Physique
Quoique de petite taille et relativement menue, Alice n’est pas ce que l’on pourrait qualifier de discrète. En effet, elle pèse 50 kilogrammes pour 150 centimètres. Pour autant, elle n’a jamais vraiment complexé sur sa taille. Tout d’abord parce qu’elle n’a que quatorze ans et considère donc encore avoir largement le temps de grandir. Et même si elle venait à ne pas prendre plus de quelques centimètres, ça ne la dérangerait pas tellement, ce n’est pas ça qui l’empêchera de s’affirmer. Malgré son jeune âge, elle semble déjà respirer la confiance en soi. Ou bien est-ce de l’inconscience ? Toujours est-il qu’elle a toujours une démarche fière et assurée -et peut-être même un peu bruyante, il est difficile de ne pas l’entendre arriver-. Sinon, on voit de suite qu’elle n’est pas particulièrement coquette. Au contraire, il n’est pas rare qu’elle est un peu de terre ou autre sur ces derniers. L’uniforme lui convient donc très bien, ça lui facilite la vie et lui évite d’avoir à choisir ses vêtements. Quoique elle aurait préféré être lupy pour porter plus souvent du rouge. Mais tant pis, elle a l’occasion de porter tous les vêtements rouges qu’elle veut le week-end.

Sinon, elle possède une longue chevelure brune, qui lui arrive au moins jusqu’aux genoux. C’est d’ailleurs un miracle qu’elle arrive à l’entretenir alors qu’elle est si peu soignée. En réalité, c’est qu’à force de devoir s’épuiser à tout démêler après avoir délaissé cette tâche plusieurs jours, elle a retenu la leçon. Pour autant, elle ne s’embête pas à faire des coiffures élaborées et les attache rarement. Pour être assortie à sa soeur, elle tresse cependant quelques-unes de ses mèches de cheveux. De toute manière, elle ne saurait pas faire beaucoup plus. Cependant, il arrive parfois que sa jumelle la coiffe. Le plus souvent, elle arrange sa chevelure en deux couettes mais ça peut varier selon les envies d’Alice.

Quant à son visage, la première chose qu’on peut dire dessus, c’est qu’il est très expressif. A vrai dire, ça n’a rien de surprenant puisque tout dans la façon d’être d’Alice témoigne de sa spontanéité, que ce soit sa gestuelle ou ses expressions. C’est sa manière de s’exprimer, pour elle qui a du mal à poser des mots sur ce qu’elle ressent et elle n’a pas forcément conscience que ça paraît parfois exagéré. Ainsi, que ce soit la joie ou la colère, ça se lit tout de suite sur son visage. Quand bien même elle se force au calme, ses yeux gris ne mentent jamais, qu’ils s’illuminent de joie face à une personne appréciée ou s’assombrissent face à un individu indésirable. Elle semble incapable d’arborer un visage neutre, cette expression s’en rapprochant le plus étant encore l’ennui, comme ça peut être le cas dans pas mal de matières… On ne peut pas dire qu’elle soit des plus studieuses.

Ainsi, la brune renvoie une image très spontanée. Elle ne fait pas partie de ses personnes qu’on a du mal à cerner. Au contraire, un peu de temps passé à l’observer suffit à la comprendre. Que ce soit sa chevelure constamment ébouriffée ou sa tenue pas plus soignée qu’elle ne le devrait, on comprend vite qu’elle ne se soucie pas du regard des autres. Elle est qui elle est et tant pis si certains n’en sont pas contents. Bien sûr, elle sait aussi que certaines circonstances peuvent exiger une tenue particulière et elle accepte assez facilement de s’y plier, mais en dehors, elle fait comme elle veut. De plus, sa manière d’agir, que ce soit sa démarche ou sa gestuelle, renvoie toujours une démarche audacieuse. On voit qu’elle veut s’affirmer.
 

Caractère

Alice, c’est une demoiselle qui est connue pour son impétuosité et son caractère bien trempé. A l’inverse de sa soeur qui sait rester douce et élégante en toutes circonstances, Alice aime se faire remarquer, quitte à devoir manquer de manières pour cela. A vrai dire, elle n’a jamais vraiment enregistré les cours de bienséance qu’on a pu lui donner étant petite et personne ne le lui a de toute manière fait remarquer. Son entourage veillait simplement à ce qu’elle et sa soeur aient la meilleure éducation possible mais puisqu’il ne serait jamais question de les intégrer à la haute société pour autant, ils ne voyaient pas d’inconvénients à ce qu’Alice ne souhaite pas se plier à l’étiquette et préféraient privilégier son bonheur.

