Sans grande surprise, Keith est en avance au rendez-vous donné. Rien d’inhabituel à cela : l’Ecossais n’apprécie pas le retard. Quand on donne une heure, ce n’est pas pour arriver plus tard au final. Vraiment, il n’y a pas meilleur moyen pour l’énerver. Surtout quand on lui donne plusieurs excuses du style « je devais faire ça avant », « je pensais c’était à cette heure-ci » (Alors dans ce cas vérifie ?!) ou encore « c’est bon c’est pas important non plus ». Dans ces moments, le lupy n’a qu’une envie, frapper ces personnes. Non mais sérieux quoi, lui aussi il a d’autres trucs à foutre, lui aussi il a du travail, lui aussi il aime rester dans son lit sans rien faire. Pourtant s’il sait qu’il doit voir quelqu’un, il fait un effort. Même quand il le sent pas.

Il grogne un coup et se force à se calmer. Tout doux le roux, il n’y a pas de raison de partir au quart de tour juste car tu restes trop longtemps dans tes pensées. Après avoir regardé l’heure une nouvelle fois, il se dit qu’il est là plus tôt qu’à l’accoutumé. Si en général il est présent dix minutes avant l’heure fixée, cette fois il est plutôt dans la vingtaine de minutes d’avance. Bah, il n’avait rien à faire. Être ici ou à Ilukaan, aucun changement. Son téléphone est chargé à fond, il a sa batterie externe… Il n’a pas grand-chose à craindre question ennui.
Qui plus est, il est aussi habillé chaudement, vu la température moyenne en ce moment – rien de bien étonnant cela dit au Canada. Résultat, il porte un bonnet et une petite doudoune mais suffisante pour lui éviter de trembler de froid. Il porte aussi des gants, par contre, pas d’écharpe ! Ce qui laisse l’occasion à sa barbe de trois jours de prendre l’air. A côté de ça, un jean un peu large et un pull à capuche. Rien de bien compliqué, pas de prise de tête : il doit simplement se balader avec un pote, il va pas faire un défilé de mode.

Le temps passe et il finit par recevoir un sms : Henry. Il l’ouvre, espérant ne pas lire un « je vais être en retard, tu es déjà là ? ». Heureusement, ce n’est pas le cas. C’est même tout l’inverse ! Le Cervirald vient d’arriver et lui explique où il se trouve. Cool. Il répond directement (Je suis déjà là. J’arrive, bouge pas.)

Aussitôt dit, aussitôt fait. L’Ecossais bouge de l’endroit où il se trouvait et se dirige vers l’arrêt de bus. Ce n’est pas bien loin, étant donné qu’il a aussi pris le bus. Il retrouve facilement son ami et lui fait signe juste après en l’interpellant.

« Hey. Content de voir que t’es d’jà là. T’sais, j’me dis qu’on aurait pu carrément partir ensemble d’puis Ilukaan. ‘Fin bon, pas grave hein. »

Ca vient de lui traverser la tête : Ils sont tous les deux dans la même école, pourquoi un rendez-vous en ville ? C’est un peu con. Enfin, pas grave non plus. Ils se sont retrouvés, c’est le principal.

« J’t’écoute, t’veux commencer par quoi ? Y’as la boutique d’sports qu’fait des promos j’crois. On pourrait aller voir. »

Ça vaut bien la peine d’envoyer un message si on regarde pas la réponse, tiens. Il n’empêche qu’Henry a de la veine : le rouquin ne s’est pas aperçut qu’il ne l’avait pas reconnu sur le coup. Il n’est pas observateur à ce point, enfin, sauf quand ça concerne ses frères. Mais ce n’est pas pareil, loin de là. Après les salutations, le Cervirald enchaîne sur l’effort qu’il vient de faire, ce qui fait légèrement sourire en coin Keith.

« Je t’aurais insulté comme jamais, mec. T’imagine même pas. Poireauté en hiver dehors c’est franchement pas ce que je préfère, sans trop d’étonnement. »

Quiconque connait le Lupy en sait la raison : sa santé lamentable. Sans être non plus défini comme fragile, il n’empêche qu’il tombe malade au moins une fois pendant la période froide et attrape des coups de soleil en été. C’est tellement une habitude que ses parents lui envoient toujours au cours du mois de novembre une sacoche avec tout ce qu’il lui faut pour se soigner, même pas besoin d’aller voir l’infirmière… Enfin, pas pour ça, quoi. Idun reste irremplaçable pour lui remettre la mâchoire droite. Pourtant, il fait attention, il porte toujours des vêtements chauds, ne fait pas l’erreur de sortir en t-shirt après son entraînement, mange assez bien, mais non, ça ne loupe jamais. Autant dire qu’il a presque envie d’abandonner et de directement se jeter dans les premières neiges nu. Mais par pudeur et car il n’est pas suicidaire, il évite. Pas sûr en plus que ses colocataires apprécient d’avoir la grippe à cause de lui.

