La fraîcheur caractéristique des jours d'hiver approchant régnait à présent à Ilukaan.

Parmi ceux qui semblaient rester imperturbables face au changement des saisons, il y avait Kyojurô.
L'aspirant Auror était fidèle à lui-même, arpentant les couloirs de l'école, le visage affublé d'un sourire confiant et tranquille, non dépourvu d'une chaleur certaine qui réconfortait bien des coeurs face à la monotonie des jours d'école et à la dépression saisonnière qui se faisait ressentir.

Que les jours raccourcissent, qu'ils deviennent plus sombres et plus froids ne semblait pas avoir la moindre importance pour l'Ursirre. Il restait aussi rayonnant qu'un Soleil d'été.
Vif, il venait en aide à ses pairs dès que le besoin se faisait ressentir. Assistant ses cadets aux devoirs si jamais ils butaient sur un exercice, encourageant les sportifs qui couraient dans le campus le matin, avant les cours, peu motivés à l'idée de faire face aux matins obscurs et glacés...
Il restait fidèle à sa réputation.

Lui-même répondait à un emploi du temps strict qu'il s'était lui-même imposé et qu'il suivait avec assiduité.
Comme n'importe quel guerrier à l'époque des samouraï, ronins et seigneurs de guerre, Kyojurô s'imposait une stricte discipline, héritage de l'éducation inculquée dans sa famille depuis des siècles. Il convenait après tout aux héritiers du nom Rengoku d'être élevés de la sorte et de faire honneur à la réputation de cette famille qui n'était plus à refaire dans le monde magique et dont les représentants, aux longs cheveux blonds ondoyant dans l'air comme des flammes, étaient associés à la défense magique au Japon.


Et l'aîné des fils de Shinjurô et Ruka était plus qu'honorer de porter ce nom, cet héritage familial et ces grandes responsabilités qui lui incombaient depuis la naissance.


Sans doute parce qu'il associait ceci à un quelconque autre devoir qui reposait sur ses larges épaules, Kyojurô avait pris sous son aile bienveillante bien des jeunes personnes, bien plus souvent des jeunes garçons, bien que la première personne à porter officiellement le titre de "disciple" était Kanroji Mitsuri, une demoiselle ô combien talentueuse et vertueuse, dont il était extrêmement fier, au point d'avoir confectionné lui-même un haori blanc pour l'un de ses anniversaires, c'était dire !

Il n'avait pas perdu cette habitude de surveiller de près certaines jeunes âmes au sein de l'école, comme un grand-frère. Sans doute une déformation de son statut d'aîné au sein de la maisonnée Rengoku.
Plus encore, parfois, il semblait être une figure paternelle pour certains dont les situations familiales étaient plus que complexes.
Avec grand plaisir, Kyojurô encourageait ses cadets quand ils étaient dans le droit chemin, les sermonnant quand le besoin se faisait ressentir.
Mais jamais il ne les laisserait tomber.

Parmi tous les adolescents pour qui il se démenait, un trio se détachait particulièrement. Tous trois en Cinquième Année, avec de grandes qualités qui promettaient qu'ils deviendraient des individus exceptionnels. Il n'était que naturel que Kyojurô aide ces jeunes bourgeons à s'épanouir et à fleurir n'est-ce pas ?

Au sein de ce petit groupe, un élément était particulièrement... remarquable, tant par la hure qu'il se plaisait à porter que par le fracas qui retentissait à son approche... Mais tout cela laissait Kyojurô de marbre, jamais il ne jugeait ces jeunes âmes, au contraire, il les encourageait, malgré leurs excentricités et resterait présent aussi longtemps que ça se pouvait s'il y en avait le besoin.

C'est pourquoi, quand Inosuke Hashibira, ce jeune à la tête de sanglier, lui avait envoyé un message lui demandant s'il était possible de lui apprendre le kendo, voie du sable ancestrale que suivait Kyojurô depuis sa prime jeunesse, ce dernier avait accepté sans la moindre hésitation et lui avait demandé de le rejoindre à son entraînement du jour.