Ainsi, la jeune fille développa un comportement allant à l’encontre de ce qu’on pourrait s’imaginer venant d’une enfant de bonne famille. Elle n’est pas du genre à tourner en rond pendant des heures et à s’encombrer de politesses inutiles quand elle a quelque chose à dire. Non, elle préfère être directe. Son honnêteté et sa sincérité est probablement l’une de ses plus grandes qualités. Cependant, c’est parfois aussi un défaut car sa franchise s’approche parfois dangereusement de l’impolitesse. Elle dit toujours ce qu’elle pense, sans aucun filtre et ne se rend pas forcément compte que ça peut être blessant. Et même si elle a conscience que ses paroles peuvent être un peu dures, elle n’imagine pas que ça puisse réellement affecter durablement quelqu’un. En fait, elle ne voit même pas le mal. Dire la vérité, c’est une bonne chose, non ? La brune ne supporte pas les faux-semblants ou les gens qui tournent en rond pendant des heures, incapables d’oser dire la vérité. Non seulement c’est lâche mais en plus ça lui donne mal à la tête parce qu’elle finit par ne plus rien comprendre.

Alice n’est pas spontanée que dans ses paroles mais aussi dans ses actes. C’est une fonceuse et le proverbe “réfléchir avant d’agir” ne s’applique pas à elle. Elle fait et elle réfléchira aux conséquences après. Même les rares fois où elle fait l’effort de peser le pour et le contre, elle n’arrive pas à imaginer l’ampleur que pourraient avoir ses actions et finit par le faire quand même. Il faut avouer qu’elle est peut-être un peu simplette et plutôt que de s’encombrer la tête d’inquiétudes futiles, elle préfère foncer. On ne peut pas savoir sans essayer, après tout. Ajouté à cela qu’elle est très facile à provoquer et vous pouvez imaginer qu’elle réagit toujours au quart de tour. Encore plus si quelqu’un touche à une personne à qui elle tient, personne d’autre qu’elle ne devrait en avoir le droit. Malgré son âge, c’est déjà une petite bagarreuse et aînée ou pas, elle n’a jamais peur de s’affirmer.

Heureusement, elle a conscience que son comportement peut parfois causer des torts aux autres et ce n’est pas son but. Ce qui lui arrive à elle, c’est son problème mais elle ne veut pas que ses proches récoltent ce qu’elle sème. Ainsi, il y a bien quelques personnes capables de canaliser la boule d’énergie qu’elle est et de la convaincre de rester relativement calme. Ca ne l’empêchera pas de lancer quelques piques de temps en temps -car oui, qu’elle soit aussi prompte à réagir ne suffisait pas, elle est elle-même très provocatrice- ou de bouder dans son coin mais c’est toujours ça de pris. De plus, après plusieurs années à Ilukaan, elle a fini par comprendre que les sanctions et punitions lui apportaient plus d’agacement que certaines bêtises ne lui procuraient de l’amusement, alors elle est déjà beaucoup plus sage qu’en première année. Bien sûr, elle reste Alice et son caractère explosif continue quand même de lui jouer des tours.

En réalité, derrière ses grands airs se cache une jeune fille sensible et une adolescente qui se cherche encore. Alice a toujours vécu isolée du monde extérieur et les personnes avec qui elle pouvait échanger pouvaient presque se compter sur les doigts de ses mains. A cause de ça, elle se montre parfois maladroite quand il s’agit de sociabilité. A cause de sa confiance et de son assurance, on la croit parfois à tort extravertie. Ce n’est pas vraiment le cas puisqu’elle-même a du mal à définir ce qu’est un ami. Elle ne saisit pas non plus les nuances entre ami, camarade ou allié, pour elle, c’est du pareil au même. A cause de ces différences qu’elle n’arrive pas à faire, elle ne sait pas à partir de quand on peut considérer quelqu’un comme un ami. Alors plutôt que de faire une erreur, elle colle des étiquettes ou des titres aux gens, tout comme elle a décidé qu’Oz était son serviteur. Aujourd’hui, elle sait malgré tout que le lien qu’elle a tissé avec lui mérite d’être qualifié d’amitié, peut-être même plus, mais autant par fierté que par habitude, elle continue de raconter à qui veut l’entendre qu’il est son esclave.

