La serre d’Ilukaan était vraiment un endroit merveilleux. Il y avait tant de variétés différentes de plantes magiques qui offraient un paysage magnifique, mais le mieux dans tout ça c’était qu’en dehors des heures de cours, il n’y avait généralement personne à l’intérieur. A cette heure là, il régnait dans la serre un silence absolu et un calme paisible qui en faisait l’endroit parfait pour un après midi de lecture. Les plantes le détestaient mais lui les aimait bien en retour et elles ne rendaient l'environnement que plus agréable. C’était un peu décevant de voir Allister tout seul dans son coin avec un livre après toutes les belles promesses qu’il s’était faites avant d’intégrer cette nouvelle école. “Cette année va être mon année, je vais réussir à affronter ma timidité et me faire plein d’amis!”, il l’avait dit avec plein de bonne volonté cet été, mais le mois d’octobre était déjà bien entamé et cette promesse sonnait désormais comme une phrase bateau dite dans le vent. En effet, devenir soudainement extraverti et sociable c’était avéré plus difficile que prévu mais le jeune Strixyst ne savait même pas par quoi commencer pour se mettre à fréquenter les autres élèves. Tout le monde dans sa classe avait l’air très gentil mais il ne savait pas comment les approcher, il avait toujours peur de leur parler au mauvais moment et de les déranger, alors il préférait ne rien leur dire plutôt que d’essuyer un refus de leur part. Il n’avait pas beaucoup plus de chance du côté de son dortoir, il n’était qu’avec des garçons beaucoup plus vieux que lui qui le terrifiaient, surtout un grand blond qui commençait déjà à l’embêter. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle il se trouvait dans la serre actuellement, pour lire au calme et surtout pour fuir son dortoir et éviter qu’un de ses colocataires ne perturbe sa lecture ou, pire, ne se moque de son magnifique recueil de nouvelles d’Edgar Allan Poe.

C’était un peu avec un sentiment d'échec qu’il se retrouvait à lire seul comme ça dans son temps libre, au lieu d’aller vers les autres. Allister pensait vraiment que les choses allaient être différentes, mais on ne peut pas changer en seulement quelques semaines et ça lui faisait un peu mal de voir qu’il était toujours le même petit garçon solitaire et maladivement timide qu’auparavant. Cependant, il était encore trop tôt pour baisser les bras, la rentrée était il ya juste un peu plus d’un mois, il avait encore le temps de s’améliorer en compétences sociales et de faire de belles rencontres. Il n’était pas trop tard pour faire des efforts, de grands changement comme ça, il fallait les faire petits pas par petits pas. Le Strixyst entendit soudain la porte de la serre s’ouvrir. C’était peut être le destin qui lui envoyait un signe, qui lui donnait sa chance de se faire son premier ami à Ilukaan. C’était sa chance de se prouver à lui même qu’il pouvait faire des effort et… ah non, il était déjà parti se cacher. Avant même que la porte ne soit totalement ouverte, il avait trouvé le moyen de refermer son livre et de fuir derrière une grosse plante pour ne pas se faire repérer. Encore une fois, il n’avait pas réfléchi et ses instincts de grand timide avaient pris le dessus. Toute sa bonne volonté pour aller vers les autres venait à nouveau de partir en fumée. Maintenant il ne pensait plus qu’à une chose, partir au plus vite de la serre pour éviter toute confrontation avec la personne qui venait d’entrer. Seul problème: celle-ci se trouvait devant la porte, autrement dit, la seule sortie possible. Ce n’était pas si grave, Allister était devenu un maître pour fuir discrètement ce genre de situation, au point que s’il n’était pas déjà un sorcier, il aurait pu tenter de devenir un ninja. Il tenta de se concentrer sur le bruit des pas de l’inconnu. Il n’avait qu’à attendre que la personne se déplace, en suivant sa trajectoire au bruit, et quand il sera dans un angle mort, il en profitera pour s’échapper par la porte, ni vu, ni connu.

Bernadetta avait toujours été une personne qui avait tendance à se cloîtrer dans sa chambre pour fuir les rencontres et les imprévus. Cependant, à Ilukaan, c’est une chose qui était vite devenue impossible pour la simple et bonne raison que les chambres n’étaient pas individuelles. Alors, dès sa première année, elle avait cherché à fuir ses colocataires, pas qu’elle ne les aimait pas mais parce qu’elle avait toujours peur d’être de trop, d’être indésirable et de polluer l’atmosphère et voulait par conséquent leur épargner sa présence le plus possible. Aujourd’hui, c’était quelque peu différent. Elle était toujours d’une grande timidité et manquait énormément de confiance et d’estime de soi mais tentait parfois de faire des efforts. Ca ne l’empêchait pas de se sentir constamment de trop, cependant, après tant d’années à l’école, elle ne comptait plus le nombre de quiproquos que sa timidité avait engendré et le nombre de fois où on lui avait répété que très souvent, elle était la seule à avoir une aussi piètre image d’elle-même. Alors elle essayait de se laisser une chance plus souvent en accordant le bénéfice du doute. “Peut-être qu’elle n’était pas si dérangeante que ça”.

