Bubbles avait été élégamment surprise par la proposition d’une balade dans la forêt faite par Tanjirô. La petite blonde avait accepté celle-ci, malgré le fait que la température ne dépassait pas la barre du zéro et ce même en après-midi, depuis des semaines maintenant. La plus coquette des triplées Utonium appréciait beaucoup la compagnie du Japonais. Elle avait fait la connaissance de celui-ci grâce à Zenitsu Agatsuma, son ami et le président du club de Musique d’Ilukaan. L’adolescente était totalement fan de la motivation et de l’entrain dont pouvait faire preuve l’Ursirre, qui matchait avec sa propre énergie.

Pour l’occasion, Bubbles ressemblait presque véritablement à une bulle : sa grosse doudoune bleue lui donnait des airs de bonhomme Michelin, son bonnet tricoté à pompons (assorti ! Attention !) lui faisait une tête toute ronde et ses gros gants bleus (assortis ! Eux aussi ! He oui !) donnaient à ses mains l’allure de mini-gants de boxe. Seuls ses grosses bottes d’hiver beige pouvaient réellement la différencier des bonhommes de neige qu’avaient construit les élèves dans le parc, quand la météo un peu plus clémente et que le ciel était un peu plus assorti à elle. Le visage à moitié dissimulé derrière son écharpe bleue (assortie, oui, elle également), des petites volutes de vapeur traversaient les mailles de celle-ci, laissant apparaître le bout de son nez rougi par le froid qui le mordillait, lui et le reste de son visage.

Si ce n’était pas à cause du choix de sa tenue, car un temps pareil l’avait imposée à la jeune femme, c’était la marche difficile dans la neige qui avait mis la jeune blonde en retard. Car elle était en retard, comme d’habitude. Elle avait d’ailleurs envoyé un message à Tanjirô pour le prévenir, mais ne semblait pas l’avoir vu. Il était peut-être mort congelé ?! Oh le malheureux ! Pétrifié dans cette forêt, tel une statue de glace, qui ne reprendrait forme humaine qu’au printemps, des mois plus tard ?! C’eut été terrible si ça avait été le cas.

Son téléphone vibra doucement dans sa poche. Elle le sortit de sa poche en continuant sa lente progression vers le lieu de rendez-vous pour découvrir qu’elle venait de recevoir un message de son camarade. FIOU ! Il était en vie ! Et il lui disait qu’il l’attendait à l’entrée de la forêt, leur point de rendez-vous. Mais il n’avait donc pas reçu son premier message ? Il devait y avoir de sérieux problèmes de réseaux dans cette forêt.

Maintenant un gant sous son aisselle, elle pianota rapidement pour lui dire qu’elle était en route et pour s’excuser de son léger retard, faisant cliqueter ses longs ongles sur l’écran. Elle replongea bien vite son téléphone dans sa poche et tenta de presser le pas, comme pouvait le faire un bonhomme Michelin : de son mieux.

Peu après, elle reconnut la silhouette du jeune homme, particulièrement à son ironiquement haori à carreaux. “TANJIROOOOOOO !” s’exclama-t-elle avec grande joie.
 

Bubbles aussi secouait le bras vivement par-dessus sa tête tout en s’approchant du japonais, ce qui eut pour effet de la faire glousser pendant tout le temps qu’elle eut à marcher les derniers mètres qui la séparait du jeune Ursirre. La petite blonde était du genre bon public, mais alors très bon public en matière d’humour. Vraiment. Si elle était d’humeur, un rien pouvait la faire rire. Et en même temps, mieux valait trop rire que pas assez, n’est-ce pas ? En plus, avec ses airs de bonhomme Michelin, elle devait sûrement avoir une silhouette au grand potentiel comique, à cet instant.

