ft. Laurent de Vère
Laurent a perdu son piaf

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Lucifer était un homme très travailleur, un véritable bourreau de travail. Il se plaignait rarement de cet état de fait car il en avait toujours été ainsi. En tant qu'aîné d'une fratrie de sept frères, il était évident qu'il ne pouvait pas refuser toutes les responsabilités qui allaient avec. Ou du moins, cela serait très irresponsable de sa part. Il voulait soulager au mieux le poids de ses parents en agissant comme le grand frère poule qu'il était et avait donc pris l'habitude après sa quatrième année de tout gérer.

Les tâches à la ferme de Juneberry n'échappaient donc pas à cette règle. Il n'était certes pas un homme habitué à ce genre d'activités paysannes, leur préférant l'administratif et les papiers, mais il y mettait les efforts. C'était normal d'aider, après tout, ce couple qui les accueillait pour deux mois entiers dans ce charmant cottage. Cependant, il espérait que cet état d'esprit s'applique à tout le monde et que certains élèves, pour ne citer personne, faisaient en sorte d'aider consciencieusement et avec sérieux…

Oh, que de claques qui se perdaient !

Quoiqu'il en soit, l'étoile du matin était présentement en train de tondre les Eemcis. Ces créatures étaient…fascinantes et un petit peu inquiétantes quand on y réfléchissait bien. Si ces dernières étaient utilisées dans certains pays pour appliquer la peine capitale, c'était bien pour une raison et cela l'intriguait et le fascinait énormément. Il fallait dire que Lucifer avait un certain goût pour les trucs glauques…

Pour effectuer sa tâche, le brun avait le choix entre la baguette ou bien une sorte de tondeuse magique. Il préférait l'utiliser comme leur avait expliqué les gérants de la ferme de peur de blesser la créature. Après tout, un diffindo mal placé, ça pouvait vraiment faire des dégâts. Cela étant, il était toujours armé d'un seau d'eau afin de mouiller la laine de chaque eemci et d'y déloger de malheureux prisonniers. Etrangement, il y en avait toujours : des élèves malchanceux ou inattentifs aspirés par le nuage de laine. On les retrouvait souvent totalement assoupis. C'était définitivement dangereux.

La voix de Laurent de Vère, étudiant de la même maison, lui vint aux oreilles et le sortit de ses pensées. Lucifer n'avait pas vraiment d'avis sur ce dernier. Ou du moins, il avait un avis…neutre et il semblerait que cela était réciproque. Bien qu'ils aient eu l'occasion de se côtoyer à de multiples reprises pendant plusieurs années, ils n'avaient jamais vraiment réussi à briser la glace. Après, est-ce que l'un des deux le voulait, rien n'était moins sûr.

A l'annonce de la question du Français, Lucifer dut réfléchir un instant.

— Bonjour De Vère. Je ne pense pas avoir vu de diamant de Gould dans le coin, malheureusement. Mais cela a peut-être échappé à mon regard. En tout cas, si ça peut te rassurer, je n'ai vu aucune plume colorée dans le tas de laine donc si l'oiseau que tu cherches est dans les parages, il se trouve encore dans le troupeau non tondu.

Il se redressa et lui lança un regard équivoque : il était prêt à l'aider bien sûr mais Laurent allait devoir lui donner un petit coup de main.

— A moins que tu ne veuilles utiliser l'aguamenti, tu peux aller récupérer des seaux d'eau là-bas. Nous allons devoir les arroser pour nous assurer que ton oiseau ne se trouve pas ici. Allez, au travail !

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Il adressa un sourire sardonique à Laurent lorsque ce dernier afficha son air outré. C'est vrai qu'il était plutôt autoritaire et se comportait comme un véritable tyran quand il s'y mettait. C'était sans doute pour ça que le courant ne passait pas vraiment entre eux. Cela dit, c'est agréable surpris qu'il vit le blond obéir, chercher les seaux et les remplir et ce, sans se plaindre. Tiens donc.

Il glissa sa main dans ses cheveux noirs de jais pour dégager ses mèches rebelles et se mit également au travail. Les pauvres bêtes ne ressemblaient vraiment à rien quand on les mouillait. On croirait voir des serpillères vivantes.

