Le ciel est bleu, les oiseaux chantent, le vent souffle et les nuages sont aux abonnés absents. L’ambiance est lumineuse, douce et bon sang, qu’il est agréable de sortir par un temps pareil ! Alors, oui, forcément, je suis sortie. Avec toutes mes affaires, crayons, feutres, stylos, livre… Le matos nécessaire pour passer une agréable matinée ! Enfin, avec des barrières rouges et blanches avec un panneau « interdit », ce serait mieux encore. Quoique, certains viendraient juste pour contredire.

« Linaaaaaa … J'me fais chiiiiiier…
— Va te promener.
— Pas tout seeeeuuuueul…
— T'es chiant. »

Le chat se met à ricaner alors que je commence à ranger mes affaires. J’ai pu dessiner quelques minutes, et ça y est, le voilà qui me pompe l’air ! Il est casse-couilles, sérieux. Fais-le disparaître. Si je pouvais, il ferait déjà trois fois le tour de la Terre sur une trottinette. Au moins, ça l’occuperait. Et ça me ferait des vacances. Orion se met à rire, tandis que je me lève, toutes mes affaires dans mon sac.


Et je ne sais toujours pas pourquoi j’ai accepté de suivre Rin. Je le suis, j’erre dans la ferme comme une âme en peine. Genre… Vraiment. Les gens qui me croisent me lancent des regards curieux. Sans doute que c’est la faute à mon air dépité. Et c’est sûrement à cause de mon regard nébuleux, parti à un million de kilomètres d’ici, qu’ils ne viennent pas me parler. Tant mieux. Ou tant pis. J’avoue je sais pas.

Attends, tu viens de dire quoi là ?! Que je préfèrerais qu’on vienne me causer plutôt que de traîner derrière cet imbécile de chat qui se dandine comme un coq en racontant n’importe quoi ! Donc oui, t’as bien compris, mais sérieux, regarde-le ? Oui bon j’avoue, il a l’air si heureux dans sa connerie. Genre, comme s’il pouvait pas aller se balader tout seul ? Ouais, mais tout seul, il pourrait pas parler. Oui, mais je l’écoute même pas et il le sait ! C’est Rin, tu sais.

Et c’est avec Rin qui parle en arrière-plan, une discussion entre deux êtres totalement las en premier plan et un visage complètement déprimé sur le visage que je finis par arriver devant les cuisines. Et c’est de là que ce qui semble être mon sauveur sort, me rejoignant rapidement. Son arrivée me fait m’arrêter, tout comme Rin qui se retourne et attend. Et au tour du mec qui, sans se présenter, se met à juger que je ne fais rien, me demandant de l’aide en cuisine. Tout cela dans un sourire niais, avec un « s’il te plaît » à rallonge. Rin explose de rire.

« Et d’ici quelques secondes, sur votre droite, messieurs-dames admirez une Lina qui envoie chier son monde ! »

Et c’est au tour d’Orion de rire. Je crois qu’il se rend pas bien compte d’à quel point il t’emmerde. Ouaip. Ni d’à quel point je l’emmerde. J’observe le nouveau venu en penchant la tête sur le côté.

« Tout dépend de ce dont tu as besoin. »

Et voilà Rin qui me regarde avec une bouche ronde comme une soucoupe. Je ne le regarde pas directement, mais je le vois, derrière le type aux cheveux noirs et à l’air niais. J’ose un sourire moqueur, que Rin perçoit et comprend parfaitement, mais que l’autre devrait pouvoir digérer sans souci.

« Attends, t’es sérieuse là ? Juste pour me donner tort ou je rêve ? »

Orion se met de nouveau à rire tandis que j’attends la réponse du mec. Il est vraiment si con, je l’adore. Moi il me gonfle. Généralement, tout le monde te saoule. Pas faux.

Mais l’autre humain aussi n’a pas l’air très malin, ou alors il a un sens de l’humour douteux. Il me répond de manière détournée, puis franche qu’il a besoin d’un second humain et je plisse les yeux, tandis qu’Orion ricane. Quant à Rin, en voyant ma tête, il se met aussi à se moquer.

« Et bientôt, Lina va abandonner ses envies de me donner tort ! »

Tu crois qu’il se rend compte qu’il me donne juste envie de continuer ? Absolument pas, tu lui en demandes beaucoup là. Je pense aussi. Quoiqu’il en soit, je crois que le type semble prendre mon silence et mon regard comme une invitation à faire mieux, car il secoue la tête avant de tenter de se rattraper. Il m’explique avoir besoin d’aide en cuisine pour sauver nos papilles et nos repas. À vrai dire, je ne sais pas si on a vraiment le droit, puisque, si on a des tours de cuisine, ce n’est pas pour rien. Cela dit, j’imagine que ça ne dérangerait pas les autres. Il me demande si je suis d’accord, tout en précisant que ce n’est pas compliqué.

« C’est dommage, en fait, je suis pas une humaine.
— Et ça y est, ça commence ! Dis-lui que la cuisine c’est pour les ploucs !
— Par contre, je t'avoue que mes papilles gustatives sont assez bien développées et les cuisiniers de cette semaine sont plutôt mauvais.
— C’était pas vraiment ça le deal, mais c’pas trop grave.
— Hm… Si, et c’est même si grave, que je vais quand même t’aider.
— Hein ?! Mais Lina, t’es pas sérieuse là ?!
— Et même si j’en ai pas l’air, si, si, je suis sérieuse. Marre d’être emmerdée par des p’tits chats qui savent pas faire la différence entre le sel et le sucre. »

Je me suis arrangée pour que chaque espace entre mes paroles et celles de Rin soient compensés par une mine de réflexion, même si ça n’était pas très recherché. Quoiqu’il en soit, le chat semble particulièrement bien prendre ma remarque concernant le sel et le sucre, qu’il fait la moue et se retourne, grommelant dans sa fourrure. Ce tandis qu’Orion se met à rire. C’est dommage, juste pour l’emmerder, tu vas devoir subir ce gars bizarre. Oui bah s’il m’emmerde de trop, je m’en irai, de toute manière.

« Par contre, je ne mange et ne cuisine pas de viande, sache-le. »

Il faut bien lui dire, avant de commencer, qu’il sache s’il peut aller chercher quelqu’un d’autre ou s’adapter. Mais je me débrouille bien avec les légumes, et comme on est dans une ferme, y en a des masses.