Cependant, elle continuait malgré tout d’apprécier ses quelques moments de solitude. La mauve voulait être plus extravertie mais elle tenait aussi à garder des instants pour elle seule. Alors, ses sorties en extérieur, que ce soit au jardin des quatre saisons, à la volière, à l’observatoire ou aux serres n’avaient plus pour seul but de fuir la réalité mais aussi tout simplement de se ressourcer. A force de chercher à s’isoler, elle avait repéré les heures moins fréquentées des différents lieux et normalement, il ne devrait y avoir personne dans les serres, à cette heure-ci. Tout du moins elle l’espérait. Bernadetta balaya malgré prudemment les lieux du regard en entrant. Il y a quelques mois, elle avait cru ça et il s’était avéré qu’il y avait déjà quelqu’un. Oh, ce n’était pas tant un mauvais souvenir, elle avait trouvé Varian très gentil mais… C’était beaucoup d’émotions pour elle qui paniquait pour un rien. Et aujourd’hui, elle voulait juste se reposer et elle choisirait la fuite plutôt qu’un nouvel événement inattendu.

La sorcière ne vit absolument pas Allister. Non seulement il était très discret mais en plus, elle-même n’était pas assez observatrice et trop vite distraite pour le remarqua. Elle alla poser son sac et s’empressa d’aller chercher des instruments de jardinage pour arroser les plantes. A l’origine, elle était venue pour s’entraîner à dessiner certains végétaux pour le décor d’une de ses illustrations, néanmoins c’était un petit rituel qu’elle faisait toujours quand elle passait par là. Elle savait qu’il y avait du personnel en charge, sauf que ça la détendait alors elle gardait l’habitude. Peut-être trop pensive, elle n’avait pas été aussi attentive qu’elle aurait dû. En effet, à force de venir ici, elle avait appris à faire attention à certaines plantes. Certes, des mesures étaient prises pour que les élèves ne puissent pas approcher les dangereuses en l’absence d’encadrement, néanmoins il en restait quelques farceuses dont elle se méfiait et approchait avec précaution. Sauf que là, elle avait oublié et le mouvement d’une plante en sa direction l’avait tant surpris qu’elle en avait trébuché et avait son arrosoir par terre. Et pire encore, son dos avaient fait basculer le contenu de quelques pots. Heureusement, rien de vraiment cassé mais des pousses à remettre en terre quand même. Sauf que pour cela, il fallait déjà ramasser la terre.

- Oh non, qu’est-ce que tu as encore fait, Bernie !pesta-t-elle en s’agenouillant pour tout ramasser. J-je… je vais vous remettre dans votre pot tout de suite… Promis… Tu vas vraiment finir par être renvoyée si tu continues de t’acharner sur la serre comme ça, Bernie… Bravo…

Les larmes lui montaient presque aux yeux. C’était son gros problème, elle était d’une nature si anxieuse et paranoïaque qu’elle sur-réagissait à tout et provoquait toujours des catastrophes. Et qu’il s’agisse d’un petit incident ou quelque chose de plus grave, elle se sentait toujours tellement honteuse.

L’inconnu avançait dans la serre et Allister restait sur ses gardes. Il fallait qu’il fasse très attention car à la moindre inattention, il risquait de se faire repérer. Afin de rester bien caché, il ne pouvait compter que sur son ouïe pour suivre les mouvements de la personne qui occupait désormais la serre avec lui, se décaler légèrement de la plante, c’était prendre le risque d’être à découvert et il ne pouvait pas se le permettre. Il restait donc attentif au moindre bruit, pour pouvoir positionner l’inconnu dans la serre à tout moment. Il l’entendait avancer, pour l’instant il restait hors de vue, pas de problème. Il entendit un objet être soulevé du sol, puis de l’eau couler. Cette personne allait certainement arroser les plantes. Etait-ce le jardinier? Ca ne rassurait absolument pas le Strixyst. Si cette personne était bien un membre du personnel, est ce que ça voulait dire qu’il allait avoir des problèmes pour être dans la serre sans autorisation hors des heures de cours? Dans ce cas, c’était une raison de plus pour fuir au plus vite!

L’inconnu se déplaçait, sûrement pour s’occuper des différentes plantes et Allister bougeait avec lui. Il fallait qu’il y ait constamment un objet entre eux, pour qu’il ne soit pas dans son champ de vision. S’il restait sur place, la personne allait finir par faire le tour de la serre et arriver à son niveau. Le jeune garçon prenait donc toutes les précautions pour ne pas faire le moindre bruit, il veillait à ne rien toucher et marchait de sorte à ce que même ses pas soient inaudibles. Ca faisait presque peur de voir à quel point un enfant de son âge était déjà capable d’une telle discrétion. Finalement, ils arrivèrent à un point où la porte était à la fois loin de la vue de l’inconnu et à proximité d’Allister. C’était le moment de fuir! Il aurait voulu courir pour partir plus vite de cet endroit mais ça aurait fait trop de bruit. Il était si près du but, ce n’était pas le moment de tout faire rater en se montrant impatient. Il suffisait de rester discret et tout devrait bien se passer. Il y était presque, il n’avait plus qu’à tendre la main et tirer délicatement la porte pour réussir sa fuite. Mais avant que sa main ne puisse atteindre la poignée, un gros bruit se fit entendre. Son coeur rata un battement. Est ce qu’il venait de faire une bêtise? Non, la source du bruit était trop lointaine pour venir de lui, et une voix vint le confirmer.