A cause de cette difficulté à jauger ses relations, elle a peur qu’on s’éloigne d’elle. Cette crainte a tendance à la rendre possessive et quelque peu jalouse, encore plus s’il s’agit d’Oz. Elle a peur que ceux à qui elle tient se font d’autres amis et finissent par l’oublier, que leurs priorités changent et qu’elle passe en seconde zone. Cependant, elle n’a pas vraiment conscience de cela et le justifie plutôt en disant que ce n’est pas normal que son serviteur s’occupe d’autres personnes, par exemple. Pour autant, au fond elle ne veut que le bonheur de son entourage et ne voudrait pas que sa jalousie les rende malheureux. Alors si quelqu’un prend le temps de lui expliquer calmement qu’il n’y a rien de mal à ce que ses proches aient d’autres amis, qu’elle aussi elle a plusieurs amis, et que même si elle parle à d’autres personnes, elle continue de toujours autant adorer Oz alors il n’y a pas de raison que ça soit différent pour lui, elle saura faire des compromis. Bon, il faudra peut-être lui offrir à manger pour se faire complètement pardonner.

S’il faut prendre autant de temps à lui expliquer ce genre de choses, c’est parce que tout comme elle a du mal avec les relations humaines, elle ne sait pas non plus mettre des mots sur ses émotions. Son monde s’est longtemps limité à son père Levi, son oncle Oswald et sa jumelle Alyssa. Et si Levi est quelqu’un de très souriant, il est aussi très énigmatique et il a une manière de penser assez singulière alors ce n’est pas vraiment lui qui a pu lui apprendre à exprimer ce qu’elle ressent. Quant à son oncle, c’est une personne très peu expressive, voire austère. Et Alyssa… Elles sont toutes deux si proches qu’il n’a jamais été question de partager leurs ressentis. Tout comme elles ne se sont jamais dit à voix haute qu’elles s’aimaient car c’était pour elles un fait tellement ancré à leur identité que ça ne leur a jamais paru important de le dire. A cause de ça, elle n’a jamais eu l’occasion d’exprimer clairement ce qu’elle pouvait ressentir. C’est sans doute pour cela qu’elle est aussi spontanée et expressive. Puisqu’elle ne comprend pas ce qu’elle ressent et n’arrive pas à l’expliquer, elle agit en espérant que son entourage comprendra. Cependant, quand elle essaie vraiment de le formuler clairement, à défaut de savoir poser le bon moment, elle assimile ses émotions à des sensations. La solitude s’apparente à avoir froid, par exemple, selon elle.

Pourtant, c’est une jeune fille pleine de sentiments divers et variés, elle n’en a juste pas conscience. Et cette incompréhension de sa propre nature la rend parfois un peu trop naïve. D’autant plus que lorsqu’elle accorde sa confiance, elle ne le fait pas qu’à moitié. Heureusement, elle semble avoir un bon instinct et fait parfois preuve d’une perspicacité étonnante venant d’elle. Si elle ne réaliserait pas qu’on la manipule, son instinct lui souffle parfois d'éviter certaines personnes. Et quand elle n’arrive pas à encadrer quelqu’un, elle le dit plutôt que de sourire poliment. Au fond, elle n’est qu’une adolescente qui se cherche. Et parfois, elle a peur de la réponse. Peur que ça ne soit pas celle qu’elle attendait. Mais elle n’est pas du genre à fuir. Non, elle ira jusqu’au bout quand même. Et si même en atteignant l’arrivée, elle ne trouve pas ce qu’elle veut, ce n’est pas grave, elle se créera un nouveau chemin de force pour atteindre son but. Elle deviendra qui elle veut.

Histoire

Deux vies contre une vie.
Est-ce un prix acceptable ?
Même si Lacie fut pleurée, personne ne s’en montra étonné. Nombre étaient ceux qui l’avaient découragé lorsqu’elle avait pris la décision de tomber enceinte. Elle avait toujours eu une santé fragile, touchée par une maladie qui ne frappait que les sorciers et qui était jusque-là incurable. Ses jours avaient toujours été comptés bien que l’échéance était inconnue. Une seule chose était sûre : la grossesse ne pouvait que rapprocher ce jour tant appréhendé. Pour autant, devenir mère était sa décision alors tous la respectèrent, espérant qu’elle survivrait à l’accouchement. Ces prières ne furent malheureusement pas exaucées, et ce fut au prix d’un ultime effort qu’elle mit au monde deux jumelles.

