L’histoire d’Itto et des Arataki commence bien avant 2004. A vrai dire, c’est un petit miracle qu’il ait vu le jour. Venant d’une longue lignée de sorciers traditionnels et de shamans, les Arataki ont toujours été miraculés. Pour connaître cette histoire, il faut remonter à l'époque des Trois Royaumes. Composée de deux familles principales à l’époque, (les Konpeki et les Kurenai) la communauté sorcière d’Okinawa, persécutée alors a réussi à échapper à des massacres et à se cacher, grâce au sacrifice d’une bonne partie de la famille Konpeki. L’histoire s’est répétée plusieurs fois entre 1350 et 2022, les deux communautés réduisant fortement à chaque fois mais réussissant à rester loin des affaires des moldus, des plus banales aux plus sombres. Depuis la 2e moitié du XXe siècle, les deux branches - a présent dites bleue et rouge, et comprenant un peu plus de 150 membres - cohabitent dans divers hameaux de campagne sur l’archipel d’Okinawa, tentant doucement de réparer ces liens coupés, non sans difficultés. Les descendants des Kurenai ont réussi à passer dans la lumière, se faisant respecter progressivement. Certains sont même devenus riches et célèbres! Pour les Konpeki…c’est plus compliqué. En acceptant de se sacrifier, beaucoup sont tombés dans la pauvreté si bien qu’ils n’ont parfois aucun héritage à laisser et doivent se tourner vers le crime. C’est rare. Mais ça arrive.

Itto est né le 1er jour de juin, alors que les dernières glycines perdaient progressivement leurs fleurs et que les insectes commencent à proliférer dans les maisons. Fils unique d’une toute petite famille de descendants de Ryukyuens, cachés dans un hameau sorcier du village de Tokashiki en préfecture d’Okinawa, Itto était un beau bébé, dépassant déjà les 5 kgs à la naissance, et anormalement grand, tout comme ses parents. Le hameau avait d’ailleurs donné à la famille le surnom d’Oni, en raison de leur taille assez démesurée. Un sobriquet peu apprécié par les parents mais que le bambin apprécierai plus tard.

Assez vite actif, Itto a marché vite, et couru dans la foulée. Pour le langage par contre…. Le marmot balbutiait encore des suites de voyelles à plus de 24 mois. Sa famille avait alors cherché des raisons à ce retard. Il ne s’agissait d’aucun souci neurologique, ou de ne pas avoir envie de parler - bien au contraire, il ne la fermait jamais. Son élocution a fini par venir et avec elle une forte capacité à crier. Bref, Itto était un enfant joyeux, turbulent et vif, même si parfois un peu simple.

En grandissant dans un village reculé, Itto n'eut jamais vraiment d’animaux de compagnie. Oh bien sûr il y avait les poules, les chiens du quartier, les chats, Itto lui-même pouvait parfois être qualifié pour remplir le rôle de bestiole selon son humeur, mais il n’a jamais eu de chien a lui. Mais ce n’était pas grave car pour ses 8 ans, sa grand-mère lui fit le plus beau des cadeaux.
Enfin - il se l’est un peu fait lui-même. Un soir, après avoir joué avec le veau d’un fermier voisin, Itto choisit comme ça de le voler et de le ramener chez lui. Il l'accueillit comme un invité de marque, lui réservant la table, lui préparant un excellent repas à base de riz mal cuit et de poisson, avant de se rendre compte que les vaches ne mangent pas de riz ou de poisson. Le temps d’aller chercher du gazon, Mamie Oni était revenue et criait, étonnée de voir un veau dans SA cuisine, ce qui attira le fermier étonné de voir SON veau dans une cuisine. Itto supplia de le garder, en utilisant tous les arguments possibles: oui il le sortirait, changerait sa litière tous les jours,  lui achèterait une roue et lui lancerait la balle.
Par sympathie pour la famille, et aussi car ça l’arrangeait de ne pas le tuer, le fermier lui en fit cadeau. Ainsi naquit la légende de Ushi et Itto, le taureau et le géant. Ushi c’est plus qu’un animal, c’est un moyen de transport, c’est un ami. Itto a une connexion particulière avec le bovin. En effet l’animal lui est très loyal et Itto a parfois de longues conversations avec lui, à la surprise et l’incompréhension générale.

Les parents d’Itto ont vite quitté Okinawa pour le laisser entre les mains de sa grand mère - par mariage, elle avait épousé le père du père d’Itto après la mort de sa grand mère biologique -  qui se fit une grande joie d’élever le petit monstre à la place de ses parents, d’abord avec son gigantesque grand père, puis rapidement seule. Fils de deux sorciers, il était prévu que le jeune garçon entre à Mahoutokoro sauf que sa magie n’est pas venue assez vite. Vraiment pas assez vite. Tellement lentement qu’à 9 ans le petit n'avait encore eu aucune manifestation magique, ce qui inquiétait grandement sa grand-mère. A l’aube de ses 11 ans, Itto n’avait toujours pas eu un seul signe de magie. Le pensant cracmol, sa grand - mère commençait à entreprendre - bien malgré elle - de l’inscrire au collège normal. Le 31 Mars, 3 mois avant ses 11 ans, Itto se préparait à rentrer au collège quand il fit exploser tous les vases de la maison, sous le coup d’un petit coup de colère. Miracle! Il était sorcier. Au secours! Tous ces vases à ramasser. Il était en revanche bien trop tard pour rentrer à Mahoutokoro. Mamie Oni, qui est une femme de réseau, et qui voulait tout pour son petit fils, fit jouer des contacts et son long bras pour lui dégoter une place de l’autre côté du pacifique, au Canada. Pas le plus proche mais l’école avait le mérite d’être internationale, il ne serait donc pas tout seul à parler japonais.

L’entrée à Ilukaan fut…. Conceptuelle. Mesurant déjà 1m70 a 11 ans et débarquant directement de la profonde campagne japonaise, Itto faisait un peu peur aux autres élèves. Les rudiments d’anglais qu’il avait appris au prix de longues sessions de bachotages portèrent leurs fruits avec l’aide des cours d’anglais et de la pratique, pour la magie par contre...Itto a toujours globalement un cancre avec des difficultés d’apprentissage, ça ne rentrait juste pas. On pourrait penser qu’il s’en sortirait comme un chef en sport mais il était bien trop violent, malgré lui. A plusieurs reprises, ses professeurs se sont inquiétés du redoublement, mais par le miracle du bullying par ses amis et de longues sessions de bachotage, il s’en tirait pas si mal aux examens finaux. En dehors de ça, la scolarité d’Itto n’a jamais été trop mouvementée, il ne sait toujours pas ce qu’il veut faire et s’est engagé dans un parcours qui ne l’intéresse qu’à moitié car il suit ses amis. Tout ça parce que chef de gang c’est pas valable comme plan de carrière. On déteste la réussite dans ce pays vraiment.

(c) Ilukaan