confortable, aux couleurs solaires, cadeau de sa dulcinée. Toutefois, cela ne les épargne pas des bruits de pas qui s'approchent, mettant le sang-pur en alerte.

Que faire pour détourner l'attention ? Il respire un bon coup. Il est inutile de paniquer, la personne peut ne faire que passer et je pas lui prêter attention préférant vacquer à ses affaires. Après tout, elle peut ne pas l'avoir remarquer du tout et simplement faire son trajet d'un point A à un point B.

Du moins, telle est l'hypothèse qu'il préfère privilégier. Aussi, tel un animal effrayé, il se fige quelques instants, dans l'espoir de passer inaperçu. Suspendu dans son geste, il attend plusieurs minutes.

Seulement, son espoir s'avère être vain et l'inconnu semble bel et bien se diriger vers sa personne. Tant pis, il allait devoir faire avec. Avec un peu de chance, cela ne durera pas longtemps.

Il se ressaisit du mieux qu'il peut. Rien ne sert de faire des plans sur la comète, surtout lorsqu'il s'agit des relations humaines. Du moins, selon sa tendre soeur, un vrai poisson dans les eaux des foules.

Il replante alors sa pelle pour la retransformer en branche, qui lui servira de repère lorsqu'il entamera son croquis. Pour le moment, il se contente de préparer son matériel de dessin et le dépose sur le sol. Puis, lorsque la silhouette est suffisamment proche, il se tourne vers elle pour la saluer, avec un sourire poli malgré son embarassement.

"Oh, bonjour. Je ne m'attendais pas à avoir de la visite. En quoi puis-je t'être utile ?"

Oh, son interlocuteur ne semble pas très agréable. Venait-il de le troubler lors d'une balade méditative ? Pourtant, le Coréen ne se souvient pas l'avoir croisé, alors que cela fait plusieurs dizaines de minutes qu'il est sur les lieux. Enfin, maintenant que son interlocuteur se trouve face à lui, il prend le temps de le détailler plus amplement. Colton prête attention à son environnement, encore plus aux détails. S'il ne dit mot, le Violet n'est pas aveugle pour autant, se montrant même assez perspicace.

Ainsi, il se rend compte que le visage de l'étranger ne lui ait pas si inconnu que cela. Il doit s'agir d'une figure populaire du campus, encore une personne que le Strixyst a bien pris soin d'éviter. Toutefois, l'accent méditerranéen du Rouge n'échappe pas à ses oreilles. Précieux indice, il devine quel élève se dresse face à lui. Une petite teigne châtain aux yeux vert olive, un accent aussi chantant que ses propos désagréables : cela ne peut être que l'aîné des Vargas, celui dont Aaron lui a parlé. Une amitié dont l'harmonie échappe toujours au botaniste. Toutefois, il se résout à penser que l'équilibre se trouve parfois dans les duologies les plus surprenantes.

"Oh, je te prie de m'excuser. Je suis Colton Wang."

Est-ce une bonne idée de se présenter à cet individu ? Il ne le sait pas et se contente de suivre les règles de politesse ancrées dans son savoir-vivre.

Si Lovino apparaît de mauvais poil, il est toutefois curieux de l'activité menée par son aîné, ce qui rassure un peu ce dernier.

Après tout, affirmer qu'il n'aurait pas besoin de son aide l'avait un peu décontenancé, aussi bien sur la forme que sur le fond, lui toujours prêt à aider son prochain lorsqu'il le peut. Il ne prend pas mal cette affirmation, persuadé que le Lupy cherche seulement à se protéger et qu'il n'est pas encore prêt à lui faire confiance. Il comprend aisément ce sentiment, lui-même a besoin de beaucoup de temps pour pouvoir accorder sa confiance à un parfait inconnu.

"Il est vrai que je n'enterre rien. Je viens seulement saisir la beauté de l'Hellébore diaphane, qui fleurit en cette période de l'année."

Il fait donc bien face à l'italien maudit. Si Colton n'avait que suivi de loin cette affaire, il est toutefois au courant des quelques mésaventures auxquelles son camarade a été confronté. Il semblerait, qu'au delà de la malédiction de la Tourette, son cadet ait développé la capacité inconsciente qu'est celle d'être un aimant à ennuis. Ou du moins, de les attirer facilement, s'ils trainent dans l'air. Pourtant, le Coréen est du genre à penser que le monde est un équilibre instable, donc que les situations considérées "mauvaises" se produisent pour une raison. Deux options s'offrent au sang-pur en réfléchissant à la question : soit sa précédente vie fut trop heureuse et il en a pu en abuser, soit le bonheur est à venir pour Lovino. Dans un cas comme dans l'autre, il espère juste que le sorcier a laissé ses ennuis au seuil de sa maison.


