Une fois de plus, l’histoire se répète. Les mêmes regards effrayés, les mêmes cris de terreur, la même agitation qui parcourt les foules craignant pour leurs vies. Les vétérans eux-mêmes font tout leur possible pour guider les plus jeunes vers les points de rassemblement, leurs mâchoires crispées traduisant la tension qui circule dans leur sang. Et pourtant, ce n’est pas la première fois qu’une telle évacuation est nécessaire. Néanmoins, certains habitants, marqués à jamais, portent encore les traces d’un traumatisme effroyable.

Telle est la vie dans cette région aux apparences si prospère, dans les contrées plus campagnardes de Nördlingen. Après tout, vivre sans crainte lorsqu’une colonie de Géants s’est établie aux alentours relève tout simplement de l’inconscience. Bien entendu, ces créatures ne sont pas aussi incivilisées que ce que leur portent les contes moldus. Néanmoins, la population qui sévit dans cette région diffère quelque peu du reste de ses congénères, plutôt marginalisée. La communication semble en effet impossible avec ces individus, rarement même anthropophages. Leur présence sur le territoire étant connue du Ministère allemand depuis maintenant près d’un centenaire, date à laquelle ils sont apparus, sans que quiconque ne puisse expliquer leur origine. Certains faits scientifiques tendent à vouloir accuser une expérience menée sur un échantillon de géants qui aurait dégénérée. Peu importe la cause exacte d’un tel phénomène, les autorités nationales veillent depuis sur ces créatures afin qu’elles ne causent pas de dégâts, aussi bien sur les villages sorciers, mais également sur les villages moldus voisins.

Fort heureusement, il apparaissait que cette colonie ne se dirigeait que peu vers les habitations, préférant se délecter de la faune locale. Surveillés et étudiés, peu de personnes les redoutaient, bien que connaissant les consignes de sécurité à suivre si jamais la tendance s’inversait. Cela était le cas jusqu’à ce que la réalité les rattrapa il y a de cela sept ans.

Mikasa, du haut de ses dix ans fraîchement acquis, comprit beaucoup de leçons ce jour-là.  D’à quel point ce monde peut être aussi merveilleux que cruel. D’à quel point vivre n’est pas donné, qu’il faut se battre pour mériter sa place dans ce macrocosme. La vie est éphémère, c’est pourquoi il faut profiter de ses proches avant qu’ils ne disparaissent. Au début, tout était aussi paisible qu’à l’accoutumée, le vent sifflait dans ses cheveux noirs alors que le soleil venait la saluer une dernière fois. Puis toute forme de vie s’était tue, seuls des pas lourds résonnaient alors. La suite s’était déroulée assez vite, si bien que l’enfant n’eut pas le temps de saisir tous les détails, épargnée par la vigilance de ses parents. Les géants s’étaient dirigés vers la ville où se rendait Mikasa pour suivre les cours, occasionnant par là de nombreux dégâts. S’ils étaient majoritairement matériels, le bilan psychologique lui, n'était pas négligeable.

Alors que la poussière soufflait sur des bâtiments partiellement en ruines, certains constatèrent avec désarroi la perte de leur foyer, d’autres de leur travail, quand ce n’étaient pas les pleurs d’une population dont des architectures patrimoniales étaient désormais perdues qui étaient entendus. Les plus malchanceux avaient été privés d’une appendice, d’un membre ou encore d’un proche. C’était par un beau mois de mai 2013 que les habitants comprit quel était leur fardeau en occupant des lieux devenus hostiles à toute forme d’humanité. Ils avaient été tout du long et le sont encore aujourd’hui, prisonniers d’une cage sans barreau.

Heureusement, les citoyens pouvaient compter sur la présence des Brigades du Mur de Nördlingen, nommée ainsi en raison du rempart qu’elles constituent face aux géants. Grâce à eux, la vie avait repris petit à petit son cours dans la région. D’autres venues, aux pertes moins lourdes, sont survenues depuis, telles des répliques d’un séisme. Si certains peinaient à s’habituer, malgré le peu de temps qu'elle retournait là-bas, ce n’était pas le cas de Mikasa. Ce n’est plus le cas de Mikasa.

Désormais adepte malgré elle de ces accidents, elle suit les consignes, mais n’hésite pas à les transgresser si besoin elle en ressent. Aujourd’hui, elle montre l’exemple aux plus jeunes, tout en leur montrant qu’il n’y a rien à craindre tant qu’elle sera dans les parages. Elle ne montre pas qu’elle a peur et est fermement décidée à stopper ce fléau, aussi rare soit-il. Malgré ses capacités, la métisse se sait incapable aujourd’hui de pouvoir gérer ces monstres, c’est pourquoi la Verte est plus que jamais studieuse, voire perfectionniste. Si elle se pare d’une telle assurance qui lui est tout à fait légitime, la sorcière se demande seulement si cela cessera un jour, et si ces enfants pourront ainsi être libre d’explorer les environs comme elle le fit jadis à leur âge.