Who am I...?

Eula est une sorcière sang-pure appartenant à la maison Cervirald et est en 9e année. Elle est inscrite au cursus Auror et Défense magique. Elle ne possède aucun don. Elle n'occupe aucun poste.

Sa baguette est faite de charme, avec un cœur en crin de licorne, d'une longueur de 31 cm, fine et souple. Elle n'a pas d'animal de compagnie.

Son patronus est un poisson volant. L'odeur de son Amortentia est composée de l’odeur de la mer, de la tourte à la viande et du punch à la menthe. Son reflet dans le miroir du Riséd la montre décorée en tant qu’Auror, le nom de sa famille non plus prononcé comme un déshonneur, mais avec admiration. On se souvient de ce nom non plus car il a abrité d’horribles mages noirs, mais car il est porté par une Auror prestigieuse. Son Épouvantard la représente aussi, dans une sombre tenue de mage noir. Elle est entourée par d’autres membres de sa famille qui portent la même robe, et des centaines de doigts sont pointés vers eux. Elle entend fuser des insultes dans l’obscurité : « criminels », « racistes », « assassins », « monstres »…

Elle n'a pas de famille présente à Ilukaan. Ses matières favorites sont Défense contre les forces du mal et Sortilèges et la matière qu'elle aime le moins est Botanique.

« Those who wish to master my signature witchcraft technique have to pass my dance class first » — Eula

La musique montait crescendo. Les premières notes se firent entendre, et ses poignets fins se croisèrent d’un mouvement sec au-dessus de sa tête. Déjà, son corps se mouvait avec des gestes précis, cliniques. La mélodie de l’orchestre, aiguë et dramatique dans ses oreilles, l’entraîna immédiatement comme un texte appris par cœur.
Les notes jouées avec perfection et la présence imposante de la demoiselle emplirent la pièce. Ses bottes hautes, dont les talons claquaient à chaque pas sur le sol boisé et rutilant, ne la rendaient qu’encore plus grande. Elle était perchée sur son mètre soixante-dix avec la même légèreté qu’un flocon porté par le vent. Pourtant, chaque mouvement de ses bras et jambes musclés perçait l’air tel une pointe de glace, ses appuis solides et rigoureux. Avec chaque élan, elle semblait défier ce qui l’entourait, son regard impassible, dur, imperturbable. Son visage fin à la peau diaphane, au nez droit et pointu, lui donnait l’air d’une reine des glaces, froide et inatteignable. Ses yeux couleur noisette s’étaient assombris, dissimulés derrière des cils longs et fournis et derrière les mèches céruléennes qui dansaient autour de son visage. La coupe volumineuse et asymétrique de ses cheveux tournait avec elle, les mèches laissées plus longues fouettant par moment son épaule gauche. Pour ne pas l’aveugler, sa frange était quant à elle retenue par un bandeau de dentelle noire, auquel s’accrochait une broche en forme de papillon. L’animal aux ailes en pointe restait cloué au côté de sa tête, retenu par un losange d’argent. Le seul bijou qu’elle portait au quotidien accrochait la lumière à chaque tour qu’elle faisait, pendant à sa ceinture : l’emblème de sa famille, le Sceau Glacial, qui n’exigeait d’elle pas moins que la perfection, la surveillant tel l’œil intransigeant de ses parents ou de son oncle. C’est sous cette présence invisible mais pesante au-dessus de sa tête, telle une épée de Damoclès, que Eula prit appui sur ses jambes pour une envolée, traversant la pièce dans un grand jeté irréprochable.
Elle se réceptionna avec aisance, en troisième position, alors que l’orchestre changeait de rythme. Les violons se calmèrent, les graves prirent le relais, l’emportant à présent dans une tout autre danse. Loin de l’exigence familiale. Loin de la froideur de l’hiver.