Henry accepte sa proposition : formidable. Déjà un premier lieu de choisit sans avoir à poireauter des heures dehors avec des « euh je sais tu n’as qu’à choisir toi ! » Urg, qu’est-ce que ça peut l’agacer ça aussi. Merde quoi, il faut réfléchir à ce qu’on veut faire, au moins un minimum, quand on part en ville.

Qu’est-ce qui ne l’agace pas, finalement ?

« Un peu des deux, je me demande si je vais pas m’acheter une autre paire de gants. J’aime bien la mienne, mais j’aime bien changer histoire de les nettoyer correctement. Ils puent grave c’est une horreur. Et pourtant il en faut pour que je sois agacé par la transpiration. »

Alors non, Keith n’est pas un gros dégueulasse. Mais quand on s’entraîne un jour sur deux dans une salle avec d’autres boxeurs, l’odeur de transpiration, bah on fait avec jusqu’à ce que ça ne dérange plus. CQFD. Mais il prend toujours sa douche après, quand même.
Quoi qu’il en soit, ils se dirigent vers la fameuse – et unique de la ville, boutique de sport. A peine il entre, Keith apprécie la chaleur qu’elle dégage et se permet d’ouvrir sa doudoune. Il part vers le rayon « SPORT DE COMBAT » et regarde immédiatement les gants. Sans surprise, les rouges lui tapent dans l’œil, mais il a bien envie de changer pour une fois. Il remarque aussi ceux avec des rayures vertes sur le côté et une autre paire avec le logo bleu dessus.

« Les matières sont pas mal, ils devraient bien tenir peu importe quelle paire je prends. J’adore l’odeur putain. J’sais qu’tu vas m’conseiller les vertes. Cache le pas. Et ça se comprend, elles sont classes. Je vais partir dessus peut-être. Les bleus une autre fois. »

Oui, il parle à Henry et en même temps à lui-même, tout un concept. Mais au moins il a choisi rapidement – sans surprise, il n’est pas connu pour mettre vingt ans à prendre sa décision. Il est rapidement prêt à payer.

« T’as trouvé ce que tu voulais toi ? Des trucs pour le club d’archer je suppose ? Tu penses je devrais prendre un truc pour Arthur ? »

« Ah ouais. J’pensais c’était plus pour le côté tu termines avec des bleus sur tout ton corps que l’odeur. Mais ok ça s’tient. »

Il ricane légèrement et après la fin de conversation sur le gant de boxe, le rouquin se lance donc pour les gants verts. De quoi lui changer un peu de d’habitude, plutôt cool.  Il les garde sous le coude et écoute Henry lui parler des gants pour tirer.

« Tu sais, j’m’en fiche si c’est cher ou non. C’pas l’prix que j’regarde quand c’pour mes frères. »

Bon, il dit ça car il sait qu’il a les moyens sans se ruiner, il est pas con hein, il sait bien que tout le monde ne peut pas se permettre des achats comme ça sans vérifier avant qu’ils ne vont pas se retrouver à découvert. Mais voilà, ce n’est pas le cas de Keith et franchement, ça se devine assez vite. C’est vrai quoi, entre ses tatouages et ses piercings qui ne sont pas donnés, on se doute qu’il n’est pas en situation précaire. Du coup, il se gêne pas des masses pour les cadeaux – enfin, surtout pour ses frères. Faut pas non plus déconner, c’est ni Midas ni l’Abbé Pierre. Faut d’abord que ça lui fasse plaisir de le faire, il a pas envie de se forcer juste histoire de. Ou alors tomber sur quelque chose qui lui fasse penser à un pote en particulier, plus rare, mais ça arrive. Bon du coup ça peut surprendre ce genre d’attention de sa part, mais c’est jamais trop désagréable, il y va au feeling.

