"Bien réviser. »

Les cours étaient depuis longtemps terminés et tout le monde avait rejoint leurs clubs s’amuser auprès de leurs petits camarades. Pour ce qui en était de Karamatsu était tout différent : il restait là, assis à son bureau, se regardant dans un petit miroir pour observer son acné qui commençait peu à peu à disparaître avec l’âge ; et il était temps car il commençait à recevoir quelques remarques désagréables de ses camarades. Il laissa échapper un soupir de désespoir en rangeant l’objet dans ses affaires et regarda sa montre qui indiquait que les clubs n’étaient pas terminés. Là, Jyûshimatsu devait courir de partout et en tant que bon grand frère qu’il était il se devait d’attendre que son frère ait terminé de fatiguer 0,001% de son énergie pour aller le voir et prendre de ses nouvelles. Oh oui, il avait tout prévu dans ses affaires ; une tenue de rechange pour qu’il ne sente pas le chacal en retournant aux dortoirs, une bouteille d’eau, une collation composée de sucreries comme les adorait son cadet… bref, il allait être de nouveau aux petits soins pour un frère qui sans doute ne verrait jamais les efforts qu’il donnait pour s’occuper de lui.

Le sorcier reposa ses mains sur son bureau, jouant nerveusement avec ses doigts tandis qu’il relisait une nouvelle fois ces cours qui ne voulaient pas graver dans sa mémoire ; il n’était pas nul mais il ne faisait pas parti des meilleurs de la classe. De ce qu’on disait, certains de ses frères étaient même meilleurs que lui et si n’importe qui aurait ressenti de la jalousie, il en était autrement pour Karamatsu qui préférait être fier. Alors qu’il commençait à reformuler le nom d’un sortilège, un petit vent froid vint lui chatouiller la nuque. Karamatsu grimaça, se leva et se dirigea vers la fenêtre pour la fermer ; quelqu’un l’avait laissée ouverte pour une raison quelconque, surtout que l’hiver laissait déjà abattre son matelas de neige sur tout Ilukaan. Peut-être que Jyûshimatsu faisait de la luge sur une porte trouvée quelque part ? Dans ce cas il allait devoir faire attention à ne pas le croiser, avec sa chance il se verrait percuté par son cadet. Il retourna à sa place, retirant la veste de son uniforme pour être un peu plus à l’aise.

Lire et relire les phrases pour ensuite fermer le livre, les répéter de mémoire, et ça continuellement, voilà ce qu’il faisait. Il en avait marre mais s’il avait envie de passer, de ne jamais redoubler et d’être toujours avec ses frères il se devait de souffrir de cette façon ; il n’était qu’en sixième année et il savait que la suite allait devenir par la suite plus compliquée. Il laissa échapper un nouveau soupir avant de se lever et ranger ses notes. Bon… Il pouvait au moins se promener non ? Avant que quelqu’un ne revienne en classe pour x ou y raison…

"Non, ce n'est pas moi. »

Alors qu’il rangeait ses notes dans le plus grand des calmes, Karamatsu se demandait si le futur allait bien lui réserver des surprises. Après tout, il n’était que le frère poule qui courrait après ses frères pour les dorloter et n’osait que très peu montrer toutes ses capacités dans le domaine artistique. Il voulait devenir danseur, il s’entrainait depuis son plus jeune âge après tout, mais il s’interrogeait quant à l’abandon de ses frères pour devenir finalement « quelqu’un ». Ne serait-ce pas trop égoïsme ? Il devait penser à sa famille avant tout. Retenant de faire une moue et se disant qu’il aurait peut-être mieux faire de prendre un animal de compagnie pour le soutenir dans des moments pareils, il entendit une voix qui lui était familière : celle de Sofia. Soudainement il paniqua, observant la demoiselle qui l’appela… « Osomatsu ». Osomatsu ? Un léger et rapide tic de la lèvre supérieur trahit son malheur ; il n’aimait guère qu’on le confonde encore une fois avec l’un de ses frères et encore plus avec son ainé qui ne savait pas faire son rôle correctement. Puis qu’avait encore fait le Puceau Rouge ? Il craignait à présent le pire bien qu’à y penser, les accusations de la jeune fille étaient infondées puisque, si elle avait perdu une boucle d’oreille, il ne se pouvait pas trop que ce soit son ainé. Certes, il savait que le premier Matsuno était bizarre, qu’il manquait fortement de maturité mais Karamatsu ne pouvait pas se l’imaginer gros chapardeur de bijoux… sauf si ce n’était que pour taquiner bien évidemment.

