Tu commençais vraiment à te rapprocher de Reyes, ce qui te faisais assez plaisir. Le type venait régulièrement se confier à toi si besoin, souvent au sujet de ses animaux, qu'il semblait aimer plus que tout au monde. Tu ne pouvais pas en vouloir à qui que ce soit de prendre soin d'un autre être vivant. Il t'avait parlé des moqueries quand à l'obésité de sa chouette, et tu lui avais conseillé de réduire ses portions de nourriture petit à petit, discrètement, pour sa santé. De bien cacher la nourriture, ou d’entraîner l'animal en mettant sa gamelle dans des endroits difficiles à atteindre, pour lui faire faire un peu de sport. Bien entendu, si c'était un problème suffisant pour qu'elle décide de ne plus se nourrir, c'était bien dangereux, et il fallait arrêter. Mais rien n'empêchait Reyes de s'essayer à l'exercice. Tu ne comprenais pas pourquoi ses amis s'étaient moqué de lui sans même lui conseiller la moindre solution.

Dans tous les cas, il fallait racheter de la nourriture à l'emplumé, et tu avais proposé d'y aller ensemble. Kankri, ta grenouille rouge, n'avait bientôt plus de réserve non plus. Tu la transportais avec toi dans une petite cage en plastique avec les trous nécessaires à sa respiration, et avec un peu d'eau et de terre pour qu'elle puisse se sentir bien. Tu avais même ajouté une petite branche pour qu'elle puisse l'escalader, car un simple environnement vide devait être très chiant à la longue. Tu sais que tu ne tiendrais pas deux minutes dans un lieu pareil.

-LA FERME, REAPER !!!

Le cri te fit revenir à la réalité bien rapidement. L'abruti que tu devais retrouver plus loin était en train de gesticuler dans ton champs de vision, surement dans le but de faire taire son animal. Tu t'approchas du petit groupe, la chouette vous regardant avec l'air assassin. Les animaux et leur instinct : elle savait surement que tu lui avais conseiller un putain de régime, et elle ne devais pas être jouasse.

-Salut Vantas, j'ai failli m'endormir.

Tu ne pus t'empêcher de snort.

-Ta gueule Reyes. Il savait, heureusement, que c'était ta manière de dire bonjour, et nous pas une vrai demande. Je rêve ou ta putain de chouette s'appelle aussi Reaper ? Bonjour l'originalité, qu'on donc un oscar à ce type, avec marque dessus "J'ai inventé un seul bon prénom, alors je le ré-utilise".

La première fois que Reyes t'avait parlé seul à seul, et s'était ouvert à toi, c'était pour t'adresser au sujet de la mort de son ancien hamster, qui s’appelait aussi Reaper, selon tes souvenirs. Peut être que tu te trompais, et peut être que ta remarque allait te faire passer pour le plus grand des abrutis. Regrettais-tu déjà de l'avoir lancé ? Oui. Avais-tu envie de changer de conversation au plus vite ? Aussi.

-J'ai emmené ma sous-merde avec moi de même, disais-tu en montrant ta grenouille. Et si on entrait histoire de ne pas rester planté là comme deux abrutis ?

Ta grenouille a l'air de s'en battre les couilles quand Reyes se penche pour lui faire un coucou. Si impoli. Tu ne peux pas te rappeler d'un seul moment où tu aurais vu une once d'émotion passer sur le visage de ton animal. Tu ne peux pas te rappeler d'un seul moment d'action, ou d'une seule envie, d'une seule colère. L'amphibien n'a jamais eu aucun avis sur quoi que ce soit. La politique actuelle ? Certainement pas. Des préférences en nourriture ? Non plus. Un grand type flippant qui s'accroupit pour faire coucou ? Why should I care ? Elle était vraiment maître du "je m'en bats les couilles", à telle point qu'elle dépassait surement la famille Strider dans son art. Dur pour les blonds à lunettes, mais c'était ainsi.

Se relevant, le plus grand souhaitait se renseigner sur le nom de l'animal. Tu le renseigna avec une joie contenue.

-Tu vas rendre les chiottes triste, à leur donner de faux espoirs. Ma grenouille s'appelle Kankri. C'est un nom de merde, oui. Mais la raison pour laquelle elle porte ce nom est surement la meilleure. Tu redressas la cage pour montrer la pauvre grenouille à ton ami. Cette pauvre petite crotte porte le nom de mon frère. Je lui ai donné ce nom car elle est silencieuse : un message à cet abruti de Kankri, qui devrait fermer sa gueule de même.

Ton ami leva les yeux au ciel, soupirant. Mince, avais-tu déjà réussi à l'exaspérer ? Une partie de toi te criait que tu avais juste ignoré sa menace, et que c'était surement la raison d'une telle réaction. Ton anxiété, cela-dit, avait décidé que c'était de ta faute, pour avoir ainsi insulté ta famille. Mal à l'aise, tu suivis le pas quand il rentra dans l'animalerie, ne laissant rien paraître de tes doutes.