Dans tous les cas, l'oiseau n'était encore nul part. Les deux Strixyst s'attelaient pourtant à lancer de l'eau sur chaque créature qui signifiait son mécontentement par un bêlement.

— Comment ces gens font-ils quand il n'y a aucunes personnes mis à part pour s'occuper d'un tel troupeau. J'ai l'impression que nous n'avançons pas.

— J'imagine qu'il y a toujours pas mal de monde. Des groupes de sorciers bénévoles doivent venir, il n'y a pas que les groupes scolaires. Ou sinon, peut-être emploient-ils des elfes de maison à mi-temps ?

Il soupira en lançant un énième seau d'eau. Vide. Rien. Pas d'oiseau. Agacé, il claqua sa langue contre son palais.

— Écoute, je me demande si ton animal de compagnie est vérita-….

Il hoqueta de surprise en sentant une forte pression sur son bras. Pourquoi diable Laurent s'accrochait-il ainsi désespérément à lui ?!
Malheureusement, ce fut bien trop tard que l'Américain compris la gravité de la situation. Très vite, il bascula en arrière, emportée par la prise du Français et ils tombèrent ensemble…Tout arriva très vite. Pourtant, il avait l'impression que tout se passa au ralenti. Ils finirent gobés par la laine magique du eemci tandis que Lucifer tomba sur Laurent…

Ok. Ça, c'était embarrassant. Digne d'un film de comédie romantique. Il ne manquait plus qu'ils s'embrassent et c'était le pompom.

— Mais qu'as-tu fais, De Vère ? Tu te rends compte que, maintenant que nous sommes là-dedans, nous ne pouvons pas sortir sans une aide extérieure ?!

Véritablement agacé et aigri, Lucifer fusillait son interlocuteur du regard.

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Il détestait cette situation et ses muscles commençaient à sérieusement avoir les nerfs à vif, tandis que De Vère déblatérait tout un tas de complaintes alors qu'il était CELUI qui les avait mis dans une telle situation. Par Merlin, heureusement que sa patience était grande, forgée par les multiples bêtises de ses frères. Mais il était vrai que s'énerver ne résoudrait en aucun cas le problème dans lequel ils étaient fourrés…

— Mais bien sûr, quelle idée aies-je d'avoir des réflexes d'humains, certainement pas une chose qui pourrait t'arriver tant ça sort du cul Hellborn.

— Oh je t'en prie. Ton orgueil t'empêche donc de reconnaître que c'était un geste stupide ? Et je vois que tu as un langage fleuri en plus.

Le comble pour Lucifer de titiller quelqu'un sur son orgueil. Mais bon. Ce n'est pas lui allait avouer qu'il en avait, après tout.

— Estime-toi heureux de ne pas supporter ton propre poids.

Il soupira.

— Tu aurais pu tomber sur pire : mon frère Beelzebub par exemple. Encore heureux que je ne sois pas celui écrasé, il manquerait plus que ça.

Ses muscles tremblaient un peu. Garder cette position n'était pas agréable du tout. Et encore moins lorsqu'un Français lançait un aguamenti sur le plafond de laine et que l'eau RETOMBAIT littéralement sur vous. Il grogna et fusilla une nouvelle fois Laurent du regard. Il hésitait à user de son autorité d'aîné pour l'engueuler comme on gronderait un enfant, mais il avait suffisamment de respect pour De Vère pour ne pas le faire et il savait que cela ne servirait rien si ce n'est démarrer une véritable dispute.

— Les propriétaires font un tour tous les jours, ils sont habitués par ces... Accidents. Qui plus est, tu n'es pas seul à tondre cette semaine n'est-ce pas ? Nous ne devrions pas rester ici bien longtemps.

— Cette semaine, je tonds avec Belphegor, Owen et Seishu. Mais j'ignore où ils en sont. De toute façon nous ne pouvons rien faire à part attendre.

Connaissant son petit frère, il était sûrement en train de taper sa meilleure sieste au pied d'un arbre. Quant aux deux autres, il n'en savait rien. Ce n'est pas comme s'il en était très proche.