« Euh… Hmm… Pardon… »

C’était quelque peu compliqué de parler lorsqu’on était un grand timide comme Karamatsu et encore ce dernier avait moins de mal avec ses camarades de classes qu’il commençait peu à peu à connaître. Puis à force, il s’était bien vu forcé à leur taper la discussion plusieurs fois pour x ou y raison, comme par exemple pour informer où se trouvaient ses frères, donner d’autres informations… Bien qu’il rougît toujours et encore chaque fois qu’on lui parlait, qu’il baissait les yeux et la tête comme pour éviter qu’on ne voie son visage acnéique. Il arbora un léger sourire gêné.

« Je suis désolé… mais je ne suis pas.. Osomatsu…. »

Oui, encore une fois on le confondait avec l’un de ses frères et il sentait comme une pression dans sa poitrine, comme si ça l’avait plus touché qu’il ne souhaitait l’avouer ; étaient-ils aussi ressemblants pour qu’on ne cesse de confondre les identités ? et par conséquent, étaient-ils tous les mêmes ? ou lui trop fade ? Cela le mettait mal à l’aise il devait l’avouer, surtout qu’on venait aussi d’accuser son frère d’un crime qu’il était certain qu’il n’avait pas commis. Pauvre Osomatsu…

« …Je suis Karamatsu… le deuxième… »

Il fallait bien préciser sa place non ? « Le deuxième », ou plutôt « l’éternel deuxième » oui. Il savait qu’il serait toujours après son aîné… et aussi après ses cadets. Il tira légèrement sur sa frange, le souffle presque coupé. Il avait envie de se cacher, de s’achever… Sans doute décevait-il Sofia de n’être que Karamatsu et non celui qu’elle espérait voir.

« Est-ce… qu’il a fait… quelque chose de... de mal ? »

"Encore Bully»

Parler plus fort ? Lui ? C’était hélas impossible, il avait peur de casser les oreilles avec sa voix grave. Il avait les larmes aux yeux ; déjà qu’il avait du mal avec ses camarades notamment avec la gente féminine, voilà qu’il se faisait agresser. La vie était injuste, pourquoi c’était toujours lui ? Certes Osomatsu avait apparemment fait des bêtises mais ce n’était pas pour autant qu’il devait s’en prendre plein la figure. Baissa de plus belle le regard, essayant de se le cacher au mieux avec ses cheveux, il vint par la suite à tenter de camoufler sa trogne avec sa main en rougissant et en se braquant : encore une nouvelle fois on l’attaquait sur son acné et les gros sourcils. Il retint une grimace et même une larme. Les gens n’avaient vraiment rien d’autre à faire que de l’insulter et le victimiser ? Il avait déjà ses frères qui étaient là pour l’ignorer et pour lui faire mal, ses compétences qui ne dépassaient pas celles du reste de la fratrie et lui-même pour se mutiler psychologiquement en se traitant comme un bon à rien, alors pourquoi est-ce que ses camarades avaient la fâcheuse manie de lui faire du mal ?

