Il y a quelques années de cela, au cœur de la ville colorée de Sang Miguel de Allende, vivait un jeune garçon du nom de Nathaniel. Né dans une famille - quelle surprise ! - particulièrement aisée de sorciers sang-purs, celle-ci était connue pour être versée dans l’histoire magique, possédant des bibliothèques jonchées de livres de tous les âges et recoins du monde. Toutefois, malgré la richesse qui l’entourait, Nathaniel avait eu le malheur d’être le cadet de sa fratrie, l’enfant oublié, coincé dans l’ombre de son grand-frère qui était destiné à être l’héritier de la famille, et celle de sa petite-soeur, pourrie-gâtée jusqu’à l’os.

Tandis que le jeune garçon grandissait, sa frustration et son désir d’attention s’intensifièrent de même. Chaque jour qui passait, il sentait les chaînes invisibles de cette négligence se resserrer autour de son cou. Il désirait plus que tout être reconnu et être écouté par ses parents, qu’ils le regardent avec fierté et amour. Mais ses efforts pour obtenir leur attention étaient souvent vains, le laissant déçu et frustré.

Dans la tentative d’être entendu par ceux qu’il aimait, Nathaniel devint de plus en plus agressif et agité. Il faisait souvent des scènes à son entourage, créant chaos et désordre peu importe où il allait. Malheureusement, son comportement ne fit qu’alimenter le dédain de ses parents envers lui, ne voyant en lui qu’un fauteur de troubles, indigne de leur affection et de leur attention.
Le tumulte qu’il apportait ne s’arrêtait pas qu’aux murs de sa villa. A l’école, avant même d’arriver à Ilukaan, Nathaniel se retrouvait constamment dans les ennuis, autant avec ses petits camarades que ses professeurs, le poussant à être exclu et isolé de ses petits camarades à de nombreuses reprises. Ses parents étaient souvent appelés pour cela, ne créant chez eux qu’un peu plus de déception et d’agacement envers leur second enfant. Ses professeurs avaient toutes les difficultés du monde à le comprendre, tandis que les autres élèves le rejetaient parce qu’il était trop hostile et inapprochable.

Dans sa solitude, Nathaniel trouva du réconfort dans ses activités artistiques. Il pouvait passer des heures, pinceau en main, à créer de remarquables œuvres d’arts représentant le monde comme il le voyait. Son imagination s’épanouissait et, au travers de ses créations, il avait l’impression d’être entendu, l’impression d’avoir un échappatoire à toutes ses émotions tumultueuses.
Cet exutoire, il le devait à son cher grand-père. Luis Muñoz était un artiste de renom dans leur ville natale, isolé dans sa demeure à quelques rues de la demeure familiale, et était le modèle de vie de son petit-fils. C’était lui qui avait développé cet amour de l’art chez Nathaniel, un domaine négligé et regardé de haut par le reste de leur famille car vu comme inutile. A chaque fois qu’ils passaient du temps ensemble, Luis l’écoutait déverser tout ce qu’il avait sur le coeur, ses craintes, ses frustrations et ses peines. Il l’encourageait à s’exprimer au travers de son art, ayant compris que c’était la seule façon que son petit-fils avait pour alléger le poids sur ses épaules.
Ce fut, d’ailleurs, lors de l’une de leur session artistique que la magie de Nathaniel se manifesta pour la première fois, à ses 10 ans. Particulièrement furieux après avoir été, encore une fois, réprimandé par ses parents, plusieurs pots de peinture avaient explosé dans la pièce alors qu’il se déchaînait sur l’un de ses tableaux.

Grâce à cela, et pour une rare fois, ses parents lui payaient enfin attention. Toutefois, le désintérêt que leur progéniture montrait à l’égard de leur héritage et de l’apprentissage de la magie, à ce moment, ne fit qu’éteindre cette attention naissante chez eux. Alors que, au même moment, un intérêt tout nouveau pour l’art apparaissait chez sa petite-soeur. A force de voir les oeuvres de son frère, la benjamine, plus jeune de 3 ans, avait commencé à l’imiter dans l’idée de se rapprocher de lui.
Cette tentative était un échec, Nathaniel ne cherchant que l’approbation de leurs parents et ne ressentant que de l’injustice face à celle qu’ils accordaient à sa petite-soeur, il ne faisait que rejeter avec véhémence tout ce qu’elle tentait de lui montrer fièrement. Leurs paternels n’étaient pas mieux, sermonnant la petite lorsqu’il la trouvait à dessiner plutôt que se concentrer sur les activités qu’ils considéraient importantes.

Le blond ne comprit que trop tard les réelles intentions de sa petite-soeur. Lorsque vint le moment où il devait choisir l’école où il étudierait la magie, Nathaniel n’avait qu’une chose en tête désormais : s’éloigner le plus possible de sa famille. Son désir d’avoir la considération de celle-ci, ne serait-ce qu’un minimum, s’était changé en dédain envers elle. Ilukaan était un choix intéressant, bien qu’il aurait souhaité rentrer dans une école plus éloignée encore, aucun n’offrait les mêmes opportunités et la même diversité que celle-ci.
Ses parents étaient, à vrai dire, tout aussi satisfaits de cette décision que leur cadet ; ainsi, ils auraient moins de problèmes à gérer avec cet enfant perturbé loin d’eux, et pourraient se concentrer sur leur premier né.
Les années qui passèrent entre ce choix et l’exécution de celle-ci ne furent pas plus douces pour Nathaniel. Son grand-père, dont les années de vie commençaient à lui peser, ne pouvait plus passer autant de temps avec son petit-fils, bien que ce dernier lui rendait régulièrement visite à l’hôpital. Son dernier souffle fut rendu lors de l’année des 11 ans du jeune bambin, le plongeant dans un chagrin sans précédent que même ses œuvres ne surent apaiser.

Ce n’est que lors de son arrivée à Ilukaan que Nathaniel put trouver un peu de répit dans tous ses tourments. Bien qu’il se trouvait désormais dans un environnement étrangé à celui qu’il avait connu, la séparation avec sa famille était comme une bouffée d’air nouvelle. Et, malgré son comportement qui en repoussait plus d’un, et à juste raison, il parvenait à rencontrer d’autres élèves aux intérêts similaires aux siens.
Cette “nouvelle vie”, comme il l’appelait, lui offrait un nouvel intérêt pour la magie et lui effaçait le presque dégoût que ses parents avaient créé chez lui envers cette pratique, lui apprenant comment fusionner celle-ci avec sa passion artistique. Ses œuvres n’en devenaient que plus remarquables et époustouflantes, insufflées avec ses sentiments et sa magie, désormais. … Lorsqu’elles n’étaient pas ruinées par la petite gerbille qu’il avait trouvée dans les rues de Bloombury, assurément abandonnée par son précédent propriétaire s’étant bêtement dit qu’elle serait plus heureuse “libre”.

(c) Ilukaan