Face au noiraud, l’adolescente dissimulait toujours son visage derrière son écharpe. Mimant la quête de chaleur de l’aîné des Kamado, mais aussi car son souffle avait fini par réchauffer son cache-col, ne serait-ce qu’un peu, elle plongea le bout de son nez aussi rouge que celui de Rudolf derrière son écharpe. Des plis en forme de pattes d’oies se formèrent aux coins extérieurs de ses yeux bleus. “Hihihi ça va bien, merci ! J’espère que toi aussi ! Je marche plus lentement que d’habitude mais je suis d’attaque à explorer cette forêt ! Wouhou !” s’exclama-t-elle alors, levant un bras en l’air tandis que l’autre se pliait devant son torse. Si la cervirald ne portait pas ses lourdes bottes d’hiver, elle aurait même sûrement plié une jambe pour ne se retrouver plus que sur un pied, en équilibre, mais si elle tentait l’exploit elle risquait de se vautrer dans la neige et finir trempée.

“Oui ! Allons-y !” s’écria-t-elle à son tour avant de lui emboîter le pas. Le Japonais devait se douter qu’elle n’était pas du genre à marcher dans une aussi grande couche de neige très souvent, car ils se mirent à marcher à un rythme qui n’était pas trop éprouvant pour la jeune femme.

Et puis même si notre coquette petite blonde était plus connue pour le soin qu’elle apportait à son apparence physique, ce qui passait non seulement par la tenue par le soin de son corps et une attention particulière au fait d’être bien reposée, tout comme ses deux triplées, Bubbles était une férue de sport ! Elle ne le laissait pas présager comme ça, mais elle avait des mollets d’acier.

Mais la jeune femme était aussi connue pour sa sociabilité. Tout le monde connaissait Bubbles, et Bubbles connaissait tout le monde. Elle avait donc toujours un sujet de discussion en réserve, peu importe son interlocuteur en face.

“Tu as revu ta famille durant ses vacances ? Comment vont tes petits frères et sœurs ?”
La jeune femme n’avait pas encore eu l’occasion de discuter avec Nezuko, l’autre sœur de la fratrie Kamado qui était présente à Ilukaan, avec laquelle elle s’entendait, ma foi, plutôt bien. C’était ça la vie de fashionista à l’école de magie canadienne : toutes les personnes avec un tant soi peu de style se connaissaient et avaient un plaisir fou à se croiser, même juste pour jeter un œil à leur tenue du jour et pouvoir s’en inspirer.

 

“Oooooooh”, soupira-t-elle en affichant une mine attendrie, bien que Tanjirô ne devait deviner celle-ci que par le ton de sa voix, emmitouflée comme elle l’était et marchant en parallèle de lui. “Trop cool comme programme ! Tu pourras me montrer cette fameuse danse au Dieu du feu ou c’est un truc secret que seuls les gens de ta famille ont le droit de voir ?”

La plus coquette des triplées était toujours heureuse d’apprendre que ça se passait bien entre les fratries. Elle se rendait compte que contrairement à Nezuko et lui, ou encore contrairement à Blossom, Buttercup et elle, cela ne se passait pas toujours très bien au sein de la même famille. Par contre, l’adolescente ne s’imaginait qu’avec peine ce que ça devait être de vivre loin de ses frères et sœurs la majorité de l’année.

Du plus loin qu’elle se souvenait, Bubbles avait toujours été entourée de ses sœurs. Elles étaient arrivées en même temps à Ilukaan, partaient aux mêmes endroits en vacances, retournaient voir leur père toutes ensemble. C’était d’autant plus difficile à imaginer une vie sans au moins une de ses jumelles pour elle car elle se trouvait être dans la même maison que Blossom, les Cerviralds. Peut-être que c’était plus facile à concevoir pour Buttercup, elle qui avait été répartie dans une autre maison que ses triplées, et faisait partie des Lupys.

A cette dernière question de son camarade japonais, le visage de la blonde s’illumina un peu. Elle dodelina de la tête de droite à gauche au rythme de ses pas en lui répondant, en signe de sa joie. “Oh oui ! J’ai reçu des bijoux et des cartes cadeaux pour des boutiques à Bloomburry ! J’ai hâte d’aller les utiliser, j’aurai bien besoin de nouvelles chaussures de sport car je les ai usées à force de courir partout dans l’école ce premier semestre.” Elle ponctua sa dernière phrase par un gloussement.