Tu t'attardes sur les différents animaux en vente. Il y a tout type de créature magique que tu redécouvre à chaque fois que tu passes ici, te rappelant de ta première fois dans la boutique, quand tu avais onze ans. Ton grand frère t'avais accompagné, et tu avais pris l'animal le plus silencieux possible dans toute la boutique, l'animal le plus rouge aussi. Tu avais pointé la créature, et tu avais déclarer "Je veux ce truc. Il est silencieux et ça sera un putain de bon changement", tout en fixant Kankri dans les yeux. Tu avais ensuite eu la merveilleuse idée de lui donner son nom, histoire de faire passer le message. Ton plus grand regret restait qu'aucun crabe n'était autorisé à l'école, ou bien tu aurais emmené le tiens pour te tenir compagnie. La grosse bête à pince te manquait énormément. Elle restait chez toi, mais tu allais surement la revoir pendant les vacances, en août.

Cette idée positive te tira de tes pensées, alors que tu examinais le reste du magasin. Gabriel avait déjà eu le temps de se précipiter vers l'une des cages.

-C'est nul quand même qu'on ait pas le droit d'avoir des petits dragons miniatures. Ca fait de mal à personne. Oh oui, vous êtes trop mignons...

-C'est mignon jusqu'à ce que ça grandisse, Reyes. Ensuite ça te crame le cul, et ça ne rentre certainement plus dans ta chambre.

C'est lorsque tu le vis sortir un biscuit que tu réalisas qu'aucun vendeur n'était présent, ou bien ton ami se serait déjà fait sévèrement engueuler. Uh. Surement la personne de service était aux toilettes, ou en pose café. Not a wise move. Tu allais t'approcher de la cage, quand la voix grave de ton pote te surpris : le voila qui engueulait sa chouette, et voila que celle-ci fonçait sur toi, venant te désigner comme son nouveau propriétaire temporaire. Tu te mis à grogner.

-Hey ! Oh my god, fuck no- Casse toi du ma putain d'épaule !...

Tu secouas brusquement celle-ci, créant un sacré vacarme dans l'animalerie, la chouette commençant à hululer avec un décibel assez impressionnant. Tu reculas légèrement dans ton débat, manquant de renverser un aquarium. Heureusement pour toi, tu eus le réflexe de te décaler afin d'éviter la catastrophe.

-REYES ! VIENT ME DÉBARRASSER DE TA STUPIDE CHOUETTE ! AOUCH- ELLE ENFONCE SES PUTAINS DE SERRES-

Un tel boucan ne put qu'attirer le vendeur, qui sorti d'une des pièces arrière du magasin. Tu pu entendre un "qu'est-ce qu'il se passe ici ?!", suivi d'un "Sortez directement avant de renverser quoi que ce soit !" Tu étais bien trop occupé à tenter de retirer le stupide oiseau de ton épaule, cela-dit, pour essayer de sortir du magasin. La panique t'avait déjà gagné : et si cette putain de chouette enfonçait ses serres jusqu'au sang ?! Oh god, tu avais si peur du sang ! Surtout du tiens !

Il n'y avait que Reyes pour te sauver d'une telle situation.

Reyes avait saisit ton poignée brusquement, prenant son stupide volatile avec lui sous son autre bras, avant de sortir en trombe du magasin. Tu avais honnêtement eu du mal à suivre, courant à toutes jambes le plus loin possible, ce qui était complètement con, en soit, car le vendeur vous avait juste demandé de sortir du magasin. La surprise et la panique vous avait rempli d'adrénaline, cela dit, et ce n'est qu'au parc que vous vous étiez enfin arrêté. Tu t'assis sur un banc, effectuant le plus gros manspreading jamais connu, bras et jambes écartés, tête penchant en arrière. Tu étais absolument épuisé.

Tu te réveillas de ta "transe" de fatigue quand ton ami se mit à hurler. Tu te figeas, effrayé, pensant pendant un moment que c'était toi qu'il engueulait. Ca ne t'aurait pas surpris: ce gars passait très souvent du meilleur des amis à un espèce de père sévère, qui te regardait avec haine pour te dire à quel point tu le décevais, et qui te hurlais dessus quand tu n'étais pas d'accord avec lui.

C'est seulement quand il s'excusa et accusa sa chouette que tu réussis à te détendre. Tu avais toujours cette immense peur, au fond de toi, qu'il t'en colle une un jour. Une bonne grosse baffe dans ta gueule. Tu ne pouvais pas lui en vouloir, qui n'aimerait pas te frapper ? Cela ne t'empêchait pas d'angoisser sur cette possibilité.

-... Oh ! La chouette- Ok. Fuck. Ouais. Ouais, elle est conne. Pas ta faute, cela dit. Tu tentas de te reprendre, ne voulant pas montrer ta précédente panique à ton ami. Par contre, on est dans la merde. Comment on fait pour acheter nos truc, maintenant ?

Tu observas le magasin, bien plus loin, en pleine réflexion.

-On va devoir demander à quelqu'un de faire nos courses à nos places... Et merde, le vendeur pourra même pas avoir de renseignement sur nos stupides animaux, vu qu'on ne peut pas les emmener à l'intérieur sans provoquer une putain de guerre mondial. C'est vraiment un beau bordel !