L'Ursirre attendait donc le jeune garçon au milieu des arbres aux feuillages rouges, oranges et jaunes. Il arborait une tenue simple, sans avoir sorti l'ensemble de l'armure. Un hakama noir et un kendo-gi rouge qui flottaient sous la légère brise du milieu d'automne. Il avait rassemblé son épaisse chevelure en un chignon haut et se tenait avec noblesse au point de rendez-vous, paumes rassemblées l'une sur l'autre sur la garde de son bokken en bois de cerisier. Celui-ci avait sa pointe contre le sol tendre.

Enfin le plus jeune arriva, en retard, mais Kyojurô ne cillait pas, ni ne dit quoi que ce soit, comme s'il venait à peine d'arriver.
Il adressa une expression solaire à son jeune disciple.



Il éclata d'un rire franc et chaleureux, fidèle à lui-même, comme s'il n'avait pas déclaré des paroles relativement gores avec une légèreté peu commune.




Ses grands yeux, s'apparentant à un strigidé, observèrent le plus jeune, attendant son retour sur le programme du jour.

À sa place, beaucoup auraient haussé le ton, manqué très vite de patience et durci la main face au manque flagrant de discipline du plus jeune... Même son propre père n'aurait pas été disposé à dispenser ses enseignements face à un tel phénomène, son flegme d'autrefois n'étant plus.


Ce n'était pas le cas de Kyojurô qui fixait son cadet de ses grands yeux semblables à ceux d'un coq. S'il était d'une nature impatiente, ayant tendance à brûler certaines étapes et à tirer des conclusions très hâtives sur certains sujets, il savait se montrer mesuré et même d'une patience d'ange avec ses cadets. C'était sûrement l'exception qui confirmait la règle.

Le blond mettait un point d'honneur à servir d'exemple aux plus jeunes. Il devait avoir une conduite exemplaire ! Ils formaient le futur du monde et il était donc tout naturel de les encourager à donner le meilleur d'eux-mêmes, cela ne pouvait que donner de l'espoir pour l'avenir.


Si Kyojurô n'était pas beaucoup plus vieux qu'eux, quoi que l'on pût penser le contraire au vu de de son attitude qui lui donnait des années en plus (ou qui donnait l'impression qu'il avait traversé les années depuis l'ère Taisho), c'était en figure d'exemple qu'il s'efforçait d'agir, d'ouvrir la voie pour inspirer ses juniors et qu'eux-mêmes le fassent à leur tour plus tard.


C'était pour cela qu'il n'aurait pas été correct de gronder Inosuke qui ne demandait qu'à faire de son mieux, aussi maladroitement cela pouvait-il être.
Il ne fallait absolument pas le dégoûter mais profiter de son enthousiasme pour le diriger correctement ! En cela, il fallait faire preuve de diplomatie, ce qui n'était pas bien compliqué pour l'Ursirre qui complimenta son jeune disciple. Tout passait mieux avec des louanges... Et surtout chez le jeune Hashibira chez qui les flatteries faisaient mouche.





Tout duel digne de ce nom devait se faire dans les règles, et les cieux savaient à quel point Kyojurô Rengoku y était attaché, manifestant un zèle particulier pour celles-ci, parfois incompréhensible de ses pairs.

Qu'à cela tienne, cela n'avait pas d'importance ! Enfin, il n'y accordait pas d'importance, disons le franchement... Il ne le remarquait même pas, comme s'il était déconnecté d'une partie de son environnement parce que ses yeux étaient rivés sur son but.

Calant son arme au creux de son coude, l'aîné Rengoku s'approcha du jeune Lupy, se permettant d'approcher sa paume libre de la garde de son arme, rejoignant sa compagne.




Ceci fait, il porta une main dans le dos musclé et bien développé de son cadet, malgré son jeune âge. Il possédait un physique hors du commun, ce qui était plus qu'admirable !

Délicatement, il encouragea le garçon à se redresser un peu, pour que son dos soit parfaitement droit avant de tapoter ses genoux pour qu'il les fléchisse un peu.

Sans aller trop vite, ce qui risquait de brusquer Inosuke qui était un peu comme un animal sauvage qu'il fallait apprivoiser, l'aspirant Auror corrigeait sa position afin qu'elle soit adéquate pour leur duel, avec un sourire sympathique et encourageant, comme d'habitude.


Il avait bien sûr hâte de commencer, mais il fallait que les conditions idéales soient réunies pour ce faire.


Restait à voir si le jeune Hashibira était disposé à modifier sa position selon les directives de son aîné...