Soudainement, lui vint en tête l’idée de vivre comme dans une communauté de rats car ces derniers avaient toujours un souffre-douleur dans leur bande afin de se sentir mieux. Peut-être qu’il était ce pauvre rat qui s’en prenait plein la figure, peut-être que son rôle dans ce monde n’était que les gens se défoulent sur lui pour se satisfaire leur égo ou bien leur envie de se défouler. Voilà à présent comme il se verrait par la suite… Comme un Ka-rat-matsu… Peut-être qu’il le méritait après tout, ce funeste rôle… Et sans doute se devait-il de ne pas se retirer un jour la vie comme il l’avait plusieurs fois songé pour éviter que cela ne retombe sur quelqu’un d’autre, comme l’un de ses frères.

Bien qu’il était braqué et s’efforçait de respirer normalement pour ne pas faire remarquer son envie de pleurer… Par contre, elle accusait vraiment Osomatsu d’avoir fait ça ? D’avoir volé sa boucle d’oreille ? Il avait peur de répondre à Sofia, il devait l’avouer, mais il ne pouvait pas non-plus laisser son ainé se faire insulter de cette sorte, car il croyait en lui, il savait qu’il n’avait rien fait d’aussi stupides.. Peut-être une petite blagounette mais Karamatsu doutait fort qu’il ne soit pas revenu vers elle le plus rapidement possible. Jouant avec ses doigts et gardant le regard baissé il répondit timidement :

« Tu… l’as peut-être… perdue… dans la classe… »

Il se leva toujours en ne regardant pas la Lupy pour se mettre aussitôt par terre à quatre pattes et chercher le précieux bijou, priant pour qu’il le retrouve. Il n’aimerait pas que son aîné se fasse victimiser tout comme lui, même si ce n’était qu’un imbécile qui ne méritait pas sa place.

« Je.. vais la chercher.... »

"A la recherche du bijou disparu.»

Ouh qu’il commençait déjà à pleurer, à lâcher ses quelques petites larmes tandis qu’il continuait à chercher la boucle d’oreilles. Il fallait qu’il la trouve pour éviter qu’elle n’aille s’acharner sur Osomatsu, son aîné ne devait pas se faire bully à sa place car c’était là son rôle de rat souffre-douleur. Il passa sous quelques bureaux, s’essuyant ses yeux humides avec son manche et essayant de ne pas renifler pour ne pas trahir ses pleurs, tant pis s’il venait à morver sur le sol. Entendant la première question de Sofia il se mit soudainement à paniquer de plus belle, ce qui par conséquent lui fit verser plus de larmes. Oh non, elle allait rire de lui, le penser faible… Alors pour elle il ne serait plus qu’un « Matsuno acnéique aux gros sourcils » mais « Le Matsuno fragile acnéique aux gros sourcils ». Vu son caractère, elle devait être de ces filles populaires qui utilisaient de leur notoriété pour écraser les autres et se sentir supérieure… à moins qu’elle ne le faisait que pour satisfaire son manque de confiance en elle et déchainer toute sa fureur sur lui, mais ça… Il allait devoir s’y faire, c’était son rôle de petit rat.

La voyant se placer devant lui, Karamatsu crut que son cœur allait exploser tant il se sentait encore plus mal. Seigneur, il avait envie de se fondre dans le parquet pour pouvoir retrouver ce bijou sans à avoir à communiquer avec la Lupy. Il se cacha le visage avec sa frange pour qu’elle ne puisse pas le voir pleurer et secoua la tête comme guise de réponse négative. Bien sûr qu’il chialait, mais il n’allait pas avouer qu’il le faisait. Puis s’il s’était fait mal physiquement cela aurait pu aller… Après tout, vu sa situation, il préférait largement perdre un bras que d’avoir à vivre un enfer psychologique comme celui dans lequel il était prisonnier. Bien que sa vue était embrouillée par les larmes, il parvint finalement à voir au loin une forme sur le sol et il s’en approcha ; mais malheureusement ce n’était qu’un taille-crayon. Une fausse joie , il allait devoir rester encore en compagnie de Sofia un peu plus longtemps. Il posa l’objet trouvé sur le bureau toutefois en espérant que le propriétaire de celui-ci soit heureux de le revoir avant de repartir à la recherche du bijou. Il se pencha même pour regarder sous un meuble, se disant qu’il avait pu glisser.