« Du coup ça l’aide pour quoi exactement ? Genre, il va moins ressentir les cordes, moins lui faire mal ? »

Clairement, l’équipement d’un archer il n’y connait pas grand-chose. Il voit les bases, vu qu’il voit les affaires d’Arthur mais ça va pas plus loin. De ce fait, il suit et écoute les conseils de Henry et regarde ce qu’il lui conseille avant qu’il s’éloigne de son côté. Okay. Trois doigts pour les ambidextre. Simple. Ils ont l’air pas mal, cool. Faut juste choisir le design, ça va le faire. Il en repère un en cuir marron, d’un style qu’on voit dans les films fantastiques avec des archers elfes. Formidable. Son choix étant fait, il s’avance ensuite vers la caisse, prêt à tout payer.

Jusqu’à ce qu’il entende un « ploc ».

Il regarde alors par terre et peste immédiatement. Bordel. L’un de ses fermoirs de collier vient de se péter. Il soupire et se baisse pour récupérer le dit-bijou en vérifiant que rien d’autre est parti avant de le mettre dans sa poche. Bon, ça a l’air d’aller mais ça le fait bien chier. Heureusement il est déjà à Bloombury, c’était pas un détour prévu mais autant en profiter. Après avoir payé, il attend le cervirald à la sortie, sac en main. Quand finalement il arrive, il ne lui laisse pas beaucoup de choix pour la prochaine destination :

« Mec, je dois aller à la bijouterie faire changer un fermoir de collier qui vient de casser. Ça me saoule un peu, mais je vais avoir la flemme si je le fais pas maintenant. »

Ce qui l’agace un peu c’est aussi le fait qu’il risque certainement de craquer et de s’acheter un bracelet, une boucle d’oreille ou autre du genre, se connaissant. Non, allez Keith, tu peux tenir. Aies confiance.

« Bah, je trouve ça juste normal de leur faire des cadeaux de temps en temps. Pas tout le temps, mais quand même… J’attends pas toujours une occasion. »

Après cette conversation et l’approbation de Henry une fois en dehors de la boutique, ils partent donc ensemble à la bijouterie, Keith gardant bien en main son collier cassé. Fuck. Se connaissant, il va sans aucun doute craquer pour un bijou, n’importe lequel. Ou alors, il va voir les personnes avec leurs tatouages et il va vouloir prendre rendez-vous auprès d’Atreus pour le sien. Dans les deux cas, son argent va prendre carrément plus que prévu.

Bon. Il dit ça comme s’il n’avait pas d’autres choix, alors que clairement si. Mais la tentation est plus forte que la raison et au moins ça lui fera changer son humeur.

Il sort finalement de ses pensées quand il entend Henry se plaindre. Non mais. En même temps. Pas étonnant qu’il ait froid, il portait rien de bien chaud. Sérieux, comment il a pu se dire que ça allait passer de s’habiller comme ça, hein ? Enfin, venant de Henry, pas bien étonnant : ce dernier accorde pas mal d’importance à son apparence, alors peut-être que le gros pull col roulé pour lui c’est pas assez… « à la mode ». Keith est bien heureux de ne pas voir les choses ainsi.

« Mec, tu devrais franchement acheter un truc plus chaud, me dit pas que t’en as, j’t’ai jamais vu avec. Ca va hein, t’peux être bien habillé avec une doudoune. Et ça t’évite d’avoir la crève. C’s’rait pas mal. On peut y aller après la bijouterie s’tu veux. »

Il va pas non plus le laisser se les geler, quand même. Il a pas envie qu’il tombe malade juste car ils se seront pas arrêté acheter des fringues. Il peut survivre deux minutes dans une boutique de vêtements, surtout dans ce genre de cas.

« On arrive. »

Il entre dans la bijouterie et pousse presque un soupire de soulagement en ressentant la chaleur de l’enceinte. Ça fait franchement du bien, pour être honnête. Juste après ce petit instant de bonheur, son regard se tourne vers le présentoir, lui faisant totalement oublier ce pour quoi il est venu. Forcément, c’est l’argent qui l’attire. C’est joli l’or, mais bien trop pimpant pour lui. C’est tout d’abord une bague qui lui donne envie, toute simple, avec simplement un trait au milieu. Il en a déjà pas mal hein, mais une de plus ou une de moins, au point où il en est… Faut juste qu’il s’achète une boîte à bijoux plus grande quoi.