Les triplées Utonium avaient rejoint le conseil des élèves, cette année, sur la demande de Nathan. C’était un ami à Buttercup, mais Bubbles s’entendait bien avec lui alors elle avait accepté sa proposition d’être la chargée de communication. En même temps, les réseaux sociaux et l’image publique c’était un peu son dada. Mais cela voulait dire qu’elle avait aussi une plus grande charge de travail. Hé oui, être au conseil ne signifiait pas que communiquer sur les réseaux sociaux pour elle. Il fallait aussi préparer des affiches pour des évènements et les placarder dans des endroits stratégiques sur tout le campus de l’école.

En bref : Bubbles courait déjà beaucoup de base, mais alors là elle ne quittait plus ses chaussures de sport.

“C’est quand la prochaine fois que tu retournes voir ta famille, au Japon ? Et d’ailleurs, ils ont quel âge tes frères et sœurs ?” La blondinette lui posait la question car il lui semblait logique qu’ils viennent également à Ilukaan dès qu’ils en auraient l’âge. Après tout, Nezuko avait emboîté le pas de son aîné deux ans après lui.
 

Quand Tanjirô ne montra aucune réticence à lui montrer sa danse traditionnelle plus tard, la jeune Cervirald serra le poing en signe de victoire dans sa poche, l’avançant et reculant légèrement comme elle aurait pu le faire devant son torse. Bien qu’elle était chaudement vêtue et que ses mains étaient fourrées dans une paire de gants bien épais, la petite blonde ne voulait pas se risquer à se geler les doigts en les sortant des cavernes chaudes qu’étaient les poches de sa doudoune bleue. Le japonais était l’une des personnes les plus gentilles qu’elle avait rencontrées depuis le tout début de sa scolarité à l’école de magie canadienne, aussi ça ne l’étonnait pas vraiment que de le voir répondre par la positive à sa requête.

“Mais je connais déjà Nezuko !” dit-elle avec sa voix montant très légèrement dans les aigus, ce qui était bon signe dans ce contexte précis. “Elle m’a cousu l’un de mes crop top préférés ! Il est du même bleu que mes yeux.” ajouta la jeune américaine d’un ton enjouée. “Mais bon, je suis pas prête de le reporter de si tôt,” dit-elle dans un gloussement.

En effet, ce n’était clairement pas la saison des crop tops. C’est ce que ses orteils tout contractés dans ses bottes lui affirmaient en tout cas. Le froid commençait à les mordiller, provoquant des fourmillements dans ses extrémités malgré la double couche chaussettes-collants qu’avait mise Bubbles.

Tanjirô était gentil, mais aux vues de ses dires, il l’était tout autant si ce n’était plus avec sa petite sœur. Ça mettait du baume au cœur de la plus coquette des triplettes, qui ne pouvait s’empêcher de fondre en imaginant la scène : l’aîné Tanjiji qui portait une immense et lourde pile de sacs de nombreuses boutiques tandis que sa petite sœur Nezuko trottinait devant en chantonnant gaiement. Elle n’était pas certaine que Nezuko ait le courage de chantonner en public, par contre. Dans tous les cas, l’Ursirre était un grand frère attentionné, elle ne pouvait absolument pas en douter.

La jeune américaine hocha la tête à la réponse du noiraud. Oh ! Leurs cadets ne les avaient donc pas suivi à Ilukaan pour les études ? Cela l’étonnait quelque peu, mais elle décida qu’elle ne poserait pas la question. Cela pouvait être déplacé de sa part.