"Je suis enchanté de faire ta connaissance, Lovino, si tu permets que je t'appelle par ton prénom. A dire vrai, Aaron m'a beaucoup parlé de toi. Pas en mal, si cela peut te rassurer."


Non, il lui a déjà parlé de l'italien, mais sans aucun à priori. Le Strixyst pense que l'attrait de son aîné pour les arts occultes a renforcé le lien entre les deux Rouges, bien qu'il aurait préféré que le canadien reste plus prudent à ce sujet. Néanmoins, Colton ne questionne pas les choix de son grand frère. Si Aaron estime que leur amitié vaut le coup, alors le cadet lui fait une confiance aveugle. Aussi mystérieux que soit le lien qui unit les deux Lupy, il respecte son choix et ne se mêle pas de ses histoires. D'autant que de ce qu'il a compris jusque là, Lovino ne lui a jamais fait cadeau de sa poisse. Il espère que les choses resteront ainsi.



"Avec une pelle, effectivement. Lorsque je suis venu faire du repérage l'autre jour, la neige ne l'avait pas encore recouverte. Toutefois, au vu de la saison, je me doutais que cela pouvait arriver, c'est pourquoi j'ai installé une branche en guise de repère. En revenant aujourd'hui, j'ai transformé le repère en pelle à l'aide d'un sort de métamorphose afin de pouvoir déblayer la couverture neigeuse qui la recouvrait."


Pourquoi ressent-il ce besoin de tout expliquer à son nouvel interlocuteur? Après tout, peut-être que ce dernier ne se soucie guère des détails et ne cherche que l'essentiel. Après tout, il sait que c'est ce que certaines personnes cherchent lors d'une conversation, d'éviter les futilités et de n'évoquer que le strict nécessaire. Pourtant, voilà là une habitude que le sorcier a pris depuis longtemps. Comme si, depuis toutes ces années, il se sentait contraint de devoir expliquer le moindre de ses faits et gestes. C'est plus fort que lui à chaque fois, lui qui fait pourtant parti de ces personnes cherchant à aller à l'essentiel et de se réduire au strict minimum de paroles.


"En parlant du sort de métamorphose, je ferai bien de me dépêcher avant que celui-ci ne prenne fin. Excuse-moi. "

Le Violet est bien conscient que la magie possède aussi ses limites, aussi bien en termes d'espace que de temps. Et ce, d'autant plus puisqu'il n'avait pas prévu de recevoir de la visite au cours de son déblayage. Aussi, il s'active plus vite, chassant le froid qui commençait à s'étendre sur son visage à l'air gêné. Ses coups deviennent plus vifs et plus précis à mesure qu'il creuse, emplissant son corps engourdi d'une certaine chaleur propre à l'effort. A moins que l'aîné se détende peu à peu ? Peu importe. Alors que son outil s'apprête à reprendre son apparence première, Colton termine enfin le travail qu'il a commencé.

Devant le duo s'offre une fleur splendide, digne de celles décrites dans les histoires fantastiques des non-magiques. Ses pétales, à l'apparence d'abord translucide, semblent irisés, formant des jeux de lumière selon l'angle sous lequel on se prend à la contempler. Un bref soupir de soulagement, teinté de buée, franchit les lèvres du Coréen.

Le voici, le trésor de Colton.

Lovino a raison, il n’a aucune raison de lui faire confiance. Pas que Colton ne soit pas digne de recevoir la confiance de qui que ce soit, contrairement à ce que le fait de creuser dans la neige peut laisser imaginer. Non, seulement, ils ne connaissent pas. Du moins, ils ne connaissent qu’au travers des conversations tenues avec d’autres. Encore que, le Coréen doute qu’Aaron ait parlé de lui à quiconque. Il est tout ce qu’il y a de plus banal, de son point de vue.