-Oh non, qu’est-ce que tu as encore fait, Bernie ! J-je… je vais vous remettre dans votre pot tout de suite… Promis… Tu vas vraiment finir par être renvoyée si tu continues de t’acharner sur la serre comme ça, Bernie… Bravo…  

Ces paroles perturbèrent Allister un instant. Est ce qu’ils étaient en réalité trois dans la serre? Non, il était sûr d’avoir entendu les pas d’une seule personne. Est ce qu’elle se parlait à elle même? Ca devait être ça. En tout cas, le Strixyst n’avait pas de temps d’y réfléchir, il devait vite partir, c’était sa chance. Et pourtant, il n'arrivait pas à attraper la poignée. Cette personne, elle avait besoin d’aide non? Elle venait de faire tomber quelque chose, et ça avait l’air de la paniquer. Est ce qu’il pouvait vraiment partir et la laisser comme ça? S’il était à sa place et qu’il venait de faire une grosse bêtise, il aimerait bien qu’on vienne l’aider. “Allé Alli, c’est ta chance de faire un effort pour les autres, tu peux le faire!”. Après s’être rassuré mentalement, il renonça définitivement à son plan d’évasion et réunit tout son courage pour se diriger vers la source du bruit. Par chance, l’inconnue était dos à lui et ne semblait toujours pas l’avoir remarqué. A sa grande surprise, ce n’était pas un membre du personnel mais une élève de Cervirald, vu son uniforme. Plusieurs pots étaient sur le sol, la terre qu’ils contenaient s’était renversée et les plantes qui y étaient enracinées avec. Si elle ne nettoyait pas tout avant que le vrai jardinier arrive, elle allait avoir des ennuis, il fallait qu’il l’aide. Il attrapa la capuche de son propre uniforme et la baissa autant que possible sur son visage. Comme ça, vu sa posture, c’était difficile de voir à quoi il ressemblait, et il se sentait un peu plus courageux quand on ne pouvait pas le voir.

-E-Excuse moi…

Les mots eurent du mal à franchir ses lèvres mais il l’avait fait. Il ne pouvait pas voir la réaction de la jeune femme en face. Avec sa capuche, les autres ne le voyait pas mais il ne voyait pas les autres non plus. C’était une bonne chose de toute façon, si l'inconnue pouvait voir son visage, elle pourrait voir à quel point il était rouge et avait peur de lui parler.

Bernadetta était là, attrapant comme elle pouvait la terre par poignées, agissant plus par automatisme que de manière réfléchie et manquant cruellement d’efficacité. En soi, c’était déjà un miracle qu’elle fasse l’effort de réparer sa bêtise comme elle pouvait plutôt que de s’abandonner dans un plus long monologue paniqué. L’espace d’un instant, la fuite lui parut être une option sauf qu’elle n’était pas comme ça, elle préférait encore assumer sa bêtise que de culpabiliser de tout avoir laissé dans cet état.

- E-Excuse moi…

Tout comme elle n’avait pas vu l’élève se diriger vers la sortie pendant qu’elle vaquait à ses occupations, elle ne l’avait pas non plus entendu venir vers elle alors elle sursauta brusquement au son de sa voix, lâchant même un cri de surprise. Il faut dire que la mauve n’était franchement pas difficile à effrayer et que le moindre bruit inattendu la faisait sursauter. Elle détestait cette manière qu’elle avait de réagir avec aussi peu de discrétion, comme si elle était incapable de garder ses frayeurs ou quelconques autres émotions pour elle alors qu’elle aurait largement préféré. En l’occurrence, elle se remit quand même relativement rapidement de sa surprise et se retourna en direction de celui qui l’avait interpellé. Au vu de sa taille, ça devait être un jeune élève, supposa-t-elle. Cependant, il avait rabattu sa capuche si bas qu’il était impossible de discerner les traits de ce visage.

La sorcière le dévisagea un instant, interdite, ne sachant pas vraiment comment réagir. Dans sa façon de s’exprimer, il avait cette intonation familière. Cette même hésitation, ce même bégaiement qu’elle pouvait avoir lorsqu’elle s’efforçait de parler à voix haute pour dire sa pensée alors qu’elle n’avait qu’une envie : fuir. Elle se figea alors, réalisant qu’elle devait paraître impolie à le fixer ainsi sans mot dire -quoiqu’elle doute qu’il puisse voir quoi que ce soit avec sa capuche-, sans même justifier son cri de surprise ou quoi que ce soit. Et puis de toute manière, maintenant qu’elle y pensait, il ne pouvait y avait qu’une raison pour qu’on vienne l’aborder ! Lui reprocher tout le grabuge qu’elle venait de faire, évidemment. Encore une preuve qu’elle était de trop et finissait par déranger tout le monde.

- A-ah ! Désolée ! C’est juste que tu m’as surpris ! Enfin non c’est pas ce que je voulais dire ! Enfin si je suis désolée d’avoir crié, ce n’était pas contre toi mais je suis surtout désolée d’avoir tout fait tomber. Je t’ai dérangé, c’est ça ? Ah, pas besoin de le dire, je comprends ! J-je vais tout nettoyer… e-et après je m’en vais, je ne dérangerais plus, promis !

Elle ne savait pas trop depuis quand l’élève inconnu était là mais ça devait définitivement être la raison de son intervention. Ce qu’elle supposait être de la timidité devait juste être dû au fait que ce n’était pas forcément facile de formuler un reproche quelqu’un. Quand bien même il était justifié, elle le méritait sûrement ! Peut-être que comme elle, il était venu ici pour se reposer un peu et elle l’avait embêté en étant aussi bruyante. Oui, ça ne pouvait être que pour ça et comme elle l’avait compris, il n’aurait pas besoin de lui dire en face, elle lui éviterait ça et elle n’aurait pas à entendre ces paroles qui la blesseraient malgré elle. Il lui paraissait tout simplement inenvisageable que quelqu’un prenne la peine de gaspiller son temps pour l’aider alors qu’elle était la première responsable de tout ça.