— En attendant, essaye de te décaler. Je ne compte pas encore mourir asphyxié aujourd'hui.

C'est vrai que ce n'était pas une mauvaise suggestion malgré son ton piquant. Endolori, il réussit à se décaler et à se laisser tomber à côté du blond.

Puis, un long silence s'ensuivit.
Un très long silence.
Plus parce que les deux étaient plongés dans leurs pensées que par volonté de ne rien dire.

Bien que la situation n'invitait pas vraiment à partir sur une discussion joviale. Lucifer brisa finalement le silence : autant faire passer le temps et faire preuve de maturité en ravalant un CHOUIA sa fierté.

— En tout cas, j'ignore où est ton oiseau. J'ose espérer qu'il n'est pas dans le reste des eemcis que nous n'avons pas eu le temps de tondre.

Son ton, plus calme désormais, se voulait rassurant. Perdre un animal de compagnie n'était pas une chose qu'il espérait à qui que ce soit. Son shiba à trois têtes avait déjà fuit du manoir, une fois, et cela avait pris un jour entier pour le retrouver. Cet épisode lui avait fait une petite frayeur. Il ne pouvait donc que trop bien imaginé le stress dans lequel était plongé Laurent.

— Comment se passe ton séjour à la ferme ? J'aurais plutôt pensé que tu profiterais de ces vacances estivales pour partir dans un endroit, disons, plus confortable avec ton fiancé. Cette ferme n'est pas la destination la plus idyllique et romantique pour passer du temps avec sa moitié.

En tout cas, ce n'est sûrement pas ce qu'il choisirait, lui…

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Aussi incongru que cela pouvait paraitre, la discussion continuait sans accroc et allait même bon train. Comme quoi, être coincés dans une laine de créature magique, ça rapprochait…

— Ce serait bien infortuné comme situation, si c'était le cas. Les Diamants de Goulds est une espèce fragile, protégé à l'état sauvage. Le mien ne l'est pas, mais il n'empêche que c'est excessivement dangereux. Je suis persuadé d'avoir fermé la cage, je m'en assure à chaque fois. Une telle erreur...

— …Est humaine.

Il le coupa par cette simple affirmation. Cela ne servait à rien de se flageller outre mesure. S'occuper d'un familier était une tâche ardue et même les personnes les plus parfaite pouvait faillir. Le tout était de ne pas recommencer les mêmes erreurs.

Patiemment et sans le couper de nouveau, Lucifer écouta la tirade du blond lui expliquant les raisons de sa venue à la ferme. Finalement, ils n'étaient pas si différents Laurent et lui. Il pouvait bien reconnaître cet état de fait. Peut-être était-ce pour cela qu'ils ne s'entendaient pas si bien que ça.

— Tu te douteras que c'est justement pour cette raison que je suis à la ferme. Je refuse catégoriquement de laisser mes frères sans surveillance ici. Tu as du entendre la nouvelle d'ailleurs : apparemment un épouvantard a quitté son champ ou a été relâché, créant un vrai chaos dans toute la propriété. Si l'on me disait que c'était de la faute de Mammon ou bien d'un autre de mes frères, je ne serai même pas surpris.

Il grogna rien qu'à cette pensée.

— Ils ont beau être tous majeurs dans le monde sorcier maintenant, ils restent de véritables enfants que je dois constamment sermonner. La ferme et les tâches au soleil ne me plaisent guère, mais je n'ai pas le choix. Et comme certains ne désirent pas forcément rentrer au manoir familial pour passer du temps avec leurs amis, je me dois d'être également présent. Cela peut paraître légèrement exagérer, mais j'ai déjà tenté plusieurs fois de les laisser se débrouiller sans moi. La preuve, je suis suffisamment absent en étant en alternance au tribunal magique canadien. Mais quand je reviens, j'ai toujours leurs bêtises à gérer… Je n'ose pas imaginer ce que cela va rendre une fois que je partirai de la maison.

Ouf.

Tout cela était sorti d'une traite. Il n'aurait jamais imaginé que cette aventure se transformerait ainsi en discussion chez le psychomage.

