La classe bruissait de milles sons d'élèves. Les affaires qu'on sort, les mots qu'on griffonne, les murmures qu'on échange ou les pieds qu'on tapote sur le sol de pierre en attendant le début du cours.

Puis la porte s'ouvre. Le silence se fait à mesure que s'avance le professeur. Il est grand, sa carrure musclée contraste avec les silhouettes encore enfantines des premières années. Son costume était aussi bien mieux que les fringues des élèves. Son pas était sûr, sa démarche imposait un silence qui finit par envahir la salle entière alors qu'il se place derrière le plan de travail qui sépare la classe du tableau. Il y pose les mains, à plat, avec une lenteur mesurée, un rythme calculé. Ses yeux se lèvent, bleus clairs, et balayent la salle avec l'acuité d'un oiseau de proie. Il se penche un peu et ouvre la bouche. Sa voix n'était pas plus forte que s'il parlait à un collègue professeur, mais dans le silence de la pièce, elle se réverbérait dans toute la classe, grave mais articulée.

Bonjour à tous. Je suis le Professeur Valmont et j'enseigne la préparation des potions. Beaucoup d'entre vous n'y accorderons pas beaucoup d'importance. Je vais néanmoins vous poser une question qui j'espère, sera assez simple pour que votre esprit l'assimile, et tente d'y répondre.

Il se redressa et d'un geste de la main, attira à lui une fiole d'une potion qui était sur le plan de travail.

Savez-vous qui n'a pas besoin de potions ?

Le silence resta un moment avant que les élèves n'échangent des regards, interloqués de la question. Après quelques secondes, une main se leva.

Ben... Les Aurors par exemple.

Les Aurors. Ils usent de véritasérum et font appel à des potions de dissimulations, de protections et parfois même d'attaques. Ils doivent également connaître à quels poisons peuvent être exposé les victimes de leurs enquêtes.

Et d'un geste, le professeur saisit une craie pour écrire le métier en question. D'autres réponses s'élevèrent et sans se départir de son ton neutre, l'homme évinça les réponses en rétorquant une liste de potions utilisées par les métiers ou les occupations de chacun. Les fertilisants et insecticides des agromages, les détachants et teintures des tailleurs, les colorants magiques des coiffeurs, les nettoyants et les lessives de femmes au foyer. Pas un métier ne répondait à la question. Un garçon leva encore la main.

Les médicomages ?

Le professeur haussa un sourcil en direction du garçon qui avait sorti l'absurdité et ce dernier se réduisit sur son siège, sans qu'un seul mot ne soit prononcé.

Ses yeux roulèrent mais le professeur inscrivit en dernier l'absurdité sur le tableau constellé de noms désormais. Un ordre précis classait les noms en cinq catégories et les élèves comprirent muettement ce que leur dit le professeur Valmont.

Chaque maison de cette école prépare ses élèves à leur avenir. Chacune avec ses affinités et des métiers qui les exploitent au mieux. Tous ces métiers nécessitent une connaissance de base - il indiqua le bas du tableau - à des notions approfondies - il montra le haut du tableau.

Posant la craie, il appuya ses mains sur le bureau. Une seconde le silence se fit où il balaya la classe.

Pour cela seulement, vous aurez besoin de toute votre attention durant mon cours. Tout ce que je vous apprendrai, vous en aurez besoin. Mais je ne me contente pas de "l'essentiel". L'essentiel, c'est bon pour les écoles sans prestige ou sans envergure. Nous sommes à Ilukaan. L'école a des standards. Vous ne correspondez pas aux standards, parce que vous êtes élèves ici. Vous correspondrez aux standards de cette école quand vos résultats le diront, quand vos potions seront réalisées à la perfection, quand vous aurez atteint l'excellence que j'attends de vous. Et j'en attends...

Il fixa le garçon à l'absurdité à l'en faire se rapetisser encore plus sur sa chaise.

... beaucoup. Suis-je clair?


Un blanc glacial flotta encore quelques instant dans la pièce, où on aurait entendu une mouche voler. Le professeur Valmont finit par y mettre fin en frappant dans ses mains, ordonnant que les élèves ouvrent leurs manuels tandis que d'un geste, il fit s'effacer le tableau.