Une fois décidé, il part vers le vendeur, lui montre son fermoir et lui parle de la bague. Le prix est vite annoncé et effectivement… c’est élevé. Bah. Ça va le faire. Il ne se prend plus rien d’autres ensuite, ou rien de trop cher. Il hoche alors la tête et paie le tout puis donne son collier. Le vendeur lui dit de revenir d’ici une ou deux heures, car il a d’autres trucs à faire avant. L’Ecossais hoche la tête et récupère la bague, avant de finalement se préoccuper de Henry.

«  T’trouves ton bonheur ? Tu hésites sur des colliers ? »

Keith se penche et regarde attentivement les deux colliers. Il comprend rapidement que l’un des deux désignent le signe astrologique de son ami – enfin, s’il se rappelle bien. Mais vu que l’ensemble des colliers de cette lignée semble être une collection entière sur les signes du zodiaque… ça lui semble plutôt logique. En tout cas, il ne voit pas pourquoi quelqu’un prendrait le collier balance s’il est scorpion, par exemple. Sauf si c’est significatif genre c’est pour se rappeler son petit-ami ou connerie du genre. Mais vu qu’il sait que le Canadien est célibataire – comme il se plait à le rappeler à tout bout de champ, enfin, à s’en plaindre, surtout, ça ne risque pas d’être pour cette raison-là.

Bref.

Il regarde ensuite la boussole, là il sait pas trop pourquoi il a flashé dessus, dans le sens où il ne voit pas un rapport quelconque avec ce qu’Henry aime, mais il reconnait que le pendentif est grave sympa. C’est peut-être juste pour ça qu’il hésite. Esthétique ou symbole. Keith ne sait pas trop comment poser un avis dessus, après tout il est aussi attaché aux deux – la preuve en est avec ses tatouages.

« Baaaah… »

Il continue de réfléchir, ce qui est putain de dur. Faire des choix sur les bijoux, c’est pas son fort. Il met souvent du temps là-dessus. C’est pour ça aussi qu’il n’emmène pas tout le monde ici, pour le peu que les autres s’en tapent des bijoux, ça va les faire attendre pour que dalle – et il comprend bien là la douleur quand ça concerne les fringues pour sa part.

« Je dirais peut-être le sagittaire, c’est ton signe et t’es archer, c’est sympa. Genre, ça devient ton porte-bonheur pour plus tard, c’est classe. Puis t’sais, ici les bijoux ils partent pas non plus méga vite. J’pense s’tu reviens dans un mois t’auras toujours le collier avec la boussole. »

Il faut dire que vu les prix, ce n’est clairement pas ici où on peut s’acheter quinze mille trucs à la fois, sauf si on fait parti des riches d’Ilukaan. Mais de temps en temps, ça passe. Enfin, après qu’il ait donné son avis à Henry, il part payer sa propre bague et attend son ami au pas de la porte du magasin.

« Faudra revenir d’ici deux heures. Enfin, tu s’ras pas obligé d’m’accompagner hein. J’te dis juste pour mon collier. Bon, on va voir pour ta doudoune à fourrure là ? D’ailleurs, si juste avec une couche supplémentaire empêche les mecs d’venir t’voir, c’que t’loupes pas grand-chose avec eux. »

Vraiment, ça lui passe clairement au-dessus de la tête la façon de s’habiller des personnes pour venir leur parler, les draguer ou quoi. Merde quoi, si on a pas envie de porter un machin qui te sert le ventre, on a le droit sans se dire que personne n’ira jamais les voir. C’est tellement débile. Après, tant que la personne s’habille pour elle, ça il juge pas, c’est cool. Mais là, il crève de froid Henry, il est juste – un peu – con.

« C’est où du coup ? J’te suis. »

Qui sait, peut-être il va trouver des trucs pour lui – c’est une rare occasion qui se présente pour varier un peu ses habits. Il aime bien ce qu’il porte, mais il n’est pas non plus totalement contre le fait de changer. Et puis il sait que tout seul, jamais il va se motiver à se bouger. En plus, il va avoir l’avis de Henry, donc c’est pas mal.

Prendre du temps dans les boutiques qu’il aime, c’est vraiment pas quelque chose qui dérange Keith. Le pire qu’il puisse arriver, c’est qu’il finisse par craquer et s’acheter un bijou supplémentaire. Rien de bien dramatique, du coup. Agrandir sa collection est toujours un véritable plaisir pour le rouquin, qu’on soit clair là-dessus. D’accord, ça changerait ses plans et son budget, mais il ne va clairement pas tomber à découvert pour un achat supplémentaire. Il en est bien loin, même.