La Cervirald poussa un petit cri en remarquant sa présence. En tant normal, Allister adorait faire peur aux gens grâce à sa discrétion, ça l’amusait beaucoup, mais là ça le faisait plus culpabiliser qu’autre chose. Déjà qu’il était en train de la déranger en lui parlant, il lui faisait peur en plus. Pour une fois ce n’était vraiment pas le but. Il s’en voulait de ne pas avoir fait attention, il aurait dû y penser et faire un peu de bruit pour annoncer sa présence. Il avait tout gâché. L’inconnue allait sûrement lui crier dessus pour l’avoir dérangée ainsi et lui faire perdre son temps alors qu’elle devait faire vite pour éviter les problèmes. Sur le coup, il avait très envie de laisser tomber sa bonne volontée et de fuir très loin, mais il sentait qu’avec ses jambes tremblantes de peur, il n’irait pas bien loin.

-A-ah ! Désolée ! C’est juste que tu m’as surpris ! Enfin non c’est pas ce que je voulais dire ! Enfin si je suis désolée d’avoir crié, ce n’était pas contre toi mais je suis surtout désolée d’avoir tout fait tomber. Je t’ai dérangé, c’est ça ? Ah, pas besoin de le dire, je comprends ! J-je vais tout nettoyer… e-et après je m’en vais, je ne dérangerais plus, promis !

Il s’attendait à tout sauf à ça. Non seulement elle ne s’énervait pas contre lui, mais en plus elle s’excusait de l’avoir dérangé? Ca aurait dû être l’inverse normalement. Cette fille bégayait presque autant que lui, il devait avoir aussi peur l’un que l’autre. C’était franchement rassurant pour Allister, lui qui avait peur de tomber sur quelqu’un de très intimidant faisait en réalité face à une jeune femme qui avait l’air douce et gentille. C’était beaucoup moins effrayant comme ça, et même s’il ne baissait pas sa garde pour autant, il se sentait moins tendu désormais. Peut être qu’il n’avait pas tout gâché après tout.

-N-non, c’est moi qui suis désolé… de t’avoir fait peur… Est ce que t-tu veux bien que… je t’aide à ranger?

Comme à son habitude, il parlait lentement pour être sûr de chaque mot avant qu’il ne franchisse ses lèvres. C’était plus simple de parler comme ça, ça faisait moins peur. Il relâcha sa pris sur sa capuche, sans pour autant la retirer. Comme ça il y voyait un peu plus. Il pouvait ainsi voir correctement la Cervirald, elle avait l’air vraiment paniqué, heureusement qu’il était resté pour l’aider. Il observa un peu mieux l’étendu des dégâts, ce n’était pas si grave que ça, mais il allait quand même falloir passer un moment pour tout nettoyer et rempoter. Il espérait vraiment qu’il n’allait pas empirer les choses … Il n’était vraiment pas doué avec les plantes, et il craignait vraiment de faire une bêtise et de créer plus de dégâts qu’il allait en réparer. Mais ça, il ne pouvait pas le savoir avant d’essayer, et il valait mieux qu’il tente de faire ce qui était en son pouvoir que de ne rien faire du tout.

-Je suis p-pas très bon en botanique mais… à deux ça ira forcément plus vite...  

Bernadetta fixait désespérement le sol, attendant que l’élève inconnu accepte ses excuses et se décider à se détourner. A moins qu’il ne les accepte pas ? La voilà qui s’imaginait les pires scénarios, maintenant et l’envie de fuir était présente. Sauf qu’il fallait bien qu’elle nettoie ça et en plus ça ne ferait qu’empirer la situation et elle serait cataloguée lâche et impolie à jamais. Le silence quoique temporaire était pesant, il n’y avait rien de plus étouffant que l’attente, surtout avec la capacité qu’avait la mauve de s’imaginer les pires scénarios possibles, au point que ça en devenait improbable.

- N-non, c’est moi qui suis désolé… de t’avoir fait peur… Est ce que t-tu veux bien que… je t’aide à ranger? Je suis p-pas très bon en botanique mais… à deux ça ira forcément plus vite...  

Même si ses bégaiements laissaient clairement deviner une timidité que trop familière, il avait une manière de s’exprimer très différente de la sorcière. Bernadetta avait tendance à monologuer dans sa panique au point de parler de plus en plus vite et d’en perdre le souffle. Très souvent, ses interlocuteurs finissaient par ne plus réussir à la suivre tant elle accélérait. Et contrairement à cet élève qui gardait une voix assez basse, Bernadetta avait tendance à vite vriller dans les aigus. Il semblerait qu’il n’était pas du tout venu la blâmer et qu’il partageait la même timidité qu’elle. Et à cause de sa réaction exagérée, il était obligé de s’excuser alors qu’il n’en était en rien responsable. La mauve ne pouvait s’empêcher de culpabiliser un peu, d’autant plus qu’elle ne connaissait que trop bien l’effort de sociabilité que ça pouvait demander que de venir aborder quelqu’un. Il était venu l’aider et à cause d’elle, il se retrouvait à devoir s’excuser.

- N-non, ne t’excuse pas, je suis désolée, c’est moi ! Et j-je… J’apprécie mais tu n’as pas besoin de te forcer… Enfin, je ne dis pas que je ne veux pas de ton aide, ce n’est pas ça du tout que j’essaie de dire ! C’est juste que je ne veux pas te faire plus de temps que nécessaire, j’ai déjà dû assez t’embêter e-et… Aaaah Bernie, qu’est-ce que tu racontes, tu vas finir par vexer tout le monde à t’emmêler…, gémit-elle en se prenant la tête entre les mains.