Elle n’avait décidé d’aucun prénom, estimant qu’elle ne le choisirait que si elle vivrait assez longtemps. Et dans le cas contraire, elle délivrait cette responsabilité à son frère, Oswald. Pourquoi ne pas l’offrir en toute légitimité à Levi, son amant et père de ses enfants ? Pour la simple raison qu’ils n’entretenaient pas une relation amoureuse. Ils ne faisaient que s’amuser et il n’avait été qu’un moyen pour accomplir son dernier caprice, celui d’être mère. C’était une femme, qui, après tout, avait accepté la fatalité de son destin depuis bien longtemps. Et pourtant, elle continuait d’aimer profondément son monde et souhaitait en connaître toutes les facettes qui lui étaient accessibles. L’amour maternel devait en être une, pour qu’elle fasse ce choix. Son seul regret était sans doute de laisser son frère seul avec sa culpabilité qui n’avait pas lieu d’être, de le forcer à assumer le poids de son absence. Il lui semblait donc tout naturel de lui confier ses enfants. Peut-être était-ce même pour lui qu’elle avait fait ce choix, pour lui laisser un dernier présent, la preuve qu’elle avait bien vécu en ce bas-monde, aussi brève fut son existence.

Alice.

On ne peut pas dire qu’Oswald était une personne brillante d’imagination ou d’inventivité. C’était un prénom trouvé en mélangeant les lettres de celui de sa soeur. La jumelle échappa de peu à Alyss. A la place de quoi, elle fut nommée Alyssa, ce qui n’était pas très loin. Il faut dire que ça deviendrait vite embêtant de savoir qui était appelée si leurs prénoms se prononçaient de la même manière. Même si la perte de sa soeur le faisait souffrir, elle avait fait ce choix en toute conscience et il devait le respecter. Et pour cela, il se devait d’offrir la meilleure qualité de vie possible à celles qu’elle laissait derrière elle. Levi et Lacie n’avaient jamais été qu’amants, c’était une relation sans sentiments, aucun. C’était un lien qui avait été forcé par le désir de Lacie de donner vie et la perspective de divertissement qu’y avait vu Levi. C’était un homme qui semblait constamment s’ennuyer et qui détestait cela, chaque événement pouvant bousculer la monotonie de son quotidien était bon à prendre. Pour autant, durant tout le suivi de sa grossesse, jamais Lacie n’avait indiqué qu’il était le père. Probablement car son souhait était qu’Oswald devienne leur tuteur si elle ne survivrait, et il respecta ça. Bien qu'il révéla la vérité à Oswald, il n'alla pas reconnaître officiellement les jumelles comme ses filles. Il laissa les autorités se tourner plutôt vers le jumeau de son ancienne amante, qui accepta bien évidemment de prendre les jumelles à sa charge.


Ses décisions ne furent pas toujours les meilleures, mais elles étaient toujours pensées dans l’intérêt d’Alice et Alyssa. Ainsi, ce ne fut pas par honte qu’il décida qu’elles ne feraient jamais leur entrée dans la haute société et qu’il les en tiendrait les plus éloignées possibles. Selon lui, cet environnement avait été toxique pour Lacie et il ne voulait pas répéter les mêmes erreurs avec ses filles, qui lui ressemblaient tant. Il se montra néanmoins peut-être trop intransigeant puisque ça finit par entraîner l’isolement des jumelles par rapport au monde extérieur. Elles n’allèrent pas à l’école. Des professeurs particuliers furent employés pour qu’elles soient scolarisées à domicile. Normalement, les enfants Baskerville étaient préparés dès leur plus âge, à un jour devoir participer aux événements mondains. Pour autant, personne ne reprocha ce choix d’éducation fait par Oswald, que de les en tenir à l’écart. Pour la simple raison qu’il était le chef de famille et que s’il décidait d’exempter les jumelles de cette obligation, personne n’avait son mot à dire.