“Mec, t’inquiète hein, on est pas pressé. T’as encore l’droit d’hésiter entre des trucs que tu veux acheter. C’pas ça qui va me faire râler.”

Quand le blond part effectuer son achat, Keith se penche vers le second collier, celui de la boussole. Si sortir son portable risque d’être trop flagrant, il prend mentalement note du bijou et de ce à quoi il ressemble. Après, son anniversaire étant bientôt, ça peut être plutôt sympa de lui prendre. Comme ça, il a les deux qu’ils voulaient, eh. À voir si ça va le tenter cela dit. Il va falloir le vérifier, mais ça devrait le faire, il ne doute pas trop là-dessus.

Après un dernier “à plus tard”, les deux amis sortent de la boutique pour se diriger à l’endroit suivant. C’est à ce moment-là que Henry se confie un peu plus auprès de l’Ecossais et qu’il se met à écouter jusqu’au bout sans rien dire. Même avec lui, il est plutôt rare que l’archer se livre en toute confiance, ou du moins tente de le faire, probablement arrêté par ses propres pensées comme souvent dans ces cas-là.

C’est d’ailleurs ce qui finit par arriver et Keith se retient légèrement de grimacer. D’accord, il n’est franchement pas le mieux placé sur ce point-là, lui qui ne sait absolument pas parler de ses soucis, mais ce n’est pas pour autant qu’il va trouver ça bien à faire. Il prône pas non plus ce genre de comportement, il sait que c’est pas vraiment ce qu’il y a de mieux à faire. C’est peut-être pour cela que par moment, il se décide à secouer un peu l’athlète, histoire qu’il ne fasse pas les mêmes conneries.

“Ouais, c’est con mais après j’peux comprendre le malaise. Franchement Henry, t’as pas à t’en faire, tu les repères vite ceux qui voient juste ça, dans ces moments tu les frappes et tu te barres voir ailleurs hein, sauf si c’est pour un coup d’un soir, ça c’est comme tu veux. Mais si quelqu’un un moment s’voit dans un truc sérieux avec toi c’qu’il verra plus loin. Puis même à côté de ça t’es cool, c’facile de t’approcher même avec les conneries qu’tu sors parfois, t’pas l’gars l’plus compliqué du campus et t’aimes bien organiser des soirées qui s’passent bien. Ça fait des occas’ pour te connaître. T’as une belle gueule, mais il n'y a pas que ça.”

Il a beaucoup trop parlé et il ne sait même pas si son conseil est logique, mais au moins il tente et ça c’est bien. Cependant, vu qu’il connaît bien Henry, il ne relance pas le sujet après avoir terminé sa tirade. Il sait que ce dernier ne va pas non plus vouloir trop s’étendre alors il ne le force pas. Ou plus pour le moment, du moins.

Cependant, le boxeur sent que le comportement de son ami change déjà à cause de ça et qu’il devient soudainement moins sûr et hésite sur tout ce qu’il dit. C’est sûr, il ne montre vraiment pas cela à grand monde. Il ne sait même pas si quelqu’un pourrait le croire s’il venait à en parler. Aucune idée et très clairement, il ne va pas s’amuser à tout raconter juste pour l’expérience. Ce serait carrément dégueulasse d’agir comme ça, en plus. Il n’a pas envie de perdre Henry pour une connerie.

“Eh, c’est cool. Si elle a l’air confortable, ce sera carrément de mon style, j’en doute même pas, il ricane un instant pour tenter de détendre à nouveau l’atmosphère, je verrais pour le tour, je crois j’ai tout ce qu’il me faut pour l’hiver.”

Malgré tout, il part faire son tour en se séparant du cervirald pour regarder les vêtements. Bon, il est vrai il y a pas mal de truc ça a l’air sympa, ça pourrait même probablement bien lui aller mais il ne prend rien en main. Pour les habits, Keith c’est exactement le contraire qu’avec les bijoux : le strict nécessaire, pas besoin de plus si tu as tout ce qu’il te faut. C’est, sans aucun doute, ce qui lui permet totalement de faire des économies. Il retient quand même certains articles, qui sait, il craquera peut-être dans quelques jours.
Il finit par rejoindre Henry, pas du tout au courant du temps écoulé jusqu’à présent. Il regarde alors la doudoune choisie par le Canadien et il est vrai qu’elle a l’air méga confortable et très épaisse. Parfait pour l’hiver.