Après tout, elle ne voulait pas que l’élève pense qu’elle refuse son aide parce qu’elle le jugeait inutile, c’était pas ça du tout, en vrai elle avait envie d’accepter sans réfléchir mais elle s’en voulait trop. Elle avait trop honte de remettre ses erreurs sur les épaules des autres parce qu’elle était incapable de se gérer seule. Cet incident qui pourrait paraître minime pour certains lui paraissait être une catastrophe et une preuve de son inutilité et de son inefficacité.

La jeune femme avait l’air beaucoup plus paniquée que lui, mais c’était compréhensible. Allister avait juste peur de parler à quelqu’un, la Cervirald partageait également cette crainte, mais elle devait en plus stresser à cause de sa bêtise, et avoir peur que ça ne soit pas réparable et qu’elle ait de gros ennuis. Le Strixyst n’allait pas laisser ça arriver! Même s’il ne connaissait pas cette jeune femme, il ne pouvait pas la laisser se débrouiller toute seule alors qu’elle risquait d’avoir des ennuis, il s’en voudrait trop, il passerait des jours à culpabiliser en se disant qu’elle a peut être eu de gros problèmes parce qu’il n’avait pas aidé.

-N-non, ne t’excuse pas, je suis désolée, c’est moi ! Et j-je… J’apprécie mais tu n’as pas besoin de te forcer… Enfin, je ne dis pas que je ne veux pas de ton aide, ce n’est pas ça du tout que j’essaie de dire ! C’est juste que je ne veux pas te faire plus de temps que nécessaire, j’ai déjà dû assez t’embêter e-et… Aaaah Bernie, qu’est-ce que tu racontes, tu vas finir par vexer tout le monde à t’emmêler…

La jeune femme prit sa tête entre ses mains, elle n’avait vraiment pas l’air d’aller bien. Allister s’en voulait de la voir dans cet état… Il n’aurait peut être pas dû s’excuser finalement, ça avait l’air de l’avoir mise encore plus mal. La pauvre… Il fallait vraiment qu’il lui vienne en aide, parce que s’ils continuaient de rester là à s’excuser mutuellement, le rangement n’allait pas avancer et ils finiraient par avoir des problèmes tous les deux. Il fallait arrêter de parler et se mettre en action.

- T-tu sais… Ca ne me dérange pas...et puis… j’ai du t-temps devant moi...  

Sur ces mots, Allister se mit à genoux sur le sol et ramassa une poignée de terre qu’il mit dans un petit pot qui s’était retrouvé quasiment vide. Ce n’était pas le travail le plus gratifiant et il allait se retrouver avec les mains toutes sales, mais au moins c’était dans ses capacités. Il n’était tellement pas doué avec les plantes qu’il aurait été capable d’en tuer une rien qu’en la touchant. Surtout qu’il n’avait jamais rien planté de sa vie, et il avait peur de mal faire. Il y avait peut être un protocole qu’il ignorait et il préférait ne pas y toucher plutôt que de tout faire rater parce qu’il a fait une bêtise irréparable. Se contenter de s’occuper de la terre, c’était bien, c’était une tâche assez importante pour faire vite avance le rangement, et en même temps c’était inratable et le tenait loin de toute bêtise potentielle. Il valait mieux laisser la Cervirald s’occuper des plantes, vu sa maison, elle devait s’y connaître en botanique et Allister se disait qu’elle devait savoir quoi faire. Lui n’était même pas capable de dire quel était le nom de ces espèces, alors connaître les prérequis pour les remettre comme il fallait dans leur pot en toute sécurité, c’était trop lui demander.

Le jeune élève ne semblait en aucun cas se vexer du refus de Bernadetta, ce qui la détendit malgré tout un peu. Il avait l’air tellement mal à l’aise lui-même qu’elle ne pouvait que trop imaginer le courage que ça avait dû lui demander de faire cet effort alors elle ne voulait pas qu’il croit qu’elle le repoussait car il la dérangeait ou quoi que ce soit.

- T-tu sais… Ca ne me dérange pas...et puis… j’ai du t-temps devant moi...  

L’élève ne s’encombra pas plus de formalités et s’agenouilla pour l’aider à ramasser la terre. L’ancienne Bernadetta aurait sans doute continué à insister longtemps pour qu’il ne se force pas à l’aider, mais avec les années elle avait appris que ça pouvait en devenir encore plus vexant et malaisant. Qu’elle précise une fois qu’il n’était pas obligé, c’était dans son caractère, mais qu’elle continue de s’acharner pour le faire seule, c’était quelque peu impoli. Plutôt que de voir les choses sous son pessimisme habituel, elle préférait simplement lui être reconnaissante pour son aide. Elle lâcha un “merci” confus avant de se mettre à la tâche, elle aussi.

Puisqu’il se chargeait de ramasser la terre, elle allait plutôt commencer à rassembler les végétaux avant qu’ils n’aillent trop loin. Les plantes magiques, ça pouvait parfois être un peu trop autonome. Au moins, l’avantage de l’intervention de l’inconnu, c’était qu’elle s’était un peu calmée et que ses gestes étaient moins fébriles et désordonnés. Qu’elle s’enfonce toute seule dans ses erreurs, c’était une chose mais elle ne voulait pas entraîner plus que nécessaire quelqu’un d’autre avec elle, alors elle essayait d’être le plus calme possible pour régler tout ça au plus vite. Par contre, il semblait que son inattention souhaitait encore lui jouer des tours, puisqu’après avoir recompté plusieurs fois le nombre de pots et de plantes dans ses mains, force était de constater qu’il en manquait une.

Non peut-être qu’elle avait mal compté pour la xième fois et que si elle le faisait à nouveau, le nombre coïnciderait enfin… La porte de la serre était fermée dans tous les cas et il n’y avait pas moyen qu’elle se soit enfuie bien loin mais ça n’empêchait la panique de monter lentement dans l’esprit de Bernadetta. Se relevant, elle parcourut la serre des yeux à la recherche du disparu.

