Ceci sont les premiers mots que je t'écris, cher journal. J'ai senti la nécessité d'avoir un outil comme toi pour m'aider à mettre des mots sur ce que je fais de bien, de mal, comment je peux m'améliorer et extérioriser mes angoisses. Pour cela je te remercie par avance, tu m'aideras bien plus que tu ne peux l'imaginer. Mais je vais me présenter, d'abord, comme il est coutume.

Moi c'est Blossom Utonium, je suis née le 3 juillet 2006 dans la banlieue de Los Angeles et dans un contexte vraiment particulier. Mon père est un sorcier et un chercheur réputé dans son domaine : les bébés chaudrons. Il s'agit d'une technologie sorcière ancienne qui permet, à la manière des PMA chez les moldus, de créer des enfants grâce à des potions compliquées, le tout dans un chaudron, d'où le nom. C'est comme ça que papa m'a créé, moi et mes sœurs : Bubbles et Buttercup.

Approchant la quarantaine, il avait une puissante envie d'avoir des enfants, mais ne souhaitait pas trouver de partenaires alors il a utilisé ses recherches pour monter une expérience à but scientifique : qu'est-ce que ça donnerait si un même père utilisait ses gamètes pour produire trois enfants avec une mère de sang-pur -la mienne-, une mère de sang-mêlé et une mère née-moldue, dans le but de voir si cela changeait quelque chose à la « qualité » du bébé chaudron au final, notamment  sur le potentiel magique. Oui, moi et mes sœurs on a chacune une mère différente, des mères qui ont signé tous les papiers pour se décharger de leur responsabilité envers nous car elles voulaient seulement servir la science, pas garder les enfants. Et aucune de nous ne leur en veut (NDLR : ses sœurs si, mais Blossom est pas toujours la plus sincère, même dans son journal) puisque nous avons eu l'enfance la plus aimante et soignée possible, choyée par un homme à qui nous devons tout et que je veux passer ma vie à vouloir rendre fier.

Car lorsque notre père nous a créé, on l'a appris des années plus tard, il avait comme rêve de faire les petites filles parfaites, mais ajouta vite qu'une fois nées il nous a aimé de tout son cœur tout de suite et avait oublié ce vœu pieu et enthousiaste. Moi, je n'ai pas oublié et même si je sais que je suis loin d'être parfaite j'ai à cœur de faire mon maximum pour le devenir afin de rendre papa encore plus heureux et fier de sa création. Raison pour laquelle, toute notre enfance, j'ai poussé mes sœurs à faire notre maximum pour aider notre prochain : jardiner, sortir les animaux, faire des courses, tout pour servir la communauté. Et je suis fière de dire que mes sœurs sont de si bonnes personnes qu'elles m'ont toujours suivies, appréciant autant que moi de nous voir félicitées pour nos bonnes actions et y mettant tout autant de cœur à l'ouvrage.

Papa nous a toujours expliqué que nous étions des sorcières, que lui aussi et que au-delà de notre banlieue pavillonnaire vivait un monde rempli de magie qu'il nous faisait parfois visiter au gré de ses voyages pour le travail ou les vacances. Un monde merveilleux que j'avais si hâte de faire mien ! Et j'espérais que mes sœurs soient aussi enthousiastes que moi, et elles l'étaient. Papa nous a expliqué que, à 11 ans, nous irions dans une école de magie pour apprendre à maîtriser tout ça. Nous allions avoir notre propre baguette et je me surprenais à rester bouche-bée devant sa baguette magique à lui que je n'avais absolument pas le droit de toucher car, disait-il, elle ne réagirait pas bien et pourrait me blesser.

Mais, je l'avoue, un jour vers l'âge de 8 ans j'ai voulu essayer. J'ai voulu essayer si fort que moi et papa on s'est disputés. Je disais que ce n'était pas juste, que moi aussi j'étais une sorcière, que ma maman était sang-pur donc que je n'allais pas être blessée, qu'il pouvait au moins me laisser faire et s'il m'arrivait quelque chose je ne me plaindrais pas ! Et lui de tenir sa baguette éloignée de moi en perdant patience, mais je continuais de faire mon caprice. Et là, sans comprendre pourquoi, je me suis retrouvée avec la baguette dans les mains, j'avais la baguette magique, mais comment j'avais fait ? Papa, et mes sœurs qui nous regardaient derrière un coin de mur, n'eurent pas plus d'explications. J'étais tellement choquée que je n'ai rien tenté avec la baguette et papa me l'a récupérée des mains avant de me consigner dans notre chambre. Le lendemain il m'a expliqué que c'était la « manifestation de mes pouvoirs magiques » qui avait provoqué ça. Je sais que Bubbles et Buttercup ont aussi eu des accidents de ce genre, c'était normal, disait papa.

Mais, enfin, arriva le jour tant attendu, nos 11 ans qui approchaient ! Nous devions choisir, avec papa, une école de magie où étudier. Moi et les filles on n'y connaissait rien alors on a lu les brochures envoyées par le ministère de la magie avec papa. Lui avait étudié à Ilvermorny, mais il sentait que ce ne serait peut-être pas la meilleure école pour nous. Il nous conseilla plutôt d'aller au Canada, à Ilukaan, qui était l'une des écoles les plus internationales du monde. Il disait que là-bas, avec le nouveau directeur qui était salué pour son inclusivité, on n'aurait pas de problèmes à cause de notre naissance. Mais il nous conseilla quand même, si un élève nous interroge, de ne pas nous lancer dans des explications trop compliquées. « Si on vous demande comment vous avez été conçues, dites que c'est avec du sucre, des épices et des tas de bonnes choses ! » en nous expliquant sincèrement que c'était aussi pour protéger ses recherches.

Et voilà qu'à la rentrée 2016 nous sommes arrivées, moi et mes sœurs, à Ilukaan. J'avoue que j'étais vraiment triste de quitter papa et la maison où on a grandi, mais je l'étais encore plus au moment de la répartition ! Moi et Bubbles nous avons été placées dans la même maison, mais Buttercup non ! Elle était chez les lupy ! On nous a séparées, vraiment ? J'ai longtemps pesté contre cette fontaine à chaque fois que je passais à côté, mais on ne pouvait pas vraiment changer notre maison, en tout cas on ne nous y autoriserait pas juste pour être ensemble.

Mais de manière générale, depuis que nous sommes à Ilukaan, j'ai plutôt bien réussi à garder notre cohésion sororale, invitant les filles pour qu'on se réunisse aussi souvent que possible, rassurant Buttercup que, de toute façon, nous n'étions jamais dans la même chambre avec Bubbles, donc c'était comme si elle était dans une autre maison elle aussi. J'ai même poussé pour qu'on se lance dans la musique et qu'on forme un groupe, les Powerpuff Girls, pour avoir d'autres chances de se côtoyer. Je suis plutôt fière de moi là-dessus, et papa aussi, il me l'a dit. Si nous sommes unies, rien ne pourra nous arrêter dans la vie et je compte bien être aux côtés de mes sœurs jusqu'à la fin. La vie est bien trop difficile pour mener ce combat seule, je le sais, elles le savent.  

(c) Ilukaan