Quand Tighnari a commencé à montrer des signes de métamorphomagie dès bébé, personne ne fut surpris. Le phénomène étant génétique et ses deux parents possédant ce don, l’inverse aurait été plus surprenant. Non, ce qui a étonné tout le monde, ce n’était pas le fait qu’il soit un métamorphomage, c’était plutôt la façon dont ça s’était manifesté. Sa mère se souvient encore de la première fois que ça s’était produit. Elle était allée mettre son bébé dans son berceau pour sa sieste, il l’avait fixé, avait fixé ce petit poster avec des animaux du désert mignons accroché au mur et pouf, des oreilles et une queue de fennec lui étaient apparues. Ca les avaient tous deux bien fait rire et c’est peut être pour ça qu’inconsciemment, il avait fréquemment reproduit ce phénomène. Les années passaient et il n’était pas rare, suite à de fortes émotions, de voir une grande paire d’oreilles pousser sur la tête du petit marocain. Son père lui avait un jour demandé, amusé, pourquoi il faisaient apparaître des attribut de fennec alors qu’aucun de ses parents n’utilisaient leur métamorphomagie de cette manière et le petit garçon lui avait simplement répondu qu’il ne le savait pas. Ce fait lui avait longtemps trotté dans la tête. Il ne savait pas… C’était quelque chose qui le concernait alors il aurait dû savoir pourquoi, non? Il faisait quelque chose sans même en comprendre les causes et les conséquences… Il fallait tirer les choses au clair!

Tighnari était ce qu’on appelle un enfant précoce et c’était le moins qu’on pouvait attendre du fils des Gamrasni. Son père entomologue et sa mère paléontologue étaient connus en ville pour être des personnes brillantes et ça n’étonnait personne que leur enfant marche dans leur pas. Il avait su marcher plus tôt que les autres, parler plus tôt que les autres, sa magie s’était manifestée plus tôt que les autres, en faisant pousser des fleurs que sa mère avait gardé en les faisant sécher dans un livre, et il avait su lire plutôt que les autres. Il n’était pas rare de le voir se faufiler dans le bureau de ses parents afin de parcourir leur bibliothèque. Pourquoi lire des livres pour enfant quand il pouvait lire un livre sur de vrais dinosaures? Il ne comprenait pas la majorité de ce qu’il lisait mais bon, ce n’était pas si comptait, l’important pour lui, c’était d’avoir accès au livre de grand pour se donner l’impression d’être un chercheur lui aussi. Il savait, malgré son jeune âge, différencier la réalité de la fiction et il savait donc très bien que ces livres compliqués ne racontaient rien d’inventé, le peu qu’il arrivait à apprendre de ces ouvrages, c’était de vraies informations. Il s’était mis à arpenter toute la bibliothèque, parcourant chaque livre au noms compliqués pour y chercher un titre contenant le mot “métamorphomage”. Il avait une question existentielle à laquelle répondre après tout, il fallait trouver pourquoi il se retrouvait souvent  avec ces oreilles et cette queue touffue.

Quelques livres plus tard, trouvés dans le bureau et achetés pour l’occasion par ses parents qui avaient très bien compris ce qu’il cherchait à faire, il avait plus ou moins cerné le problème. Apparemment, ça venait d’un manque de maîtrise de son don, les autres métamorphomages se transformaient à volonté, lui par accident. Il avait essayé après ça, de faire apparaître ses attributs de fennec de son plein gré, avec quelques il réussissait à les faire venir, les faire partir était bien plus dur. Toute autre transformation allait lui demander plus d'entraînement… Cependant, la question n’était qu’à moitié répondue. Il savait pourquoi il se transformait comme ça, mais pourquoi un fennec? Il en avait parlé à ses parents à table qui lui avaient répondu qu’il ressentait peut être une forte connexion avec cet animal. Pourquoi? Parce qu’il y en avait un dans sa chambre de bébé? Ça avait quoi de particulier un fennec? Sa curiosité était à nouveau attisée et l’avait menée à davantage de recherches. Quelques lectures plus tard, il se trouvait qu’il aimait en effet les fennecs. Ils n'étaient pas seulement mignons, ils étaient aussi très malins et possédaient plein de techniques pour chasser dans le désert sans se faire remarquer! La lecture ne lui suffisait plus, il fallait qu’il en voit un en vrai! Son père devait justement partir en excursion dans le désert, pour observer des scarabés, d’ici quelques semaines. Après avoir promis qu’il serait très sage et expliqué en quoi ça serait trop chouette pour lui d’y aller “pour ses recherches”, Tighnari fut autorisé à l'accompagner. Mauvaise idée. Le petit garçon n’avait pas calculé un détail pourtant aussi évident qu’important. Dans le désert il fait chaud, le soleil tape fort et le petit marocain ne faisait pas honneur à ses gènes en supportant aussi mal la chaleur. L’insolation eut raison de lui et il fut ramené à la maison avant d’avoir pu voir le moindre fennec, ses parents jugeant qu’il valait mieux l'emmener dans un parc animalier plutôt que de retenter l’expérience.

