S'il est rare de croiser Daniel dans l'espace de travail de la bibliothèque d'Ilukaan, cela ne signifie pas pour autant que quelque chose de particulier s'est produit. Non, parfois, sur un coup de tête, il flâne à travers les allées pendant une bonne heure avant de finalement se poser avec un ouvrage qui pique à vif sa curiosité.

Après tout, le monde sorcier reste encore un grand mystère pour lui, bien qu'il soit conscient d'y appartenir depuis plus de six ans. Plus il passe de temps à l'école de sorcellerie, plus il découvre à quel point cet univers est si vaste... Il ne veut pas tout savoir sur les sorciers et ce qui les entoure, heureusement. Il est bien conscient que c'est impossible. Déjà que pour le monde moldu, c'est compliqué, alors le monde sorcier qui est plus avancé et rempli de plus de mystères... Sérieusement, chaque fois qu'il se penche sur un sujet, il a l'impression d'être aspiré par un puits de connaissances sans fond. Si ce n'est pas pour lui déplaire, il perd toutefois toute notion du temps embarqué. Du moins, jusqu'à la personne gérant les lieux s'occupe de lui rappeler que la bibliothèque allait fermer. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, oui, le canadien est capable de rester calme quelques heures au delà de quand il dort.

Aujourd'hui, son programme de lecture porte sur l'histoire de la magie noire. Pourquoi lui associer la couleur noire d'ailleurs ? Pour la symbolique du sombre ? Dans ce cas, un rouge bordeaux illustrerait bien les tenants et les aboutissements de ces usages de la magie ! Enfin, ce n'est pas ce qui l'intéresse pour le moment. Non, il préfère se pencher sur la naissance de la magie noire. Pas qu'il nourrisse une passion attrayante sur le sujet pour le moment; seulement, il trouve les nuances entre magie noire et blanche très controversées et pas toujours justifiées. Lui, qui se veut être plus tard le garant de la Justice par son badge d'Auror, a plutôt intérêt à s'entrainer rapidement à discerner les limites.

Toutefois, un détail vient perturber véritablement sa lecture. Il s'agit de l'usage de termes sorciers anciens, dont Daniel ne connait ni le sens ni les moyens de se renseigner dessus. L'internet moldu, il le comprend aisément, mais l'internet sorcier, c'est une autre histoire... Dans ce genre de cas, le voilà bien embêté et il le montre malgré lui : il se tire les cheveux, soupire, grommelle contre lui-même...

Décidément, il n’y a l’air d’affaire rien à faire. Il a beau tourner le livre dans tous les sens, lui lancer des Revelio en boucle, lui parler, l’objet semble alors impassible à sa demande, gardant précieusement son savoir. Mais Daniel n’est pas prêt d’abandonner aussi facilement ! Oh que non, il compte bien tout mettre en œuvre pour percer à jour les écritures anciennes courant les fines pages de l’ouvrage. Il existe forcément une solution, ils sont dans un monde où la magie existe, zut à la fin !

Il est vrai que le canadien se révèle être un petit peu têtu. Une fois qu’il se met Martel en tête, difficile de lui faire changer d’avis ou d’objectifs. C’est ainsi. Sa perception des choses et son éternel optimiste ne font que renforcer cette attitude entêtée, parfois bien difficile à canaliser pour ses comparses. L’appartenance à un monde fantastique forge les caractères de chacun ; peut-être bien que le Bleu n’aurait pas été une aussi forte tête s’il n’avait été qu’un non-maj parmi les autres sur cette vaste planète. Cela étant, cela aurait pu être une bonne chose dans certains cas, comme celui présent, puisqu’il envisage alors de brûler le livre pour parvenir à déchiffrer ces symboles qui lui posent tant de problèmes jusqu’à présent.

Fort heureusement, la Violette intervient à ce moment précis. Certes, pas dans le but d’éviter un tel massacre et une potentielle retenue à son cadet, mais dans une intention plus noble de l’aider dans ses recherches.

« Oh… euh…. Bonjour ! C’est gentil de proposer ton aide ! »

Elle l’a pris au dépourvu, il n’y a pas à dire. Il était alors tellement concentré sur l’obstacle qui se dressait entre les origines de la magie noire et lui qu’il n’avait pas vraiment prêté attention à ce qui l’entourait. Plutôt cocasse pour une personne aisément distraite, non ?

Son regard bleuté se pose sur la silhouette qui est venue à sa rencontre. Pas de doute possible, il ne peut s’agir que de la préfète des Strixyst ! Le jeune Auror en devenir se souvient plutôt bien de cette personne. Après tout, dans les ouvrages qu’il avait pu consulter depuis son entrée à Ilukaan, le nom de sa famille lui était revenu en matière de magie noire.

Pourquoi n’y a-t-il pas pensé plus tôt ?? Bon, il n’allait pas perdre du temps à courir dans les couloirs à la recherche des jupons de Carmilla pour lui demander de lui en dire plus à ce sujet, c’est peut-être pour ça. Il est un grand garçon désormais, il peut se débrouiller tout seul, du moins dans certains domaines dont celui qui l’intéresse présentement n’en fait pas parti à son grand regret.

« J’essaie de lire ces écritures anciennes qui parlent des origines de la magie noire mais je n’arrive à rien ! Tu me diras, j’aurais sûrement trouvé des réponses sur le réseau sorcier, mais la vérité, c’est que je sais pas vraiment m'en servir. Celui des non-maj, j’y arrive facilement mais celui-là pas trop ! Mais si tu es une experte dans le domaine, je veux bien de ton aide ! »

Lui répond-t-il avec un grand sourire, avant d’être en proie à une réflexion moins lumineuse. Après tout, les Stocker sont connus parmi les sorciers pour avoir utilisé la magie noire et les sciences occultes pour parvenir à leurs fins dans le passé. Mais rien ne prouve que ce n’est pas encore le cas aujourd’hui, non ? C’est juste que ça n’a pas encore la sphère numérique des médias peut-être ? S’il creuse cette hypothèse, il se dit que les enfants de cette famille doivent être initiés assez tôt à tout ce côté estimé sombre de la magie. Peut-être même que si ces derniers sont à Ilukaan, c’est pour recruter de nouveaux membres dans leurs rangs ! Oh non, ce sera désastreux… Vite, autant mettre les choses au clair :

« Je te préviens par contre, essaye pas de faire de moi un mage noir, quoique ça veuille dire ! Je compte pas devenir quelqu’un de mauvais comme les Mangemorts ! Je vais devenir un grand Auror, alors j’irai traquer toutes les personnes qui se croient au dessus des lois et qui font régner la terreur sur Terre ! Même si ça implique des gens que je connais, personne n’échappe à la justice !»

Il a prononcé ses mots avec une conviction telle que ses yeux semblent s’être transformés en deux amandes ayant capturé l’essence d’un ciel orageux. Bien qu’il ne sache pas encore où se situe la limite entre les types de magie, il croit aveuglément en la Justice. Sa Justice. Les récits de chevalerie de son enfance lui ont forgé très tôt une vision très ancrée de ce que représente la Justice et comment elle s’applique.  Daniel est persuadé que rien ni personne ne pourra l’empêcher de mener à bien sa mission, celle que son Dieu lui a donné en lui conférant de tels dons. Celle de rendre le monde plus juste.