La musique s’apaisa doucement. Les notes d’abord brusques et acérées fondirent telle neige au soleil, ralentissant pour s’écouler des enceintes, comme une cascade remplissant la pièce d’une eau cristalline. Dans cette immensité bleutée, Eula commença à se détendre, ne se souciant plus de ce bijou en bronze qui la surveillait, comme si elle l’avait depuis longtemps apprivoisé. Ses mouvements devinrent plus légers, moins précis, mais toujours d’une grâce palpable, ses doigts longs et aux ongles entretenus caressant l’air autour d’elle. Sans oser l’avouer, elle commençait à s’amuser, sortant des pas à la précision rigide pour se laisser porter par la mélodie, ses bras libres et aériens voguant autour d’elle, dans des gestes fluides. Elle flottait, pleinement à l’aise dans son corps qui avait tant changé au fil des ans, pour abandonner celui de la ballerine parfaite qu’elle était autrefois. Elle avait laissé derrière elle le corps sec, filiforme que recherchaient tant ses professeurs de danse. Elle était à présent tout en courbes, de sa poitrine plantureuse à ses hanches larges et ses cuisses qui débordaient des bas enserrant ses jambes. On la définissait autrefois comme « grêle » ; aujourd’hui, on l’appelait « costaude ». À cette pensée, sa bouche timide laissa apparaître un sourire, brillant sous une légère couche de rose à lèvres. Elle n’avait aucunement honte de son apparence, et ne se gênait pas pour en prendre toujours soin et la mettre en valeur, restant élégante, maniérée dans la façon dont elle bougeait.
Ses pas se firent plus sautillants, ses talons claquant l’un contre l’autre lorsqu’elle les colla, et ses bras vinrent se placer naturellement en position de valse, comme si un partenaire invisible enserrait sa taille fine et la faisait tournoyer avec lui. Elle arpenta ainsi la pièce, comme en apesanteur, le papillon dans ses cheveux agitant ses ailes blanches et bleues comme s’il souhaitait s’envoler. Ses vêtements, bien que serrés, ne l’entravaient en rien. Sans doute aurait-elle dû porter une tenue plus adaptée, plus décontractée, mais elle ne se sentait jamais aussi libre que dans des habits saillants : un pantalon moulant, une robe ou un short, un chemisier ou un col roulé, comme une seconde peau, extension de son être. Quittant son cavalier, elle enchaîna ensuite arabesques, pirouettes, déboulés, sans se soucier réellement de la logique, ou de produire une chorégraphie cohérente. Elle cambrait son dos avec souplesse, ses cheveux ondulant tels des vagues. Elle pouvait presque sentir la surface molle du sable sous ses semelles, la densité de l’eau autour d’elle. Pourtant, l’eau ne résistait pas, ne faisait qu’accompagner son mouvement, la portant comme pour la faire flotter.
L’écume dansant avec elle, elle acheva finalement en tournant sur elle-même, les yeux clos, jusqu’à ne plus savoir où se situait le miroir dans la pièce, ni d’où la musique provenait, l’univers comme étouffé autour d’elle.
Lorsqu’elle arrêta ses mouvements, ses bras avaient retrouvé leur position initiale, au-dessus d’elle, mais ses poignets étaient plus détendus, et sa respiration plus exaltée que lorsqu’elle avait commencé, comme si elle sortait d’apnée. Les instruments firent vibrer l’air une dernière fois jusqu’à s’éteindre, et elle soupira en rouvrant les yeux, se retrouvant face à son reflet.
Oui, elle avait beaucoup changé depuis son entrée à Ilukaan. Tant physiquement que dans sa manière de danser, de s’habiller, ou simplement de se mouvoir. Pourtant, malgré les réprimandes de sa famille, ou malgré les messes-basses que cela suscitait autour d’elle, elle n’arrivait pas à regretter sa transformation. Elle avait été piégée dans la glace pendant si longtemps. La fonte de cette glace avait marqué sa renaissance.
D’un geste léger, elle vint rajuster la broche de papillon dans ses cheveux, avant d’éteindre la chaîne hi-fi et de quitter la pièce.

Tu ne sais pas ce que ça veut dire. Tu ne connais pas Eula Lawrence, ni l’histoire de sa famille. Tu voulais juste profiter de la salle de danse, et elle était déjà là, la musique à fond. Tu as juste été un peu curieux, et tu t’es retrouvé malgré toi à l’épier alors qu’elle dansait. Tu aurais sûrement dû passer ton chemin, attendre que la salle soit libérée, mais tu n’as pas pu t’empêcher de rester là, l’œil contre la lucarne de la porte. Tu ne l’avoues pas, mais si la curiosité t’a poussé à regarder, l’hypnose t’a fait rester. D’abord par sa technique impeccable, puis, lorsque le morceau a changé de ton, par… autre chose. Elle avait changé, elle aussi, entre les deux parties. Comme si elle était une autre personne. Et sans trop savoir pourquoi, tu voulais comprendre.