- J-je crois qu’il y en a une qui s’est cachée…

Alors qu’il faisait de son mieux pour ramasser la terre sans rien faire tomber pour ne pas créer encore plus de bazar, l’inconnue le remercia. Ca fit doucement sourire Allister. Malgré sa grande timide, il adorait aider les autres et un mot aussi simple que “merci” suffisait à lui faire tellement plaisir. Ca lui donnait l’impression d’être utile, de servir à quelque chose et, à ses yeux, il n’y avait rien de plus gratifiant que la reconnaissance de quelqu’un, même pour une aide aussi minime que celle qu’il apportait. Les pots commençaient à avoir regagné une bonne partie de leur terre alors que la jeune femme réunissait les plantes. Le Strixyst voulait faire vite pour ne pas la faire attendre. Il ne voulait pas être un poids et la laisser en plan, les bras remplis des différentes pousses qui étaient tombées. Il était censé faire gagner du temps, pas en faire perdre et il aurait honte de lui même s’il s’avérait être un boulet même dans une tâche aussi simple. Cependant, la Cervirald semblait avoir un problème avec ses plantes. Elle se releva l’air paniquée, semblant chercher quelque chose.

-J-je crois qu’il y en a une qui s’est cachée…  

Si Allister ne portait pas cette capuche aussi bas, elle aurait pu voir sur son visage le choc et la panique qui commençait à le gagner lui aussi. Comment ils allaient faire? S’il manquait une plante, le jardinier et le professeur de botanique allaient le remarquer. Ils risquaient tous les deux de gros problèmes si ont réalisé qu’ils avaient perdu une plante, ou pire, s’ils pensaient qu’ils l’avaient volé! Non, ça ne pouvait pas arriver, il fallait empêcher ça! Allister ne pourrait plus jamais regarder les membres de sa maison en face s’il leur faisait perdre des points, ses prochaines années à Ilukaan allaient se passer reclu de la société et ils pouvait faire une croix sur ses rêves de sociabilité. Il fallait absolument retrouver cette plante! Mais en chercher une dans une serre, c’était un peu comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Ah, que faire? Le Strixyst faisait de son mieux pour réfléchir à une solution. Ca ne lui plaisait pas du tout comme idée, mais peut être que dans une situation aussi extrême que celle là, il fallait qu’il utilise son don… Peut être qu’en touchant le pot de cette plante, il pourrait découvrir dans quelle direction elle a filé… Non, il refusait de faire ça. Il préférait peut être encore assumer la disparition de cette plante, parce que s’il se servait de son don, l’inconnue allait deviner qu’il était en fait un psychomètre, et il ne lui faisait pas assez confiance pour qu’elle le sache. Ils ne se connaissaient pas après tout, peut être que la Cervirald était plus méchante qu’elle ne le laissait paraître et qu’elle irait raconter son secret à tout le monde. Ca serait une catastrophe, encore plus que perdre des points,parce que si les gens savaient pour son don, ils voudraient tous l’utiliser, et il ne voulait plus jamais que ça arrive. De toute façon, rien ne garantissait qu’il ait une vision, ou une vision utile. La psychométrie ne marchait pas comme ça, elle ne lui montrait pas ce qu’il voulait voir. Utiliser son don, ça serait vraiment trop risqué avec aucune garantie que ça les aide.

-Q-qu’est ce qui’il manque comme plante? Si on se s-sépare… on a peut être une chance de la retrouver...  

Oui, c’était mieux comme ça. C’était la meilleure solution pour la retrouver, même si leurs chances étaient assez faibles. Pas besoin de son don, ils allaient la chercher normalement, peu importe le temps que ça prendra.

La mauve regrettait déjà d’avoir laissé cette phrase lui échapper. Le dire à voix haute c’était reconnaître son erreur et se fermer toute possibilité de fuite. De plus, elle aurait dû le garder pour elle plutôt que de mêler encore plus l’élève à ses problèmes. Elle lui était déjà reconnaissante qu’il l’aide à ranger, mais s’il restait malgré tout des dégâts à la fin, c’était de sa responsabilité et pas de la sienne. Il aurait mieux valu qu’elle se taise et aille chercher la fugitive, seule, quand ils auraient remis tout le reste en pot. Quoique, il se serait bien aperçu qu’il en manquait une. Et de toute façon, c’était trop tard. Bernadetta s’imaginait déjà les pires scénarios si elle ne retrouvait pas la plante, allant jusqu’à envisager le renvoi. Seule, elle aurait sans doute complètement paniqué et enchaînait maladresse sur maladresse mais là, elle ne pouvait s’empêcher de se dire que l’élève était peut-être tout aussi paniqué qu’elle et qu’elle ne devait pas l’effrayer plus que nécessaire en sur-réagissant.

- Q-qu’est ce qui’il manque comme plante? Si on se s-sépare… on a peut être une chance de la retrouver...

C’était difficile de dire s’il était tout aussi affolé qu’elle, son visage était bien trop dissimulé par sa capuche pour qu’elle ne puisse y discerner une quelconque expression et sa façon de s’exprimer était toujours la même. Après tout, même s’il semblait très timide, comme elle, il n’était peut-être pas aussi prompt à la panique. Elle ne savait pas trop mais elle respectait et appréciait l’effort qu’il avait fait de venir l’aider malgré sa timidité apparente et elle ne voulait pas qu’il finisse par le regretter à cause d’une autre de ses erreurs. Toujours est-il que la question posée était tout à fait sensée et elle se sentait bête de ne pas se l’être demandé avant plutôt que de céder à l’angoisse.