"Enfin trouvé !»

Voilà à présent qu’elle agrippait, comme pour le forcer à regarder mais Karamatsu évitait de la regarder droit dans les yeux, comme s’il avait droit à une conversation avec la Gorgone. Cette dernière avait un peu son pouvoir d’un côté, à le figer sur place tellement il était trouillard. Le jeune homme essayait de se calmer mais en vain : voilà qu’à présent il semblait inquiéter la demoiselle ou alors l’énerver vu les gestes. Est-ce qu’elle allait à un moment le frapper ? Crier plus fort ? Si c’était le cas, que ferait-elle si elle venait à rameuter du monde ? Ce dernier se moquerait-il de lui à le voir pleurer comme ça ? Car oui, malheureusement les mœurs souhaitaient que les hommes ne puissent pas montrer leurs sentiments, faire signe de faiblesse et sans doute Karamatsu ne sera-t-il jamais considéré comme un homme et sérieux vu qu’il pleurait de temps en temps, voire même souvent. Il haussa les épaules, ne souhaitant pas dire que c’était la demoiselle qui lui faisait pleurer ; il n’avait pas envie de la vexer et pire encore, la mettre de plus belle en rogne.

Le Matsuno se braqua de plus belle lorsqu’elle vint à tirer derechef sur sa manche pour lui ordonner de la regarder dans les yeux. Face à cette exigence, il s’interrogeait s’il devait ou non obéir puisqu’il n’aimait pas le contact visuel avec les autres ; peut-être devrait-il songer un jour à s’acheter des lunettes de soleil pour éviter cela. Après, au nombre de fois où on lui parlait, pas la peine de se prendre des lunettes aux verres teintes, cela ne servirait strictement à rien si ce n’était que de le ridiculiser. Toutefois, il se plia à la volonté de Sofia en la regardant droit dans les yeux, tremblotant un peu.

« Ce.. ce n’est rien… »

Il n’allait pas lui sortir pépère mémère « Oh bah c’est juste que je suis un dépressif ignoré par tout le monde surtout par ses frères avec qui on compare le plus et tu me fais peur » et compagnie ! Quand même pas, c’était Karamatsu, sans doute le plus pleutre de tous les Matsuno. Commençant à avoir ensuite le regard fuyant, il finit par retourner chercher la précieuse boucle d’oreille. Finalement, il la trouva et sans même regarder Sofia, il la lui tendit pour qu'elle puisse le récupérer.

"Sorry.»

Oh ? L’avait-il choquée ? Enervée ? En tout cas, Karamatsu comme le bon empathique qu’il était sentit surtout qu’elle avait été comme blessée. Etait-ce parce qu’il avait pleuré en sa présence ? Qu’il avait refusé de lui répondre ? Qu’il lui avait fait prendre conscience qu’elle avait accusé à tort son pauvre frère et que par conséquence elle devrait mieux chercher au lieu de s’attaquer à Osomatsu ? Il n’en savait rien mais voilà qu’à présent, il culpabilisait. Bon sang, qu’il était idiot. Il aurait dû se retenir de pleurer dès le départ, voire même peut-être trouver le bijou avant qu’elle n’arrive pour y mettre dans sa poche et s’auto-accuser de vol ; au moins il en aurait pris pleins la tronche et ainsi qu’une heure de colle mais au moins Sofia aurait pu se défouler librement sur lui. La voyant partir, le jeune homme se releva pour ouvrir la porte et la regarder s’éloigner dans le couloir. Il prit là une grande inspiration.. Bon, il n’avait pas beaucoup de courage mais il pouvait en trouver parfois entre quelques cartons de son cerveau.