C’était une notion assez vague pour Alice. Pour elle, ça voulait simplement dire que tout le monde devait lui obéir, point. C’était en réalité plus complexe que ça. La force des Baskerville résidait en partie dans son unité, si un Baskerville faisait quelque chose, ça voulait dire qu’il était approuvé par le reste de la famille. Bien sûr, tout cela n’était que théorique. Néanmoins, cette image créée par les anciennes générations persistait, en devenant parfois handicapante. En effet, par le passé, la famille avait compté dans ses rangs plusieurs mages noirs, ce qui lui avait valu pendant longtemps d’être mise à l’écart dans la société. Encore aujourd’hui, quelques mauvaises rumeurs continuaient à circuler. C’était un travail difficile que d’influencer favorablement l’opinion publique et que de racheter des actes passés. Après tout, la haute société est un monde qui sait se montrer impitoyable et il faut du temps pour se remettre des coups qu’elle peut porter. Mais c’était là le rôle d’Oswald, que de relever les Baskerville. Mais aussi de veiller à ce que les anciennes erreurs ne se répètent plus. Aucune décision trop importante ne pouvait être prise sans son accord, sous peine que ça ne leur nuise à tous. Il devait aussi s’assurer que personne n’agisse par conséquent dans son dos. C’était un rôle difficile mais il gardait toujours du temps pour ses nièces et tant qu’il en serait ainsi, Alice se moquait pas mal de ce que pouvait vouloir dire être chef de la famille.


Pour autant, leur enfance fut loin d’être malheureuse. Même si les deux soeurs aimaient qu’on leur parle de leur mère, cette dernière ne leur manquait pas pour autant. Pour que l’absence soit douloureuse, il faut que la présence ait été connue, ce qui n’était pas le cas. Et même si elles ne côtoyaient que peu de monde, elles n’étaient pas délaissées. Leur père passait beaucoup de temps avec elle, de même pour leur oncle. Et si Alyssa ne s’entendait pas trop avec Oswald, Alice l’adorait, et ce malgré son caractère strict. Quant à son père… Eh bien c’était une relation plus ambigüe qu’elle entretenait avec Levi. Il leur avait un jour été révélé que c’était lui, leur géniteur mais la notion de “parent” était assez vague pour les jumelles. Comment l’avoir alors qu’elles étaient élevées par un oncle ? Bien qu’elles l’ignoraient, c’était même parce qu’Oswald lui avait demandé qu’il venait aussi souvent visiter ses filles, dans l’espoir que ça leur apporterait un peu plus de stabilité relationnelle.  Et malgré ce rapport parent-enfant particulier, ça avait fonctionné.  C’était une personne qui faisait partie intégrante de l'univers d'Alice et quoiqu’il en soit, il n’avait jamais eu de mauvaises attentions à son égard alors elle appréciait malgré tout le temps passé en sa compagnie. De toute manière, tous ces questionnements étaient loin de ses préoccupations enfantines.

Ainsi le temps s’écoulait paisiblement. Elle se souvient vaguement d’un jour, où, à sa grande surprise, Oswald leur avait demandé de venir avec lui. Ce fut la première fois qu’elles sortirent de la demeure Baskerville. C'est avec émerveillement qu’elles observaient le paysage défiler de la vitre de la voiture. Ils se rendaient en fait rendre visite à une famille avec laquelle les Baskerville entretenaient des liens étroits. C’était des affaires d’adultes qui dépassaient la jeune fille qui n’avait alors que cinq ans. Cependant, Oswald y avait vu une occasion de sortir ses nièces de leur isolement. D’autant plus que les Vesallius avaient aussi un enfant, Oz, de deux ans leur aîné et ça leur donnerait peut-être une chance de sympathiser avec quelqu’un d’à peu près leur âge. Alyssa étant d’une nature beaucoup plus calme, elle préféra rester non loin des adultes. Ce ne fut pas le cas d’Alice qui était déjà très énergique et dynamique et qui alla tout de suite vers Oz.