Tighnari était interdit de désert jusqu’à nouvel ordre, mais ça n’empêchait pas qu’il adorait accompagner son père au travail. Il apprenait toujours plein de choses! Celui-ci faisait régulièrement des excursions en forêt, magique comme moldue, Khénifra en étant bordée. Le petit garçon avait souvent le droit de s’y rendre, hors des horaires d’école, pour aider son père dans ses recherches armé d’une loupe que lui avait offert sa mère. Ces moments dans la forêt étaient si instructifs! Il découvrait à chaque fois de nouvelles informations, et pas que sur les insectes! Son père avait toujours des anecdotes à raconter, sur la faune, sur la flore, sur comment retrouver son chemin quand on se perd dans les bois, comment survivre dans la nature, comment reconnaître ce qui se mange et ce qui ne se mange pas, … Toutes ces informations, le marocain les emmagasinait, années après années, au point où on disait en plaisantant que c’était devenu lui, l’expert en forêt de la famille.

Quelques mois avant l’anniversaire de ses onze ans, une brochure est arrivée dans leur boîte aux lettres. Il s’agissait d’un prospectus vantant les mérites d’une école de magie internationale canadienne. C’est vrai qu’il allait bientôt falloir quitter la maison pour partir en pensionnat… Où aller? C’était un choix qui ne se faisait pas à la légère et qui allait sûrement conditionner le reste de son existence. Tighnari étant Tighnari, il passa de nombreuses heures à faire des recherches, classant chaque école en fonction de ses points forts et de ses points faibles avant de prendre sa décision. Ilukaan lui semblait être la meilleur option, c’était un établissement réputé depuis des générations qui bénéficiait d’un regain de modernité grâce à sa nouvelle direction, de plus, son ouverture sur le monde lui permettrait de rencontrer des génies venant de tous les horizons, possédant des acquis dont il ne connaissait pas l'existence, autant d’arguments qu’il avait présenté à ses parents accompagné d’un powerpoint. Ils avaient soutenu son choix, ils l’auraient fait peu importe l’école. L’année suivante était venue l’heure du grand départ. N’importe quel enfant aurait été mortifié à l’idée de quitter son pays et sa famille pour partir seul vers l’inconnu mais pas lui. A l’aéroport, le jeune marocain avait dit au revoir à ses parents avec le sourire, sans verser une seule larme. Oh ils allaient lui manquer, bien sûr, il les aimait de tout son coeur et avait déjà hâte de les revoir, mais l’excitation de découvrir de nouvelles choses étaient trop grande pour qu’il puisse être triste. De toute façon ce n’était pas comme s’il partait au milieu de nul part, il pourrait toujours leur parler au téléphone.

Sa rentrée à Ilukaan s’était déroulée sans embûches. Il avait la chance d’avoir déjà un assez bon niveau en anglais qui lui permettait de se faire comprendre sans trop de soucis et de rencontrer de nouveaux amis. Seule surprise: sa maison. En se renseignant sur l’école, il s’était attendu à se retrouver à Cervirald, pourtant la fontaine de la répartition l’avait placé à Ursirre. Il ne comprenait pas vraiment ce choix, selon lui il n’avait rien d’un protecteur… Ca ne l’avait pas perturbé plus que ça, il s’était dit qu’il valait mieux ne pas remettre ce choix en cause, il le comprendrait sûrement plus tard. Tout le monde l’avait bien accueillir dans sa maison, ses camarades de dortoir étaient sympa et il ne pensait déjà plus à cette histoire de répartition. A Ilukaan comme dans son ancienne école, le jeune marocain était un élève brillant. Il fallait avouer que les cours étaient passionnants! Chaque matière attisait plus sa curiosité que la précédente et il attendait chaque cours avec hâte tant il avait hâte d’en apprendre plus. La découverte du campus et de Bloombury était toute aussi intéressante, rendant ses journées bien remplies. Même après plusieurs années passées à l’école, il avait encore l’impression de découvrir des recoins ou des légendes qu’il ne connaissait pas. Les clubs étaient également une source de connaissance sans fin, il y en avait tellement sur tellement de sujets différents, il les aurait tous rejoint si ça avait été compatible avec son emploi du temps!