Tu avais interrogé un garçon de ta maison, un peu plus âgé, qui apparemment la connaissait. Enfin, « la connaissait » de très loin, d’après ce qu’il t’avait dit. Personne n’était réellement « proche » de Eula Lawrence, selon lui. Même l’aborder était difficile. Elle attirait certes l’attention des gens, surtout par sa beauté, mais il y avait cette aura de mystère, autour d’elle. Ce côté inaccessible. Tu comprends ce qu’il veut dire. Quand elle avait commencé à danser, il y avait cette distance, comme si elle et toi n’étiez pas du même monde. Mince, qu’elle n’était pas du même monde que n’importe qui d’autre, d’ailleurs. Elle semblait froide, dissimulant avec soin ses émotions sous une perfection d’élégance, presque… noble.
Noble, oui, c’est le mot. Eula est une noble, justement. Ou du moins, c’est ce qu’on dit d’elle et de sa famille. Que c’est un très vieux clan sorcier, qu’ils sont pleins aux as, et qu’ils croient que cela leur donne le droit de prendre les gens de haut. Eula est déjà très imposante par sa taille, mais elle l’est aussi dans sa manière de parler. Apparemment, elle intimide les gens, par sa personnalité forte, dominante. Elle est autoritaire avec son entourage, jugeant vos manières, ou la façon dont vous parlez. En clair, une grosse prétentieuse, qui se croit supérieure aux autres. Elle joue à la cheffe, elle aime commander. Ce sont les échos que tu as. Tous ceux qui ont tenté de discuter avec elle avaient vite fait machine arrière, même avec la meilleure volonté du monde. Même ceux qui cherchaient à être gentils avec elle avaient abandonné, après avoir fait face à l’agressivité et la mauvaise humeur constante de la demoiselle. Même si on cherche à lui rendre service, elle trouvera toujours un moyen de vous reprocher votre attitude. « Elle doit être vachement susceptible », tu te dis. « C’est un euphémisme », on te répond. « Offre-lui un bouquet de fleur, et elle prétendra que c’est une atteinte à sa dignité ». Tu ne sais pas si quelqu’un a déjà tenté cette dernière possibilité, cependant.
Insolente, narcissique, orgueilleuse, fière… Tu as beau interroger différentes personnes, les réactions sont toujours les mêmes. Certains n’osent pas aller la voir à cause de sa réputation. D’autres se sont déjà frottés à elle et ont été refoulés par son petit langage d’aristocrate. Et le mot qui revient le plus souvent, ce mot qui sort naturellement et qui pourtant, cloche à tes oreilles : Eula Lawrence est bizarre. Ça résonne en toi, sans trop que tu saches pourquoi… Ou peut-être est-ce parce que lorsque tu la regardais danser, qu’elle avait fini son grand jeté et que soudainement, elle s’était transformée sous tes yeux, tu t’étais dit toi aussi : « C’est trop bizarre. »
Et puis, il y a la vengeance. « La vengeance ? », tu demandes. Apparemment, elle n’a que ce mot à la bouche. Si elle juge que vous avez commis une quelconque faute envers elle, elle promettra de se venger de vous et de vous faire payer votre affront. Et bien sûr, elle prendra bien son temps. Elle n’oublie pas. Une perspective qui donne froid dans le dos à certains. L’école est pourtant sécurisée. Ils ne laisseraient pas entrer à Ilukaan une élève capable d’agresser ses camarades, pas vrai ? On te répond que ce n’est pas tant Eula le problème, mais plutôt le cercle dont elle fait partie.
Les rumeurs finissent par être mises sur la table. On te dit « Tu n’es pas au courant ? », et tu secoues la tête. Tu es né-moldu, tu ne sais pas grand-chose des vieilles familles de sorciers. Alors on te raconte, avec une pointe de mystère, comme on raconterait une histoire qui fait peur, ou avec des petits sourires moqueurs, presque exaltés. On t’explique qui sont les Lawrence, et ce qu’ils ont fait. Tu écoutes, avec patience… Et une fois fini, tu te dis qu’il y a définitivement quelque chose qui cloche dans toute cette histoire.