Les faire se rencontrer se révéla être une bonne idée puisque les deux enfants s’entendirent très bien. Pour elle qui n’avait jamais conversé avec d’autres enfants que sa soeur, la relation débuta peut-être avec maladresse et de crainte de se tromper en affirmant qu’ils allaient devenir amis, elle préféra en faire son serviteur, comme elle disait. Après tout, un serviteur doit fidélité à son maître, non ? Alors si Oz était à son service, il ne pourrait jamais la trahir et serait à ses côtés pour toujours. Malgré son fort tempérament et ses manières laissant parfois à désirer, Oz ne lui en tint jamais rigueur et ils finirent par tisser de solides liens. Ainsi, ils continuèrent de se voir régulièrement, chez l’un ou chez l’autre. En général, c’était tout le temps parce que leurs familles devaient se rencontrer mais ça ne les dérangeait pas. Pour ne pas embêter les adultes, ils restaient ensemble, jouaient, se chamaillaient, rigolaient. En fait, cette amitié se révéla même très enrichissant pour la jeune fille. Puisqu’elle ne fréquentait presque personne d’autre de son âge, Oz était en quelque sorte son repère. Après tout, c’est une relation très différente que celle que l’on peut avoir avec un parent ou un adulte et ça lui permit de découvrir de nombreuses émotions, quoiqu’elle resta assez maladroite dans ce domaine.

Malheureusement, toute bonne chose à une fin et un jour, un désaccord entre les deux familles stoppa cette amitié. A l’ambiance pesante, aux brides de conversations surprises et aux voix qui s’élèvent, les enfants comprirent que leurs adieux approchaient. Dans d’autres conditions, Alice se serait sans doute emportée, faisant savoir son désaccord. Après tout, elle était du genre à agir sans réfléchir, quitte à parfois devoir se mêler de ce qui ne la regarde pas. Mais cette fois, quelque chose dans l’atmosphère lui faisait comprendre que rien de ce qu’elle ferait ne changerait quoi que ce soit et qu’il valait mieux au contraire qu’elle profite du temps qu’il leur restait. C’est ainsi qu’ils décidèrent de se faire une promesse.

La promesse qu’ils ne s’oublieraient jamais. La promesse que le temps ne pourrait effacer leur amitié, que tout restera pareil, inchangé entre eux s’ils se revoyaient. Pour Alice, c’était même un “quand” plus qu’un “si”. Aujourd’hui, elle était peut-être incapable de faire entendre son avis. Après tout, que valaient les paroles d’une enfant de huit ans dans une dispute d’adultes ? Probablement rien, mais un jour elle aussi elle serait une grande fille et plus personne ne l’empêcherait de revoir Oz. Et puisqu’ils avaient promis de ne pas s’oublier, Oz serait ravi de la revoir, elle en était certaine. Surtout que pour officialiser ce “contrat” comme elle l’appelait, elle l’avait même embrassé ! Elle avait entendu dieu ne sait où qu’ainsi, ça permettrait de rendre cette promesse imbrisable. Et pour s’assurer qu’il ne l’oublierait vraiment pas, elle lui avait offert la montre que lui prêtait toujours Oswald. C’était une montre fabriquée par l’un des amis de son oncle qui jouait aussi une mélodie écrite par Oswald et baptisée Lacie. Les jumelles se partageaient souvent cet objet, écouter cette mélodie ayant le don de les apaiser et de les aider à s’endormir. Mais peu importe, il y avait d’autre moyen d’entendre le morceau de musique et si ça permettait de laisser quelque chose d’elle à Oz, elle en était heureuse.

Dès que l’occasion s’y prêta, elle fit savoir son désaccord, aussi bien à Oswald qu’à son père, Levi. Son oncle était certes le chef de la famille, mais elle savait que son père l’avait été avant lui. C'était même lui qui avait formé Oswald à ce rôle, et ce dernier écoutait donc toujours son avis avec attention. Alice espérait donc qu'il puisse y faire quelque chose. Elle ne comprenait pas tout mais elle savait que si les Vesallius et les Baskerville se réconciliaient, tout pourrait redevenir comme avant. Malheureusement, Levi lui expliqua que ce n’était plus de son droit d’agir dans cette optique, il ne pouvait que donner son avis et conseiller son successeur, qui lui, était libre de l’écouter ou non. Malgré l’amour qu’elle portait à son oncle, elle lui fit savoir pendant plusieurs semaines son mécontentement. A force, sa colère sembla se tarir. Elle était toujours attristée mais que pouvait-elle y faire ? Ne plus revoir son ami d’enfance lui faisait ressentir la solitude, et ce sentiment était encore plus pesant si elle continuait de faire la tête.