Chaque été, il avait la chance de pouvoir rentrer au Maroc, rejoindre ses parents. Plus que jamais, il en profitait pour accompagner son père dans ses excursions, mettant à profit ses connaissances acquises durant l’année scolaire. En ayant pris de l’âge est de la maturité, il eut rapidement le droit de s’aventurer seul en forêt, pour faire ses propres recherches. Il adorait cette forêt, elle lui tenait beaucoup à cœur, il voulait tout savoir d’elle et la protéger des dangers. Plus les années passaient et plus il y passait de temps, jusqu’à y passer plus de temps qu’avec ses parents qui étaient censés être la raison de son retour au pays. Ils ne voyaient pas vraiment de mal à ça, étant les premiers à disparaître pendant des semaines pour mener à bien leurs recherches. Il pouvait bien faire ce qu’il voulait tant qu’il restait prudent et de la prudence, Tighnari en a manqué durant l’été séparant sa septième et sa huitième année. Enfoncé profondément dans la forêt, il avait remarqué que le ciel se teintait d’un gris inquiétant, mais il pensait avoir le temps de prendre en photo encore quelques champignons avant d’avoir à rentrer. Erreur de calcul, sur le chemin du retour, il fut surpris par l’orage et être entouré d’arbre est le pire lieu dans lequel on peut se retrouver dans cette situation. Frappé par la foudre, il a eut de la chance dans son malheur que l’éclair traverse seulement sa peau, lui laissant une belle brûlure mais pas de séquelles trop graves.

C’est à l’hôpital qu’il a donc découvert les résultats de ses choix de vœux pour son cursus universitaire. Il n’avait pas trop de doute sur le fait qu’il serait accepté où il voulait, avec son Optimal aux ASPIC, il pouvait rentrer partout. Il n’avait d’ailleurs fait qu’un seul vœu, ne voulant pas laisser le destin décider pour lui. Le plus dur avait été de faire un choix. La plupart des jeunes de son âge avaient du mal à trouver une idée de ce qu’ils voulaient faire plus tard, l’Ursirre avait le problème inverse, il avait trop d’idées. Comment s'arrêter sur un choix alors qu’il y avait tant de cursus intéressant? Il aurait pu partir en médicomagie, lui qui s’intéressait malgré le choix de la fontaine, à la magie de soin. Il aurait pu partir en soins aux créatures magiques, pour mêler son intérêt pour le soin à son amour de la faune. Cependant, ce n’était pas le choix qu’il avait fait. Il ouvrit son téléphone, regardant avec un sourire la page web indiquant qu’il avait été accepté en cursus botanique. Certains auraient pu penser qu’il manquait d’ambition, à étudier les plantes alors qu’il aurait eu les capacités d’être médecin, mais le marocain n’était pas d’accord avec cette façon de voir les choses. De l’ambition, il en avait, il n’avait juste pas d’intérêt pour le prestige ou l’argent. Un jour, il serait garde forestier et pourrait passer sa vie à parcourir la forêt et l’étudier.

Actuellement en dixième année, Tighnari réussit comme toujours brillamment ses études. Il est toujours autant investi dans ses recherches et dans les clubs de l’école et est même devenu une sorte de mentor pour certains élèves plus jeunes. C’était devenu une habitude pour lui, d’aider les autres, de leur corriger leurs devoirs, de leur transmettre ses connaissances, de les guider, de les défendre quand ils en avaient besoin. C’était peut être pour ça que la fontaine de la répartition l’avait mis à Ursirre.

(c) Ilukaan