Après réflexion, tu décides d’aller voir la principale concernée. Tu ne sais pas si tu parviendras à tirer quelque chose d’elle, après tous ceux qui avaient déjà essayé. Pour éviter de te faire immédiatement jeter, on t’a conseillé de lui « parler dans sa langue », donc avec le respect dû à une aristocrate de sang-pur. Tu te présentes à elle, et lui dis que tu souhaiterais avoir l’honneur d’échanger quelques humbles paroles avec elle. Elle te regarde avec surprise, avant de lâcher :
« Voilà une façon bien étrange de parler… Ou peut-être as-tu aussi été éduqué avec l’étiquette propre à l’aristocratie ? »
Tu ne relèves pas le fait qu’elle vient juste de te dire en face qu’elle te trouvait étrange, alors que ce sont plutôt les échos que tu as la concernant. Comme tu ne réponds pas, trop estomaqué, elle finit par se présenter à son tour :
« Eula Lawrence, 7ème année de la maison Cervirald. Je te salue… Hm ? Quoi ? Oui, "Lawrence", la famille d’aristocrates de triste renom. Oh, nous sommes toujours aussi machiavéliques ! Regarde-moi, j’ai infiltré Ilukaan, tout cela dans le cadre d’un plan diabolique pour obtenir vengeance et restaurer notre gloire d’antan ! »
Tu la regardes avec des yeux ronds. Elle a dit ça avec tant de naturel, et un tel sérieux ! Pourtant, tu ne peux t’empêcher de te dire qu’elle est sarcastique. Tu l’apprendras bientôt, mais Eula a un humour bien à elle. Une manière bien particulière de se moquer du monde et de faire tourner les autres en bourrique. Si certains prennent ses mots au pied de la lettre, ou trouvent cela insupportable, tu ne peux pas t’empêcher de rire légèrement. Elle semble prendre la réputation de sa famille avec une certaine légèreté.
« Mais bref, passons. J’aimerais connaître tes véritables intentions. Tu ne sembles pas être là pour simplement discuter du temps qu’il fait, n’est-ce pas ? »
Elle t’a rapidement percé à jour. Même si elle ne fait pas cas de ce qui se dit sur elle, cela ne signifie pas forcément qu’elle est aveugle à ce qui l’entoure. Tu la soupçonnes même d’être étonnamment perspicace. Elle ne paraît pas être le genre de personne à se laisser facilement abuser, plutôt de ceux qui demandent des preuves au lieu de gober bêtement ce que vous leur racontez. Tu décides d’être honnête. Tu lui racontes ta petite observation à l’entrée de la salle de danse, puis les rumeurs que tu as entendues. Tu es juste curieux, et tu cherches à la connaître davantage. Ça la prend au dépourvu, et tu la comprends. Ce n’est sûrement pas tous les jours qu’on vient lui parler pour réellement chercher à faire connaissance. Tu te souviens le dégoût sur le visage de tes camarades, le dédain alors qu’ils parlaient d’elle. Et plus tu la regardes, moins tu comprends leurs réactions.
« Hm… Observer ainsi quelqu’un lors de l’une de ses activités, et sans faire connaître sa présence… Quelle infamie ! Ma vengeance sera terrible. »
Ah, la fameuse vengeance. Il a suffi de quelques minutes de conversation, et te voilà déjà avec une vendetta en suspens. Et les problèmes ne s’arrêtent pas là. À chaque parole que tu avances, tu as l’impression de te heurter à un mur. Elle semble méfiante, mais elle est aussi d’une honnêteté presque brutale, ne parlant pas sans détour. Clairement, elle n’aurait jamais pu être diplomate. Tu espères que ça ne fait pas partie de son plan de carrière. Tu te demandes d’où lui vient cette franchise à toute épreuve, cette hardiesse qu’elle semble jeter au visage de tout le monde. Tu le sauras bientôt.
Après t’avoir menacé de représailles par trois fois, elle finit par rire, elle aussi. Son visage se transforme, s’adoucie, te réduisant au silence.
