Arthur avait l'impression de ne plus sortir, ces derniers temps.
Pas qu'il avait pour habitude de le faire chaque semaine – c'était même l'inverse, en fait – mais une fois le mois de janvier achevé, l'euphorie du nouvel an définitivement passée et le rythme des cours revenu, le Britannique avait réalisé qu'il s'était étrangement et involontairement trop enfermé, ces derniers temps. Sans doute quelque chose avait titillé son esprit sans qu'il ne s'en rende compte, ainsi le Lupy n'avait pas songé une seule fois à prendre l'air.
Lorsqu'il avait réalisé cela, il s'était mit en tête de s'arrêter cinq minutes dans sa vie, puis de faire un tour en ville. Seul.
On pourrait donc croire que ça entre totalement en contradiction avec ses petites habitudes bien à lui où il préfère prendre le thé près d'une cheminée avec un bon bouquin signé Doyle, mais Arthur reste avant tout humain : même lui, aussi forgé puisse-t-il être malgré ses révisions qui n'en finissent pas, peut finir par devenir zinzin à force de rester à l'intérieur.
En plus, ce serait un coup à tomber malade après s'être trop habitué à la chaleur.
Bon, Arthur tombait rarement malade...
Mais manquerait plus que ça arrive.
Parfois, Arthur avait vraiment froid, et de temps à autres, il ne grelottait pas malgré tout. Il faut dire qu'il a toujours été habitué au froid de l'Écosse, à la neige d'Édimbourg et à son climat du nord. Le Canada, c'était
un chouia plus frais que ça. Le changement ne fut pas brutal, pour lui, mais du fait qu'il avait un corps un peu lâche sur les bords, il lui arrivait de brefs moments de faiblesse où
PAF, le virus frappait fort.
Cette année, ça allait. Pas de rhume, rien, que tchi.
Arthur marchait tranquillement dans les rues de Bloombury en observant distraitement la neige tomber dans les rues. Il y avait toujours des flocons aussi gros, dans ce pays. En ce moment, au Royaume-Uni, la neige commençait sûrement déjà à fondre ici et là. Il n'était pas rare qu'il neige là-bas, mais ici, au Canada, qu'est ce qu'elle durait ! Il y avait presque autant d'hiver que d'été dans toute une année.
Il lorgna sur l'enseigne de l'Another Round.
La dernière fois qu'il y était allé, il avait prit quoi ? Ah oui, une mini-cuite.
Et euh, le reste, c'était privé...
Peut-être allait-il opter pour un autre coin. C'était du moins ce qu'il avait pensé, avant d'apercevoir la silhouette d'un de ses amis à travers la fenêtre.
Lukas travaille encore ? Mais il était quelle heure ? Ah, 18h... il ne devait pas être là depuis très longtemps. Arthur se demandait si lui aussi, une fois passé en cursus universitaire, il pourrait tenir une cadence à travailler
et ses cours,
et un job. Ses parents n'allaient pas non plus le faire dépendre de leur argent toute sa vie, et d'un autre côté, sa famille était bien placée pour savoir qu'il était du genre à bosser à tel point qu'il s'en rendrait malade.
Ses proches étaient donc presque tous au courant que ça craindrait un peu, qu'il cumule les révisions et un taff soudainement. Mais ce jour viendra, sans doute. Même s'il a une préférence pour les livres plutôt que pour le service – caissier comme serveur.
Arthur mit un pied dans l'établissement et se garda de saluer Lukas, qu'il n'avait pas envie de déranger pendant son service – il était toutefois entré là parce qu'il l'y avait vu, allez savoir.
…
On lui avait servi un thé, et à côté de ça, Arthur se distrayait sans vraiment trop savoir ce qu'il attendait. Téléphone en main, il suivait des débats inintéressants sur Hooter, passait en revue les gens qui racontent leur vie sur Pentagram, et Spellchat... il n'avait pas Spellchat. Déjà parce qu'il n'était pas du genre à envoyer une photo éphémère même pour la déconne, et aussi parce que personne ne lui en enverrait, de toutes façons.
Bon... c'était peut-être surtout pour ça, un peu. C'était vexant, quoi.
Au pire, il recevrait surtout les photos de Gabriel, mais bon, faut voir les conneries qu'il envoie.
C'est fou comme Arthur pouvait utiliser son téléphone uniquement pour passer le temps, et rarement pour envoyer des messages ou téléphoner. Il préférait les lettres, quand il voulait contacter l'extérieur de l'école. Il faisait ça surtout avec ses grand-parents.
Tout à coup, une silhouette sauvage apparut alors qu'il buvait la deuxième moitié de son thé. Lukas Bondevik, en personne.
Il se permit de faire bon usage de ce silence pour ne pas se presser et terminer sa petite gorgée. Laisser un thé refroidir ? Hors de question !
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Hey, fit-il seulement une fois la tasse posée.
Arthur fit alors glisser son téléphone sur le coin de la table. Il était temps de sociabiliser un peu. Enfin, c'était Lukas, ça ne le sortait pas de sa zone de confort. Avec lui, comme avec Kiku par exemple, il était serein, ouvert... enclin à être un type bien. Quel dommage que personne d'autre d'Ilukaan ne voulait être témoin de ces moments-là : ainsi, Arthur passait le reste de son temps à être classifié comme un connard froid sans scrupules et qui ne pense qu'à sa pomme.
Même si c'est parfois un peu vrai.
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En pause ? demanda-t-il simplement.
Ça a l'air tranquille, on dirait.