« Je… suis désolé… »

De quoi ? Lui-même n’en savait que trop rien ; après tout il avait juste pleuré de peur et d’autres raisons, mais il ne l’avait pas plus parlé que ça. Le visage toujours baissé, les yeux humides et toujours larmoyants regardant ses pieds, il était paralysé par la crainte d’être moqué de nouveau et peut-être pas par la Lupy mais par d’autres élèves qui assisteraient à la scène. Il se mordilla la langue, réfléchissant bien à ses paroles.

« C’est.. normal chez moi… de pleurer… Il ne faut pas que tu le prennes pour toi… Je suis un peureux… qui chiale tout le temps…. »

Pas seulement à cause de ses angoisses, aussi pour d’autres raisons mais il n’allait pas les lui citer. Se culpabilisant de plus belle d’avoir fait fuir sa camarade, Karamatsu s’enfonça l’ongle sur pouce dans la chair de son index comme pour essayer de retenir de nouvelles larmes.

« Alors… il ne faut pas y prendre pour toi… je suis désolé… »

"Devenons amis ! »

La jeune fille se mit soudainement à venir vers lui d’une façon quelque peu effrayante pour un peureux comme Karamatsu ; l’avait-il énervée avec ses niaiseries, à toujours s’excuser ? Ou bien souhaitait-elle l’achever à coups de pompes dans l’arrière-train ? Voilà à présent que l’esprit débordant d’imagination du second Matsuno venait à exploser, le laisser croire à une éventuelle baffe dans le meilleur des cas et à son enterrement pour le pire. Sans doute ce qui était le plus à craindre n’était pas qu’il pensait à se défendre mais plutôt qu’il se demandait si dans l’éventuel deuxième cas ses frères le pleureraient. Sans doute que oui, sans doute que non, à moins de devenir un fantôme il ne le saura jamais. Alors qu’il était tétanisé par Sofia et s’attendait à une majestueuse claque, il fut quelque peu surpris de l’entendre dire qu’il devait cesser de s’excuser et qu’elle l’avait agressé. Oh bon sang. Voilà que c’était maintenant la culpabilité de Karamatsu qui lui faisait mal.

« Non… Ne t’inquiète pas… Il est normal que… que je m’excuse tout le temps… »

Il n’avait pas envie qu’elle pensât que c’était sa faute s’il était aussi réservé, la pauvre bichette. Regardant la main de la Lupy, il releva timidement le regard sur le visage de cette dernière en écoutant son discours. Il ne savait pas trop quoi dire, surtout qu’elle avait envie de l’aider ? Est-ce qu’il faisait autant pitié que ça ? limite il devrait se mettre dans un carton pour demander de l’aide aux autres ? Non, c’était lui qui venait au secours des autres et non l’inverse, cela lui serait perturbant, surtout qu’il était conscient qu’il était un peu un papa poule avec ses cadets. Par contre, il avait envie de venir en aide à Sofia qui semblait avoir peur. Regardant toujours la main il se décida finalement à afficher un léger sourire, toujours aussi timide.

« ..Enchanté.. »

Il prit la main tendue, essayant de ne pas trop baisser le visage pour ne pas paraître impoli.

« Je suis Karamatsu Matsuno… 6ème année chez les Strixyst…  Tu peux m’appeler comme tu veux… On m’appelle parfois juste « Kara »….  Je souhaite plus tard faire dans la musique… Ce n’est pas aussi cool que toi… mais c’est ce que j’aime… Et je suis aussi trop sensible et timide… faut le savoir… mais faut pas venir m’aider… Il ne faut pas s’inquiéter de mon cas… Je t’en remercie toutefois… mais je peux t’aider avec ta peur…»

Jamais il n’allait lui dire qu’il la trouvait complètement impulsive, il avait vraiment peur de la vexer et ce n’était pas le but escompté, au contraire, voir cette main amicale et entendre qu’on souhaitait devenir son ami le rendait plutôt joyeux. Et s’il ne pouvait exprimer sa joie par un grand sourire et un air serein comme n’importe qui, lui rougissait juste en ayant des larmes aux yeux, les baissant pour ne pas énerver de plus belle Sofia.