Heureusement, il lui restait sa jumelle avec qui elle était très complice, malgré leurs caractères extrêmement différents. Ca ne les empêchait pas de se comprendre si bien qu’elles pouvaient sans mal se faire passer l’une pour l’autre. Quoique Alice n’avait pas la patience pour faire durer une telle supercherie. Les blagues les plus courtes sont les meilleures, comme on dit. C’est d’ailleurs en voulant protéger Alyssa d’une mauvaise chute qu’elle manifesta ses pouvoirs magiques pour la première fois. Alice avait toujours été d’une nature protectrice envers ceux à qui elle tenait, peu importe leur âge. Elle l’était aussi envers Oz, bien qu’il était son aîné et qu’il le soit lui-même envers elle.  Même si Alyssa était d’une nature beaucoup plus calme et solitaire qu’elle, elle réussissait parfois à l’entraîner dans ses escapades. En effet, même si elles vivaient dans une aile isolée du manoir, l’envie de liberté la poussait souvent à vouloir visiter les parties centrales de la demeure. Elle avait délaissé quelques minutes sa jumelle et en se tournant à nouveau vers elle, elle la voyait faire face à d’autres enfants de la famille. Une erreur d’interprétation la poussa à croire qu’ils s’en prenaient à elle. Elle ne chercha pas à en savoir plus et agit instinctivement, créant une vague d’énergie qui repoussa de quelques pas les enfants, les faisant trébucher.

Rien de trop dangereux, sa magie n’était pas encore très puissante mais suffisamment pour qu’on le remarque et qu’on comprenne que c’était son éveil. La part des choses fut faite et si elle fut disputée pour cet acte trop hâtif, on lui dit aussi que c’était gentil de sa part de vouloir protéger Alyssa. Avec nostalgie, elle fit savoir à Oswald qu’elle aurait aimé pouvoir raconter tout ça à Oz. Elle avait toujours eu hâte de pouvoir lui raconter son éveil, l’attendant avec impatience. Elle ne le disait pas par rancoeur envers lui, la colère était passée mais la frustration restait, même si cela faisait un an puisqu’elle avait désormais neuf ans. Et ça continua ainsi jusqu’à ce qu’elle intègre Ilukaan. Il lui arrivait souvent de faire des réflexions mélancoliques comme quoi elle aurait aimé faire ceci avec Oz ou lui raconter cela.

C’est sans doute l’une de ses décisions qui poussa sa famille à choisir Ilukaan comme école. En effet, ils savaient que le Vesallius y avait fait son entrée plus tôt. Ce ne fut bien sûr pas la seule raison. En effet, si Poudlard aurait coulé de source pour n’importe quel autre enfant Baskerville, ce n’était pas le cas pour les jumelles pour qui il avait été décidé de les tenir à l’écart de la haute société. Or, c’était un nom de famille qui serait dur à porter à Poudlard au vu de la réputation qui le suivait. Et il n’était pas non plus question de les mettre dans une autre école d’Angleterre. Même si ni Oswald, ni Levi ne voulait les pousser à l’excellence, ils voulaient leur offrir les meilleures clés pour qu’elles puissent devenir ce qu’elles voulaient et cela impliquait une des meilleures écoles possibles. Et les valeurs véhiculées par le nouveau directeur d’Ilukaan correspondaient à celle que les Baskerville souhaitaient transmettre. La décision d’y envoyer Alyssa aussi fut prise. Les jumelles étaient trop proches pour que quelqu’un ait le coeur à les séparer.

Oswald ne prévint pas Alice qu’elle pourrait retrouver Oz, à Ilukaan. S’il voulait lui offrir l’occasion de le revoir, lui-même n’y tenait pas particulièrement. Elle ferait ce qu’elle voudrait une fois là-bas. Et quand ils se retrouvèrent, son choix fut tout simplement de respecter sa promesse. Même si trois ans avaient passés, c’était comme s’ils venaient de se quitter hier. Ilukaan lui fut aussi bénéfique pour de nombreuses autres raisons. Pour la première fois, elle réalisa vraiment ce qu’était la solitude et l’isolement dans lequel elle vivait auparavant. Cette école lui permit d’avoir enfin une vie normale et de cesser d’être emprisonnée dans cette cage dorée, sans que la réputation de sa famille ne lui pèse pour autant.