“La rentrée est en avril au Japon non ? Ils devraient avoir des vacances aux alentours des célébrations de Pâques dans ce cas !” répondit la jeune femme sur un ton qui se voulait motivant. Quatre mois pouvaient paraître très long quand il s’agissait de vivre loin de sa famille, de ses proches, ou même de ses amis. Mais pour Bubbles, les quatres derniers mois avaient filé à une vitesse folle ! Elle n’avait pas vu le mois de novembre passer tellement elle avait été occupée. Que ce soit en révisions, ou pour le conseil.

“Il faut qu’on fasse gaffe à pas trop s’enfoncer dans la forêt, si on commence à avoir froid et qu’on veuille rentrer rapidement,” dit Bubbles sur un ton de conseil. Elle pouvait tenir encore un moment, mais il est vrai que le froid commençait à attaquer ses membres et les rendre un peu douloureux.
 

Bubbles réalisait bien à quel point Tanjirô devait être fier de sa petite sœur. S’il avait des étoiles dans les yeux, il en avait aussi plein la voix, car son ton était emplie d’une certaine noblesse à l’égard de sa cadette. Et puis, il avait de quoi être fier : la plus coquette des triplettes ne s’affichait pas dans n’importe quelle tenue en public ! Elle faisait attention aux moindres détails de son apparence, pour se mettre le plus en valeur. Elle avait une belle gueule, c’était pour la mettre en avant au mieux, sapristi ! Et si la blonde appréciait mettre des belles tenues et dessiner des vêtements, jamais elle n’aurait été capable de les créer de toutes pièces avec ses dix doigts. Qualité qu’elle enviait un peu à la jeune japonaise, mais sans aucune forme d’amertume.

Ah Tanjirô … Il était vraiment trop altruiste. Capable de faire passer ses cadets et leur stress avant ses propres besoins. Il ne se rendait sûrement pas compte que sa présence pouvait, au contraire, leur apporter un soutien rassurant dont ils auraient potentiellement besoin avant une nouvelle rentrée. Un phare dans la nuit, comme une lumière familière avant de naviguer sur des eaux de savoir qui leurs étaient encore inconnues.

Bien que son champ de vision soit réduit par son bonnet et son écharpe bleus, la jeune américaine voyait très bien que le montagnard commençait à grelotter de froid. Elle ne pouvait pas lui en vouloir : elle l’avait fait attendre en arrivant en retard à leur rendez-vous ! Et ses propres pieds avaient commencé à trembler de froid dans ses grosses bottes noires, il y a déjà quelques minutes de cela.

Quand le jeune Ursirre lui proposa de se mettre sur le retour, la petite blonde hésita quelque peu. Elle avait fait quelques pas de plus que le japonais, ne s’attendant pas à le voir s’arrêter. Elle appréciait beaucoup passer du temps avec lui, et elle trouvait leur discussion intéressante. Mais après tout, rentrer à l’école ne signifiait pas forcément la fin de leur après-midi passée ensemble. Et puis, elle-même commençait à ne plus supporter les flocons qui leur tombaient dessus inlassablement.

“Je vais être franche,” commença-t-elle sobrement, “mais moi aussi j’ai les pieds complètement gelés. Ils sont à deux doigts de devenir des glaçons.” Elle ponctua sa phrase d’un gloussement, mais sa voix commençait elle aussi à être tremblante de froid aussi celui-ci se termina par un “brrrrr” incontrôlé. Son corps prenait la décision à leur place, finalement.

“Hé bien, rentrons ! On n’aura qu’à continuer à discuter autour d’une bonne tasse de thé ou de chocolat chaud !” dit-elle d’un ton qui se voulait motivant. Cette fois-ci, c’est elle qui entama la marche dans la direction opposée. Mais c’était beaucoup plus simple qu’avant car il lui suffisait de marcher dans ses pas, ayant déjà creusé la grosse couche de neige molle qui recouvrait le sol de la forêt. L’intérieur de ses chaussures était trempé, elle sentait qu’elles faisaient “splotch splotch” à chacun de ses pas. Ceci renforçait sa hâte de retourner au chaud, se blottir sur un canapé dans le dôme où ils pourraient continuer à faire connaissance.