“Elle va être cool. Tu vas voir, c’est pas mal de ne plus se cailler. C’est un truc que je recommande en général et le conseil est apprécié.”

Pour autant, il voit que le regard se tourne plutôt vers les manteaux, plus jolis esthétiquement parlant que la doudoune. Mais pour affronter le froid canadien, ce n’est pas forcément suffisant, selon lui. A voir ce que le blond décide de faire comme choix. Après, ils iront… faire autre chose.

Visiblement, son ami semble tout de même touché par ce qu’il dit et c’est franchement tant mieux, car Keith n’aurait eu aucune idée de quoi ajouter ensuite pour continuer son monologue. Il a clairement tout utilisé en une fois, un peu comme un « maintenant ou jamais », en fait. Bon, forcément tout va pas se régler d’un coup mais euh, bah au moins il sait qu’il a quelqu’un pour l’encourager ? Honnêtement, il peut plus ou moins comprendre ce genre de truc, enfin, ce fait de garder une image de soi caché des autres, craindre quand on va plus loin. Mais aujourd’hui, ce n’est pas à propos de lui, mais de Henry. De toute façon, il ne préfère juste pas tourner ce genre de conversation à son propos de façon plutôt général, c’est mieux ainsi. Il va bien, il est là pour ses proches.

Il a désormais depuis longtemps appris à se mettre plus facilement en retrait sur ce qui peut ressentir à son propos – enfin, mis à part quand ça concerne des trucs genre… sentiments amoureux, quand même, mais sinon, il fait juste en sorte de s’assurer que ses frères, ses meilleurs amis peuvent se confier à lui sans se dire qu’il n’est pas en forme pour x ou y raison. Ou qu’il est occupé ailleurs, à faire des trucs, traîner avec des personnes au hasard qui les empêche de venir vers lui. Au mieux, il évite tout cela et ne s’en sort pas trop mal. De toute façon, il n’a pas forcément besoin d’un grand cercle. Le minimum lui suffit, tant que ce minimum va bien. Ainsi, il ne préfère sincèrement pas partir plus loin dans ses réflexions.

Si ça arrivait, il ne sait pas ce qui pourrait se passer pour lui. Et il ne préfère pas savoir.

Il quitte alors ses pensées avant qu’elles ne titillent trop une partie qu’il veut laisser au repos. Surtout pas maintenant où il passe simplement un bon moment en extérieur avec son meilleur ami, ce serait clairement pas intéressant de se taper une quelconque crise existentielle soudainement.

Il préfère se concentrer plutôt sur la blague du blond, le taquinant sur sa faible capacité à survivre pendant l’hiver. Et durant l’été. Durant toutes les saisons jusqu’à la fin de sa vie, en fait. Putain, la vie lui en veut, en fait ?

« Mec, sérieusement, « au cas où » je tombe malade ? « Au cas où » ? Tu sais parfaitement que je vais tomber malade. Là tu vois, cette sortie, elle va m’être fatale et je le sais. Et pourtant, j’ai quand même pris sur moi pour venir ici avec toi. T’imagines même pas comment je vais payer après. »

Bien entendu, il argumente par un rire mais le rouquin sait qu’au final il n’est pas bien loin de la vérité, malheureusement. Il sent déjà des frissons parcourir son corps et, malgré l’écharpe, sa gorge lui pique petit à petit. Il retient un soupire, prenant note de se faire du thé avec du miel en rentrant tout à l’heure, même s’il sait que ça ne suffira pas.

Il met ce point-là aussi de côté, n’espérant pas gagner son sa santé physique et préfère plutôt sourire en voyant que le cervirald a fait comme choix de se prendre une véritable doudoune, un truc réellement chaud plutôt que de juste prendre un vêtement beau. Puis en plus, c’est pas non plus dégueulasse ce qu’il a choisi.

« J’aime bien la suite du programme. J’te préviens, je languis un vrai chocolat chaud. Y’a rien de mieux. »

En sortant de ce magasin, il lui semble que son ami est plus… serein, plus reposé avec lui-même et ça rassure Keith, réellement. Si cette journée lui a permis qu’une chose de bien arrive, il est satisfait.

Voilà en quoi il est doué.