« C’est curieux… Nous venons à peine de nous rencontrer, et tu m’as déjà donné trois raisons de me venger de toi. Tu es une personne intéressante. »
Tu as l’impression d’avoir touché le gros lot. La méfiance qu’elle avait affichée lorsque tu l’avais interrogée semble s’être dissipée, comme si grâce à votre petite conversation, elle avait jugé de ta personnalité, et conclu que tu étais une personne de confiance. Elle a l’air de comprendre que tu n’es pas là pour la juger. Ce n’est pas ton genre. L’idée que tu t’étais faite d’elle s’évapore, et tu oublies complètement ce que t’ont raconté tes camarades. Quelque chose te pousse à connaître la vraie elle.
Lorsque tu retournes au dôme et qu’on t’interroge sur ta rencontre avec la terrible Eula Lawrence, tu gardes le silence un instant avant de juste répondre : « Elle est sympa. Je crois qu’elle m’aime bien. » Tu les laisses là, alors qu’ils restent tous comme deux ronds de flan.

Il ne te faut pas longtemps pour comprendre que tout ce qui se dit sur Eula Lawrence n’est que le fruit des nombreuses rumeurs qui les entourent, elle et sa famille. Beaucoup n’avaient pas réellement cherché à savoir qui elle est, et sa personnalité somme-toute particulière n’aidait pas.
Au premier abord, tu l’aurais décrite comme renfermée. Elle n’a pas l’air à l’aise avec les conversations de tous les jours, comme si ça ne faisait pas partie de ses compétences de noble de parler de choses sans intérêt. Et tu finis toujours par te prendre de plein fouet ce mur de reproches dont on t’a tant parlé. Chacune de tes actions semble être pour elle une excuse pour te réprimander. Mais tu es malin, et tu finis par craquer le code, en discutant avec elle lors d’un repas.
« Tu ne devrais pas manger ça, ou tu vas être malade ! Comment veux-tu que je venge ma famille si je dois m’occuper d’un mal-portant ? »
Tu trouves ça presque drôle. Tu comprends qu’elle s’inquiète pour toi, et que les reproches ne sont pour elle qu’un moyen détourné de montrer son affection. C’est paradoxal. Elle qui est si franche d’ordinaire, si expressive, elle n’est même pas capable de te dire clairement qu’elle t’apprécie. Les reproches se multiplient, et petit à petit, tu arrives à décrypter la manière dont elle parle, remplissant ton petit « dictionnaire personnel du langage Eula ». Elle te balance des critiques, mais tu la trouves presque tendre, affectueuse. Vos conversations doivent avoir l’air surréalistes, vu de l’extérieur, surtout quand elle revêt sa persona de noble pour t’amuser :
« Tâcheron ! Arrête-toi un instant, veux-tu ? Incline-toi et mets le genou à terre et, euh… C’est quoi, la suite, déjà- »
Tu as manqué de tomber de ta chaise plusieurs fois, avec tout ça. Tu as vite appris que si Eula a l’air d’une pure noble, hautaine, froide et traditionnelle, il n’en est rien. Elle t’a expliqué qu’elle trouve les manières de sa famille, ce qu’elle appelle « l’étiquette », ridicules et désuètes. Ces manières arriérées lui avaient déplu, et elle avait décidé de ne pas s’en embarrasser. Malgré ça, tu vois bien que son éducation est profondément ancrée en elle, même si elle cherche à la rejeter. Son langage et sa simple manière de bouger en sont la preuve.
Cela ne l’empêche pas d’être vue comme une disgrâce au sein de sa propre famille pour cette même raison. Tu trouves ça à la fois triste et ironique. Eula est coincée entre deux chaises, n’ayant pas de place dans sa famille dont elle rejette les conventions, et pas de place à Ilukaan qui ne voit en elle que son nom et son éducation. Elle t’a pourtant affirmé qu’elle ne regrettait pas. Elle n’aime pas qu’on lui dise ce qu’elle doit faire, comment se comporter ou comment penser. Couper les ponts avec sa famille était la seule façon pour elle d’être libre, et elle assumerait les conséquences de cette décision, quoi qu’il arrive. Tu ne peux t’empêcher de l’admirer pour cette détermination à toute épreuve. Tu vois en elle une révolutionnaire, mais aussi une tête de pioche qui ne déroge jamais aux règles et aux objectifs qu’elle s’est fixés, même si ça a tendance à lui porter préjudice. Elle te parle parfois de sa grande ambition : devenir Auror, et venger le nom de sa famille. Cette dernière formule te fait toujours te questionner : se venger comment, exactement ? Comptait-elle tabasser tous ceux qui avaient le malheur de dire du mal de sa famille ?