Sauf que là comme ça, elle n’en avait aucune idée. Heureusement, il y avait les noms des végétaux sur les pots et elle était assez bonne en botanique pour en déduire lequel était manquant, en comparant à ceux qu’elle avait en main. C’était même une matière qu’elle appréciait assez mais le sujet n’était pas là. Elle trouva rapidement le plant manquant. C’était une fleur qu’elle avait déjà eu l’occasion de dessiner, donc elle pouvait assez facilement la visualiser. Elle fit une rapide description sommaire à l’élève. A vrai dire, elle ne lui en aurait pas voulu s’il lui avait dit que ça ne le concernait plus et que c’était à elle de se débrouiller mais pour maintenant, autant la chercher ensemble.

- A-après, la porte est fermée, donc elle n’a pas pu aller bien loin… E-et même si on ne la retrouve pas, je dirais que ce n’est pas de ta faute ! Tu n’auras pas de problème, promis, alors pas besoin de s’inquiéter pour ça, tu n’y est pour rien !

Bernadetta se sentait obligée de le rajouter avant d’aller la chercher. Comme dit, elle n’arrivait pas à savoir si l’élève était aussi inquiet qu’elle, mais si c’était le cas, elle espérait que ça pourrait au moins un tout petit peu le rassurer. Puis, elle baissa les yeux vers les plantes qu’elle avait déjà en main. C’était un peu encombrant et il valait mieux qu’elle les remette en terre tout de suite. Car hors de question de les reposer si c’était pour que d’autres s’enfuient à leur tour, même si elle aurait préféré se lancer de suite à la recherche de la disparue.

- J-je vais juste replanter celles-là avant d’en perdre une autre...

La Cervirald avait l’air d’avoir rapidement repris ses esprits suite à sa proposition. Ou du moins, elle paraissait moins paniquée. Elle examina les différentes pots pour pouvoir identifier la plante manquante et la décrire à Allister. Malheureusement, il n’avait pas les compétences en botaniques nécessaires pour que cette description l’aide beaucoup, mais il fait quand même de son mieux pour retenir chacune des informations qu’elle lui donnait.

-A-après, la porte est fermée, donc elle n’a pas pu aller bien loin… E-et même si on ne la retrouve pas, je dirais que ce n’est pas de ta faute ! Tu n’auras pas de problème, promis, alors pas besoin de s’inquiéter pour ça, tu n’y est pour rien ! J-je vais juste replanter celles-là avant d’en perdre une autre...

Sa phrase lui avait retiré un poids de ses épaules. C’était rassurant de se dire que peut importe ce qui allait arriver, il n’aurait pas d’ennui. Mais est ce que c’était correct de laisser la jeune femme prendre toute la faute? C’est vrai que lui n’y était pour rien dans cette histoire, mais est ce qu’il avait le droit de l’abandonner comme ça après lui avoir proposé son aide? S’il l’aidait, il devait l’aider jusqu’au bout et ne pas la laisser en plan en faisant les choses à moitié. Premièrement, il fallait déjà retrouver la plante fugitive. Ca ne servait à rien de stresser sur ce qui allait arriver s’ils ne la retrouvaient pas, c’était se faire du mauvais sang pour un évènement qui n’allait peut être pas arriver à la finale. Il valait mieux concentrer leur énergie sur leurs recherches, et si jamais par malheur ils n’arrivaient pas à la retrouver… Eh bien le Strixyst aviserait à ce moment là.

-D’accord… Dans ce cas… j-je vais aller la chercher tout seul… en attendant que tu finisses avec ces plantes là.

Il laissa donc la jeune femme s’occuper des plantes qu’ils avaient déjà, et s’avança dans l’allée. Ca lui faisait un peu mal mais il retira sa capuche. Tant pis si on voyait son visage, il y avait des choses plus importantes dont il devait s’occuper. Avec la capuche, sa visibilité était réduite, et il s’en voudrait tellement s’ils ne retrouvaient pas la plante uniquement parce qu’il n’avait pas été capable de la voir, ça serait trop bête! Ils n’avaient pas beaucoup de chances de la retrouver, alors il valait mieux mettre toutes les chances de leur côté. Et puis, la Cervirald était occupée à tout replanter alors elle était probablement trop concentrée pour faire attention à lui et regarder dans sa direction. Il observa donc avec attention chaque recoin de la serre, pour l’instant, il n’y avait aucune plante qui correspondait à la description qu’on lui avait faite, et dans un sens c’était bon signe. S’il y avait plein d’espèces qui lui ressemblaient, il aurait été incapable de savoir laquelle était la bonne, et ça aurait rendu les recherches bien plus compliquées. Au bout de quelques minutes, il aperçut une pousse sans pot qui correspondait parfaitement à ce qu’il cherchait. La plante était moins rapide que ce qu’il aurait cru et il n’eut pas trop de difficultés à l’attraper. Il fit attention à bien la tenir pour être sûr qu’elle ne lui échappe pas des mains, et remis sa capuche en place avant d’aller voir la jeune femme.


-Est ce que… c’est la bonne plante?

L’espace d’un instant, elle avait craint que puisqu’elle lui affirmait qu’il ne subirait aucune conséquence, qu’il retrouve ou non la plante, il déclare que dans ce cas, il n’avait pas à la chercher. Pourtant, l’élève lui avait paru très gentil à lui apporter ainsi son aide, même quand la situation se “compliquait” ainsi mais Bernadetta était du genre à toujours imaginer qu’on puisse finir par l’abandonner, elle se pensait si médiocre qu’elle estimait que c’était normal qu’on se lasse d’elle. C’était un comportement et un complexe qu’elle avait aussi bien dans des situations plus importantes que dans des petits incidents comme celui-ci.

