La Cerviralde profite du temps clément durant ce week-end de février. Contrairement à Republic City, le climat hivernal canadien n’est pas ce qui pourrait être qualifié de doux ni d’ensoleillé. Oh, l’américaine a bien fini par s’y accoutumer et y trouver même quelques avantages. Après tout, toute cette couverture neigeuse et ces températures nulles possèdent quelques charmes. Le froid stimule d’autant plus les méninges de la mécanicienne, faisant germer dans son esprit d’inventrice des idées pour subvenir à certains besoins, dont elle n’avait pas idée avant de rejoindre Ilukaan. Si elle n'avait pas jamais mis les pieds dans l’école de sorcellerie internationale, elle n’aurait probablement jamais pu imaginer qu’il puisse faire aussi froid et donc rajouter la fonction de chauffage sur ses gants magiques.
 
L’une des autres bonnes choses qu’elle a découverte au cours de son apprentissage de la magie l’a conduite directement à cette sortie : le karting en hiver. Bien sûr, il ne s’agit pas de conduire sous le blizzard : elle a déjà essayé et elle n’en tire pas spécialement une bonne expérience. Non, cela est bien trop intense et désagréable. Néanmoins, lorsque la météo n’est pas en pleine ébullition et que le soleil joue à cache-cache avec les nuages, l’expérience est tout à fait saisissante, sans en être trop excessive. Avide de sensations fortes, celle dont les rumeurs l’apparentent à Lucifer Hellborn prend énormément de plaisir à piloter en karting par des températures basses. L’air fouettant sa chevelure d’ébène, le froid pénétrant sa peau, la vitesse transformant les paysages qui l’entourent et, par-dessus tout l’adrénaline qui brûle dans son sang-mêlé, renforçant la moindre sensation : comment ne pas devenir ivre de bonheur ?

Voilà l’une des raisons qui avaient motivé Asami à apprendre à piloter des véhicules rapidement : la vitesse. Bien sûr, il y a aussi cette volonté d’indépendance, de se déplacer rapidement ou encore la compétition, mais tout cela lui est venu plus tardivement.  La sensation de vélocité et de rapidité l’a tout de suite subjuguée. Peut-être était-ce la nouveauté à cette époque-là ? Elle ne saurait le dire, cela lui fait toujours le même effet après des années de pratique.
 
 
D’autant que la présence d’un karting à Bloombury lui a permis de continuer à conduire en toute sécurité tout au long de son adolescence. Certes, ce n’est pas la même chose que de piloter son propre engin sur le circuit de son choix. Néanmoins, la Sato trouve que cela constitue un bon challenge : le parcours est imposé donc il est nécessaire de s’adapter et il est possible de faire la course avec sureté, même avec des personnes n’ayant pas encore leur permis de conduire. Quelle belle opportunité ! Aussi, le karting propose des options magiques, ce qui rend les courses d’autant plus palpitantes !
 
 
Curieuse de connaître ses opposants du jour, la brune arrête sa machine, une moto volante qu’elle a pris soin de modifier à son goût, tout en restant dans les clous de la loi. Ce serait bête de se faire arrêter pour un excès de génie non contrôlé. Elle prend soin de la garer puis de la sécuriser autant que possible. Elle y tient comme à la prunelle de ses yeux, mal avisé serait la personne qui tenterait ne serait-ce que de la toucher sans son autorisation. Une fois l’opération finement menée, elle retire son casque ainsi que ses lunettes de pilote, laissant sa chevelure reprendre sa place et flotter autour de son visage fin. Elle souffle un peu sur ses verres verts, afin d’y ôter toute la buée qui s’y est accumulée avec l’humidité ambiante. Elle est habituée à répéter cette opération dans cet ordre, chevauchant régulièrement son motocycle en tout temps, que ce soit pour des courses urbaines ou bien par simple plaisir personnel.
 
 
Ses talons claquent sur le bitume avant de résonner dans le hall d’accueil du karting. Avec sa besace, on pourrait penser qu’il ne s’agit pas d’une personne déambulant dans ces lieux pour faire du karting, mais plutôt d’une mère venant chercher son enfant après une activité extra-scolaire. Pourtant, les clients les plus réguliers savent que cette besace renferme quelques surprises, puisqu’elle est enchantée magiquement pour ne pas avoir de fond. Certains prétendent même que le secret de sa beauté de porcelaine ou encore celui de ses victoires résideraient dans cette toile surnaturelle. Cela l’amuse plus qu’autre chose, à vrai dire.
 
 
Alors que l’aînée s’avance vers le comptoir pour entamer la conversation avec le patron, elle aperçoit une tête blonde aux traits encore enfantins, qui semble être légèrement déboussolée. Un sourire chaleureux aux lèvres, elle s’approche alors de la Rouge avant de se mettre à sa hauteur :
 
« Tout va bien ? C’est la première fois que tu viens ici, n’est-ce pas ? Ta tête me dit quelque chose mais je suis sûre de ne t’avoir jamais eu comme adversaire de karting. »
 
 
 

Voyant sa cadette reculer, la Verte fait de même. Peut-être s’est-t-elle trop approchée, aussi il convient de mettre de la distance entre les deux sorcières. Elle l’a sûrement effrayé, ce qui n’était pas son intention première. Ayant le contact tactile confortable et rapide, il lui arrive d’oublier que tout le monde n’est pas aussi à l’aise à l’idée de se rapprocher d’un inconnu pour entamer la conversation avec lui. Oh, elle devrait être plus vigilante, elle risquerait de répandre l’inconfort chez certains de ses camarades par inadvertance.
 