« Tabasser ? Me prends-tu pour une sauvage ? Cela n’a rien à voir. »
Il te faut un certain temps pour comprendre. Quoi qu’il arrive, quoi que l’on dise sur elle, Eula est dévouée à Ilukaan, et dévouée envers ses camarades. Tu la découvres altruiste, généreuse, et toujours prête à rendre service. Elle rechigne parfois, mais quoi qu’il arrive, elle accomplira toujours son devoir. Elle se plaint juste pour la forme, pour ne pas trop montrer qu’elle se sent concernée. Mais elle est volontaire, spontanée, peu importe qui lui confie sa tâche. Peu importe si c’est une personne qui la déteste, ou qui crache sur le nom de sa famille. Tu trouves ça aberrant. Tu entends les horreurs qu’a commis la famille de Eula, et pourtant, tu as l’impression que c’est elle, la victime de toute cette histoire. Comme si c’était sur elle que s’abattait la vengeance du reste du monde, en permanence. Peut-être ses reproches constants étaient-ils une manière de se protéger, en fin de compte ? Elle porte sa « vengeance future » telle un bouclier, pour repousser la tempête de critiques qui pleut sur elle. Tu la vois supporter tout ça, et tu lui demandes comment elle fait.
« Ma famille était puissante et influente, autrefois, avant de tomber en disgrâce. Mon oncle m’en parlait souvent, comme d’une ère des miracles. Mais je n’ai pas vécu cette époque, et je ne comprends pas pourquoi elle est tant idolâtrée. Mon but n’est pas de rendre à ma famille sa gloire d’antan, mais de redorer son blason en montrant qu’elle a changé. J’en suis la preuve vivante, non ? »
Voilà donc quelle est la teneur de sa revanche : se venger des ennemis de sa famille en leur prouvant qu’ils ont tort. En étant la meilleure personne possible, en protégeant ceux qui l’entourent, sans rien demander en retour. Mais tu te dis, ce serait peut-être plus facile si elle n’avait pas autant une grande gueule.
« On me dit qu’il suffirait que je parle avec plus de douceur, de politesse, ou avec plus de déférence pour qu’on me pardonne plus facilement, mais ceux qui parlent de cette façon n’ont jamais connu la vie de paria. Le chemin de la rédemption n’est guère aisé quand on est un paria de la société. »
Tu en as été témoin, et elle a raison : quoi que Eula fasse, et peu importe pour qui, on trouvera toujours un moyen de lui reprocher ses agissements. Être gentille ne changerait rien à sa situation, car les gens ne voient que ce qu’ils ont envie de voir. Elle avait donc décidé de cesser de marcher sur des œufs, et de simplement être elle-même, honnête avec son entourage. Cela te donne envie de la défendre bec et ongle, et de chanter ses louanges.
Car la demoiselle est bourrée de qualités invisibles à tous ceux qui ne s’intéresseraient pas de près à elle, et que tu découvres, petit à petit, à ses côtés. D’abord, un courage à tout épreuve, qui la fera voler au secours d’une personne en danger, bien qu’elle aura la prudence d’évaluer une situation avant de se joindre à la bataille. Eula a beau être brave, elle n’est pas non plus tête brûlée. Elle te reproche d’ailleurs parfois de te jeter dans une bagarre ou d’entamer un exercice en cours de Défense contre les Forces du Mal sans réfléchir. Tu as découvert qu’en plus d’une excellente vue et d’une bonne ouïe, elle a aussi une très bonne intuition, qui lui permettent d’éviter les situations difficiles. Sa capacité de déduction lui permet de prendre des décisions rapides, réfléchies et parfois non-conventionnelles, grâce à sa souplesse d’esprit. Mais elle sait aussi reconnaître une situation sans issue. Cette facette très réaliste va sûrement avec son côté franc : elle ne se berce pas d’illusion et va juste afficher la vérité pure et dure, sans détour. Tu apprends aussi à tes dépens qu’elle aime la compétition, encore une fois pas par témérité, mais