« Bon Shigeo, aujourd’hui tu te mets au sport ! »

Eh oui, cela faisait maintenant 4 années que Shigeo avait rejoint Ilukaan, et cette longue période de procrastination semblait être arrivée à son terme.
Les poings serrés, la mine déterminée, Shigeo rassemblait dans son dortoir, sous les regards amusés de ses camarades, ses affaires de sport. Sa tenue ( qu’il avait achetée avant d’arriver en première année et qui depuis le temps était devenue un peu trop petite ), ses chaussures, sa serviette et sa petite bouteille d’eau. Tout était prêt. Aujourd’hui, Shigeo Kageyama se mettait au sport.

La raison de cette soudaine prise de conscience ? L’apparition d’un début de bourrelet au ventre qui le mettait dans tous ses états. En effet, il s’était déjà renseigné sur les conséquences de l’obésité pour la santé, ainsi que des maladies cardio-vasculaires liées au surpoids : autant vous dire qu’il prenait la chose très au sérieux. De plus il n’en pouvait plus de son corps de lâche, et ne pouvait s’empêcher d’envier les plus vieux étudiants de l’école, lorsqu’il les croisait dans les couloirs, eux qu’il trouvait si grands, massifs et imposants ( tout ce qu’il voulait être en fin de compte ).
Premier couac : Shigeo qui avait été en repérage sur le terrain d’athlétisme quelques jours auparavant, s’était dit qu’il serait bon pour s’échauffer de partir directement du dortoir des Lupy en courant pour arriver au gymnase. Finalement, dix petites minutes de course ce n’était pas grand-chose comparé au programme digne des plus grands sportifs qu’il s’était efforcé à se concocter.
Sauf que, pour quelqu’un qui n’a littéralement jamais couru de sa vie, courir pendant 10 minutes peut paraître comme étant une épreuve en soi. Finalement, il était déjà essoufflé lorsqu’il arriva sur le terrain de course.
Il fit une petite pause et jeta un regard rapide sur les quelques élèves qui couraient sur le terrain. Un en particulier attira son attention.

Il faisait sans doute partie de ces étudiants plus vieux auxquels Shigeo aimerait tant ressembler. Il était grand, large carrure, et enchaînait les tours de piste, écouteurs dans les oreilles, sans montrer le moindre signe de fatigue. Lorsque le jeune homme passa devant Shigeo, ce dernier ne put retenir son regard qui tomba immanquablement sur son postérieur. Le japonais se sentit rougir sans comprendre pourquoi. Il ne pouvait nier que le derrière de cet homme devait faire des envieux…

Rassemblant ses pensées, son courage, en enfilant une grosse gorgée d’eau ( il avait déjà bu la moitié de sa bouteille en chemin ), Shigeo se mit à courir, en se disant qu’une fois sur le piste,  il devrait se révéler et pouvoir courir comme tous les autres sans se fatiguer trop rapidement.
Mais bien évidemment, au bout d’un tour et demi, le pauvre garçon sentit déjà de larges gouttes perler sur son front. Au bout du troisième, ses poumons étaient en feu et il allait se traîner pour entamer le quatrième tour lorsqu’une présence à côté de lui le fit sursauter.
Sans le saluer, le garçon qu’il avait regardé faire des tours de terrain avec autant d’aisance s’adressa directement à lui en lui donnant des conseils. Il avait l’air grognon, et pourtant c’était lui qui s’était arrêté et était venu lui parler. Bien que son comportement le rendait confus, Shigeo hocha très rapidement la tête ( probablement trop rapidement car il se sentit soudainement très stupide ). Il n’eut pas le temps de le remercier, qu’il était déjà reparti.

Sans perdre un instant, Shigeo bu encore de l’eau et appliqua religieusement les conseils qui lui avaient été donnés. Rapidement il put remarquer qu’il se fatiguait beaucoup moins, son souffle s’en trouvait renforcé, et la douleur qu’il avait dans le dos était grandement diminuée. Il continua donc de courir, ne prêtant pas attention à l’heure qui tournait ni au terrain de course qui se vidait petit à petit.
Shigeo n’avait plus qu’un seul objectif en tête, rattraper l’homme qui lui avait donné ces conseils pour tout d’abord lui montrer qu’il les appliquait à la lettre, ensuite qu’ils fonctionnaient, et enfin pour le remercier. Mais il semblait ne jamais pouvoir le rattraper, en effet le garçon courait toujours plus vite que Shigeo si bien qu’il n’arrivait jamais à le rattraper…

Il dû abandonner cette idée, et il s’arrêta sur le côté du terrain, en l’attendant. En le voyant arriver Shigeo pris une profonde inspiration, tenta de se donner un air sûr de lui, et lui fit signe de la main pour que le garçon s’arrête…
Il espéra au fond de lui qu’il n’allait pas faire semblant de ne pas l’avoir vu…il se sentirait bien bête…  

En voyant le grand gaillard s’approcher de lui, le sang ne fit qu’un tour dans le corps du petit Shigeo qui se mit immédiatement à regretter d’avoir osé déranger cet imposant personnage pendant son entraînement.
Le ton de sa voix se voulait neutre, et pourtant l’expression qui se lisait sur son visage était loin d’être encourageante.

Peut-être pouvait-il encore prétexter qu’il l’avait confondu avec quelqu’un d’autre avant de prendre la fuite et ne plus jamais remettre les pieds sur ce terrain d’athlétisme ? Ou encore il pourrait soudainement se rappeler que Gaufre n’avait pas mangé de la journée et qu’il était grand temps d’aller s’occuper de lui ?


Qu’on se le dire, Shigeo ne savait pas mentir. Et il savait pertinemment que s’il avait opté pour la seconde option, il aurait rougi comme une tomate et cela ce serait vu comme le nez au milieu de la figure. Quant à la première option...n’en parlons même pas. Comment pouvait-il se tromper avec quelqu’un à côté de qui il s’était trouvé à moins de dix centimètres à peine quelques minutes auparavant. Il serait passé pour quelqu’un de sacrément stupide, comme si la situation n’était pas assez gênante comme cela…

Finalement, avec toutes ces idées qui se bousculaient dans sa petite tête, Shigeo se rendit compte qu’il s’était installé un léger silence, et que le garçon en face de lui allait sans doutes très rapidement montrer des signes d’agacement et l’envoyer balader s'il ne prenait pas rapidement une décision.
Il se secoua mentalement, en se disant qu’après tout, il voulait juste le remercier de ses conseils et lui montrer qu’ils n’étaient pas tombés dans l’oreille d’un sourd.
Il commença donc, sans remarquer la grosse perle de sueur qui coulait sur son front alors qu’il prononçait ces mots :

Euh...Je voulais juste...te remercier pour tes conseils. Je veux dire...je m’essouffle beaucoup moins et je t’en suis énormément reconnaissant !! Tu as l’air d’être super fort en course !


Le jeune japonais commença à se pencher rapidement en avant, en guise de remerciement, avant de relever vers l’homme des yeux brillants d’admiration.

Est-ce que...est-ce que tu accepterais de devenir mon senpai de course ? Promis je serais super attentif et je te dérangerais pas !


Gênant ce petit Shigeo ? Mais non voyons, disons juste un peu...socially awkward.