« J’accepte d’être ton ami… si tu es toujours d’accord… »

"Yeah Potos ! »

Le jeune homme se sentit encore plus mal en ne pouvant quitter des yeux le regard de Sofia ; en effet, il craignait que s’il fixait le sol de nouveau la Lupy ne l’achevait sur place. Toutefois il avait accepté l’amitié de Sofia et il essayait de se soutenir moralement en se répétant mentalement qu’ils étaient à présent amis et qu’il devait se montrer moins timide envers elle. Il réussirait bien un jour à surmonter sa timidité, n’est-ce pas ? Même si cela prendrait des années. Par contre, il aurait bien aimé récupérer sa main, n’ayant pas l’habitude du contact si ce n’était qu’avec ses frères mais n’osait rien dire et faire y concernant pour ne pas attiser le courroux de sa camarade.

« Bien… si c’est ce que tu souhaites… J’accepte alors d’être aidé… Merci, je t'en revaudrai ça... »

Il n’avait surtout pas le choix, du moins c’était comme ça qu’il avait perçu les mots de Sofia puis peut-être qu’au final il avait besoin d’être aidé lui aussi ? A surmonter cette peur des autres, cette timidité, cette dépression…. Pourtant il était toujours et sera encore certain que seuls ses frères pourraient grandement l’aider au fil du temps. Chacun allait pouvoir évoluer pour devenir de vrais hommes et les voir devenir quelqu’un ne ferait qu’égayer la vie du pauvre imbécile qu’il était. La Lupy lui proposa de traîner avec lui et c’était bien la première fois qu’on lui proposait un rendez-vous entre amis. Cela lui arracha un léger sourire et de nouvelles joues rouges de plaisir et baissant de nouveau les yeux en le visage, Karamatsu répondit :

« Bien… Pourquoi pas… ? A me donner… le jour et l’heure… et le lieu de rendez-vous… Si tu veux… tu peux inviter d’autres personnes… plus on est de fous… plus on rit non ? »

Enfin, « plus on est de fous, plus lui se cache » surtout. Il n’osait déjà rien dire face à quelqu’un mais alors dans un groupe, pour essayer de s’incruster… c’était le pompom.

"A bientôt ! »

Oh zut, oui, elle n’était pas très sociable et pourtant, elle avait déjà un ami certes pas très loquace, mais un ami quand même. Il se demandait si le courant allait bien passer avec Lukas, après tout il ne le connaissait pas vraiment, c’était juste une vague connaissance qu’il croisait parfois mais à qui il n’avait jamais adressé la parole.

« Très bien… »

C’était là la seule chose qu’il pouvait répondre. Est-ce que Lukas l’accepterait le week-end ? Après tout il craignait qu’il ne soit hélas de trop dans le groupe ; déjà qu’il se sentait un peu à part dans la fratrie, il savait que dans une sortie entre amis cela le ferait encore souffrir. Après, il ferait des efforts pour essayer de se sociabiliser avec le pote de Sofia, même si ce serait très difficile, il en était fort conscient.

« A samedi. Merci encore. »

Il la regarda partir avant de retourner dans la classe, rangeant ses affaires. Il afficha un petit sourire et les glandes lacrymales menaçaient de nouveau de trahir ses sentiments ; il était heureux, il s’était fait une amie. Toutefois la joie laissa vite place à la peur que ce ne soit qu’une amitié de courte durée, qu’il se fasse lâcher facilement. Après tout, il n’avait rien de cool, d’intéressant dans sa personnalité… Au pire, il verrait ce que cela donnerait. Karamatsu terminant de ranger ses affaires dans son sac, il quitta la salle pour aller rejoindre son frère, sourire aux lèvres.

Finalement, il avait passé une bonne journée.