 
Néanmoins, lorsque les paroles de la Rouge lui parviennent à ses oreilles de porcelaine, son sourire chaleureux s’amplifie. A défaut de lui avoir fait perdre un instant ses repères, elle ne lui a pas fait perdre sa langue. Au contraire, Amelia lui donne le sentiment de ne plus faire face à un enfant introverti qui irait courir dans les jupons de sa mère à la première frayeur, mais à une personne qui cherche à s’affirmer, ou bien qui se cherche ?
 
 
Une chose est sûre, la Moore semble bien savoir ce qu’elle veut, déterminée à frôler le bitume sur les pistes. Cette lueur dans ses yeux semblables à deux noisettes tombées de l’arbre, Asami la connait bien. Dans le fond, bien qu’Amelia ne lui ait dit que quelques mots, elle se reconnait dans son comportement et dans ce qui apparait comme sa motivation.
 
 
 « C’est impressionnant au début, je suis passée par là aussi. Mais tu verras, on s’y fait vite ! Je suis une habituée des lieux maintenant ! Mon nom est Asami Sato. Quel est le tien ? Histoire que je puisse t’introduire sans me tromper auprès de Varg !  »
 
Après tout, elle aussi avait été un jour cette vieille enfant passionnée par la vitesse, frôlant délicatement le sol du bâtiment telle une petite souris. Elle avait été très impressionnée par tout le complexe, qui devient facilement sa troisième maison avec le temps, sa deuxième étant la prestigieuse école de sorcellerie d’Ilukaan. Au début, beaucoup d’habitués s’étaient habitués à la charrier, en raison de son âge, peut-être aussi par le fait que c’était une femme en devenir. Rien de très méchant, eux aussi se moquaient de ces clichés tirés de propagande « femme au volant = accident ». Puis, ils la trouvaient mignonne avec ses airs enfantins à chercher à conduire et même les devancer ; ils pensaient qu’elle abandonnerait vite comme bon nombre de pré-adolescents passant par là. Mais non, elle avait finalement réussi à se faire une place parmi la famille du coin, d’abord pour leur plus grande surprise puis pour leur plus grand bonheur.
 
 
 « Bonjour à vous, monsieur Hanssen ! Comment vont les affaires ? Personne n’a trop détruit vos véhicules ? Vous savez que vous pouvez me contacter pour que je vous file un coup de main en week-end ! »
 
 
Elle s’est avancée vers le comptoir, toujours aussi souriante, invitant la plus jeune à la suivre, avant d’entamer la conversation avec le propriétaire des lieux. Il faut dire qu’il en impose. Des cheveux verts, un piercing à la lèvre, aux oreilles et à la langue, un pantalon noir troué et un débardeur trop grand avec le logo de son groupe de métal préféré, il a tout l'air d'un "punk" sorti des anciens temps. Aux premiers abords, les personnes ont assez peur de lui avec son apparence. Cependant, il s'avère que le Norvégien possède un côté assez enfantin lorsqu'on se met à lui parler régulièrement et surtout des courses de kart. La Sato l’a bien vite compris, ce qui lui a permis de rapidement se familiariser avec lui. Même si elle lui a bien abîmé deux ou trois machines aux abords de mauvais virages. Elle s’est bien rattrapée depuis !
 
Une fois leur échange sur les nouvelles quotidiennes terminé, l’aînée pose une main sur l’épaule de la blonde, la présentant directement au patron.
 
 
 « Je te présente Amelia Moore. Elle est en première année à Ilukaan mais j’ai le sentiment qu’elle en a plus sous la pédale que son âge le laisse penser ! Amelia, je te présente Varg Hanssen, le propriétaire du MagiKart. Si tu as quelque chose à lui demander, n’hésite pas ! Même s’il fait peur, je t’assure qu’il ne sermonne que les gens qui ne font pas attention au matériel. Autrement, c’est un vrai passionné ! »
 
 
Lui souriant de plus belle, elle se tourne ensuite de nouveau vers le norvégien :
 
 «Par ailleurs, est ce que la piste est bien libre comme nous l’avions convenu pour que je teste les nouvelles fonctionnalités du circuit ? Je suis très heureuse que vous ayez accepté de me laisser tester tout ça en avant-première, vous n’imaginez pas à quel point je suis impatiente ! »
 
Son regard se pose par la suite vers la jeune sorcière.

 «Dis-moi ça te tentera de venir tester avec moi ? Il parait qu’il y a désormais des cubes magiques qui vont apparaitre des objets aléatoires pour aller plus vite ou ralentir ses adversaires ! Bien sûr, il faut que monsieur Hanssen soit d’accord mais je me porte entièrement garante de toi ! »
 
Elle lui fait un clin d’œil avant de rire doucement de sa main gantée.