Qui plus est, le Violet n’accorde pas facilement sa confiance aux autres. A vrai dire, il l’accorde peu, même aux personnes qu’il connait très bien et dont il est proche. Ce qui est un peu triste, mais pourtant véridique. Colton est une personne introvertie qui préfère le calme d’une bibliothèque au vacarme d’une foule. Il en va de même pour son cercle d’amis, il le préfère composé de peu de personnes calmes, restreint, plutôt que d’être populaire et d’entendre mille et une rumeurs toute la journée. Il en entend déjà bien trop à son goût, alors il n’ose imaginer s’il se mettait à sociabiliser. Trop d’informations inutiles à la seconde pour lui.

Puis son éducation n’est en reste concernant sa méfiance envers d’autres humains. Au sein des nobles familles sorcières, les complots sont légion et un allié peut retourner sa veste en un quart de seconde. Bien entendu, le monde n’est pas constitué uniquement d’individus de la sorte, encore moins Ilukaan. Néanmoins, il lui est difficile de se défaire de cette perception du monde et craint de se voir se faire planter un couteau dans le dos n’importe quand, peut-être même par quelqu’un qui l’apprécie, voire de sa famille. Après tout, sa famille lui en fait voir assez pour la savoir capable de n’importe quelle fourberie.
Aussi, ne s’offusque-t-il en voyant l’italien sur la défensive. Il aurait sûrement une réaction similaire, bien que plus polie.

"Il est vrai que tu n’as aucune raison. C’est ton droit et je le respecte."

Au contraire, remarquant son attitude, le Coréen juge alors bon de détailler son activité, afin que le Rouge comprenne de lui-même qu’il ne possède pas de mauvaises intentions. Puis, même s’il ne rend jamais vraiment compte, lorsqu’il s’agit de botanique ou d’entomologie, le Strixyst devient soudainement plus loquace. Sa passion surmonte à chaque fois son introversion. Il se veut pédagogue, sans utiliser de mots très techniques, de crainte de perdre son interlocuteur. Non, il veut que son propos soit clair et concis.

Toutefois, il n’a pas pensé que cela pouvait offenser d’autant plus Lovino. Il se dit alors que le Lupy pense qu’il le prend pour un imbécile, un chérubin incapable de discerner ce qu’il est en train de faire. Oh non, ce n’est pas son but !

"Oh excu-"

Tandis qu’il s’apprête à s’excuser, son aîné renchérit son propos plus vite que le mot « Quidditch », l’incitant finalement à continuer, pour « occuper son cerveau ». Soit… Il continue donc ses explications.

Si Lovino compare son discours à celui distribué lors de reportages, autant dire que Colton ne serait pas si à l’aise s’il devait s’exprimer dans un tel cadre. Non, il n’est vraiment pas à l’aise avec le public et prendre la parole impliquerait de consentir à se faire juger, chose qu’il ne souhaite pas, au vu de son anxiété sociale suffisamment imposante. Toutefois, face à une seule personne, cela est bien plus facile, aussi caractérielle qu’elle soit. Puis, s’il s’est dirigé vers lui en premier lieu et qu’il n’est pas réparti, le discours doit être suffisamment intéressant, non ?

Enfin, une fois la plante alors découverte de son manteau de neige, le Coréen s’empresse de jeter quelques sorts autour d’elle. Certains d’entre eux visent à la préserver, d’autres à mieux s’imprégner de ses formes et de ses couleurs pour pouvoir les retranscrire par la suite sur son parchemin de dessin. Il s’installe ensuite, sortant d’abord son matériel de dessin, relié à certains sortilèges prononcés à l’instant, puis s’accroupissant devant le végétal pour pouvoir dans un premier temps l’esquisser.

"Bien sûr. Dans un premier temps, j’en dresse l’esquisse grossièrement. Quand j’en suis satisfait, j’ajuste les détails avec le matériel adapté. Enfin, je laisse la magie rendre grâce à cette fleur au travers de mon dessin, imprimant le souvenir dans le parchemin."

Il espère que ses explications sont claires, car son temps et sa concentration sont comptés. Fort heureusement, il s’agit d’un procédé qu’il a l’habitude d’utiliser et dont les mécanismes sont rodés. Au moins, il n’a pas de souci à se faire en termes de dessin. C’est ce qu’il se dit en voyant ses crayons voler autour de la plante, comme des plumes à papotes de l’art, interrogeant l’objet du dessin sous toutes les lumières et tous les angles. Il espère que la démonstration calmera alors son interlocuteur.