simplement car cela lui permettra de montrer ses capacités, d’apprendre quelque chose, ou de juger de la force de ce qu’elle considère être un adversaire. Tu ne décomptes d’ailleurs plus le nombre de personnes qu’elle qualifie de « pires ennemis », et dont elle a promis de se venger un jour. Apparemment, elle tient une liste. Une très longue liste. Mais malgré cette file de Némésis, elle apprécie travailler en équipe, et mettre en commun les compétences de plusieurs personnes. Après tout, deux cervelles valent mieux qu’une, pas vrai ? Même si la plupart du temps, les gens ne l’écoutent pas vraiment et vont rejeter chacune de ses propositions, à moins qu’elle ne fasse ses preuves…
Après t’être retrouvé dans le pétrin de nombreuses fois, tu as appris qu’elle est aussi digne de confiance, toujours présente lorsque tu as besoin d’aide. Juste pour rire, tu lui as un jour demandé si elle t’aiderait à cacher un cadavre. Elle t’a regardé sans comprendre, avec un « Qu’est-ce que tu me chante-là ? » effaré. Mais tu vois bien la fidélité sur son visage, même s’il ne fallait sûrement pas tester sa loyauté : tu sais très bien que si un jour tu venais à blesser les gens autour de toi, elle se ferait un devoir de te stopper, comme elle avait promis d’éteindre le nom des Lawrence de ses propres mains si les circonstances le demandaient. Tu la trouves aussi incroyablement tolérante envers son entourage, pas du genre à écouter les rumeurs ou à juger les autres sans les connaître. Elle est bien placée pour savoir que les apparences sont trompeuses, chose dont elle est victime tous les jours. Cette capacité pourrait être un avantage pour qu’elle puisse se faire des amis, mais son caractère en rebute toujours certains. Sans compter qu’elle peut se montrer quelque peu jalouse, par moments. Pas le genre jalouse maladive ou possessive qui va constamment chercher à savoir où vous êtes, quand et avec qui. Mais les amitiés sont si rares pour elle qu’elle aura toujours l’air un peu déçue lorsque vous la laisserez. Quand tu le fais, elle te le reproche pour la forme, en promettant de te le faire payer, et ça te fait rire. Tu sais qu’elle ne te retiendra pas. Que tout ce qu’elle veut, c’est que tu sois heureux, peu importe si ce n’est pas en sa compagnie. Mais il faut bien sauver les apparences.
Ah. À propos d’apparence, tu viens d’entendre quelqu’un dans le dôme la traiter de précieuse et d’insipide. Ce ne sont pas les mots que tu aurais employé pour la qualifier. Oui, Eula est élégante, distinguée dans ses mouvements et sa manière de parler, tenue de le faire par les règles de l’étiquette. Un noble doit toujours prendre garde à son maintien : se tenir droit, avoir une prestance impeccable, même dans une situation difficile, y compris les duels magiques. Tu te souviens avoir vu Eula affronter un de ses camarades de maison lors d’un cours, sans jamais être repoussée, ni assommée, ni même perturbée par un sortilège, comme si cela aurait été honteux. En tant que Lawrence, elle se doit de rester maître d’elle-même, en toute circonstance, pour être plus réactive et ne pas se laisser surprendre. Sa magie est aussi élégante que son apparence et sa manière de danser, d’une délicatesse solide comme le fer, imperturbable. Mais elle n’a rien des poupées muettes, aux gestes mécaniques et rasoirs de l’aristocratie. Elle fait preuve d’un raffinement certain, tout en étant toujours énergique, prête à l’effort. Tu l’as déjà vue enchaîner une séance de natation dans la piscine d’Ilukaan en plein hiver, puis quatre heures de cours, et enfin un passage à la salle de danse pour deux heures d’entraînement, tout ça sans transpirer et avec une vigueur impressionnante. Tu te demandes comment elle fait. Si ça avait été toi, on t’aurait sûrement ramassé à la petite cuillère.
