"Allons discuter.»

Quelque chose inquiétait grandement Karamatsu : voilà que son cadet violet se mettait à l’ignorer, lui et leurs autres frères. Est-ce qu’ils avaient fait quelque chose de mal ? Est-ce que l’un d’eux avait osé l’offenser et qu’il boudait toute la fratrie ? Tout était possible mais pour le Numéro 2, il n’était pas probable qu’Ichimatsu mette des mois à ignorer ses frères. Comme l’ainé protecteur qu’il était, il s’était mis à réfléchir sur les éventuelles façons dont ses cadets et lui avaient pu énerver le bout de chou avant que l’anxieux, lui, ne se mette à hurler à la théorie que c’était peut-être lui, le bleu, la source de tous les problèmes. Il fallait dire qu’il avait bien changé, qu’il s’était décidé à donner un personnage et éventuellement ce dernier pouvait énerver son cadet qui, lui, manquait grandement d’assurance. Les questions germaient dans l’esprit de Karamatsu : est-ce que son frère le détestait ? souhaitait sa mort ? accepterait-il de le pardonner ? de nouveau lui adresser la parole ? qu’est-ce qui faisait surtout qu’il semblait en colère contre lui ? Dire qu’il était dans la même maison que son petit-frère et qu’il n’était pas capable de mettre le doigt sur le problème l’énervait. Aussi songeait-il que son cadet lui en voulait grandement pour avoir été dans la même maison que lui, après tout, il devait avouer qu’il n’était pas le frère le plus apprécié de toute la fratrie, sans doute même Osomatsu qui oubliait bien souvent ses responsabilités d’ainé avait bien plus de valeur que lui à leurs yeux.

Ce fut après un très long moment de réflexion et surtout de recherche de courage que Karamatsu se décida finalement d’aller chercher quelques explications ; bien sûr, aurait-il bien pu demander directement à ses camarades s’ils n’avaient pas été témoins d’un éventuel incident qui aurait rendu davantage plus grognon Ichimatsu, mais la timidité le tiraillait toujours et il craignait de les déranger dans leurs histoires de famille. Ainsi opta-t-il pour faire une nouvelle fois le travail d’ainé que n’assumait pas l’autre abruti en rouge ; celui d’essayer de réparer les liens de la fratrie. La journée fut quelque peu longue voire même épuisante pour l’artiste ; celui-ci n’avait pas écouté convenablement les cours, à la recherche des bons mots à dire à son cadet puisque la moindre erreur de sa part pourrait éventuellement l’éloigner un peu plus de tous. Il fallait que tout soit parfait, jusqu’à même un probable petit câlin de réconciliation ou de réconfort ; conserver son personnage et rester le frère aimant qu’il était pouvait être un véritable défi. Lorsque les cours eurent terminé, le jeune homme s’empressa aussitôt d’aller quérir son petit frère.

« Hello, brother. Je peux te parler quelques secondes s’il-te-plait ? »

Cela ne lui ressemblait pas d’aller au-delà de ses peurs pour directement lui parler des soucis ; généralement il avait cette activité forte déplaisante avec Osomatsu en l’embarquant plus loin pour parfois lui asséner un coup de poing. Toutefois, il n’y avait pas de coups de prévu au programme de Karamatsu concernant son cadet puisqu’il ne voulait lui faire aucun mal. Juste qu’il ne pouvait pas accepter que l’un de ses frères s’éloignent de lui, même si finalement, malgré son amour il ne sentait pas qu’il faisait parti de leurs proches. Sans attendre la réponse de son frère, il lui prit la main devant des camarades quelques peu hébétés devant une telle scène et il l’entraîna avec lui, avec un fin sourire.

« On a eu une belle journée, n’est-ce pas ? »

Enfin, ça avait été compliqué pour lui avec toutes ces choses à penser ; les phrases, les mots… pour qu’au final il choisisse l’improvisation en devinant fort bien que, quoiqu’il dise, il se ferait agresser verbalement et peut-être même physiquement. Il ne marcha pas trop rapidement non-plus pour éviter que son cadet en surpoids ne se trouve fatigué par l’épreuve physique qu’il lui imposait avant de l’emmener dans un coin du jardin d’hiver ; là, personne n’oserait les embêter et ils pourraient très bien veiller à ce qu’il n’y ait nulle âme qui vive dans les parages pour les espionner. Il lâcha la main de son frère pour se tourner vers lui et poser sa dextre sur son épaule.

« Brother… est-ce qu’on t’a fait du mal ? »

Bien sûr, il était mort de trouille dans l’âme et s’il ne se forçait pas à respirer sans doute se serait-il asphyxié lui-même, mais il fallait que son frère et lui s’expliquent.