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Lucifer ne faisait plus vraiment attention au temps qui passait en compagnie de Laurent. Comme c'était étonnant comme réalisation. Peut-être était-il finalement de meilleure compagnie qu'il ne l'aurait pensé. En tout cas, ce dernier l'écoutait et ne le coupait en aucun cas. Bien que le contraire l'aurait étonné, il était toujours agréable d'avoir une oreille attentive en guise d'interlocuteur.

Enfin…
Au final, Lucifer était une personne qui se confiait peu. Mis à part à Miss Morgendorffer à qu'il lui arrivait de raconter certains cauchemars liés à ses traumatismes. Mais pour ce qui l'en était de ses responsabilités, c'était une autre histoire.

— En ce qui concerne tes frères, il est vrai que ces derniers sont parfois assez terribles. Et pourtant, je suis ami avec Satan. Peut-être pourrais-tu tenter de repartir malgré tout, plus longtemps. Si tu continues de toujours les couvrir, c'est peut-être la raison pour laquelle ils continuent sans penser aux conséquences. Ils savent que le grand frère va réagir derrière. Il serait bon de tenter autrement, qui sait.

— Satan peut quelques fois être le pire de tous, surtout quand cela me concerne.

Il soupira une nouvelle fois. C'était fou…ce que Satan et Belphegor pouvaient faire pour rendre de sa vie un enfer (haha, un enfer pour Lucifer, tu captes la subtilité de la blague ?). Un véritable petit duo infernal.

— Mais…Ce que tu dis n'es pas totalement empli de mauvais sens. De toute façon, il y aura bien un moment où je vais partir. Cela dit, j'ai bien peur des conséquences que cela pourrait déclencher-

— Je me doute que cela soit compliqué. Tu as beau t'en plaindre, je sais que c'est aussi de l'inquiétude. Vous avez une façon bien étrange de montrer l'affection que vous avez les uns pour les autres. La tienne, c'est de régler leurs problèmes, même si ce sont eux qui les cause. Et d'être là. Je ne sais pas si tu te sens si forcé d'être ici, quelque chose me dit que c'est aussi une bonne façon de passer du temps avec eux, car justement tu les vois moins désormais. Vous ne devez pas être habitué à cela.

— ….

Il resta silencieux à cette réplique du blond. Car il avait visé dans le mille.
C'était comme ça que Lucifer montrait l'amour qu'il avait pour sa fratrie : par mille et une remontrance, par le fait qu'il était h24 sur leur dos, et par une inquiétude constante. Ce n'était pas la plus saine des choses, mais ça avait toujours été le cas. Même si évidemment, ils faisaient des activités ensemble et montraient leur affection les uns envers les autres d'une autre façon également, le fait que Lucifer soit toujours là était vraiment une habitude qu'il avait toujours eu depuis l'adoption de ses frères.
Ce rôle de grand-frère, il ne le détestait pas. Il le prenait cependant trop à coeur… Alors lâcher prise oui…c'était ce qu'il y avait de mieux à faire.

Somme toute, entendre une telle vérité de la part de Laurent avait un goût un peu amer.

— C'est amusant. Car malgré tout, vous êtes l'une des fratries les plus unies du campus. Crois-moi que s'ils te détestaient réellement comme quelques uns aiment le dire, cela se sentirait bien plus. Crois-en l'expérience.

— …Oui. Notre lien fraternel est important. Je pense qu'il l'est pour chacun de mes frères. Surtout depuis...depuis…

Il ne termina pas sa phrase. Mais évidemment, il pensa directement à Lilith, sa chère petite soeur obscurial. Ce tragique accident avait resserré les liens des Hellborn d'une façon indescriptible.

Il esquissa cependant un léger sourire.

— ….Mais…Je te remercie de reconnaître cela en ma famille et de me dire de tels mots. Si je ne me trompe pas, tu n'es pas fils unique. N'avais-tu pas un frère à Ilukaan ? Comment est votre relation ?

Et tandis que la discussion battait son plein, du brouhaha à l'extérieur se faisait entendre. Par Merlin, est-ce qu'on allait enfin les sortir d'ici ? Il s'écria de sa voix grave :

— Hé Ho !! Par ici !!!

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