- D’accord… Dans ce cas… j-je vais aller la chercher tout seul… en attendant que tu finisses avec ces plantes là.

La sorcière poussa un soupir de soulagement en voyant qu’il ne l’abandonnait pas. C’est vrai que s’il voulait le faire, il avait déjà eu maintes occasions. Elle hocha la tête, le remerciant au passage. Elle s’en voulait un peu de le laisser commencer les recherches tout seul mais ça serait faire encore pire que mieux si elle laissait d’autres plantes s’échapper. Elle allait juste vite rempoter toutes les autres et le rejoindre. Enfin, pas trop vite non plus car être trop pressée était le meilleur moyen de tout rater et ils n’avaient pas absolument pas besoin de ça. La mauve reposa les plants pour avoir les mains libres pour les remettre en terre un à un mais gardant cette fois un oeil prudent sur eux.

- Est ce que… c’est la bonne plante?

Bernadetta était tout juste en train de terminer sa tâche quand l’élève revenait avec une plante à la main. Elle leva les yeux vers lui et le végétal qu’il tenait. Elle se sentit immédiatement soulagée en constatant que c’était en effet la bonne. Se relevant, elle afficha un sourire reconnaissant et soulagé au Strixyst.

- O-oui c’est bien celle-là, merci beaucoup ! Je vais la remettre tout de suite.

La mauve récupéra le plant et s’empressa de le remettre en place avant de se relever à nouveau. Peut-être un petit coup de balaie pour se débarrasser des derniers grains de terre et tout serait comme neuf. Quand elle y repensait, c’était assez ridicule comme situation, une plante qui s’échappe. Elle ne put retenir un rire nerveux. Avant d’aussitôt se rappeler qu’elle n’était pas seule et qu’elle avait peut-être l’air bizarre, cette pensée la faisant rougir de gêne.

- A-ah, désolée, je ne me moquais pas, c-c’est juste que c’est nerveux ! E-enfin, je veux dire, c’est assez improbable comme situation… Encore désolée de t’avoir déran-... Ou plutôt merci de m’avoir aidé, c’était très gentil de ta part. Je ne sais pas comment te remercier...

Il n’y avait de toute manière rien qui aurait pu justifier le fait qu’elle se moque de quoi que ce soit mais Bernadetta avait déjà été à l’origine de tellement de quiproquos qu’elle avait toujours peur que son comportement soit mal interprété.

Le temps qu’il revienne, la jeune femme avait déjà replanté tout ce qu’elle avait fait tomber. Il ne restait plus qu’un pot vide dans lequel devait aller la plante qu’il tenait dans les mains. Il espérait vraiment que c’était bien la bonne et qu’il ne s’était pas trompé… Sinon par sa faute ils auraient perdu du temps et il aurait dérangé cette pauvre petite plante pour rien.

-O-oui c’est bien celle-là, merci beaucoup ! Je vais la remettre tout de suite.

Quel soulagement! La Cervirald remis rapidement la fugitive à sa place. Au moin comme ça elle ne risquait plus de s’enfuir! La jeune femme se releva, il semblait ne plus y avoir grand chose à faire pour qu’il ne reste plus aucune trace de cet accident. Tout était revenu à sa place, il ne restait plus qu’à balayer la terre qui n’avait pas pu être ramassée et la serre serait à nouveau comme avant leur passage. Au final, ça n’avait pas pris tant de temps que ça, et ils allaient tous les deux évité les ennuis! La Cervirald poussa un petit rire avant de devenir toute rouge. Ca inquiéta un peu Allister, est ce qu’il avait fait quelque chose de mal? Est ce qu’elle rigolait parce qu’elle se moquait de lui? Est ce qu’elle rougissait parce qu’il l’avait mis mal à l’aise?

-A-ah, désolée, je ne me moquais pas, c-c’est juste que c’est nerveux ! E-enfin, je veux dire, c’est assez improbable comme situation… Encore désolée de t’avoir déran-... Ou plutôt merci de m’avoir aidé, c’était très gentil de ta part. Je ne sais pas comment te remercier...

Finalement, il s’était inquiété pour rien. C’est vrai que dans un sens, c’était un peu drôle. Le Strixyst était juste venu pour passer un moment au calme et il avait fini par se faire embarquer dans toute une petite aventure. Il en aurait presque rigolé avec elle s’il n’était pas si timide. En tout cas, ça lui faisait plaisir que tout se finisse bien, et la reconnaisance de la jeune femme étaient tout ce qu’il lui fallait comme remerciement. Il ne voyait vraiment rien qu’il pouvait demander de plus. De toute façon, même si ce n’était pas le cas, il n’aurait rien osé demander. S’il aimait rendre service au gens, c’était pour leur faire plaisir, pas parce qu’il attendait quoi que ce soit en retour.

- Ne t’en fais pas… Je suis content… d’avoir pu me rendre utile...

En temps normal, c’est à ce moment là qu’Allister aurait pris la fuite, il avait fini de lui venir en aide, rien ne le forçait plus à rester ici et être sociable. Cependant, cette année il s’était promis de faire des efforts, et pour la première fois depuis la rentrée, il avait enfin une opportunité de faire preuve d’un peu de courage pour se rapprocher de quelqu’un.

- D-dis… Est ce que tu vas arroser le reste des plantes? Si oui… est ce que je peux… rester un peu avec toi?