« Un rêve...Cette nuit j'ai rêvé. Oh rien d’intéressant. Ma vie si ennuyante, si misérable. Peut- être à une seule différence près : je ne touchais plus le sol. »

Sa vie était terriblement triste, d'un ennui mortel. Oui, les mots étaient justes. Dans une chambre misérable, sombre, tout juste éclairé par l'écran d'ordinateur allumé en permanence. En dehors des cours, Isaac ne bougeait pas vraiment de chez lui. C'est vrai ça, chez lui était tellement mieux que dehors ! Dehors, il y avait les autres, les gens. Ils le feraient pleurer. Quoique, il n'avait pas besoin de leur aide pour ça. Ses yeux étaient constamment humides des larmes versées. Voilà tout le temps qu'il passait, à pleurer, il ne faisait que ça. Il avait plusieurs raisons, et à la fois aucune. Il pleurait juste, en permanence. Son existence misérable aurait dû prendre fin il y a si longtemps, mais jamais il n'avait eu le courage d'y mettre un terme. Il était bien trop peureux, jamais il n'eut passé à l'acte. Et puis, qui le regretterait ? Ses parents ? Peut-être bien, mais il se jugeait un bien trop grand fardeau, il avait préféré les fuir comme il le pouvait. Sa peur de la solitude l'avait poussé à s'isoler encore plus qu'il ne pouvait l'être. Un déchet qui souillait la surface de la terre, voilà ce qu'il était. Il ne savait quoi faire de son entité vide. Il a toujours été incapable de faire des choix.

En plus de ça, on pouvait dire que sa famille était composée de personnes vraiment particulières. Ils étaient tous de grands et forts sorciers. Ils étaient impressionnants, et lui, n'était que trop ébloui par leur succès. Lui, ne savait rien faire. Lui, n'avait aucun potentiel. Lui, ne servait à rien. Même son père, qui se trouvait être un cracmol, savait faire de nombreuses choses ! Même lui, qui n'avait pas de pouvoirs magiques arrivait à faire vivre la petite famille de ses bras puissants. Ils avaient leur propre petite ferme dont ils vivaient. Un potager, trois poules, une bande de lapin, une chèvre, deux ânes et un cheval, suffisaient à subvenir à la plupart de leurs besoins primaires. D'autant plus qu'ils pouvaient partager leurs récoltes avec les voisins, dont ils pouvaient récupérer d'autres services. Mais ils vivaient principalement de l'héliciculture. Il faut de tout dans la vie, les escargots ne poussent pas dans les arbres. C'était heureux, vivant, sociable. Mais petit Isaac n'osait pas sortir. Il n'osait pas voir ses gens, croiser leur regard. Il n'osait pas se confronter à ce monde si effrayant. Petit Isaac vivait seul. Bien que la famille soit en réalité nombreuse, en raison de la génération de sa mère, petit Isaac passait la plus grande partie de son temps seul. Lorsque son cousin le plus proche a dû partir, il l'était devenu totalement. Seul. Le blondinet a cependant de bons souvenir avec celui-ci. Ils passaient des heures devant la télé, voire même sortir dehors ! C'était beaucoup pour lui, énorme. Il en était très proche. Certainement la personne la plus proche dont il eut pu être. Mais malheureusement Melchior ne pouvait pas rester. C'était que la vie n'était pas évidente pour lui non plus.

La petite grange était son repère. Il y avait installé une radio et venait se fourrer dans la chaleur du foin lors des jours de pluie. C'était étrangement réconfortant. Des heures pouvaient passer qu'il s'en fichait. Tout en écoutant la musique, les yeux fermés, il se réconfortait. Sa bienveillante mère lui apportait tout de même des en-cas, lorsqu'il y restait des journées entières. Un jour, le sourire aux lèvres, la gentille sorcière était venue le voir afin de lui adresser une bonne nouvelle. Et une proposition est venue à lui. Il l’avait souhaité secrètement. Elle venait d'une prestigieuse école de magie, la même qui plus tôt avait invité son cousin à venir ! Il en avait de la chance, il avait même cru à une mauvaise blague. Mais au fond, ça représentait une chance inestimable. Il ne pouvait pas la refuser. Il découvrit un monde nouveau.

Bien que rempli d'épreuves. Ne serait-ce que trouver sa baguette. Il n'a pas réussi, après des dizaines d'essais, à trouver une baguette qui voulait bien de lui. Évidemment, ça l'a fait pleurer. Et aucune des baguettes ne voulaient d'un sorcier aussi pleurnichard. Il trouva finalement peu de temps après sa rentrée une en bois de mélèze. Ils ont réussi à s'entendre pendant les premières années. Puis les disputent sont venues. Elle a été davantage vexée lorsque Isaac a envisagé de changer de baguette. Elle a alors cessé de fonctionner pendant près d'un mois. Résigné, il l'a rendu, afin qu'elle trouve un partenaire à sa hauteur. Il en a aujourd'hui une en châtaignier, avec qui il est très proche, il se sent moins nul avec elle. Certainement la bonne.

Néanmoins les années passées dans la fameuse école étaient dures. Isaac ne savait toujours pas comment se faire des amis et en plus de ça, il se sentait incroyablement pathétique en face de ses camarades. Tous semblaient plus doués. Cela restait un spectacle écœurant aux yeux du petit asocial. Il ne fit alors que se renfermer davantage. Pourtant il y avait bien des matières où il n'était pas mauvais, loin de là. Il s'était bien débrouillé aux cours de vol, ainsi que Botanique et Soin aux animaux magiques, vie de fermier oblige. Les cours de Métamorphose était une étrange prédilection. Il aimait qu'on puisse changer les choses laides et inutiles en choses magnifiques et indispensable. Il aimait surtout à penser qu'il puisse faire de même avec lui. C'était ainsi que naquit un projet de devenir animagus. Mais les efforts qu'il fallait faire ne lui étaient pas inconnus. Alors, il se détourna de cette idée, paraissant trop insurmontable. Malgré tout cette petite idée reste dans un coin de sa tête, sait-on jamais.

Il s'est toujours senti vide, seul et abandonné. Il se disait que c'était ce qu'il méritait, que personne ne voudrait de quelqu'un d'aussi pitoyable que lui. Il noyait sa peine dans la musique. Il n'eut jamais demandé à prendre des cours de solfège, personne ne lui avait appris comment jouer, mais il avait acheté quelques bons équipements. Pas du haut de gamme mais quelques choses de parfaitement convenable. L'adolescent ne su jamais d'où lui venait cette attirance pour la composition et le mixage, mais il était plutôt bon. Du moins pas si mauvais. Tout vient avec l'expérience, comme on dit. Il ne l'a jamais reconnu mais cette passion était pour lui une échappatoire à cet enfer qu'était sa vie. Sans même s'en rendre compte, il souriait parfois. C’est comme ça, qu’un peu malgré lui, il est devenu président du club de musique ! Il ne s’en occupait pas trop mal. Il s’occupait d’un groupe d’élèves, qu’il a appris à connaître. Il a beaucoup angoissé, lorsqu’il n’était que vice-président. Mais d’être devenu président, ça lui faisait du bien. Il se sentait utile.

Ses moments de joies étaient tellement minces ! Mais la sociabilisation (et le suivi psychologique) lui permet peu à peu de devenir un adulte. Sortir de son douloureux cocon n'est pas chose aisée. Dans une si grande école, il devait bien y avoir des personnes qui puissent l'aider. Ne lui reste-il qu'à faire le premier pas vers autrui.

(c) Ilukaan