Elle te dit souvent que le secret d’une santé de fer, c’est une bonne alimentation. Bien sûr… Quand tu vois tout le sucre qu’elle ingurgite, tu te permets d’en douter, et tu ne te gênes pas pour le lui faire remarquer. La fin du repas est sûrement un des moments préférés de Eula, car elle adore manger, en particulier des pâtisseries. Ça ne l’empêche pas d’être tous les jours dans une forme olympique, rythme que tu as du mal à suivre. Et elle prend tout dans les hanches, avec ça, mais ça n’a pas l’air de la déranger. Elle ne surveille pas vraiment sa ligne, et tu te dis qu’elle n’a pas le profil typique d’une aristocrate, surtout une qui aurait pratiqué la danse classique. Malgré ça, elle est plutôt coquette, prenant grand soin de son apparence et se mettant toujours en valeur. Elle n’aime tout simplement pas se montrer sous une apparence moins que parfaite. Elle a clairement conscience de sa beauté, et même si elle n’en tire pas avantage, elle préfère être toujours bien habillée et présentée. On pourrait dire que cela fait partie de son mode de vie bien décent, bien rangé. Contrairement à toi, elle déteste être éparpillée et elle accorde du souci au détail, aussi bien dans son étude de la magie que dans le rangement de sa chambre. Même lorsqu’elle cuisine, tu t’étonnes du peu de bazar qu’elle met. Elle te rétorque alors que, pour que son ambition soit réalisée, elle se doit d’être irréprochable dans tous les aspects de sa vie. Tu ne vois pas trop ce qu’un paquet de farine laissé à traîner sur le comptoir va changer à ça, mais bon. Tu comprends cependant, lorsqu’elle goûte la première bouchée de ce qu’elle a préparé et que son visage s’adoucit. Elle murmure simplement : « Après l’effort, le réconfort. » Tu espères qu’un jour, lorsqu’elle aura fait ses preuves aux yeux de tous et que les efforts ne seront plus nécessaires, Eula pourra enfin trouver le réconfort auquel elle aspire tant dans sa vie.

« Je t’ai déjà dit qu’observer quelqu’un sans son consentement était une pratique indigne. Pourquoi ne viens-tu pas me rejoindre ? »
Malgré toi, tu t’es arrêté à la lisière des arbres, la demoiselle assise dans l’herbe quelques mètres devant toi, à l’observer, comme au premier jour. Tu te demandes comment elle fait pour toujours te voir venir. Sûrement cette oreille bionique… Tu viens finalement t’assoir près d’elle, le froissement des feuilles au-dessus de vous et le chant du vent dans vos cheveux. Tu n’es pas vraiment sensible à la beauté de la nature, contrairement à Eula. Ton amie peut rester des heures ainsi, dans l’ombre des arbres, à simplement observer le parc, les nuages qui passent dans le ciel et les bâtiments rutilants de l’école. Cette dernière vision n’est pas des plus naturelles, les murs construits par une main d’homme, froids et durs. Pourtant, elle semble dans son élément, aussi paisible lorsqu’elle regarde les vagues du bord de mer qu’en fixant la baie vitrée du dôme. Comme si elle était censée se trouver là. Tu avais décelé la reconnaissance qui habitait son être lorsqu’elle songeait à la chance qu’elle avait d’étudier dans cette école, de côtoyer des élèves venus des quatre coins du monde, et de nourrir en elle cette nouvelle ambition. Ilukaan lui avait permis de s’affirmer, de s’affranchir de l’aide de sa famille, pour faire d’elle une personne autonome et libre. Eula ne voulait plus dépendre de qui que ce soit. Elle avait obtenu une bourse, le temps de pouvoir pallier au manque d’aide financière de son clan et de trouver un travail, une fois la majorité atteinte. Tu sais qu’elle a la vie dure entre ces murs, et pourtant son visage affiche toujours cet optimisme indestructible, comme si elle savait que sa vie pourrait être bien pire que ce qu’elle est à l’heure actuelle. Elle a conscience de ses capacités, puisant dans l’espoir pour avancer, avec persévérance.
Ta vie a bien changé, depuis que tu la connais. Tu te trimballes une réputation nouvelle, celui de « l’ami de Eula Lawrence ». Les gens ne savent plus trop s’ils doivent t’approcher ou non, comme si elle pouvait avoir une influence néfaste sur toi, et que tu allais toi aussi devenir arrogant, pédant et agressif. Pourtant, ceux qui te connaissent se questionnent. Ils t’interrogent. Tu leur dis alors que ce n’est pas à toi de répondre à leurs questions. Que s’ils sont curieux, alors ils devraient simplement essayer. Ils devraient s’arrêter devant la salle de danse quelques minutes, pour juste regarder. Puis, sans aucun filtre, ils devraient aller parler à Eula Lawrence.

« I was forced to learn all of the rules by heart, but even I don't take them that seriously. » — Eula